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Article AUTONOME (Décision n° 2009-0655 du 27 juillet 2009 portant définition des obligations de contrôle tarifaire des prestations de terminaison d'appel vocal mobile des opérateurs mobiles français d'outre-mer pour la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2010)

Article AUTONOME (Décision n° 2009-0655 du 27 juillet 2009 portant définition des obligations de contrôle tarifaire des prestations de terminaison d'appel vocal mobile des opérateurs mobiles français d'outre-mer pour la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2010)



4.1. L'avis de la Commission européenne


Le projet de décision de l'Autorité a été notifié à la Commission européenne et aux autorités réglementaires nationales de la communauté européenne le 29 mai 2009.
Dans sa lettre de commentaires du 29 juin 2009, la Commission se félicite « des efforts considérables déployés par l'ARCEP pour abaisser les TTM de la plupart des ORM dans les territoires français d'outre-mer, en termes absolus notamment [...] ».
La Commission européenne rappelle que « les TTM doivent normalement être symétriques et que toute asymétrie doit être dûment justifiée. La Commission a indiqué à plusieurs reprises qu'il faut veiller à ce que les asymétries ne restent pas en vigueur trop longtemps et que les TTM de chaque ORM doivent être ramenés au niveau du coût d'un opérateur efficace après une période suffisamment longue pour permettre à l'opérateur de s'adapter aux conditions du marché et d'être performant sur la durée ».
La Commission souligne que l'ARCEP « ne peut justifier une asymétrie des tarifs de terminaison d'appel que pendant une période transitoire limitée suffisamment longue pour leur permettre d'atteindre l'échelle minimale efficace et généralement estimée à quatre ans ». La Commission s'appuie sur les exemples de micro-opérateurs (Dauphin Télécom et UTS Caraïbe) pour qui il est important de « ramener les TTM au niveau des coûts d'un opérateur efficace, compte tenu des différences de coût objectives [...] » car « les déséquilibres de trafic risquent, de fait, d'être accentués par le niveau asymétrique actuel des TTM ».
La Commission est nuancée quant à la façon de contrôler et d'imposer le respect de l'obligation de non-excessivité à l'opérateur SPM, seul opérateur actif à Saint-Pierre-et-Miquelon, et relève ainsi que : « l'ARCEP ne fixe pas de plafond tarifaire ni de tarif précis pour SPM Télécom alors que cet opérateur, à l'instar des cinq autres petits ORM, est soumis à l'obligation de ne pas pratiquer de tarifs excessifs. [...] La Commission a pris acte des motifs de l'ARCEP justifiant cette approche [...]. La Commission admet que la concurrence en infrastructures puisse ne pas être viable au niveau économique du fait de la taille limitée du marché de Saint-Pierre-et― Miquelon, à savoir une population de 7 000 habitants, mais des tarifs de terminaison d'appel excessifs, même s'ils ne constituent pas d'obstacle potentiel à l'accès au marché, risquent de se traduire par des redevances téléphoniques de détail plus élevées pour les appelants situés hors de la zone d'activité de SPM Télécom, situation qui exige incontestablement une réaction appropriée de l'autorité de régulation ».


4.2. Synthèse des contributions reçues
lors de la consultation publique
4.2.1. Sur la référence aux coûts incrémentaux
4.2.1.1. Sur la base juridique de la décision


Selon le groupe France Télécom/Orange, l'Autorité ne peut prendre comme référence les coûts incrémentaux tant que cette nouvelle référence de coûts n'a pas fait l'objet d'une décision opposable visant à identifier de façon claire et précise les coûts pertinents dans le cadre de cette nouvelle méthode. Ainsi, la décision 07-0129 étant toujours en vigueur, l'Autorité ne saurait définir des obligations de contrôle tarifaire en utilisant une autre référence que les coûts complets distribués.


4.2.1.2. Sur le périmètre des coûts incrémentaux


Le groupe France Télécom/Orange estime qu'il lui est nécessaire de connaitre le périmètre des coûts incrémentaux pour respecter son obligation de séparation comptable, s'agissant notamment du coût incrémental de capacité, de localisation, des équipements 3G, ou encore du coût des fréquences associées.
Pour SRR, il est prématuré de prévoir une baisse des coûts encourus sans même prendre en considération le déploiement des réseaux 3G et les coûts y afférent. SRR rappelle par ailleurs qu'il a contesté le modèle retenu par l'Autorité, par l'exclusion que ce dernier fait de certaines catégories de dépenses.


4.2.1.3. Sur la conformité à la Recommandation
de la Commission européenne


Selon le groupe France Télécom/Orange, le calendrier de baisses retenu par l'Autorité est décorrélé du rythme européen dans la mesure où la recommandation du 7 mai 2009 indique que les ARN ont jusqu'au 31 décembre 2012 pour mettre en œuvre le concept de coûts incrémentaux.


4.2.2. Sur le modèle de coûts


Selon le groupe France Telecom/Orange, le modèle de coûts n'est pas conforme à la recommandation de la commission, du fait que la méthode de calcul des coûts incrémentaux ne retiendrait aucun coût de redevance de fréquence de l'incrément de TA, ne recourrait pas à une méthode de valorisation d'actifs en coûts de remplacement ou en coûts courants.
Le groupe France Telecom/Orange rappelle au sujet des résultats du modèle ses principales remarques développées dans les précédentes consultations. En annexe, l'opérateur présente également plusieurs commentaires sur le modèle Antilles-Guyane. Par exemple, il affirme que le rythme de déploiement de la 3G est sous-estimé.


4.2.3. Sur l'obligation de réguler l'opérateur UTS Caraïbe en phase de déploiement
sur les départements de la Guyane, de la Guadeloupe et de la Martinique


Le groupe France Télécom/Orange estime que l'Autorité devrait réguler la terminaison d'appel des trois filiales d'UTS Caraïbes préparant leur déploiement sur la zone Antilles-Guyane. Selon l'opérateur, le niveau de la terminaison d'appel imposé à ces trois filiales d'UTS devrait être identique à celui imposé à UTS Caraïbe.


4.2.4. Le rythme de baisse des asymétries
4.2.4.1. Pour Digicel et Outremer Telecom,
les écarts avec les opérateurs dominants sont trop faibles


Digicel relève que les plafonds tarifaires de sa terminaison d'appel en 2010 sont « inférieurs ou égaux à ceux de la métropole aujourd'hui, alors que les coûts d'exploitation dans les Antilles françaises sont les plus élevés ». L'opérateur fait également valoir, s'agissant du plafond de la terminaison d'appel dans les Antilles, les coûts plus élevés d'exploitation en outre-mer qu'en métropole (risques naturels, éclatement territorial, recours aux liens satellitaires en tant que liens de secours, coût de la vie plus élevé, taille réduite du marché, salaires plus élevés), sa rentabilité moindre qu'Orange France et SFR (pour des niveaux de terminaison d'appel voisins). Pour l'opérateur, le niveau de terminaison d'appel proposé pour 2010 constitue une baisse drastique qui va impacter les investissements futurs de l'opérateur.
Par ailleurs, Digicel estime que la baisse de plafond imposée par l'Autorité plus forte que celle initialement envisagée en 2007 n'est pas justifiée « compte tenu de l'évolution du marché au cours des deux dernières années, pendant lesquelles Digicel a augmenté seulement de 2,0 % ses parts de marché [...]. La variation de la proposition de l'ARCEP entre juillet 2007 et juin 2009 est très nettement défavorable à Digicel comparativement à Orange et Only et [favorise donc une] concurrence déloyale. Et ni la part de marché ni la structure de coût de Digicel ne justifient ce traitement que [Digicel] consid[ère] comme injuste. »
En Guyane, Digicel considère qu'il est illogique de faire bénéficier Outremer Telecom d'une charge de terminaison de 54 % supérieure à celle de Digicel alors même qu'Outremer Telecom aurait un parc clients supérieur.
En conclusion, Digicel demande pour 2010 un tarif de terminaison d'appel au moins égal à 12 c€/min en Guyane et 9 c€/min aux Antilles.
Pour Outremer Telecom, la baisse du plafond tarifaire de terminaison d'appel à 5,5 c€ pour les principaux opérateurs ne permettra pas de répondre pleinement aux attentes du marché ultramarin en matière de contenu d'offres et de tarifs associés. SRR et Orange Caraïbe bénéficieront « d'une sur-rente injustifiée qui prolongera les déséquilibres concurrentiels sur le marché domien ».


4.2.4.2. Pour le groupe France Télécom/Orange et SRR,
le maintien des asymétries et leurs écarts ne sont pas justifiés


Pour le groupe France Télécom/Orange, l'ARCEP n'a pas à réguler en vue de prévenir les risques de distorsion naissant de la pratique d'offres on-net par un opérateur à part de marché plus importante. Les asymétries ne devraient pas compenser la part de déséquilibre de trafic imputable à la politique commerciale des opérateurs de petite taille.
Selon le groupe France Télécom/Orange, les asymétries accordées sont disproportionnées avec les déséquilibres de trafic constatés. L'opérateur relève ainsi que le solde d'interconnexion Orange Caraïbe/Digicel ne justifierait pas l'asymétrie accordée à ce dernier sur la base de la progressivité revendiquée par l'Autorité (même raisonnement s'agissant des déséquilibres constatés avec Outremer Telecom sur la zone Antilles-Guyane). Sur la zone Réunion-Mayotte, ces soldes sont déséquilibrés en défaveur d'Orange Réunion.
Quant à SRR, il « [...] considère que l'imposition de plafonds tarifaires symétriques dès maintenant est la meilleure solution pour prévenir les distorsions concurrentielles liées aux tarifs de terminaison d'appel ». Ce maintien conduit, selon SRR, à celui des pratiques de différentiation tarifaire entre on-net et off-net, et génère en outre des soldes d'interconnexion favorables aux concurrents de SRR. SRR s'étonne de la persistance de ce maintien dans le temps. Toutefois, SRR considère que la suppression de l'asymétrie entre opérateurs fixes et mobiles serait prématurée au regard du maintien d'asymétries entre opérateurs mobiles.


4.3. Conclusions tirées par l'Autorité
4.3.1. Sur l'avis de la Commission européenne


La Commission invite l'ARCEP à tenir compte de la date butoir du 31 décembre 2012 fixée pour l'application de TTM fondés sur l'approche LRIC par la recommandation 2009/396/CE de la Commission du 7 mai 2009 sur le traitement réglementaire des tarifs de terminaison d'appels fixe et mobile et ce afin de garantir « une élimination progressive des asymétries en vue de parvenir à des tarifs de terminaison d'appel fondés sur les coûts efficaces pour tous les ORM d'ici à la fin de 2012 ».
Le cadre juridique français (art. D. 301 à D. 303 du CPCE) impose un réexamen de la définition des marchés, de la désignation des opérateurs puissants et des obligations qui leurs sont imposées tous les trois ans. A ce titre, l'Autorité initiera un troisième cycle d'analyse des marchés durant l'année 2010 en vue de remotiver, le cas échéant, une prorogation de la régulation des terminaisons d'appel mobile des opérateurs ultra-marins sur la période 2011-2013.
L'Autorité prend acte des commentaires de la Commission européenne et les examinera lors du prochain cycle d'analyse des marchés. Concernant SPM Telecom, l'Autorité lancera des travaux supplémentaires tenant compte de ses spécificités.


4.3.2. Sur la référence aux coûts incrémentaux


Concernant les modalités de substitution de la référence aux coûts incrémentaux à celle aux coûts complets distribués, l'Autorité rappelle que, dans un souci de transparence, elle avait annoncé le réexamen de la pertinence du concept de coût complet distribué dès le 16 octobre 2007 dans sa décision n° 2007-0811 (29), au vu des problèmes concurrentiels découlant de la position dominante des opérateurs mobiles ultra-marins sur les marchés de la terminaison d'appel mobile.
En outre, l'Autorité souligne que sa régulation ne devance pas les délais précisés par la recommandation européenne pour que les tarifs soient au niveau des coûts incrémentaux. Au contraire, l'Autorité a considéré qu'une période de transition est d'une importance capitale pour la stabilité du secteur et la visibilité économique des opérateurs. Cette transition doit intégrer deux contraintes a priori opposées : d'un côté assurer la convergence la plus rapide possible des tarifs de terminaison d'appel vers le niveau de coûts incrémentaux d'un opérateur efficace, et, de l'autre, éviter de déstabiliser le marché par une transition trop rapide.
Ainsi, les plafonds tarifaires prévus d'ici fin 2010 seront encore très supérieurs aux coûts sous-jacents. En effet, les coûts incrémentaux de long terme d'un opérateur efficace sont situés entre 1 et 2 c€ par minute, soit au moins 3,5 c€ plus bas que le plafond de 5,5 c€ par minute fixé pour Orange Caraïbe et SRR en 2010. A la fin du présent cycle 2008-2010, il restera alors deux ans jusqu'au 31 décembre 2012, qui constitue l'échéance recommandée par la Commission européenne, pour atteindre la « cible » recommandée au moyen de la méthode des coûts incrémentaux, à savoir des tarifs symétriques au niveau des coûts.
Par ailleurs, l'Autorité rappelle que, comme l'indique son titre (30), la décision n° 2007-129 se limite à spécifier comment les opérateurs doivent élaborer les restitutions comptables demandées par l'Autorité conformément au 5° du I de l'article L. 38, sans préjuger du concept de coût de référence retenu pour les obligations de contrôle tarifaire. Pour déterminer ces obligations, l'Autorité dispose de différentes sources d'information sur les coûts, dont les données comptables auditées, le modèle technico-économique et la comparaison internationale, ainsi qu'elle l'a indiqué au chapitre 1.
En conclusion, l'Autorité estime que les réponses reçues n'apportent pas d'éléments nouveaux susceptibles de remettre en cause la référence aux coûts incrémentaux et maintient que la méthode des coûts incrémentaux de long terme crée un signal économique mieux adapté et plus efficace pour les marchés que les coûts complets distribués.

(29) Décision n° 2007-0811 de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 16 octobre 2007 portant sur la définition des marchés pertinents de gros de la terminaison d'appel vocal sur les réseaux mobiles français outre-mer, la désignation des opérateurs disposant d'influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre. (30) « Décision [...] portant sur la spécification des obligations de comptabilisation et de restitution des coûts ».