La commission émet l'avis suivant :
I. ― Par lettre en date du 15 octobre 2008, la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi a saisi la commission, en application de l'article 3 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 modifiée susvisée, en vue de la mise en œuvre d'une prise de participations croisées entre Aéroports de Paris SA et NV Luchthaven Schiphol (ci-après désigné sous sa dénomination commerciale Schiphol Group), à hauteur de 8 %, dans le cadre d'un accord de coopération industrielle entre ces deux sociétés. L'article 6 de la loi du 20 avril 2005 susvisée (article L. 251-1 du code de l'aviation civile) dispose que la majorité du capital d'Aéroports de Paris appartient à l'Etat. L'ouverture minoritaire du capital d'Aéroports de Paris a été autorisée par le décret du 22 mai 2006 susvisé.
Aux termes des dispositions de l'article 4 de la loi du 6 août 1986, la procédure suivie dans cette opération étant celle d'une cession de gré à gré dans le cadre d'un « accord de coopération industrielle, commerciale ou financière », la commission est appelée à rendre un avis, dont la conformité est requise, sur le choix de l'acquéreur et sur l'ensemble des conditions de sa prise de participation.
En application de l'article 1er (1°) du décret du 3 septembre 1993 modifié susvisé, un avis relatif aux objectifs de l'accord de coopération industrielle a été publié au Journal officiel du 22 octobre 2008. La commission a été informée que cette publication n'a pas suscité de proposition alternative.
Il n'est pas envisagé que l'opération soit accompagnée d'une offre réservée aux salariés.
II. ― Aéroports de Paris a été constitué en 1945 sous forme d'établissement public national afin d'aménager, exploiter et développer des aéroports civils dans la région parisienne. La loi du 20 avril 2005 susvisée l'a transformé en société anonyme, lui a reconnu la pleine propriété des actifs et lui a conféré une licence d'exploitation à durée indéterminée.
En juin 2006, le capital de la société a été ouvert au secteur privé par introduction en bourse et la commission a alors émis l'avis n° 2006-A-4 susvisé. Une offre d'actions réservée aux salariés a accompagné cette opération conformément à la loi du 6 août 1986 susvisée. Le capital est en conséquence réparti au 31 décembre 2007 comme suit :
― Etat français : 68,38 % ;
― salariés : 2,44 % ;
― autocontrôle : 0,05 % ;
― public : 29,14 %.
En janvier 2008, le groupe Vinci a annoncé avoir acquis 3,3 % du capital.
Aéroports de Paris est la deuxième société aéroportuaire d'Europe et la sixième au monde en nombre de passagers, la première en Europe et la septième au monde pour le fret et le courrier. La société possède et exploite principalement les trois grands aéroports de la région parisienne : Paris - Charles-de-Gaulle (Roissy), deuxième aéroport européen (avec 54 millions de passagers), plate-forme d'activité (« hub ») du groupe Air France-KLM et de l'alliance Sky Team, Paris-Orly (25 millions de passagers) et Paris-Le Bourget (premier aéroport européen d'aviation d'affaires). Le groupe emploie environ 11 500 personnes.
Le groupe Aéroports de Paris distingue quatre segments dans ses activités :
― les services aéroportuaires (72 % du chiffre d'affaires en 2007 et 86,2 % de l'EBITDA) regroupent les activités de gestion des pistes et des aérogares, les commerces et les parcs de stationnement automobile ;
― l'immobilier (7,6 % du chiffre d'affaires et 9,6 % de l'EBITDA) qui reprend les loyers perçus sur des terrains ou des immeubles hors aérogares. Le groupe exploite plus d'un million de mètres carrés de bâtiments. Son domaine foncier comprend près de 6 700 hectares dont 18 % sont utilisables pour l'activité immobilière ; sur ce total, 348 hectares de réserves foncières non exploitées sont disponibles pour des développements immobiliers futurs ;
― les services d'assistance en escale aux compagnies aériennes (7,6 % du chiffre d'affaires et contribution négative à l'EBITDA) qui sont une activité déficitaire en cours de réorganisation ;
― les activités diverses : télécommunications, ingénierie,... (12,8 % du chiffre d'affaires et 4,2 % de l'EBITDA).
Le chiffre d'affaires d'Aéroports de Paris comprend pour 16 % la taxe d'aéroport, qui finance le coût réel des dépenses de sûreté et, pour 37 %, des redevances aéronautiques pour services rendus ― définies aux articles R. 224-1 et R. 224-2 du code de l'aviation civile ― et des redevances spécialisées.
Les conditions dans lesquelles sont déterminées les redevances ont été fixées par la loi du 20 avril 2005, le décret du 20 juillet 2005 et l'arrêté du 16 septembre 2005 susvisés. Pour les aérodromes d'Aéroports de Paris, ces textes prévoient qu'un contrat pluriannuel est passé entre l'Etat et la société et définissent le périmètre d'activité ― dit « périmètre régulé » ― dans lequel est appréciée, conformément aux dispositions du code de l'aviation civile, la rémunération de l'entreprise. Le périmètre de régulation comprend l'ensemble des activités, déduction faite de celles de sûreté, de l'assistance en escale, de la diversification immobilière et des autres activités non liées à l'aéroportuaire. Dans ce système dit de « simple caisse », les tarifs des redevances aéronautiques sont fixés de telle sorte que le résultat opérationnel de l'ensemble des revenus du « périmètre régulé » permette de rémunérer les capitaux investis au coût moyen pondéré du capital.
Le contrat de régulation économique (CRE) a été conclu entre l'Etat et Aéroports de Paris le 6 février 2006. Il fixe en particulier, sur la période 2006-2010 et en référence au programme d'investissements prévus, le plafond du taux moyen d'évolution des principales redevances pour services rendus. En avril 2008, les redevances aéronautiques ont ainsi augmenté de 3,8 % en moyenne. Le contrat détermine en outre les objectifs de qualité de service. Pour les contrats ultérieurs, l'arrêté du 16 septembre 2005 prévoit que sortent de la « simple caisse » l'immobilier de diversification (inclus à titre dérogatoire dans le premier contrat de régulation) et éventuellement certaines activités commerciales, ce qui permettrait à Aéroports de Paris de bénéficier du progrès de la rentabilité de ces activités.
Au cours de l'exercice 2007, Aéroports de Paris a connu une forte progression de ses activités et de ses résultats. Le chiffre d'affaires a progressé par rapport à 2006 de 10,4 % à 2,3 milliards d'euros grâce particulièrement au dynamisme du trafic aérien (+ 4,7 %), à la revalorisation des redevances et à l'augmentation des surfaces commerciales (+ 21,2 %) et des surfaces immobilières louées.
L'excédent brut d'exploitation (EBITDA) s'élève à 754 millions d'euros, en hausse de 13,5 %, grâce à l'amélioration des marges rendue possible notamment par la maîtrise des charges de personnel. Le résultat opérationnel courant s'établit à 442 millions d'euros, en augmentation de 13,1 %.
Le résultat net, part du groupe, est de 322 millions d'euros et a plus que doublé. Hors éléments non récurrents, essentiellement la plus-value de cession des titres de BCIA (aéroport de Pékin), le résultat net, part du groupe, s'élève à 239 millions d'euros, en hausse de 19,2 % sur son équivalent de 2006.
Le bilan consolidé d'Aéroports de Paris au 31 décembre 2007 fait apparaître des capitaux propres, part du groupe, de 2,95 milliards d'euros (+ 6 %) et un endettement net de 1,78 milliard (― 4 %).
Le premier semestre 2008, au cours duquel le trafic passagers s'est encore inscrit en hausse de 2,8 % par rapport à la même période de 2007, est caractérisé par une progression de 12,3 % du chiffre d'affaires grâce principalement à la revalorisation des redevances, à l'ouverture de nouvelles installations et surfaces commerciales et à la croissance de l'immobilier. L'EBITDA est en hausse de 14,2 % et le résultat opérationnel courant de 12,4 % par rapport au premier semestre 2007, grâce à l'amélioration des marges. Seul le segment « escale », en restructuration, reste déficitaire. Le résultat net progresse de 11 % hors éléments non récurrents (cession de BCIA au premier semestre 2007). Au 30 juin 2008, les capitaux propres s'élèvent à 2,91 milliards d'euros et l'endettement net à 1,97 milliard.
Aéroports de Paris a annoncé qu'au cours du troisième trimestre 2008 son chiffre d'affaires a progressé de 9,3 % par rapport à la même période de 2007, les services aéroportuaires augmentant de 6,9 %. Sur les neuf premiers mois de l'exercice en cours, le trafic a progressé de 1,5 % par rapport à 2007 et le chiffre d'affaires de 11,2 %.
Pour l'ensemble de l'année 2008, malgré un environnement moins favorable qui s'est traduit par la baisse de 3,6 % du trafic passagers en septembre 2008 par rapport à septembre 2007, Aéroports de Paris maintient ses objectifs de rentabilité avec un EBITDA en croissance comprise entre 9 et 12 % en 2008 et en augmentation de 60 % en valeur absolue entre 2005 et 2010.
III. ― Schiphol Group (NV Luchthaven Schiphol) est une société néerlandaise qui n'est pas cotée en bourse. Son capital est réparti de la manière suivante :
― Etat néerlandais : 75,8 % ;
― ville d'Amsterdam : 21,8 % ;
― ville de Rotterdam : 2,4 %.
Une ouverture du capital, par cession d'actions détenues par l'Etat, a été envisagée, mais finalement écartée par le Gouvernement néerlandais en octobre 2007.
Schiphol Group possède et exploite l'aéroport d'Amsterdam Schiphol et trois aéroports secondaires aux Pays-Bas (Rotterdam, Eindhoven et Lelystad). Il a des intérêts dans huit autres aéroports dans le monde. Amsterdam est un des plus grands aéroports d'Europe avec en 2007 le transport de 47,8 millions de passagers (5e rang européen) et 1,6 million de tonnes de fret (3e rang). Il a connu au cours des dernières années une croissance robuste de son trafic (4,2 % en moyenne sur les dix dernières années pour les passagers) et a été élu meilleur aéroport d'Europe. Schiphol Group emploie environ 2 500 personnes.
Le groupe présente son activité en quatre segments :
― le segment « aviation » représente 56,7 % du chiffre d'affaires et 45,1 % de l'EBITDA (excédent brut d'exploitation) en 2007. Il a pour sources de revenus les redevances aéroportuaires et les droits d'approvisionnement en carburant des avions. Schiphol est régulé selon le principe de la « double caisse », les redevances aéroportuaires étant fixées au regard du résultat opérationnel des activités du seul segment « aviation » en vue de permettre de rémunérer les capitaux investis au coût moyen pondéré du capital ;
― le segment « consommation » (26,3 % du chiffre d'affaires et 34,6 % de l'EBITDA) regroupe les recettes des ventes en direct en magasin et des parcs de stationnement, les redevances des commerces en concession et de la publicité ;
― le segment « immobilier » (10,8 % du chiffre d'affaires et 16 % de l'EBITDA) reprend les loyers d'immeubles et de terrains perçus. Le groupe exploite près de 500 000 mètres carrés de bâtiments. Le domaine foncier de Schiphol comprend plus de 3 000 hectares dont le tiers est alloué au segment immobilier ; 540 hectares de réserves foncières non exploitées sont destinés aux développements immobiliers futurs. Les ventes et les plus-values latentes sont intégrées au compte de résultats ;
― le segment « alliances et participations » (6,2 % du chiffre d'affaires et 4,3 % de l'EBITDA) reprend les activités exercées dans des aéroports autres que Schiphol, aux Pays-Bas et à l'international. Schiphol Group détient notamment 40 % de la joint-venture qui exploite le terminal 4 de JFK à New York.
Le chiffre d'affaires consolidé de Schiphol Group s'est élevé à 1,15 milliard d'euros pour l'exercice 2007, en hausse de 10,5 % sur 2006, grâce principalement aux segments « consommation » (+ 30 % avec notamment la reprise en direct des commerces de spiritueux et tabacs) et « immobilier » (+ 14 % avec la mise en location de nouveaux immeubles et l'augmentation des revenus générés par les services). Le trafic passagers a été en hausse sur l'année de 4,4 %.
L'EBITDA pour 2007 a progressé de 24,3 % atteignant 594 millions d'euros grâce principalement à la progression enregistrée dans le segment « aviation » (+ 13,8 % en raison de la maîtrise des coûts) et surtout dans « l'immobilier » (+ 59,6 %, y inclus les plus-values latentes). Le résultat opérationnel (EBIT) s'est élevé à 420 millions d'euros (+ 32,6 %).
Le résultat net, part du groupe, atteint 316 millions d'euros, soit une baisse de 40 % en raison de la constatation en 2006 d'un montant important de crédits d'impôts différés résultant de l'accord intervenu avec l'administration fiscale sur les conditions d'imposition de la société. Hors plus-values latentes sur l'immobilier et éléments fiscaux exceptionnels, le résultat net est en hausse de 17,7 % à 233 millions d'euros.
Au bilan du 31 décembre 2007, les fonds propres consolidés s'élèvent à 2,96 milliards d'euros (+ 8,7 %) et l'endettement net à 765 millions (+ 28 %).
Au cours du premier semestre 2008, le trafic passagers est encore en hausse de 2 % et le chiffre d'affaires de 1,7 % par rapport à la même période de 2007. L'EBITDA diminue cependant de 16,3 % en raison de l'augmentation des coûts et de la baisse des redevances aéroportuaires, tandis que le résultat opérationnel recule de 23,5 %. Le résultat net est en baisse de 32,9 % (de 8,3 % seulement hors plus-values latentes et éléments fiscaux exceptionnels).
Lors de l'assemblée générale du 17 avril 2008, les actionnaires de Schiphol Group ont décidé la distribution de deux dividendes exceptionnels prélevés sur les réserves : le premier, d'un montant de 500 millions d'euros, a impacté d'autant le volume des fonds propres au 30 juin 2008 ainsi ramenés à 2,44 milliards d'euros, l'endettement net étant de 781 millions. Le second dividende exceptionnel sera distribué en 2009 et son montant, d'un maximum de 500 millions d'euros, devra permettre à la société de conserver une notation d'au moins A.
Pour les neuf premiers mois de l'exercice en cours, le trafic passagers s'inscrit en hausse de 0,4 % par rapport à la même période de 2007.
Pour l'ensemble de l'année 2008, Schiphol Group anticipe une croissance nulle du trafic passagers et une baisse de l'EBITDA. Sur la période 2007-2013, le groupe prévoit que son EBITDA connaisse une croissance moyenne comprise entre 5 et 9 %, sur la base d'une hypothèse de croissance du trafic passagers en ligne avec la croissance économique à partir de 2010.
IV. ― Aéroports de Paris et Schiphol Group ont décidé de se rapprocher et, à l'issue de travaux approfondis comprenant notamment les « due diligences » d'usage, les deux groupes ont annoncé publiquement le 21 octobre 2008 leur intention de signer un accord-cadre de coopération industrielle à long terme et de prise de participations croisées à hauteur de 8 %.
Les deux groupes soulignent que cette initiative stratégique majeure devrait produire des bénéfices significatifs pour les deux sociétés dans tous les domaines clés de leurs activités. Avec l'aide d'un cabinet indépendant, ces synergies de revenus et de coûts ont été identifiées et évaluées à environ 71 millions d'euros par an en année pleine d'ici à 2013. Les dépenses d'investissement pourraient de plus être réduites de 18 millions d'euros par an à partir de 2013. Une structure de coopération est mise en place autour d'un comité de coopération industrielle qui est constitué à parité entre les deux partenaires et est chargé de définir et de coordonner la coopération dans chacun des axes identifiés.
La ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi a annoncé le même jour qu'elle « apportera son entier soutien à ce projet d'alliance entre deux des plus importants groupes aéroportuaires européens qui permettra de créer un double hub de premier plan et accompagnera le développement d'Air France-KLM et de son alliance Sky Team ».
V. ― Les accords juridiques formalisant le rapprochement d'Aéroports de Paris et de Schiphol Group et soumis à la Commission des participations et des transferts comprennent sept documents essentiels.
a) L'accord-cadre entre Aéroports de Paris et Schiphol Group définit l'ensemble des modalités du rapprochement et comprend en annexe les six autres documents ci-après mentionnés. Il prévoit également les garanties que s'accordent les parties ;
b) Aéroports de Paris et Schiphol Group ont conclu un accord de coopération industrielle pour une durée initiale de douze ans. Les objectifs de cet accord ont été publiés par un avis inséré au Journal officiel du 22 octobre 2008.
c) Le contrat de cession d'actions entre l'Etat français et Schiphol Group définit les modalités financières de l'entrée de ce dernier au capital d'Aéroports de Paris.
d) Le contrat de souscription d'actions nouvelles de Schiphol Group par Aéroports de Paris définit les modalités financières de l'entrée de ce dernier au capital de Schiphol Group.
e) Le pacte d'actionnaires entre l'Etat français et Schiphol Group est destiné à régir leurs droits et obligations réciproques en tant que co-actionnaires d'Aéroports de Paris.
f) Le pacte d'actionnaires entre Aéroports de Paris et les actionnaires de Schiphol Group est destiné à régir leurs droits et obligations réciproques en tant que coactionnaires de Schiphol Group.
g) L'accord régissant les conditions d'une éventuelle sortie précise les modalités détaillées, notamment en matière de prix, de cession des participations conformément aux pactes d'actionnaires.
VI. ― Les projets d'accords conclus entre Aéroports de Paris, Schiphol Group, l'Etat français et les actionnaires de Schiphol Group comprennent l'entrée de chacune des deux sociétés au capital de l'autre à hauteur de 8 % dans les conditions suivantes.
a) Entrée de Schiphol Group au capital d'Aéroports de Paris :
L'Etat français cède à Schiphol Group un volume d'actions qu'il détient représentant 8 % du capital existant d'Aéroports de Paris. Les parties sont convenues que cette cession se fasse au prix de 67 € par action, ce qui représente un montant de 530 millions d'euros environ. Ce prix valorise implicitement Aéroports de Paris à environ 6,6 milliards d'euros pour 100 % du capital.
b) Entrée d'Aéroports de Paris au capital de Schiphol Group :
Les statuts de la société NV Luchthaven Schiphol ont été amendés par l'assemblée générale tenue le 19 octobre 2008 afin de créer une nouvelle classe d'actions pouvant être souscrites par des actionnaires autres que ceux existants. L'accord prévoit que la société procède ainsi à une augmentation de capital réservée à Aéroports de Paris de façon à ce que ce dernier détienne 8 % du capital augmenté. La souscription à l'augmentation de capital représenterait pour Aéroports de Paris un investissement de 370 millions d'euros. Ce montant représente une valorisation implicite de Schiphol Group à environ 4,3 milliards d'euros pour 100 % du capital avant augmentation et après distribution du dividende exceptionnel de 2008. Aéroports de Paris bénéficiera, comme les autres actionnaires, de l'éventuelle distribution d'un dividende exceptionnel en 2009.
c) Garanties :
L'Etat français accorde à Schiphol Group les garanties juridiques usuelles pour une cession d'actions. Aéroports de Paris accorde par ailleurs à Schiphol Group des garanties sur la sincérité des comptes et des documents présentés en salle d'informations lors de la procédure de « due diligence ». Les garanties sont limitées dans le temps et pour leur montant global à 10 % du prix de la cession. Elles font aussi l'objet d'un montant minimum individuel et global. Schiphol Group accorde à Aéroports de Paris des garanties strictement symétriques.
d) Pactes d'actionnaires et conditions de sortie :
Aéroports de Paris et Schiphol Group s'engagent à maintenir leurs participations croisées durant la durée de l'accord.
Le pacte d'actionnaires d'Aéroports de Paris entre l'Etat français et Schiphol Group ne constitue pas un concert au sens du droit boursier. Il prévoit la présentation par Schiphol Group de deux membres du conseil d'administration d'Aéroports de Paris. Le pacte et l'accord de sortie éventuelle accordent notamment :
― à l'Etat français un droit de préemption des actions d'Aéroports de Paris que céderait Schiphol Group, un droit de veto sur la cession (exerçable une fois) et un droit de cession forcée en certaines circonstances ;
― à Aéroports de Paris un droit de première offre ainsi qu'un droit de veto et un droit de préemption en cas de cession (venant après ceux de l'Etat français) ;
― à Schiphol Group un droit de maintien du niveau de sa participation.
Le pacte d'actionnaires de Schiphol Group entre Aéroports de Paris et les actionnaires de Schiphol Group prévoit la présentation par Aéroports de Paris d'un membre du conseil de surveillance de Schiphol Group. Le pacte et l'accord de sortie éventuelle, tenant compte du fait que Schiphol Group est une société non cotée, accordent notamment :
― à l'Etat néerlandais un droit de cession forcée en certaines circonstances ;
― à Aéroports de Paris un droit de maintien du niveau de sa participation et un droit de sortie en certaines circonstances.
VII. ― La cession par l'Etat d'actions d'Aéroports de Paris et l'entrée d'Aéroports de Paris au capital de Schiphol Group constituant un tout, la commission a eu recours, conformément à la loi, pour chacune des deux sociétés concernées, à une analyse multicritères qui prend en compte les éléments boursiers, la valeur des actifs, les bénéfices réalisés, l'existence des filiales et les perspectives d'avenir.
Elle a disposé à cette fin des rapports d'évaluation des banques conseils de l'Etat et d'Aéroports de Paris.
a) Evaluation d'Aéroports de Paris :
La banque conseil de l'Etat a procédé à une évaluation d'Aéroports de Paris selon les méthodes suivantes :
― la somme des parties : les quatre segments de l'activité ont été évalués séparément selon la méthode de l'actualisation des flux ; pour l'aéroportuaire, la valeur terminale a été calculée à partir d'un multiple de la base des actifs régulés (BAR). La banque a considéré deux scenarii : celui du plan d'affaires établi par l'entreprise et un scenario où le nouveau contrat de régulation à conclure avec l'Etat permettrait une sortie partielle à horizon 2011 des commerces et des parcs de stationnement du périmètre de régulation ;
― la méthode des multiples de sociétés comparables : la banque a utilisé le multiple valeur d'entreprise sur EBITDA 2008 et a retenu comme comparables Fraport, d'une part, et un échantillon d'aéroports européens de taille moyenne cotés, d'autre part.
La banque a également étudié le cours de l'action Aéroports de Paris sur différentes durées et les objectifs de cours des analystes financiers.
La banque conseil a ainsi présenté une fourchette d'évaluation dont elle a ensuite étudié la sensibilité par rapport à des variations des paramètres financiers et opérationnels.
b) Evaluation de Schiphol Group :
La commission a par ailleurs disposé du rapport de la banque conseil d'Aéroports de Paris qui présente l'évaluation de Schiphol Group. La banque a préalablement retraité les comptes publiés en vue d'en éliminer les plus-values latentes et les effets des traitements fiscaux non récurrents. Elle a aussi intégré les distributions de dividendes exceptionnels décidés par l'assemblée générale de la société en avril dernier. Les deux méthodes d'évaluation suivantes ont été appliquées :
― l'actualisation des flux de trésorerie : la banque conseil a procédé à ses travaux sur la base, d'une part, du plan d'affaires établi par Schiphol Group et, d'autre part, d'un plan d'affaires révisé établi par la banque en liaison avec la société et tenant compte des résultats des « due diligences ». Ces plans couvrent la période 2008-2013. La valeur résiduelle, qui compose l'essentiel de la valeur d'entreprise (plus de 95 %), a été déterminée par application d'un multiple d'EBITDA, calculé à partir de celui d'Aéroports de Paris, à l'EBITDA d'une année normative ; la vraisemblance du montant obtenu a été contrôlée en comparant le taux de croissance à l'infini implicite avec ceux retenus par les analystes de recherche pour les aéroports européens cotés ;
― la somme des parties : les quatre segments de l'activité ont été évalués séparément. Les segments « aviation » et « consommation » ont été valorisés selon l'actualisation des flux ; pour l'aéroportuaire, la valeur terminale a été calculée à partir d'un multiple de la base des actifs régulés (BAR). L'immobilier et le foncier ont été évalués à partir d'un taux de capitalisation des loyers, y compris pour les projets à venir. Enfin, les filiales ont été valorisées sur la base d'un multiple de l'EBITDA 2008. Comme pour l'actualisation des flux, deux scenarii de plans d'affaires ont été retenus.
La banque conseil a ainsi présenté une fourchette d'évaluation dont elle a ensuite étudié la sensibilité par rapport à des variations des paramètres financiers et opérationnels.
c) Evaluation des synergies :
Bien que les synergies attendues de la coopération entre les deux groupes n'aient pas été incluses dans l'évaluation des deux entreprises, les banques-conseils en ont étudié la valeur selon la méthode de l'actualisation des flux de trésorerie. Les différents scenarii retenus reposent sur des taux d'actualisation intégrant le degré d'incertitude des flux, des taux de croissance à l'infini des flux et des hypothèses sur l'impact de la régulation.
Au total, les travaux des banques conseils concluent à des fourchettes de valorisation d'Aéroports de Paris de Schiphol Group dans lesquelles s'inscrivent les valeurs retenues par les parties dans leur accord.
VIII. ― Pour évaluer Aéroports de Paris et Schiphol Group, la commission a particulièrement étudié les hypothèses d'activité retenues dans les plans d'affaires et les paramètres financiers, comme les taux d'actualisation des flux, ainsi que les conséquences des modes de fixation des redevances aéronautiques par les pouvoirs publics et leur possible évolution. Ces bases de calcul lui ont paru cohérentes et ne pas conduire à une sous-évaluation d'Aéroports de Paris. Les prix des actions n'incluent pas de prime explicite, ce qui a paru adapté au caractère symétrique des prises de participation et à leur niveau. De même, il n'a pas été tenu compte du fait qu'Aéroports de Paris est une société cotée contrairement à Schiphol Group car les pactes d'actionnaires et l'accord de sortie éventuelle rendent in fine très comparables les droits et obligations attachés aux actions des deux sociétés.
L'appréciation de la valeur des deux sociétés implique cependant de prendre en compte les conséquences de la dégradation rapide de la situation économique générale sur le secteur du trafic aérien qui y est très corrélé. Les premières données sur le trafic en septembre 2008 le confirment. La commission a donc demandé aux banques des travaux complémentaires sur ce sujet, et plus généralement sur la sensibilité de l'évaluation aux variations des paramètres financiers et des hypothèses opérationnelles.
Aéroports de Paris a été introduit en bourse en juin 2006 au prix de 44 € (45 € pour les investisseurs institutionnels). L'action, d'abord un peu hésitante, s'est envolée durant le premier semestre 2007, dépassant 90 € en milieu d'année. Elle s'est ensuite lentement repliée sur les douze mois qui ont suivi jusqu'à environ 70 €. Elle est affectée depuis l'été 2008 par la crise boursière et financière internationale et l'anticipation de ses conséquences sur l'économie, et donc sur le trafic aérien. Le cours évolue depuis un mois entre 40 et 55 €, sans que les perturbations actuelles du marché et sa forte volatilité puissent donner à ce niveau de cours un caractère de référence indiscutable. L'action Aéroports de Paris a, depuis son introduction en bourse, réalisé une performance nettement supérieure à celle de la principale société européenne comparable, Fraport.
Au total, la commission a conclu de ses travaux que le prix de vente des actions d'Aéroports de Paris par l'Etat français à Schiphol Group envisagé par les accords, 67 € par action, correspondant à une valeur globale de la société d'environ 6,6 milliards d'euros, ne sous-estime pas la valeur de la société.
En vue d'apprécier de façon globale l'opération qui lui a été soumise, la commission a également examiné l'évaluation que les parties ont retenue pour Schiphol Group, soit environ 4,3 milliards d'euros, afin de déterminer le prix de la souscription d'Aéroports de Paris à l'augmentation de capital. Cette évaluation est apparue faite sur des bases homogènes avec celle d'Aéroports de Paris.
L'ensemble de la transaction respecte les intérêts patrimoniaux du secteur public.
IX. ― La commission a procédé à l'examen de l'accord de coopération industrielle. L'alliance d'Aéroports de Paris et de Schiphol Group s'étend à tous leurs grands domaines d'activités.
Sur le plan aéronautique, elle doit permettre la consolidation du double « hub » constitué par les deux aéroports, grâce à l'amélioration de la liaison entre eux, la facilitation des transferts et l'harmonisation des services. Cette approche devrait permettre aux deux plates-formes d'améliorer la qualité et le coût des services rendus aux compagnies aériennes, et notamment à leur premier client Air France-KLM et à l'alliance Sky Team. La position concurrentielle des deux aéroports s'en trouvera renforcée. A cet égard, ils disposent, en particulier Aéroports de Paris, de capacités disponibles, contrairement à beaucoup d'aéroports concurrents.
Dans les autres domaines d'activités, commerces, immobilier et télécommunications en particulier, les deux groupes entendent échanger leurs meilleures pratiques et négocier en commun certains contrats. Cette coopération devrait stimuler le programme de modernisation d'Aéroports de Paris. Les deux aéroports ont décidé par ailleurs de mener dorénavant en commun leurs projets d'internationalisation.
Bien documentées, les estimations de synergies semblent avoir été effectuées avec prudence bien qu'elles soient par nature incertaines. Elles bénéficieraient majoritairement à Aéroports de Paris. La coopération entre les deux groupes devrait de plus favoriser l'optimisation de leurs investissements et l'amélioration de leur compétitivité.
Les participations croisées entre Aéroports de Paris et Schiphol Group, dont le niveau a tenu compte des contraintes d'actionnariat public, permettent à chacune des deux sociétés de bénéficier financièrement des effets positifs du rapprochement. La commission a été informée que ces participations seraient mises en équivalence dans les comptes consolidés des deux groupes.
X. ― La commission constate que les accords qui lui ont été présentés constituent un « accord de coopération industrielle, commerciale ou financière » au sens de l'article 1er du décret du 3 septembre 1993 susvisé, qu'ils préservent les intérêts nationaux, que le choix de Schiphol Group comme acquéreur d'actions d'Aéroports de Paris est pertinent et que les conditions de la cession de 8 % du capital d'Aéroports de Paris ne sous-estiment pas la valeur de cette société.
Pour tous ces motifs, et au vu de l'ensemble des éléments qui lui ont été transmis, la commission émet un avis favorable au choix de l'acquéreur et aux conditions de cette cession ainsi qu'au projet d'arrêté annexé au présent avis.