A N N E X E
CAHIER DES CHARGES DE L'APPELLATION D'ORIGINE CONTRÔLÉE « KIRSCH DE FOUGEROLLES »
Chapitre Ier
1. Nom de l'appellation
Seules peuvent prétendre à l'appellation d'origine contrôlée « Kirsch de Fougerolles » les eaux-de-vie répondant aux dispositions particulières fixées ci-après.
Mention complémentaire :
La mention « fermier » et toute autre mention faisant référence à une origine fermière sont réservées à l'eau-de-vie obtenue exclusivement avec des cerises récoltées, fermentées et distillées sur l'exploitation. Cette eau-de-vie devra avoir été maturée et mise en bouteille sur l'exploitation.
2. Description de la boisson spiritueuse
Le « Kirsch de Fougerolles » est une eau-de-vie de fruits telle que définie au point 9 de l'annexe II du règlement (CE) n° 110/2008 du Parlement européen et du Conseil du 15 janvier 2008 concernant la définition, la désignation, la présentation, l'étiquetage et la protection des indications géographiques des boissons spiritueuses et abrogeant le règlement (CEE) n° 1576/89 du Conseil.
Il s'agit d'une eau-de-vie blanche provenant de la distillation exclusive de cerises.
Son degré alcoolique, au moment de la vente au consommateur, est au minimum de 45 % vol.
Au moment de la vente au consommateur, sa teneur en substances volatiles est au minimum de 400 grammes par hectolitre d'alcool pur.
Sur le plan organoleptique, le « Kirsch de Fougerolles » présente des caractéristiques fruitées et noyautées nettes et franches. Au niveau visuel, il est limpide et translucide ; cependant, il peut, après plusieurs années de vieillissement, d'une façon naturelle, se colorer légèrement.
3. Définition de la zone géographique
La récolte des cerises et leur fermentation, la distillation de l'eau-de-vie et sa maturation sont effectuées dans l'aire géographique délimitée approuvée par l'Institut national de l'origine et de la qualité lors de la séance du comité national compétent le 10 septembre 2009 et constituée des communes suivantes :
Dans le département de la Haute-Saône, les communes de : Aillevillers-et-Lyaumont, Fougerolles, Raddon-et-Chapendu, Saint-Bresson, Saint-Valbert, La Vaivre ainsi que la partie située au nord de la D 83 de la commune de Corbenay et les sections cadastrales ZC et B2 de la commune de Fontaine-lès-Luxeuil.
Dans le département des Vosges, les communes de : Le Clerjus, Plombières-les-Bains, Le Val-d'Ajol.
La production de cerises est réalisée sur des vergers ayant fait l'objet d'une procédure d'identification. Cette identification est effectuée sur le fondement de critères d'identification parcellaire liés à leur lieu d'implantation et approuvés par l'Institut national de l'origine et de la qualité lors de la séance du comité national compétent du 30 mai 2007 :
― microclimat compatible avec la culture de la cerise ;
― sols sur substrat gréseux (grès bigarrés) ou formé sur altérites, colluvions ou alluvions anciennes, notamment celles issues de grès bigarrés. Les sols situés sur substrats calcaires ou sur des alluvions récentes ne sont pas retenus ;
― sols légers et aérés ne présentant aucun caractère asphyxiant.
Tout producteur désirant faire identifier une parcelle de verger en effectue la demande auprès des services de l'Institut national de l'origine et de la qualité avant le 1er janvier de l'année de récolte.
La liste des nouvelles parcelles de vergers identifiées est approuvée chaque année par le comité national compétent de l'Institut national de l'origine et de la qualité, après avis de la commission d'experts désignée à cet effet. Les listes des critères et des parcelles identifiées peuvent être consultées auprès des services de l'Institut national de l'origine et de la qualité.
4. Description de la méthode d'obtention
4.1. Variétés de fruits
Le kirsch de Fougerolles provient de merises rouges ou noires, ou de guignes rouges ou noires appartenant à des variétés locales.
Les cerises de table type bigarreau et cerises acides type griotte et montmorency sont exclues.
Les variétés locales sont :
― soit les variétés fougerollaises : « Au Château », « Béchat (ou Béchâ Standard ou Béchâ Thermo) », « Bianzère », « Bianzey », « Bocagère », « Blanche Pierre », « Brune », « Caraude », « Carmélite », « Chalonnaise », « Chapendu », « Fouérouze », « Grain de café », « Grande Branche », « Grande Queue noire ou rouge », « Jean Blanc », « Jacquinot », « Jean Diaude », « Leuillot », « Ligeon », « Longue Queue de Besançon », « Marie Jean Diaude (rouge ou noire) », « Marsot », merise rouge ou noire « Mottet », « Noire de Fontaine », « Noire de Montreux », « Noire du Mondurand », « Noire Brillante », « Noire des Argey », « Parère », « Petite noire », « Queue Fourchette », « Rouen », « Riggi », « Rouge de chez Colle », « Sacristaire », « Saint Valbert », « Tinette » ;
― soit les variétés hors liste : variétés de guigne issues d'un verger situé dans l'aire d'appellation, non identifiées et différentes des variétés nommées ci-dessus.
Afin de préserver cette grande diversité variétale, le verger de l'exploitation, s'il contient plus de 50 arbres au total, devra contenir au moins cinq variétés citées dans la liste ci-dessus et pourra contenir au maximum 20 % des arbres en variétés hors liste.
4.2. Conduite du verger
Les cerises destinées à l'élaboration de kirsch proviennent d'arbres isolés, de vergers d'arbres exclusivement voués à la production fruitière ou de prés-vergers dans lesquels élevage et production fruitière sont associés.
Les arbres morts doivent être éliminés dans l'année suivant leur dépérissement.
L'irrigation est interdite à partir de l'année d'entrée en production des arbres.
Densité de plantation :
Les vergers plantés après la date d'homologation du présent cahier des charges devront présenter une densité inférieure ou égale à 200 arbres par hectare.
Les prés-vergers plantés après la date d'homologation du présent cahier des charges devront présenter une densité inférieure ou égale à 100 arbres par hectare.
Enherbement :
Dans les vergers, l'enherbement de l'interrang est obligatoire. Le désherbage est autorisé jusqu'à une distance maximale de 1 mètre de chaque coté du rang.
Pour les prés-vergers et les arbres isolés, l'enherbement est total, le désherbage autour des plants dans un rayon maximum de 1 mètre est autorisé uniquement durant les trois premières années de végétation.
Hauteur sous frondaison :
Afin de conserver la typicité du paysage fougerollais, chaque exploitation doit disposer d'une proportion minimale de 50 % de cerisiers qui présentent à l'âge adulte et hors période de fruits une hauteur moyenne sous frondaison au moins égale à 1,80 mètre.
Les cerisiers plantés après la date d'homologation du présent cahier des charges présentent à l'âge adulte et hors période de fruits une hauteur moyenne sous frondaison au moins égale à 1,80 mètre.
4.3. Récolte, transport et stockage
de la matière première à distiller
Seuls pourront être mis en œuvre des fruits sains, loyaux et marchands, récoltés à bonne maturité selon les usages locaux, à l'exclusion des fruits avariés et déchets de fruits.
Le matériel de récolte doit empêcher le contact des fruits avec le sol, garantir leur propreté et préserver leur intégrité.
Les fruits doivent être transportés sans broyage des noyaux dans des récipients étanches et couverts d'une capacité maximale de 1 000 litres.
4.4. Rendements maximaux
Le rendement des vergers ne doit pas excéder :
― 400 kilogrammes par arbre jusqu'à 50 arbres par hectare ;
― 25 tonnes par hectare à partir de 51 arbres par hectare.
Ces valeurs pourront être modifiées, à la hausse ou à la baisse en fonction des conditions météorologiques, pour une campagne déterminée sur proposition du comité national compétent après avis de l'organisme de défense et de gestion.
Les jeunes arbres ne seront pris en considération dans la superficie de production destinée à l'élaboration de l'appellation d'origine qu'à partir de la sixième année de végétation.
4.5. Conduite de la fermentation
La fermentation des fruits devra s'effectuer en présence des noyaux, sans chauffage ni addition de levure ou d'aucun produit chimique.
La durée de la fermentation s'étend au minimum sur cinq semaines.
Tout enrichissement du jus est interdit.
4.6. Distillation
La distillation doit porter uniquement sur des fruits fermentés récoltés pendant la même campagne.
Elle ne peut démarrer avant le 15 août et doit se terminer au plus tard le 30 avril de l'année suivant la récolte.
Les eaux-de-vie devront être distillées exclusivement au moyen d'alambics à premier jet discontinus, dont la chaudière et le chapiteau sont en cuivre.
La capacité des alambics ne doit pas excéder 285 hectolitres. L'usage de colonne de rectification est interdit.
Les alambics doivent permettre la séparation des têtes et des queues, conformément aux usages locaux, loyaux et constants. On entend par « queues », appelées localement « petites eaux », le distillat titrant moins de 48 % d'alcool pur.
Les alambics sont chauffés à feu nu, au bain-marie ou indirectement par la vapeur. L'injection directe de vapeur dans le produit à distiller est interdite.
Les queues sont mélangées au chargement suivant (ou au premier chargement de la campagne suivante). Les têtes peuvent également être mélangées au chargement suivant. Pour la première distillation de chaque campagne, les têtes et les queues mélangées au premier chargement sont celles de la dernière distillation de la campagne précédente.
La repasse est interdite.
Dans le collecteur quotidien, l'eau-de-vie présente un titre alcoométrique moyen inférieur ou égal à 65 % vol. Cette limite pourra être augmentée au maximum de 10 % pour une campagne déterminée sur proposition du comité national compétent après avis de l'organisme de défense et de gestion.
Pendant la distillation des eaux-de-vie susceptibles de bénéficier de l'appellation d'origine contrôlée « Kirsch de Fougerolles », la distillation dans le même atelier d'autres eaux-de-vie de cerise est interdite. En revanche, tout autre fruit que des cerises pourra être distillé en même temps et dans le même atelier que les cerises destinées à l'élaboration de « Kirsch de Fougerolles ».
4.7. Maturation
L'eau-de-vie doit maturer dans un récipient neutre pendant au moins six mois avant commercialisation.
4.8. Diverses méthodes d'élaboration
(méthodes traditionnelles)
L'édulcoration est interdite.
5. Mesures transitoires
Les eaux-de-vie élaborées antérieurement à la date d'homologation du présent cahier des charges et répondant aux conditions fixées par le présent cahier des charges peuvent être admises au bénéfice de l'appellation d'origine contrôlée « Kirsch de Fougerolles » si elles font l'objet d'une déclaration de revendication telle que définie au chapitre II du présent cahier des charges et satisfont à un examen analytique et organoleptique dans un délai de trois mois à compter de la date d'homologation du présent cahier des charges.
6. Règles de présentation et étiquetage
Les eaux-de-vie pour lesquelles sera revendiquée l'appellation d'origine contrôlée « Kirsch de Fougerolles » ne pourront être déclarées pour la fabrication, offertes au public, expédiées, mises en vente ou vendues, sans que dans les déclarations, les annonces, sur les prospectus, étiquettes, factures, récipients quelconques l'appellation susvisée soit inscrite et accompagnée de la mention « Appellation contrôlée » en caractères très apparents.
Aucune ambiguïté d'étiquetage ne doit avoir pour effet de tromper le consommateur sur l'origine du produit. Ainsi tout kirsch ne bénéficiant pas de l'appellation d'origine contrôlée « Kirsch de Fougerolles » doit exclure dans son étiquetage et dans le même champ visuel les termes « kirsch » et « Fougerolles » associés.
La mention « Production fermière » devra être inscrite en caractères dont les dimensions ne peuvent excéder la moitié de celles de l'appellation « Kirsch de Fougerolles ».
7. Lien à l'origine
7.1. Description des facteurs naturels et des facteurs humains
du lien au terroir
Caractéristiques du milieu naturel :
Fougerolles se situe dans une petite région naturelle que l'on appelle la Vôge, zone gréseuse qui sépare le noyau essentiellement granitique du massif vosgien des zones calcaires de Franche-Comté et de Bourgogne. La Vôge présente un modelé topographique vallonné et dans lequel les altitudes varient de 300 mètres à 500-550 mètres dans le noyau historique de production. C'est une région particulièrement riche en forêts et en sources.
En première approche, le substrat géologique sur lequel sont situés la majeure partie des vergers à cerisiers, dont les fruits sont à l'origine du kirsch de la région de Fougerolles, est constitué par :
― les zones où affleurent, à faible profondeur, les grès dits « bigarrés » ;
― les formations superficielles héritées de ces grès : colluvions de versant, altérites de plateaux, alluvions anciennes en terrasses sur les flancs des vallées.
Les caractères physico-chimiques de ces terrains conviennent particulièrement aux cerisiers. Leur nature gréseuse micro-fissurée permet un bon développement du système racinaire et constitue une bonne réserve hydrique, constante et équilibrée au cours de toute la phase de développement des cerisiers.
Les formations superficielles se sont mises en place au cours des périodes récentes (Quaternaire), à partir de l'érosion, et d'un transport plus ou moins long des grès du substrat. Classées selon un transport plus ou moins long, elles comprennent :
― les altérites de plateaux issues de l'altération des grès sous-jacents. Elles sont argilo-sableuses et leur épaisseur ne dépasse pas quelques décimètres ;
― les colluvions de versant constituées par les produits issus de l'altération des grès et entraînés par ruissellement sur les flancs des versants. Leur épaisseur augmente depuis le sommet (20 à 30 centimètres) jusqu'à la base (1 mètre ou plus) ;
― les alluvions anciennes présentent sous formes de terrasses de part et d'autre des rivières. Constituées de galets et de sables limoneux, elles dominent le lit actuel de la rivière de 4 à 5 mètres ou plus.
Un certain nombre de formations sont à exclure de la zone d'appellation potentielle. Il s'agit, d'une part, des zones où affleurent des formations calcaires et, d'autre part, des zones de basse plaine alluviale.
La présence de prés-vergers complantés de cerisiers en tiges hautes est un élément indissociable du terroir de Fougerolles. La présence des cerisiers s'accompagne d'une organisation spécifique du paysage du finage. Le pré-verger combine arboriculture fruitière et une production fourragère herbagère (pâturage et/ou fauche).
Caractéristiques humaines :
La distillation de fruits est très ancienne et constante à Fougerolles. Sur cette seule commune, on compte 4 entreprises spécialisées dans la distillation et 37 distillateurs fermiers. Une telle concentration de distillateurs ne se retrouve dans aucun secteur de toutes les régions alentours.
Les cerisiers sont également très nombreux dans le secteur. Sur Fougerolles, la concentration en cerisiers est 177 fois supérieure à la moyenne du département de la Haute-Saône. Dès qu'on s'éloigne, cette présence du cerisier diminue, mais la concentration en cerisiers est encore cinq fois supérieure à la moyenne départementale sur les communes limitrophes de Fougerolles.
La cerise et sa distillation sur Fougerolles est incontestablement un élément de diversification agricole qui participe à l'existence d'un système traditionnel de polyculture. L'élevage bovin, principalement laitier, est ici l'activité principale des exploitations qui développent une diversification arboricole grâce à l'aménagement judicieux des prés-vergers qui permet une habile cohabitation des arbres et du bétail. Aujourd'hui, la polyculture fougerollaise subsiste et laisse apparaître, d'une part, une forte densité d'exploitations agricoles et se traduit, d'autre part, par une taille relativement modeste des fermes.
Le secteur de Fougerolles est caractérisé par la présence d'un habitat rural semi-dispersé dans lequel, au-delà du noyau aggloméré formant le chef-lieu de la commune, s'organise un ensemble de hameaux et parfois de fermes isolées. Dès que l'on s'éloigne de Fougerolles, on constate un habitat plus dispersé.
Comme il arrive souvent dans les régions de frontières culturelles, la population de Fougerolles et des environs a développé au cours des siècles une forte personnalité collective. L'identité de cette communauté humaine s'est construite empruntant des éléments culturels comtois et lorrains (dans l'architecture paysanne, le mobilier, les habitudes alimentaires, les pratiques religieuses, la musique populaire, les fêtes calendaires...), en les intégrant de façon originale tout en se démarquant ― voire pour mieux se démarquer ― de l'une et de l'autre province. Cette identité, vécue et revendiquée, a vu ses marqueurs évoluer au cours de l'histoire, mais, depuis un peu plus de deux siècles, c'est la culture des cerisiers et la fabrication du kirsch qui en constituent à la fois un des fondements et l'une des manifestations les plus claires et les plus évidentes. Les savoirs vernaculaires concernant cette double activité ― et les savoir-faire techniques qui en découlent ― ont survécu à toutes les vicissitudes de l'histoire agricole et rurale. Associés à un souci de production de qualité, ils sont restés intacts, mais sans immobilisme. En effet, loin de rester figés dans une conception nostalgique du patrimoine culturel et cultural local, les producteurs de cerises et de kirsch de Fougerolles témoignent, aujourd'hui comme hier, d'un dynamisme certain. Non seulement ils ont su s'adapter aux conditions modernes de la production arboricole, mais ils font preuve ― y compris certains cultivateurs âgés ― d'un esprit novateur remarquable. Par-delà l'intérêt économique de la production de cerises et de kirsch, les agriculteurs et les distillateurs voient dans cette activité une expression profonde de leur terroir ― et en quelque sorte d'eux-mêmes. Cela se vérifie surtout à Fougerolles et dans quelques communes (ou parties de communes) limitrophes ; cela devient de moins en moins vrai au fur et à mesure qu'on s'éloigne de Fougerolles qui conserve ainsi, aujourd'hui comme hier, son rôle de centre historique de production de cerises et de kirsch.
Une des caractéristiques majeures du secteur de Fougerolles sont les grandes variétés de guignes cultivées et utilisées pour la production d'eau-de-vie. Plus de quarante-cinq variétés, sélectionnées localement et très rarement utilisées ailleurs, ont été inventoriées. Il est de tradition à Fougerolles de distiller un mélange de nombreuses variétés, contrairement à la plupart des autres sites de distillation de kirsch.
Une autre spécificité du kirsch de Fougerolles est que l'eau-de-vie est souvent vieillie en bombonnes de verre dans un local où les écarts de température sont élevés entre l'hiver et l'été. Enfin l'eau-de-vie commercialisée est généralement le fruit d'un assemblage de plusieurs eaux-de-vie d'âges différents.
7.2. Eléments historiques concernant les facteurs
du lien au terroir
L'histoire particulière de Fougerolles éclaire mieux ce lien entre ces productions particulières et le secteur géographique. Au Moyen Age, le territoire de Fougerolles se trouvait aux limites indécises des Etats de France, Bourgogne et Lorraine. Après plusieurs tentatives de rattachements successifs par les ducs de Lorraine et de Bourgogne qui revendiquaient ce territoire, aucun aboutissement ne vit le jour. Fougerolles fut alors proclamé territoire de surséance et bénéficia d'une indépendance totale vis-à-vis de son fonctionnement. Le seigneur de Fougerolles bénéficiait alors de trois pouvoirs : de la haute, moyenne et petite justice sur ces terres. Il était maître de son territoire. Il percevait les taxes à sa guise sans restriction d'un pouvoir supérieur. D'autre part, l'activité économique pouvait alors être menée à la guise de la population étant exemptée de toutes taxes provenant d'une entité plus importante que celle de la seigneurie. Le territoire bénéficiait d'avantages fiscaux et la pratique de la contrebande se développa entre la Lorraine et la Franche-Comté.
La Franche-Comté fut intégrée à la France en 1678 après le traité de Nimègue. Mais la commune de Fougerolles resta encore indépendante jusqu'en août 1704 où elle fut attachée à la Franche-Comté et donc à la France de Louis XIV.
7.3. Eléments liés à la réputation du produit
La grande réputation des eaux-de-vie de Fougerolles, et plus particulièrement de son « kirsch », n'aurait pu exister si le produit ne présentait pas des « qualités » supérieures, ou au minimum différentes. Cette réputation explique que les prix constatés pour le kirsch de Fougerolles soient supérieurs à ceux des autres kirsch.
Le kirsch de Fougerolles présente des spécificités organoleptiques constatées lors de dégustations à l'aveugle. De bons dégustateurs entraînés, notamment des opérateurs locaux, arrivent généralement à différencier le kirsch de Fougerolles du kirsch produit ailleurs, et même, plus difficilement, à différencier du kirsch produit à Fougerolles avec des cerises de l'aire d'appellation de kirsch distillé à Fougerolles mais provenant de cerises récoltées ailleurs.
7.4. Lien causal entre l'aire géographique, la qualité
et les caractéristiques du produit
La présence de nombreuses forêts et de nombreuses sources dans cette région permet d'expliquer le développement des distilleries à Fougerolles ; le bois était nécessaire pour chauffer l'alambic et l'eau est nécessaire en abondance pour refroidir et condenser le distillat.
La nature des sols, de la topographie et du climat permet d'expliquer le développement des cerisiers.
Mais ces explications sont insuffisantes pour comprendre pourquoi cette production s'est concentrée et est restée vivace sur le seul secteur de Fougerolles, alors que des conditions naturelles assez comparables existent dans d'autres lieux proches.
Cette situation particulière a engendré chez les habitants de Fougerolles un fort sentiment d'indépendance et de singularité. C'est cette situation marginale vis-à-vis notamment des taxes qui explique en partie, avec la présence de beaucoup de bois et de sources, le développement précoce et important des distilleries à Fougerolles.
L'importance de la distillation explique peut-être, par le regroupement des distilleries et des industries associées (vanneries pour la protection en osier des bombonnes d'eaux-de-vie, etc.) afin d'autoriser les exportations, la particularité de l'habitat groupé à Fougerolles.
La réputation du kirsch de Fougerolles a permis la permanence de la culture du cerisier et des distilleries. Cette histoire longue et continue a autorisé la transmission de génération en génération d'un savoir-faire spécifique à la fois chez les producteurs de cerises et chez les distillateurs.
L'utilisation de nombreuses variétés sélectionnées localement, donc particulièrement adaptées aux conditions de sol et de climat du lieu, et la distillation en une passe sont deux éléments forts du lien entre les spécificités organoleptiques constatées sur le produit et le milieu naturel ou le milieu humain de l'aire géographique. La distillation en une passe constitue une méthode de distillation unique que l'on ne retrouve pas ailleurs. La distillation en une passe a pour finalité l'obtention d'une eau-de-vie à bas degré (60 % vol. en moyenne) et l'expression d'un fruité et d'une présence en bouche hors du commun.
Chapitre II
1. Obligations déclaratives
Déclaration récapitulative des achats de fruits :
La déclaration récapitulative d'achats de cerises est remplie par tous les collecteurs de cerises ou élaborateurs de kirschs ayant acheté des cerises au cours de la campagne. Elle est adressée chaque année avant le 15 février à l'organisme de défense et de gestion qui informe l'organisme de contrôle agréé. Elle comporte le nom du fournisseur, les dates de livraison ainsi que les quantités de cerises achetées par fournisseur.
Déclaration d'ouverture et de fermeture des travaux de distillation :
L'ouverture des travaux de distillation doit être déclarée auprès de l'organisme de contrôle agréé avant toute opération de distillation d'eau-de-vie destinée à être revendiquée en AOC « Kirsch de Fougerolles ». La déclaration indique le nom de l'appellation, la date d'ouverture des travaux ainsi que les références des matériels de distillation concernés.
La fermeture des travaux de distillation doit être déclarée auprès de l'organisme de contrôle agréé à l'issue des opérations de distillation des eaux-de-vie destinées à être revendiquées en AOC « Kirsch de Fougerolles ». La déclaration indique le nom de l'appellation, la date de fermeture des travaux ainsi que les références des matériels de distillation concernés.
Au cas où l'opérateur ne distille que l'AOC « Kirsch de Fougerolles », la copie des déclarations souscrites auprès de la DGDDI tiendra lieu de déclaration et sera transmise auprès de l'organisme de contrôle agréé.
Déclaration récapitulative de revendication :
La déclaration récapitulative de revendication est transmise à la fin de la période de distillation et au plus tard le 30 avril qui suit la distillation. Elle comporte la période de distillation ainsi que les quantités distillées (volume et TAV).
La déclaration récapitulative de revendication qui permet de définir la quantité maximale d'eau-de-vie commercialisable par chaque élaborateur est adressée à l'organisme de défense et de gestion qui informe l'organisme de contrôle agréé.
2. Tenue de registres
Dans le cas où la récolte, la collecte ou la distillation ne seraient pas affectées en totalité à l'élaboration de « Kirsch de Fougerolles », un compte spécial pour les cerises destinées à l'élaboration de « Kirsch de Fougerolles » doit être tenu dans chacun des registres.
Registre des cerises :
Tout producteur de cerises destinées à la production d'AOC doit tenir une comptabilité matière des fruits récoltés avec le lieu et la date de récolte des fruits, les quantités mises en circulation et leur(s) destinataire(s).
Le collecteur intermédiaire (entre producteur et distillateur) doit tenir une comptabilité matière des cerises collectées destinées à l'élaboration de « Kirsch de Fougerolles » en appellation d'origine contrôlée (nom du producteur, date, quantité de cerises, destinataire).
Registre de distillation :
Le registre de distillation prévoit l'enregistrement des données suivantes :
― date de distillation ;
― matériel de distillation ;
― quantité de cerises mises en œuvre ;
― quantité d'eau-de-vie obtenue en volume et en TAV.
L'enregistrement sur le registre de distillation permet la circulation des eaux-de-vie entre dépositaires agréés. Le registre de distillation doit être tenu à disposition de l'organisme de défense et de gestion et de l'organisme de contrôle agréé.
Registre de comptabilité matière des eaux-de-vie :
Les entrées et sorties des eaux de vie revendiquées en AOC « Kirsch de Fougerolles » sont inscrites dans un registre de comptabilité matière prévu par le code général des impôts.
Schéma de cohérence à l'origine :
Chaque élaborateur susceptible de travailler des cerises d'autres régions tient à disposition de l'INAO et de l'organisme de contrôle agréé un schéma de cohérence à l'origine établissant les moyens qu'il met en œuvre afin de permettre une séparation des cerises AOC avec des cerises ne pouvant y prétendre.
POINTS À CONTRÔLER |
MÉTHODES D'ÉVALUATION |
---|---|
Habilitation |
|
Parcelles de cerisiers localisées dans l'aire et appartenant à la liste des parcelles identifiées |
Examen documentaire |
Variétés de cerisiers plantées |
Examen documentaire |
Mode de conduite des vergers et densité |
Examen visuel Examen documentaire |
Matériels de distillation |
Examen visuel Examen documentaire |
Localisation de la distillation |
Examen documentaire |
Règles annuelles |
|
Rendement maximum |
Examen documentaire |
Dates de distillation |
Examen documentaire |
Conduite de la distillation |
Examen documentaire Examen analytique |
Maturation |
Examen documentaire |
Produits |
|
Caractéristiques analytiques du produit fini |
Examen analytique |
Caractéristiques organoleptiques du produit fini |
Commission de dégustation |