(3) L'absence de concurrence potentielle
Ainsi que cela a été précédemment exposé, les opérateurs dégroupeurs ne bénéficient pas, à l'heure actuelle, de la même couverture géographique que France Télécom.
Au-delà des zones dégroupées, la concurrence à laquelle est potentiellement confrontée France Télécom est limitée. En effet, si l'émergence d'une concurrence, essentiellement par le dégroupage, est susceptible d'intervenir sur une partie des répartiteurs non encore ouverts, elle reste longue et coûteuse à mettre en place. En outre, l'avènement d'une situation concurrentielle sur les plus petits répartiteurs reste peu probable et limité aux projets de collectivités.
Par conséquent, en dehors des zones dégroupées, la concurrence potentielle qui résulte essentiellement de l'extension éventuelle du dégroupage s'avère trop parcellaire et trop longue à mettre en place, pour exercer une pression significative sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
3. Conclusion
A l'issue de l'analyse qui précède, l'Autorité propose de désigner la société France Télécom comme opérateur exerçant une influence significative sur le marché pertinent de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
IV. ― OBLIGATIONS IMPOSÉES À L'OPÉRATEUR EXERÇANT UNE INFLUENCE SIGNIFICATIVE POUR LES OFFRES DE GROS D'ACCÈS HAUT DÉBIT ET TRÈS HAUT DÉBIT ACTIVÉES LIVRÉES AU NIVEAU INFRANATIONAL
Dans cette partie, l'Autorité présente les obligations qu'il paraît nécessaire et proportionné d'imposer à France Télécom sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
Les développements portent particulièrement sur les offres activées fondées sur la technologie DS. La dernière section aborde le traitement des offres fondées sur la fibre.
1. Principes généraux relatifs à la détermination des obligations imposées à l'opérateur
exerçant une influence significative sur un marché
Conformément à l'article 16 de la directive « cadre », lorsqu'une autorité de régulation nationale a identifié un opérateur exerçant une influence significative sur un marché pertinent, celle-ci est tenue de lui imposer des mesures réglementaires spécifiques visées aux articles 9 à 13 de la directive « accès ». Ces obligations sont les suivantes :
― obligations de transparence ;
― obligations de non-discrimination ;
― obligations relatives à la séparation comptable ;
― obligations relatives à l'accès à des ressources spécifiques et à leur utilisation ;
― contrôle des prix et obligations relatives au système de comptabilisation des coûts.
Conformément au considérant 14 de la même directive, il s'agit d'un ensemble maximal d'obligations pouvant être imposées aux entreprises.
L'article 8 de la directive « accès » prévoit également que les obligations imposées sont fondées sur la nature du problème constaté, proportionnées et justifiées au regard des objectifs énoncés dans l'article 8 de la directive « cadre ».
Par ailleurs, le paragraphe 118 des Lignes directrices indique qu'un projet de mesure est considéré comme compatible avec le principe de proportionnalité si la mesure à prendre poursuit un but légitime et si les moyens employés sont à la fois nécessaires et aussi peu contraignants que possible.
L'article L. 38-I du code des postes et des communications électroniques prévoit que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer, en matière d'interconnexion et d'accès, une ou plusieurs des obligations (...), proportionnées à la réalisation des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 ».
Il s'agit des obligations suivantes :
― rendre publiques des informations concernant l'interconnexion ou l'accès, notamment publier une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion ou d'accès lorsqu'ils sont soumis à des obligations de non-discrimination ;
― fournir des prestations d'interconnexion ou d'accès dans des conditions non discriminatoires ;
― faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des éléments de réseau ou à des moyens qui y sont associés ;
― ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants ;
― isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès.
S'agissant de l'accès, l'Autorité peut imposer à un opérateur réputé exercer une influence significative de faire droit aux demandes raisonnables, notamment lorsqu'elle considère qu'un refus ou des propositions déraisonnables empêcheraient l'émergence d'un marché de détail concurrentiel durable ou risqueraient d'être préjudiciables aux utilisateurs finaux.
Dans ce cadre, l'ARCEP peut préciser les contours de l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès en imposant certains des mécanismes spécifiques qui figurent notamment à l'article D. 310 du code des postes et des communications électroniques.
En outre, lorsque l'Autorité apprécie le caractère proportionné des obligations d'accès qu'elle est susceptible d'imposer, elle veille notamment à prendre en compte les critères d'analyse suivants mentionnés à l'article L. 38-V du code des postes et des communications électroniques :
a) La viabilité technique et économique de l'utilisation ou de la mise en place de ressources concurrentes, compte tenu du rythme auquel le marché évolue et de la nature et du type d'interconnexion et d'accès concerné ;
b) Le degré de faisabilité de la fourniture d'accès proposée, compte tenu de la capacité disponible ;
c) L'investissement initial réalisé par le propriétaire des ressources, sans négliger les risques inhérents à l'investissement ;
d) La nécessité de préserver la concurrence à long terme ;
e) Le cas échéant, les éventuels droits de propriété intellectuelle pertinents ;
f) La fourniture de services paneuropéens.
En toute hypothèse et quelles que soient les obligations qui peuvent être imposées, celles-ci doivent être proportionnées aux objectifs généraux fixés à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques, à savoir :
« 1° A la fourniture et au financement de l'ensemble des composantes du service public des communications électroniques ;
2° A l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques ;
3° Au développement de l'emploi, de l'investissement efficace dans les infrastructures, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques ;
4° A la définition de conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence ;
5° Au respect par les opérateurs de communications électroniques du secret des correspondances et du principe de neutralité au regard du contenu des messages transmis, ainsi que de la protection des données à caractère personnel ;
6° Au respect, par les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques, de l'ordre public et des obligations de défense et de sécurité publique ;
7° A la prise en compte de l'intérêt des territoires et des utilisateurs, notamment handicapés, dans l'accès aux services et aux équipements ;
8° Au développement de l'utilisation partagée entre opérateurs des installations mentionnées aux articles L. 47 et L. 48 ;
9° A l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des opérateurs ;
10° A la mise en place et au développement de réseaux et de services et à l'interopérabilité des services au niveau européen ;
11° A l'utilisation et à la gestion efficaces des fréquences radioélectriques et des ressources de numérotation ;
12° A un niveau élevé de protection des consommateurs, grâce notamment à la fourniture d'informations claires, notamment par la transparence des tarifs et des conditions d'utilisation des services de communications électroniques accessibles au public ;
13° Au respect de la plus grande neutralité possible, d'un point de vue technologique, des mesures qu'ils prennent ;
14° A l'intégrité et la sécurité des réseaux de communications électroniques ouverts au public. »
Compte tenu de la situation concurrentielle observée pour les offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, l'Autorité est amenée à imposer plusieurs obligations à France Télécom, établies au terme de l'analyse suivante.
2. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès
L'article L. 38-I (3°) du code des postes et des communications électroniques prévoit que l'ARCEP peut imposer des obligations d'accès à un opérateur disposant d'une influence significative sur un marché pertinent. Conformément à l'article D. 310 du code, elles peuvent notamment prendre la forme d'une obligation d'accorder à des tiers l'accès à des éléments ou ressources de réseau spécifiques, de négocier de bonne foi avec les opérateurs ou encore de ne pas retirer un accès déjà accordé.
a) Obligation générique
L'analyse de la situation concurrentielle prévalant sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, telle que développée précédemment dans la partie relative à la désignation du ou des opérateurs exerçant une influence significative sur le marché, a montré que France Télécom bénéficie sur ce marché du contrôle d'une infrastructure difficile à dupliquer.
En effet, si le dégroupage de la boucle locale, qui constitue un vecteur essentiel du développement de la concurrence sur le marché de l'accès DSL, permet aux opérateurs de concurrencer les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational de France Télécom, il reste toutefois limité géographiquement à une partie du territoire. Actuellement, le dégroupage ne couvre qu'environ 70 % de la population française. Par comparaison, France Télécom a désormais installé des DSLAM dans l'intégralité de ses répartiteurs.
A l'horizon de la présente analyse et malgré les relais de croissance pour l'extension du dégroupage que constituent les réseaux d'initiatives publiques et l'offre LFO de France Télécom, il apparaît qu'une forte proportion des répartiteurs de France Télécom ne sera pas dégroupée.
Pour compléter la couverture du dégroupage, et pouvoir ainsi commercialiser des offres de détail sur le plan national, les opérateurs doivent nécessairement utiliser le réseau de France Télécom, l'opérateur historique étant le seul opérateur à avoir installé des DSLAM dans l'intégralité de ces répartiteurs. L'accès au réseau DSL de France Télécom est donc indispensable pour rendre possible l'exercice d'une concurrence effective entre les opérateurs sur les marchés de détail, à l'échelle du territoire national et dans l'intérêt des utilisateurs, conformément aux objectifs mentionnés aux articles L. 32-1-II (2°) et D. 310 du code des postes et des communications électroniques.
Actuellement, plusieurs modes d'accès au réseau DSL de France Télécom coexistent : l'achat de trafic haut débit centralisé en un point de livraison national unique ou à des niveaux intermédiaires, dits régionaux ou départementaux, du réseau.
D'un point de vue économique, le recours à un système de collecte relativement capillaire plutôt qu'à une offre nationale permet à un opérateur alternatif qui a déployé un réseau longue distance ainsi que des sous-réseaux régionaux, pour le dégroupage, de remplir son propre réseau, rentabilisant ainsi plus rapidement ses investissements et proposer des services d'abondance au client final.
Au vu des éléments d'analyse qui précèdent, l'Autorité estime qu'il est nécessaire d'imposer à France Télécom l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables des opérateurs tiers visant à obtenir l'accès à des éléments de réseaux sur DSL ou à des moyens et ressources associés sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational. Ces demandes devront respecter les critères de l'article L. 38-V du code.
Dans ce cadre, France Télécom est invitée à négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent l'accès sur ce marché, afin de minimiser les cas de litige.
Dans les zones où France Télécom n'est ni propriétaire ni gestionnaire de la boucle locale (zones aéroportuaires de Paris par exemple), une demande d'accès à ces réseaux formulée auprès de France Télécom ne saurait être considérée comme raisonnable. France Télécom n'est donc pas soumise sur ces zones à l'obligation de fournir des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational.
En pratique, si les propriétaires ou gestionnaires de la boucle locale dans ces zones ne proposaient pas des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational dans des conditions équivalentes à celles fournies par France Télécom sur le reste du territoire, l'Autorité serait amenée à traiter cette situation en règlement de différend.
La proportionnalité de ces prescriptions est vérifiée en l'absence de mesures moins contraignantes permettant d'atteindre le même objectif, et au regard des critères spécifiques mentionnés à l'article L. 38-V précité du code, notamment en ce qui concerne la prise en compte du degré de faisabilité de la fourniture de l'accès à un niveau infranational et de la nécessité de préserver la concurrence à long terme.
b) Précision de l'obligation
Le caractère raisonnable d'une demande d'accès formulée par un opérateur devra être apprécié au regard de la proportionnalité entre les contraintes économiques et techniques d'une telle demande pour France Télécom et le bénéfice attendu pour la résolution d'un problème concurrentiel particulier ou plus généralement pour le fonctionnement des marchés du haut débit et du très haut débit.
A cette fin, il sera tenu le plus grand compte des éléments d'appréciation retenus dans le code des postes et des communications électroniques dans son article L. 38-V.
Compte tenu du développement actuel du marché et des offres, il apparaît d'ores et déjà que certaines demandes d'accès doivent être considérées comme raisonnables ; il convient donc, conformément à l'article D. 310, de préciser plusieurs obligations qu'il apparaît nécessaire d'imposer à France Télécom sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées à un niveau infranational.
(1) Prestations existantes
Les prestations qui étaient fournies par France Télécom avant la mise en œuvre de la précédente analyse de marché, et qui relevaient du marché pertinent considéré, sont le fruit de demandes auxquelles France Télécom avait accédé car elle les estimait raisonnables, ou qui lui avaient été imposées par les autorités de régulation en tant qu'elles étaient justifiées et proportionnées aux problèmes de concurrence rencontrés.
Les offres de gros actuellement offertes par France Télécom et qui relèvent du marché pertinent considéré sont les suivantes :
― DSL Entreprises ;
― DSL Access ;
― DSL Access Only ;
― DSL Collect ATM ;
― DSL Collect IP ;
― DSL Collect Ethernet.
Ces offres représentaient, à la date du 31 décembre 2007, un tiers des accès que France Télécom vendait sur le marché de gros aux opérateurs alternatifs. Elles apparaissent donc comme structurantes pour le marché. Toute remise en cause ou évolution artificielle à court terme de ces prestations serait une source de déstabilisation technique, économique et commerciale des opérateurs et serait finalement nuisible au marché.
Le maintien des prestations existantes, dès lors qu'elles sont susceptibles de répondre aux obligations imposées au titre de la présente analyse de marché, est donc un élément indispensable pour assurer la pérennité des plans de développement des opérateurs. Ce maintien doit être assuré sans coûts supplémentaires ni frais de migration.
En particulier, les principales évolutions apportées par France Télécom aux processus et prestations existantes depuis la décision d'analyse de marché n° 2005-0280 du 19 mai 2005 devront être maintenues et intégrées dans l'offre de référence « accès et collecte DSL », en particulier :
― pour les offres destinées in fine à une clientèle résidentielle :
― la possibilité de commander des accès en ADSL 2+ ;
― la possibilité de commander des accès par reprise de ligne et par construction de ligne pour l'offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée ;
― la désaturation monopaire ;
― l'introduction d'un service extranet de recherches d'informations à l'adresse ;
― la prestation de retour rapide en cas d'écrasement à tort.
― pour les offres destinées in fine à une clientèle professionnelle :
― la désaturation monopaire et multipaire ;
― la protection des accès sensibles contre les d'écrasement à tort.
Toutefois, les évolutions technologiques peuvent rendre obsolètes, à l'horizon de la présente analyse, certaines prestations existantes. Sous certaines conditions qui devront être précisées le cas échéant, l'obligation de maintenir de telles prestations, qui ne paraît pas proportionnée, pourrait être levée.
Le maintien des prestations déjà proposées aux opérateurs, dès lors qu'elles sont susceptibles de répondre aux obligations imposées au titre de la présente analyse de marché, se fonde sur les dispositions des 1° et 3° de l'article D. 310 du code des postes et des communications électroniques. En l'absence de moyen moins contraignant permettant de rendre possible l'exercice d'une concurrence effective entre les opérateurs sur les marchés de détail à l'échelle du territoire national, dans l'intérêt des utilisateurs, conformément aux objectifs mentionnés au 2° du II de l'article L. 32-1 et à l'article D. 310 du code des postes et des communications électroniques, et compte tenu du b du V de l'article 38 relatif au degré de faisabilité de la fourniture des accès concernés, la mesure est proportionnée au but poursuivi.
(2) Les interfaces de collecte
Lors du précédent cycle d'analyse des marchés du haut débit, deux types de réseaux avaient été principalement déployés par les opérateurs de télécommunications pour le haut débit : les réseaux utilisant l'ATM comme protocole de transmission pour le cœur de réseau, d'une part et, plus récemment, les réseaux « tout IP ». Ces choix d'architecture représentent des investissements lourds, qui ne peuvent être remis en cause que sur un terme long.
France Télécom utilise à ce stade les deux technologies sur son réseau : elle a déployé à la fois un réseau ATM très capillaire et un réseau IP qui présente au moins un point d'entrée par région. Ces deux protocoles de transport sont utilisés par le trafic issu des accès DSL. En effet, les accès DSL produits par France Télécom sont dans un premier temps transportés sur le réseau ATM à travers plusieurs brasseurs, puis convertis en IP par un équipement BAS (« Broadband Access Server ») et transportés ensuite sur le réseau IP de France Télécom.
Or, un troisième mode de collecte, l'Ethernet, est désormais disponible et d'ores et déjà utilisé par un grand nombre d'acteurs. Ethernet apparaît comme une technologie de transmission efficace en termes de coûts et de qualité de service. Cette interface semble aujourd'hui s'imposer comme celle des réseaux de nouvelle génération. Sur les marchés résidentiel et professionnel, les opérateurs sont aujourd'hui à même de proposer des offres adaptés aux besoins de leurs clients, en déployant uniquement des réseaux Ethernet « natifs ».
La collecte Ethernet présente de nombreux avantages. Les équipements sont standardisés et font l'objet d'une demande forte au niveau mondial, ils présentent donc des coûts d'achats relativement faibles. En outre, la collecte Ethernet devrait permettre à terme de fournir des offres à destination du marché tant professionnel que résidentiel et, ce, en présentant une architecture, des coûts d'exploitation et une gestion opérationnelle simplifiée par rapport à la collecte ATM.
De même, du point de vue des réseaux d'accès, il apparaît que, depuis plusieurs mois déjà, les DSLAM achetés par France Télécom et par les opérateurs alternatifs sont majoritairement des DSLAM Ethernet. De même, Orange a déployé des DSLAM Ethernet dans environ 1 000 répartiteurs à la fin de l'année 2007.
Dès lors, il semble nécessaire que cette évolution technologique majeure, structurante pour l'évolution des réseaux au cours des trois prochaines années, se traduise par une évolution des interfaces de livraison proposées dans le cadre des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational.
La livraison des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational proposées à ce stade par France Télécom se fait aujourd'hui selon deux principales modalités, conformément aux obligations imposées dans le cadre du précédent cycle d'analyse des marchés du haut débit :
― en IP, pour des offres destinées in fine au marché résidentiel ;
― en ATM pour des offres destinées in fine soit au marché résidentiel, soit au marché professionnel.
Dans ces conditions, il convient d'examiner quelles modalités d'accès, en termes d'interfaces de livraison, il apparaît justifié et proportionné d'imposer à France Télécom sur ce marché.
L'ARCEP note tout d'abord que le code des postes et des communications électroniques fixe dans l'article L. 32-1-II (13°) que l'ARCEP doit « veiller au respect de la plus grande neutralité possible, d'un point de vue technologique », des mesures qu'elle prend.
Par ailleurs, étant donné les conditions de développement des réseaux en France précisées ci-dessus, restreindre l'offre de gros à un seul type d'interface, ATM, IP ou Ethernet, serait de nature à constituer une barrière à l'entrée pour des acteurs qui auraient fait un autre choix technologique, et limiterait ainsi de fait le développement de la concurrence sur les zones où l'accès au réseau de France Télécom est incontournable.
Notamment, la limitation de l'accès sur le marché de gros de l'accès haut débit activé sur DSL à la seule technologie ATM empêcherait les opérateurs ayant fait un choix d'architecture technique « tout IP » ou Ethernet, et qui déploient sur ces technologies un réseau capillaire, de compléter leur couverture de dégroupage par une offre de gros qui leur permette d'utiliser de façon optimale leur réseau. Cette limitation leur imposerait d'avoir recours à une offre de gros ATM inadaptée à leurs besoins, notamment en termes de dimensionnement et de tarification, et d'investir de plus dans des équipements spécifiques de conversion ATM/IP ou ATM/Ethernet.
L'Autorité note que France Télécom a d'ores et déjà indiqué avoir ouvert une offre en collecte Ethernet pour le marché résidentiel depuis le 1er mai 2008. L'adoption par France Télécom de cette nouvelle interface dans son réseau, au niveau cœur comme au niveau accès, n'est toutefois que partielle et sa généralisation à l'ensemble du territoire n'interviendra vraisemblablement pas avant plusieurs mois, voire plusieurs années.
La fourniture d'une offre en interface Ethernet ne pourra donc se faire que progressivement, à mesure que France Télécom installera dans ses répartiteurs et les nœuds amont de son réseau des équipements permettant d'assurer un tel service, pour ses besoins propres comme pour ceux des clients d'une telle offre.
Enfin, l'Autorité considère que le maintien d'une offre en collecte ATM ne paraît plus proportionnée à terme, compte tenu des coûts d'achat et d'exploitation liés à cette technologie, notamment en comparaison avec la technologie Ethernet. Au cours des prochaines années, une substitution devrait donc s'opérer entre l'ATM et l'Ethernet, tant chez France Télécom que chez les opérateurs alternatifs. Ainsi, dans la mesure où ces deux technologies paraissent substituables d'un point de vue fonctionnel, en matière d'offres DSL à destination d'une clientèle tant résidentielle que professionnelle, les obligations incombant aux offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational doivent tenir compte cette substitution progressive.
Plus précisément, la coexistence d'un grand nombre d'interfaces de livraison n'apparaît ni justifiée ni proportionnée, dès lors que cette coexistence est coûteuse, et que l'Ethernet a vocation à se substituer progressivement à l'ATM.
L'obligation faite à France Télécom de proposer une offre d'accès haut débit activée sur DSL livrée au niveau infranational en collecte ATM pourrait ainsi être levée sur les NRA disposant de DSLAM Ethernet.
Cela ne pourrait toutefois se faire que sous certaines conditions, afin de ne pas mettre en péril les investissements et les plans d'affaire élaborés par les opérateurs alternatifs :
― uniquement sur les NRA ouverts à la collecte Ethernet ;
― sous réserve que la collecte Ethernet permette effectivement de proposer des offres, à destination tant de la clientèle professionnelle que de la clientèle résidentielle, avec des garanties et fonctionnalités équivalentes à la collecte ATM ;
― au terme d'un délai de prévenance raisonnable, en dissociant éventuellement la fermeture commerciale dans un premier temps puis la fermeture technique ;
― moyennant l'existence d'une offre de migration techniquement et financièrement satisfaisante pour les opérateurs alternatifs souhaitant migrer massivement leurs abonnés d'une collecte ATM ou IP vers une collecte Ethernet et sous réserve d'un dimensionnement suffisant par France Télécom de ses DSLAM Ethernet.
En particulier, dans la mesure où la migration de la collecte ATM vers la collecte Ethernet engendrerait pour un opérateur alternatif une augmentation de sa facture récurrente de collecte, la fermeture technique et commerciale, par France Télécom, sur une zone donnée, de l'offre de collecte ATM ne devra pas induire de coûts liés à l'opération de migration « forcée » vers l'Ethernet pour ces opérateurs.
En conséquence, sur le fondement des dispositions de l'article D. 310 (3°) du code, l'Autorité estime nécessaire que France Télécom propose aux opérateurs alternatifs les interfaces de livraison suivantes pour la livraison infranationale de ses offres d'accès haut débit activées sur DSL :
― en IP sur l'ensemble du territoire relevant du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational ;
― en Ethernet pour l'ensemble des répartiteurs équipés de DSLAM permettant une collecte Ethernet ;
― en ATM pour l'ensemble des répartiteurs où les conditions énoncées précédemment ne seraient pas vérifiées.
Au demeurant, cette obligation s'impose sans préjudice du traitement qui pourrait être réservé à toute demande d'accès de livraison de flux sous une autre interface.
Cette obligation permettra de garantir une concurrence loyale et effective. Compte tenu de l'impossibilité pour les opérateurs alternatifs de mettre en place des ressources concurrentielles, du caractère limité des contraintes qu'elle crée en termes d'investissement pour France Télécom, du degré de faisabilité de la fourniture des accès en IP, en Ethernet et en ATM, et de la nécessité de préserver la concurrence à long terme, conformément aux éléments mentionnés aux a à d du V de l'article 38 du code des postes et des communications électroniques, et en l'absence de mesure moins contraignante permettant de garantir, dans les mêmes conditions, la loyauté et l'effectivité de la concurrence, la mesure est proportionnée à l'objectif poursuivi.
(3) Niveau de livraison
L'observation des réseaux déployés par les opérateurs alternatifs en France met en évidence une capillarité accrue de ces réseaux et un déploiement de plusieurs opérateurs alternatifs aux niveaux régionaux et départementaux. En effet, les réseaux de collecte des principaux opérateurs alternatifs présentent désormais un niveau de capillarité élevé du fait de leurs investissements dans le dégroupage. Ce niveau leur permettrait, de manière quasi systématique, de prendre livraison de la collecte à un niveau départemental, quelle que soit la modalité de livraison retenue.
Les offres de gros DSL actuelles de France Télécom proposent deux types de raccordement correspondant à des niveaux tarifaires distincts :
― un niveau « plaque », correspondant à un niveau de type régional, permettant de couvrir le territoire national en raccordant une vingtaine de points du réseau de France Télécom, que ce soit en ATM ou en IP ;
― un niveau « local », correspondant à un niveau de type départemental, disponible uniquement en ATM, permettant de couvrir le territoire national en raccordant une centaine de points du réseau de France Télécom.
L'opérateur peut choisir un nombre de points de raccordement intermédiaire, il dispose alors d'un tarif mixte, relevant pour partie du tarif « local » et pour partie du tarif « plaque ».
Dans ces conditions, il convient d'examiner quelles modalités d'accès, en termes de capillarité des offres de gros, il apparaît justifié et proportionné d'imposer à France Télécom sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
Il apparaît tout d'abord nécessaire, pour garantir le développement d'une concurrence durable dans les zones non dégroupées, de maintenir la disponibilité de la livraison des offres de gros au niveau régional, quelle que soit la technologie de livraison.
En effet, seul ce niveau de capillarité est en mesure de répondre aux besoins d'opérateurs tiers encore peu déployés, et de permettre ainsi le déploiement de réseaux alternatifs favorisant ainsi l'exercice d'une concurrence renforcée sur les marchés de détail du haut débit en DSL. En particulier, le déploiement éventuel par un nouvel entrant d'un réseau capillaire, en vue notamment de faire du dégroupage, est coûteux et, par conséquent, nécessairement progressif. Au cours de ses premières phases de déploiement, un tel opérateur doit pouvoir s'appuyer sur une livraison au niveau régional des offres d'accès haut débit activées sur DSL de France Télécom. Les entrées récentes d'acteurs tels que SFR ou Bouygues Telecom sur le marché du haut débit confirment l'importance de maintenir un niveau de livraison régional.
Au-delà de ce niveau de livraison correspondant à un déploiement minimal des opérateurs, il apparaît également justifié que France Télécom accède aux demandes raisonnables des opérateurs concernant le raccordement pour un réseau plus capillaire, et donc au niveau départemental, dans la mesure où l'ouverture de tels points de raccordement est techniquement faisable pour France Télécom.
En effet, l'existence d'un niveau de livraison plus capillaire, à des tarifs plus attractifs, est une incitation au déploiement d'infrastructures par les opérateurs alternatifs. Une telle prestation leur permet d'utiliser au mieux leurs investissements, en ayant recours dès que possible à leur propre réseau. En pratique, le niveau le plus capillaire des offres de gros proposées par France Télécom doit être accessible pour un nouvel entrant, et non uniquement aux propres filiales ou services de France Télécom, afin de garantir des conditions loyales et non discriminatoires de concurrence sur les marchés avals.
En outre, les flux amenés jusqu'aux clients finaux sont de plus en plus importants. Ceci est dû notamment au développement des sites gratuits de vidéos en ligne (Dailymotion, YouTube, etc.) et d'offres légales d'œuvres musicales et audiovisuelles en ligne. Dès lors, pour réduire leurs coûts de collecte, notamment auprès de France Télécom, et pour éviter une surcharge du réseau de collecte de celle-ci, les opérateurs sont incités à s'interconnecter le plus bas possible dans le réseau de l'opérateur historique.
Les critères a et d énoncés à l'article L. 38-V du code des postes et des communications électroniques, ainsi que l'objectif d'investissement efficace dans les infrastructures, énoncé à l'article L. 32-1, sont ainsi vérifiés.
L'examen des contraintes représentées par la fourniture de ces offres pour France Télécom met en évidence que les niveaux de raccordement aux niveaux départemental et régional sont compatibles avec l'architecture actuelle du réseau ATM de France Télécom. Ils correspondent en effet à un accès à son réseau au niveau des nœuds qui hébergent des équipements de routage des flux permettant d'orienter le trafic vers d'autres nœuds de son réseau : le coût supplémentaire consistant à orienter ces trafics vers le réseau d'opérateurs alternatifs qui viendraient s'y connecter est de fait réduit. En pratique, ces différents niveaux de capillarité des offres de gros sont déjà proposés par France Télécom en ATM au travers des offres DSL Collect ATM et DSL Entreprises.
En ce qui concerne la collecte Ethernet, elle est utilisée par France Télécom pour ses propres besoins sur un nombre restreint de répartiteurs et mise en œuvre sur le marché de gros depuis le 1er mai 2008 pour les offres destinées in fine à la clientèle résidentielle. France Télécom prévoit son extension progressive à un nombre conséquent de répartiteurs au cours des trois prochaines années. Le calendrier du présent cycle d'analyse des marchés du haut débit et très haut débit, s'il venait à imposer à France Télécom de permettre une livraison de la collecte Ethernet au niveau départemental, pourrait permettre à France Télécom d'intégrer cette obligation dans l'architecture technique de son réseau de collecte Ethernet non encore déployé pour un coût supplémentaire réduit. Un délai pourrait cependant être nécessaire pour permettre à France Télécom d'adapter son réseau Ethernet actuel à une collecte départementale, qui pourrait s'avérer profitable au secteur.
En outre, l'Ethernet apparaît comme la technologie la plus pérenne pour se substituer à terme à l'ATM. Or, l'ATM étant actuellement livrée aux niveaux départementaux et régionaux, la livraison de l'Ethernet à ces deux niveaux apparaît comme une condition nécessaire à la levée de l'obligation pour France Télécom de fournir une livraison ATM pour les accès vérifiant les conditions énoncées dans la partie précédente relative aux interfaces de collecte.
En revanche, la mise en place d'un niveau de livraison départementale paraît plus difficile en IP, dans la mesure où France Télécom a mis en œuvre historiquement une architecture ne permettant qu'une livraison au niveau régional, qu'il s'avérerait complexe de faire évoluer. L'ouverture d'une offre de collecte IP au niveau départemental impliquerait en effet d'augmenter significativement le nombre de sites munis de BAS (Broadband Access Server) mis en œuvre par France Télécom, ce qui rendrait non proportionnée l'obligation de livrer la collecte à un niveau départemental dans le cas de l'IP.
Par ailleurs, l'Autorité note que les opérateurs peuvent être souscripteurs auprès de France Télécom de plusieurs prestations distinctes d'accès haut débit livrées au niveau infranational, comme des offres professionnelles et des offres résidentielles, par exemple. Afin de favoriser une mutualisation des investissements et une rationalisation des architectures techniques, une homogénéisation des points de raccordement proposés au titre des différentes offres pourrait être garantie dans la mesure où elle est techniquement faisable.
Enfin, conformément à l'analyse présentée dans la partie « prestations existantes », il convient de s'assurer que les offres formulées maintiennent les points de raccordement actuels, afin de ne pas déstabiliser les plans d'investissement et les stratégies de déploiement mises en place dans l'ancien cadre par les opérateurs alternatifs.
Le critère de faisabilité de l'accès, énoncé à l'article L. 38-V (b) du code des postes et des communications électroniques est ainsi vérifié.
Dans ces conditions, sur le fondement de l'article D. 310 (1°) du code des postes et des communications électroniques, l'analyse concurrentielle conduit l'Autorité à proposer de mettre à la charge de la société France Télécom l'obligation de fournir aux opérateurs, en ATM et en Ethernet :
― une offre d'accès haut débit activée sur DSL permettant une couverture nationale à travers un raccordement régional, en une vingtaine de points ;
― une offre d'accès haut débit activée sur DSL permettant une couverture nationale à travers un raccordement départemental en une centaine de points ; dans le cas de la collecte Ethernet, France Télécom devrait être en mesure de la mettre en œuvre dans un délai raisonnable au regard de la demande des opérateurs.
En ce qui concerne la collecte IP, sur le fondement de l'article D. 310 (1°) du code des postes et des communications électroniques, l'analyse concurrentielle conduit l'Autorité à proposer de mettre à la charge de la société France Télécom l'obligation de fournir aux opérateurs une offre d'accès haut débit activée sur DSL permettant une couverture nationale à travers un raccordement régional, en une vingtaine de points.
France Télécom devra autant que faire se peut homogénéiser les points de raccordement proposés au titre de ces différents modes de collecte.
Edictée dans le but de garantir une concurrence durable, en particulier sur les zones non dégroupées, et l'égalité des conditions de concurrence, et en l'absence de mesures moins contraignantes pour France Télécom, cette obligation est proportionnée aux objectifs poursuivis précités, et notamment de loyauté et d'effectivité de la concurrence, compte tenu des éléments mentionnés aux a, b et d du V de l'article 38.
(4) Offres d'accès haut débit activées avec service de téléphonie commutée
et sans service de téléphonie commutée
L'apparition de l'offre de gros DSL Access Only de France Télécom (dite d'« ADSL nu ») à l'été 2006 a contribué à l'uniformisation fonctionnelle des offres haut débit sur l'ensemble du territoire : il est désormais possible pour un client final éligible à l'ADSL de s'affranchir de l'abonnement au réseau téléphonique commuté classique quelle que soit sa localisation géographique.
Depuis cette date, deux principales offres de gros de France Télécom permettent donc aux opérateurs alternatifs de proposer à leurs clients de s'affranchir de l'abonnement au réseau téléphonique commuté traditionnel. Il s'agit du dégroupage total dans les zones dégroupées et de l'« ADSL nu », dans les zones non dégroupées.
Ces offres portent aujourd'hui la croissance du marché et se substituent de plus en plus aux offres de gros nécessitant le maintien d'un abonnement téléphonique distinct, à savoir le dégroupage partiel et l'offre DSL Access. En particulier, l'offre de gros DSL Access Only, dite d'ADSL nu, porte aujourd'hui l'essentiel de la croissance du parc d'accès haut débit sur DSL livré au niveau infranational. Elle contribue à un effet de rattrapage entre les zones dégroupées et non dégroupées, en termes de taux de pénétration et d'usages.
Au cours des trois dernières années, le parc des offres de gros sans abonnement au service téléphonique achetées à France Télécom a progressé de 5 millions d'accès.
En outre, la faisabilité technique d'une offre d'ADSL nu pour France Télécom est relativement aisée sur le marché de gros dès lors qu'elle propose des offres d'ADSL nu sur le marché de détail résidentiel et qu'une telle offre existe d'ores et déjà dans le cadre de l'offre de référence « accès et collecte DSL » de France Télécom.
Par ailleurs, une part significative des clients finaux souhaitant pouvoir conserver un abonnement au réseau téléphonique commuté en parallèle de leur abonnement haut débit, il est nécessaire que France Télécom continue à proposer une offre d'accès haut débit activée avec service de téléphonie commutée, dans la continuité de ce qu'elle propose à ce jour via l'offre DSL Access.
La faisabilité de l'accès et le caractère limité des investissements correspondant critères cités à l'article L. 38-V (b et c) du code, sont ainsi vérifiés.
En conséquence, afin de renforcer la concurrence au bénéfice des utilisateurs finaux, l'Autorité considère que la société France Télécom doit être tenue, conformément aux dispositions de l'article D. 310 (1° et 3°) du code, de proposer aux opérateurs :
― une offre d'accès haut débit activée avec service de téléphonie commutée ;
― une offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée.
Compte tenu des dispositions de l'article L. 38-V (a, b, c et d) du code et en l'absence de mesures moins contraignantes permettant d'atteindre le même objectif, l'obligation imposée à France Télécom n'est pas disproportionnée.
(5) Offre professionnelle et offre résidentielle
Les opérateurs alternatifs développent des offres de détail fondées sur des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational à la fois pour la clientèle résidentielle et pour la clientèle professionnelle. France Télécom propose elle aussi ces deux types de solutions, à travers Orange Business Services s'agissant de la clientèle professionnelle, et Orange pour la clientèle résidentielle. Ces deux types d'offres, si elles correspondent à des prestations techniques voisines, se distinguent nettement en termes d'options ou caractéristiques additionnelles, notamment en termes de qualité de service et de garantie du débit.
Pour un opérateur alternatif, la qualité de service dépend à la fois des services et paramètres qu'il contrôle lui-même et de la qualité de service propre de l'offre de gros de France Télécom.
Ainsi, afin de pouvoir commercialiser leurs produits auprès de clients résidentiels et professionnels, et concurrencer les offres aval de France Télécom, les opérateurs alternatifs doivent bénéficier d'offres de gros répondant aux besoins de ces deux types de clientèles, résidentielle et professionnelle.
Pour France Télécom, la fourniture de ces deux types d'offres de gros ne constitue pas une charge excessive. Le réseau sous-jacent à la fourniture de ces deux catégories d'offres est le même, seuls diffèrent les niveaux de qualité de service et de garantie du débit. Or, le réseau de France Télécom est conçu pour gérer de multiples offres avec des paramétrages de qualité de service variés qui sont commercialisés sur les marchés de détail résidentiel et professionnel.
De plus, France Télécom propose d'ores et déjà ces deux types d'offres de gros, à travers l'offre DSL Entreprises répondant aux besoins de la clientèle professionnelle, et les offres DSL Access, DSL Collect ATM et DSL Collect IP pour les offres à destination de la clientèle résidentielle.
Il ressort de ces éléments que les critères cités aux alinéas a et b de l'article L. 38-V du code des postes et des communications électroniques sont ainsi vérifiés. En tenant compte de ces éléments, cette obligation n'est pas disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi et des contraintes qu'elle fait peser sur France Télécom.
Les sujétions imposées à France Télécom permettent d'atteindre les objectifs visés par l'article L. 32-1 précité sans qu'il puisse exister un quelconque rapport de disproportion. En effet, nonobstant l'existence actuelle de ce type d'offres, la présente obligation tient compte, d'une part, de l'impossibilité pour les opérateurs alternatifs de mettre en place des ressources concurrentes et, d'autre part, du niveau d'investissement initial réalisé par France Télécom. Cette obligation prend également en considération la nécessité de préserver la concurrence à long terme.
Par suite, conformément à l'article D. 310 (1°) et (3°) du code, l'Autorité estime qu'il est nécessaire que la société France Télécom propose aux opérateurs :
― une offre adaptée à la clientèle de détail résidentielle ;
― une offre adaptée à la clientèle de détail professionnelle.
(6) Offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie
commutée par transfert de ligne avec portabilité du numéro
La capacité pour un opérateur alternatif à demander, lors d'une commande d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée, c'est-à-dire une commande d'ADSL nu, pour une ligne active qui supporte un service téléphonique, la portabilité du numéro de téléphone est une condition nécessaire à la fluidité du marché et à l'établissement du jeu de la concurrence. Un changement de numéro peut en effet constituer un frein important au changement d'opérateur. La portabilité des numéros en cas de changement d'opérateur est par ailleurs un droit reconnu aux abonnés par l'article L. 44 du code des postes et des communications électroniques.
Cette portabilité doit donc se faire dans les conditions les plus transparentes possibles pour l'abonné final changeant d'opérateur : les processus de livraison de l'accès en ADSL nu et de portabilité doivent donc être synchronisés, afin que le délai de coupure du service téléphonique soit le plus court possible.
L'absence de garantie d'un délai de coupure maximal pourrait être fortement préjudiciable à l'attractivité des offres d'ADSL nu pour les consommateurs et donc au développement de cette offre durant les prochaines années en France.
La synchronisation entre différentes opérations techniques mentionnée ici représente une contrainte technique limitée pour France Télécom : il s'agit d'optimiser et d'organiser ses processus pour permettre cette synchronisation, ce qui est au demeurant une opération couramment proposée par France Télécom dans le cadre d'accords commerciaux de détail, par exemple dans certains cas de déménagements.
Cette obligation est cohérente avec les processus mis en œuvre actuellement par France Télécom, qui s'engage, dans son offre de référence d'accès et de collecte DSL, à effectuer, dans quatre-vingt-dix pour cent des cas, la production de l'accès en DSL Access Only et la mise en œuvre de la portabilité dans la même journée.
Au regard des critères énumérés à l'article L. 38-V, notamment aux a et d, et en l'absence de mesures moins contraignantes qui permettraient d'atteindre le même but, l'Autorité considère comme proportionné, eu égard aux objectifs précités de l'article L. 32-1-II du code, et notamment celui de protection des consommateurs, que France Télécom propose aux opérateurs un processus effectif de synchronisation de la livraison de l'accès en ADSL nu et de la portabilité du numéro, et s'engage à garantir un délai de coupure maximum, permettant de minimiser le délai de coupure du client final.
(7) Offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie
commutée par reprise de ligne et par création de ligne
Le réseau de boucle locale de France Télécom comporte deux types de paires de cuivre présentant une continuité métallique de bout en bout : celles qui supportent un service de communications électroniques, et celles qui sont inactives, suite à un déménagement par exemple. Par ailleurs, le réseau de boucle locale de France Télécom comprend des tronçons de paires de cuivre qui, s'ils sont aboutés, constituent une nouvelle paire de cuivre. La création d'une telle nouvelle paire de cuivre peut nécessiter, le cas échéant, dans la seule partie branchement, le déploiement d'un câble supplémentaire.
Ces trois types de lignes doivent être accessibles par l'offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée. En effet, comme pour le dégroupage total, un opérateur alternatif ne peut mettre en place dans des conditions économiquement viables des ressources concurrentes au réseau d'accès cuivre de France Télécom.
De plus, France Télécom utilise pour ses propres besoins de détail sur le marché résidentiel ces trois types de paires de cuivre. Notamment, les paires inactives sont utilisées en cas d'emménagement d'un nouveau client dans le local desservi. Des paires inactives ou des paires créées par aboutement de tronçons existants sont aussi utilisées par France Télécom pour produire l'offre DSL Entreprises.
En outre, l'offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée pour les paires inactives, les paires ne supportant pas de service, et les paires créées par aboutement de tronçons, est indispensable pour garantir l'égalité des conditions de concurrence entre France Télécom et les opérateurs alternatifs dans le cas où un client emménage dans un nouveau local et souhaite s'abonner à des services de communications électroniques filaires.
Un refus de fournir des accès haut débit activés sur DSL constitués par des tronçons de paires existants ou nécessitant le déploiement d'une capacité supplémentaire ne pourrait être justifié au regard de la faisabilité technique puisque France Télécom en réalise pour ses propres besoins.
Il ressort de ces éléments que les critères cités aux alinéas a, b et d de l'article L. 38-V du code des postes et des communications électroniques sont ainsi vérifiés.
Par conséquent, eu égard aux conséquences sur la concurrence, notamment pour les services aux clients professionnels, il y a lieu pour l'Autorité d'imposer à France Télécom de prévoir dans son offre de référence, comme elle le fait déjà, les prestations suivantes :
― offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée pour les paires qui supportent un service de communications électronique ;
― offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée pour les paires inactives, préexistantes de bout en bout ;
― offre d'accès haut débit activée sans service de téléphonie commutée pour les paires nouvelles créées entre le répartiteur principal et le point de terminaison du réseau dans les locaux de l'abonné. La création de ces paires nouvelles est effectuée par l'aboutement de tronçons existants et peut nécessiter, le cas échéant, le déploiement d'un câble supplémentaire (désaturation).
Au regard de l'objectif poursuivi et visant à établir les conditions d'égalité des opérateurs dans la concurrence, et en tenant compte des éléments mentionnés au a, b et d du V de l'article 38, la mesure constitue le minimum nécessaire pour atteindre les objectifs développés ci-dessus, et est ainsi proportionnée.
(8) Offre monocanal et bicanal pour la voix sur large bande
Les services de détail qui peuvent être fournis sur un accès haut débit sur DSL se multiplient. Les opérateurs proposent de plus en plus, outre un accès à haut débit à l'Internet, des offres de téléphonie fixe ou mobile, ou encore des offres de services audiovisuels. Etant donné le rythme de l'innovation technologique et marketing constaté sur ces marchés, il est certain que ces offres s'étofferont encore dans les trois années à venir.
En particulier, en dehors des zones de dégroupage, les opérateurs ne sont en mesure de concurrencer avec une qualité de service satisfaisante les offres de détail d'Orange incluant un service de voix sur large bande que s'ils ont accès à une offre de gros d'accès haut débit sur DSL bicanal, l'un des canaux transportant le trafic Internet et l'autre étant adapté au transport de la voix. En l'absence d'alternative technique à l'utilisation des ressources de France Télécom pour ce faire, le critère énoncé au a de l'article L. 38-V est vérifié.
En outre, la faisabilité technique de telles offres de gros pour France Télécom est relativement aisée dès lors qu'un paramétrage bicanal est prévu pour les offres de détail de France Télécom : ces offres de gros utilisent le même réseau que les offres monocanal, avec le paramétrage et la technique développés pour les offres de détail multiservices. France Télécom propose d'ailleurs d'ores et déjà de telles offres bicana sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
La faisabilité de l'accès et le caractère limité des investissements correspondants, critères cités à l'article L. 38-V (b et c) du code, sont ainsi vérifiés.
En conséquence, afin de renforcer la concurrence au bénéfice des utilisateurs finaux, l'Autorité considère que la société France Télécom doit être tenue, conformément aux dispositions de l'article D. 310 (1°) et (3°) du code, de proposer aux opérateurs :
― une offre monocanal, adaptée à la fourniture d'accès à Internet seul ;
― une offre bicanal, adaptée notamment à la fourniture couplée d'accès Internet et d'accès de type voix sur large bande.
Compte tenu des dispositions de l'article L. 38-V (a, b, c et d) du code et en l'absence de mesures moins contraignantes permettant d'atteindre le même objectif, l'obligation imposée à France Télécom n'est pas disproportionnée.
(9) Offre permettant de fournir des services de télévision en Ethernet
Suite à la généralisation des offres « triple play » en zones dégroupées à des tarifs attractifs, les consommateurs s'attendent à ce que des services audiovisuels soient proposés de façon plus large.
Or, l'extension géographique du dégroupage ne suffira pas à généraliser ces services sur l'ensemble du territoire.
Dès lors, l'Autorité a consulté les acteurs sur la mise en place par France Télécom, dans le cadre des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, d'une prestation permettant aux opérateurs alternatifs de fournir des services de télévision en dehors des zones dégroupées.
L'émergence d'une telle offre pourrait en effet avoir un impact positif sur le secteur :
― en augmentant l'attractivité des offres de détail en zones non dégroupées, cela pourrait se traduire par une hausse significative du taux de pénétration du haut débit dans ces zones ;
― par suite, dans la mesure où l'un des principaux critères de dégroupage d'un répartiteur pour un opérateur alternatif est son nombre de clients sur ce répartiteur, elle pourrait conduire à rendre économiquement rentable à terme le dégroupage de certains répartiteurs supplémentaires ;
― les services audiovisuels constituent des revenus additionnels de plus en plus significatifs pour les fournisseurs d'accès à Internet.
L'absence d'une telle offre s'explique notamment dans la mesure où les accès haut débit sur DSL commandés à France Télécom par les opérateurs alternatifs ne sont pas construits actuellement sur des DSLAM Ethernet, alors que la quasi-totalité des offres de télévision par ADSL disponibles aujourd'hui en zones dégroupées reposent sur ces équipements. En effet, l'Ethernet est la seule technologie permettant de proposer, dans des conditions techniques et économiques satisfaisantes, la diffusion de services audiovisuels en mode « multicast » (c'est-à-dire une émission unique du signal vers plusieurs récepteurs, uniquement en cas de « demande » par ces récepteurs). Le mode « multicast », actuellement mis en œuvre par les opérateurs pour leurs offres de télévision dans les zones dégroupées s'oppose à l'« unicast », c'est-à-dire une diffusion en mode « point à point », beaucoup trop coûteuse en termes de flux à acheminer.
Dans ce contexte, l'Autorité a ainsi envisagé la mise en œuvre par France Télécom, sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, d'une prestation « multicast » en collecte Ethernet permettant aux opérateurs alternatifs de proposer sur le marché de détail une offre de télévision sur ADSL. Celle-ci pourrait cependant ne pas être aussi riche qu'en zones dégroupées compte tenu de contraintes techniques comme le nombre maximal de chaînes pouvant être gérées par les DSLAM.
Sur un plan technique, cette prestation consisterait à transporter les chaînes de télévision des opérateurs tiers en multicast par la mise à disposition d'un VLAN spécifique par opérateur, comme le fait Orange pour ses offres de détail « triple play » sur la base de la technologie Ethernet. En pratique, d'autres opérateurs proposent déjà des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL incluant de telles prestations.
Néanmoins, il apparaît disproportionné d'imposer à ce stade à France Télécom d'engager des négociations de bonne foi avec les opérateurs alternatifs pour fournir une telle prestation, dans la mesure où :
― France Télécom s'est engagée à trouver une solution de raccordement passive pour les opérateurs tiers, via l'offre LFO, dans le cas particulier où un répartiteur était équipé par France Télécom pour fournir des services de télévision ;
― France Télécom a annoncé qu'elle utiliserait une solution de télévision par satellite en complément de couverture de ses offres actuelles de télévision par ADSL, en particulier les zones non dégroupées.
Toutefois, en cas d'évolution significative de la structure des acteurs ou des offres permettant de proposer des services audiovisuels aux clients finaux, l'Autorité pourra être amenée à revoir les obligations imposées sur ce point dans le cadre de l'analyse des marchés.
(10) Migrations inter et intra-offres
Pour fournir des accès haut débit sur DSL à leurs clients finaux, potentiellement situés sur l'ensemble du territoire, les opérateurs alternatifs utilisent plusieurs offres de gros de France Télécom, comme les offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées aux niveaux national ou régional et le dégroupage.
Les évolutions technologiques, les choix d'architecture et les besoins spécifiques de tel ou tel type de clientèle peuvent impliquer des modifications dans le choix des offres de gros achetées par les opérateurs. Notamment, un opérateur peut avoir besoin d'offres de plus en plus capillaires, suivant les investissements, nécessairement progressifs, qu'il consent dans de nouvelles infrastructures et de nouveaux raccordements au réseau de France Télécom.
Lorsqu'il choisit une nouvelle prestation de gros, un opérateur peut basculer l'intégralité de son parc existant vers cette nouvelle prestation à l'aide d'une offre de migration. Ces migrations inter-offres lui permettent donc tout d'abord de rentabiliser les coûts, essentiellement fixes, d'ouverture d'une zone à une offre capillaire non seulement sur les flux de nouveaux abonnés mais aussi sur le parc existant.
Elles sont de plus une condition nécessaire à la fluidité du marché et à l'établissement du jeu de la concurrence sur la base d'abonnés la plus vaste possible. En effet, étant donné la position historique forte et l'avance de France Télécom sur les marchés du haut débit, les offres de migrations représentent un élément structurant de l'établissement de la concurrence, en faisant porter la concurrence non seulement sur les nouveaux abonnés mais aussi sur le parc existant.
L'Autorité constate que France Télécom est seule à même de procéder à ces migrations, étant l'opérateur qui fournit les deux offres de gros entre lesquelles la migration a lieu : l'opérateur client ne peut techniquement y procéder lui-même.
Par ailleurs, les offres de migration ne correspondent pas à des investissements supplémentaires de la part de France Télécom, mais sont une déclinaison des commandes d'accès classiques.
Enfin, elles sont même souvent plus simples que les commandes d'accès, puisqu'elles se réduisent dans certains cas à des manipulations logicielles et non physiques. De telles offres sont proposées aujourd'hui par France Télécom.
Au regard de ces éléments, les critères cités à l'article L. 38-V (a, b et c) du code sont ainsi vérifiés.
Ainsi, en application des dispositions de l'article D. 310 (1°) du code, l'Autorité considère que la société France Télécom doit être en mesure de proposer aux opérateurs des offres de migration a minima :
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sans service de téléphonie commutée sur DSL livrées au niveau infranational vers le dégroupage total ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées avec service de téléphonie commutée sur DSL livrées au niveau infranational vers le dégroupage partiel ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et destinées in fine à la clientèle professionnelle vers le dégroupage total avec garantie de temps de rétablissement ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau national vers ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau régional vers ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau départemental ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational en collecte IP ou ATM vers ses offres de gros d'accès haut débit sur DSL activées livrées au niveau infranational en collecte Ethernet ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées livrées au niveau infranational en ADSL vers ses offres de gros d'accès haut débit activées livrées au niveau infranational en ADSL2+ ;
― de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational en mode monocanal vers ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational en mode bi-canaux.
Il résulte de ce qui précède que cette obligation n'est pas disproportionnée, compte tenu des éléments mentionnés aux a à c du V de l'article 38 et des objectifs fixés par l'article L. 32-1 précité, et en l'absence de mesures moins contraignantes qui permettraient d'atteindre le même but.
A ce jour, les migrations internes aux offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational sont facturées à l'acte, à des tarifs distincts selon qu'un changement de carte et/ou de DSLAM est nécessaire. Il s'agit notamment :
― des migrations d'un mode de collecte vers un autre ;
― des migrations de l'ADSL vers l'ADSL2+ ;
― des migrations des accès mono-VC vers les accès bi-VC ;
― des migrations liées à des changements de débits.
Ce type d'opérations faisant partie de l'évolution naturelle du parc d'accès des opérateurs alternatifs, il convient, sauf mention contraire, que France Télécom intègre les coûts correspondants dans le calcul de ses coûts récurrents pour fournir ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, en supprimant de fait un mode de tarification à l'acte pour ces migrations. Une telle évolution permettra de lever pour les opérateurs les freins financiers aux migrations vers des technologies pérennes et efficaces, au bénéfice du consommateur final, tout en assurant à France Télécom de recouvrer ses coûts.
En pratique, France Télécom étant soumise à une double obligation d'orientation vers les coûts et de proscription des tarifs d'éviction (voir partie IV.6), les tarifs des prestations des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational peuvent être supérieurs aux coûts encourus par France Télécom. A ce titre, les comptes séparés publiés par France Télécom pour l'année 2006 au titre de la séparation comptable ont montré que France Télécom était bénéficiaire sur le marché concerné.
Dès lors que les coûts encourus par France Télécom (y compris coûts de migration) pour les prestations récurrentes seraient inférieurs au niveau du tarif de non-éviction pour ces prestations, cette prise en compte des coûts de migration ne conduirait donc pas en pratique à une hausse des tarifs récurrents.
(11) Colocalisation des équipements et raccordement des réseaux
Deux modes de livraison des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational peuvent être envisagées et existent aujourd'hui :
― une livraison du trafic à l'opérateur alternatif au niveau du site de France Télécom ;
― une livraison du trafic au niveau du point de présence le plus proche de l'opérateur alternatif.
Dans le premier cas, une prestation de colocalisation des équipements de l'opérateur alternatif dans les sites de France Télécom est nécessaire pour rendre l'offre d'accès haut débit sur DSL livrée au niveau infranational opérationnelle. Dans le second cas, une prestation de raccordement du point de présence de l'opérateur au site de France Télécom doit être fournie.
Ces deux solutions apparaissent comme nécessaires et complémentaires, en répondant à des logiques techniques et économiques distinctes. La première offre est pertinente pour les opérateurs dont le réseau est étendu jusqu'au site de France Télécom. Son coût pour l'opérateur est essentiellement fixe, et elle est donc adaptée pour les sites à fort volume.
La seconde, dans laquelle l'opérateur n'investit pas lui-même dans le lien entre son point de présence et le site France Télécom, mais utilise le réseau de France Télécom pour ce faire, représente des coûts variables et récurrents et se prête à des volumes de trafic plus faibles.
En l'absence de ces offres de colocalisation ou de raccordement du point de présence de l'opérateur, l'offre d'accès haut débit activée sur DSL livrée au niveau infranational serait vidée de son sens puisque l'opérateur client ne pourrait pas en prendre livraison : elles constituent le lien entre l'offre d'accès proprement dite utilisant le réseau de France Télécom et le réseau de l'opérateur qui en est client.
Ces deux offres apparaissent donc comme des prestations associées à l'accès sur le présent marché, en ce qu'elles sont indispensables pour rendre effective l'utilisation des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational.
L'Autorité note que ces deux catégories d'offres sont d'ores et déjà proposées par France Télécom pour ses offres de gros, sur le haut débit comme sur l'interconnexion, ce qui atteste la faisabilité de la fourniture de ces prestations associées.
Par ailleurs, le recours à des ressources concurrentes est très limité pour les opérateurs alternatifs. Pour ce qui est des solutions de colocalisation dans les bâtiments de France Télécom, seule France Télécom est à même de les proposer. Pour ce qui est des solutions de raccordement distant, elles peuvent être dans certains cas proposées par des opérateurs tiers ayant étendu leur réseau propre jusqu'au site de France Télécom.
Cependant, ce cas de figure n'est pas systématique : le réseau de cet opérateur tiers peut ne pas raccorder le point de présence de l'autre opérateur ; de plus, seule une partie des sites de France Télécom est concernée. Ainsi, au regard de la capillarité du réseau de France Télécom, qui dessert l'intégralité des sites de raccordement pour le haut débit et des points de présence des opérateurs, elle seule est à même de fournir dans tous les cas ces liens de raccordement.
Au regard de ces éléments, les critères a et b de l'article L. 38-V du code des postes et des communications électroniques sont ainsi vérifiés. Enfin, certaines modalités concernant ces prestations connexes de raccordement du réseau de France Télécom peuvent être précisées. Dans une perspective d'efficacité, il convient d'assurer la mutualisation de l'ensemble des ressources déployées sur un site, au titre des différentes options des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational ou au titre des prestations d'interconnexion ou de dégroupage, et ce afin de ne pas dupliquer inutilement les ressources. Cette mutualisation est source d'économie de ses ressources pour France Télécom. Elle améliore l'efficacité économique du dispositif mis en place pour l'ensemble des opérateurs.
De même, il est souhaitable pour favoriser l'efficacité des investissements dans les infrastructures de permettre la mutualisation de ressources entre différents opérateurs. Cette mutualisation minimise les ressources mobilisées par France Télécom pour le compte des opérateurs alternatifs et permet une réduction des coûts au bénéfice de l'ensemble des acteurs, y compris France Télécom.
Au regard de ce qui précède, l'Autorité estime qu'il est nécessaire, sur le fondement de l'article D. 310 (6°) du code des postes et des communications électroniques, que la société France Télécom propose aux opérateurs une offre de colocalisation des équipements, d'une part, et de raccordement des points de livraison, d'autre part, en tant que ressources associées à l'accès sur le marché de gros des offres infranationales.
Les solutions proposées par France Télécom ne devront pas restreindre artificiellement les possibilités de mutualisation des ressources déployées, au titre de différentes offres ou par différents opérateurs, sur un site donné.
Edictée dans le but de permettre l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques, l'obligation imposée à France Télécom constitue le minimum nécessaire permettant d'atteindre ce but, compte tenu, dans l'appréciation de l'Autorité, des éléments mentionnés à l'article L. 38-V (a, b et c).
(12) Informations préalables
Afin de réaliser des choix pertinents en matière de déploiement et d'offre commerciale, les opérateurs ayant recours aux offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational de France Télécom doivent avoir accès à des informations préalables concernant ces offres. L'accès à ces informations est primordial, puisqu'il est nécessaire pour garantir l'effectivité des différentes prestations d'accès proposées par France Télécom sur le présent marché ; c'est un moyen associé à l'accès au réseau proprement dit.
Ces informations peuvent être scindées en deux catégories.
Une première catégorie d'informations permet aux acteurs intéressés par l'offre de gros de France Télécom d'identifier les investissements qu'ils devront consentir pour pouvoir utiliser l'offre de France Télécom ainsi que la clientèle à laquelle ils auront accès selon leur architecture de raccordement. Cette catégorie d'informations doit être mentionnée à l'offre de référence publique ; ce point sera traité au paragraphe II.C sous la rubrique « Publication d'informations préalables ».
Dans un deuxième temps, les opérateurs déjà clients de l'offre ont besoin d'informations plus fines, notamment pour optimiser leurs ressources ou encore adapter, en fonction des caractéristiques de la ligne du client final, l'offre technique et tarifaire qu'ils peuvent lui proposer.
Ces informations recouvrent notamment des données précises concernant chaque ligne afin que l'opérateur soit en mesure, pour un client donné, d'estimer le tarif correspondant et de lui proposer en conséquence une offre adaptée. Dans ce cadre, ces informations sont a minima les suivantes :
― informations permettant de déterminer l'éligibilité de la ligne aux différents débits et différents services ;
― informations permettant de déterminer le rattachement de la ligne à une zone donnée ;
― tarif de la ligne au regard du déploiement de l'opérateur.
Il s'agit aussi d'informations à la maille du répartiteur, afin notamment de permettre à un opérateur de dimensionner correctement les conduits de collecte qu'il commande, le cas échéant, sur chaque répartiteur. Il peut aussi s'agir d'informations nécessaires à la planification et à l'évaluation du coût des migrations entre différentes offres.
De façon plus générale, un certain nombre d'informations préalables sont liées à chaque prestation proposée par France Télécom au titre des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational. En l'absence de ces informations, l'opérateur client ne peut pas mettre en œuvre ces offres de gros : elles sont une condition sine qua non de l'effectivité des offres d'accès.
L'Autorité note par ailleurs que la mise à disposition de ce type d'informations reste peu coûteuse pour France Télécom.
Ainsi, s'agissant de l'obligation de mise à disposition d'informations préalables à l'accès, les critères énoncés à l'article L. 38-V (c et d) du code des postes et des communications électroniques sont vérifiés.
Cette obligation est proportionnée compte tenu notamment de la nécessité de préserver la concurrence à long terme mentionnée au c du V de l'article L. 38 du code des postes et des communications électroniques et du faible coût qu'elle représente pour France Télécom.
Au regard de ce qui précède, sur le fondement de l'article L. 38-I (3°) qui permet à l'Autorité d'imposer à l'opérateur puissant l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des moyens associés et afin de répondre aux objectifs fixés à l'article L. 32-1 (2° et 4°) précité du code, France Télécom devra donner accès sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational aux informations préalables nécessaires à la mise en œuvre effective des offres de gros.
3. Obligation de fournir l'accès dans des conditions non discriminatoires
L'article L. 38-I (2°) du code des postes et des communications électroniques prévoit la possibilité d'imposer une obligation de non-discrimination à un opérateur réputé exercer une influence significative.
L'article D. 309 du code précise que les obligations de non-discrimination font notamment en sorte que « les opérateurs appliquent des conditions équivalentes dans des circonstances équivalentes aux autres opérateurs fournissant des services équivalents, et qu'ils fournissent aux autres des services et informations dans les mêmes conditions et avec la même qualité que ceux qu'ils assurent pour leurs propres services, ou pour ceux de leurs filiales ou partenaires ».
Le principe de non-discrimination s'oppose ainsi notamment à ce que, sur le plan tarifaire, France Télécom valorise différemment les mêmes éléments de son réseau, ou utilise des règles d'allocation des coûts distincts, pour les prestations utilisées en interne et celles proposées sur les marchés de gros. Il s'oppose en particulier à ce que les offres de gros de France Télécom soient dimensionnées de sorte qu'elles ne soient accessibles aux conditions les plus avantageuses que pour ses propres services ou filiales. Sur le plan technique, il porte notamment sur la qualité de service des offres, leur richesse fonctionnelle, ainsi que la fourniture d'informations préalables à l'utilisation de ces offres d'accès.
De la même façon, un traitement discriminatoire d'opérateurs se trouvant dans des situations équivalentes aurait pour conséquence d'affaiblir la dynamique concurrentielle sur le marché de détail, en favorisant artificiellement telle ou telle situation ou choix stratégique.
France Télécom est un opérateur verticalement intégré, actif sur les marchés amont et aval du marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational. Il est présent à travers la marque Orange Business Services, notamment, sur le marché de détail de l'accès haut débit et très haut débit à destination d'une clientèle professionnelle, et à travers la marque Orange sur le marché résidentiel.
Or, en tant qu'opérateur verticalement intégré, France Télécom utilise les mêmes ressources amont pour produire, d'une part, ses propres offres de détail et, d'autre part, les offres de gros destinées à ses concurrents pour construire leurs offres de détail.
Dans ces conditions et en l'absence d'une obligation de non-discrimination, France Télécom pourrait être incitée à offrir à ses concurrents des conditions techniques ou tarifaires moins avantageuses que celles qu'elle s'accorde à elle-même, à ses filiales ou à ses partenaires.
Notamment, d'un point de vue tarifaire, France Télécom a intérêt à favoriser les offres pour lesquelles elle contrôle une grande partie de la chaîne de valeur par rapport aux offres de gros moins agrégées comme le dégroupage ou les offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, d'autant que ces offres servent de support à ses concurrents sur les marchés aval.
D'un point de vue technique, si France Télécom est incitée sur les marchés de détail à fournir des offres de bonne qualité à ses clients, elle y est moins incitée en revanche sur les marchés de gros pour lesquels sa clientèle d'opérateur est captive, comme le dégroupage ou les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational.
Or, l'exercice d'une telle discrimination pourrait avoir pour effet de limiter artificiellement l'attractivité des offres des concurrents de France Télécom sur les marchés aval, par rapport au niveau de qualité et de tarif des offres du groupe France Télécom sur ces mêmes marchés. Elle serait ainsi fortement préjudiciable au développement de la concurrence sur les marchés aval.
Il n'apparaît pas que les conditions de fonctionnement des marchés du haut débit et très haut débit aient évolué dans un sens qui change ces incitations par rapport à ce qui a prévalu par le passé.
Il apparaît en conséquence nécessaire, sur le fondement de l'article D. 309 précité du code, d'imposer à France Télécom de fournir l'accès sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational dans des conditions non discriminatoires.
Cette obligation ne saurait être considérée comme disproportionnée dans la mesure où elle constitue le minimum nécessaire permettant d'atteindre les objectifs visés à l'article L. 32-1-II et en particulier à ceux visant à garantir « l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques » et « l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des opérateurs ».
4. Obligation de transparence et de publication d'informations concernant l'accès
Conformément au 1° de l'article L. 38-I du CPCE, les opérateurs réputés exercer une influence significative sur le marché peuvent se voir imposer une obligation de transparence consistant notamment à « rendre publiques des informations concernant l'interconnexion ou l'accès, notamment publier une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion ou d'accès lorsqu'ils sont soumis à des obligations de non-discrimination ; l'Autorité de régulation des télécommunications peut imposer, à tout moment, des modifications à une telle offre pour la mettre en conformité avec les dispositions du présent code. L'opérateur communique à cette fin à l'Autorité de régulation des télécommunications toute information nécessaire ».
a) Publication d'informations préalables
Afin de réaliser des choix pertinents en matière de déploiement et d'offre commerciale, les opérateurs souhaitant avoir recours aux offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL de France Télécom doivent avoir accès à différentes informations, conformément à ce qui a été développé au paragraphe II.A-2-h. Notamment, les acteurs susceptibles d'être intéressés par l'offre de gros doivent être informés des investissements qu'ils devront consentir pour pouvoir utiliser cette offre, des points de raccordement au réseau de France Télécom correspondant et des zones de clientèle auxquelles ils auront accès grâce à cette offre.
Ce type d'informations est nécessaire pour tout acteur souhaitant établir un plan d'affaires et élaborer une stratégie reposant sur l'utilisation d'une offre de gros d'accès haut débit activée sur DSL de France Télécom.
Dès lors que ces renseignements ne révèlent pas de données stratégiques et que leur mise à disposition ne porte pas atteinte à la sécurité des réseaux, la publicité de ces informations permet d'améliorer la visibilité de l'offre à l'attention d'un plus grand nombre d'opérateurs et d'investisseurs.
Trois types d'informations apparaissent d'ores et déjà indispensables à ce titre :
― l'architecture d'accès au réseau, avec la liste des points de raccordement, leur zone arrière, et les zones tarifaires attachées ;
― les interfaces de livraison des flux disponibles sur chacun des points de raccordement ouverts ;
― la liste des répartiteurs fibrés et ouverts à l'ADSL2+ par France Télécom ;
― la liste des répartiteurs ouverts aux différents modes de collecte (Ethernet, IP, ATM) par France Télécom.
Dans ces conditions, sur le fondement de l'article D. 307-I du code des postes et des communications électroniques, et notamment des dispositions qui prévoient la publication des « spécifications techniques des prestations (...) d'accès » et des « caractéristiques du réseau », il est nécessaire d'imposer à France Télécom l'obligation de publier les informations préalables susmentionnées. Au regard des objectifs visant à permettre le développement d'une concurrence effective et loyale, la proportionnalité de cette obligation est vérifiée.
b) Publication des indicateurs de qualité de service
Ce point sera traité dans la partie suivante intitulée « Qualité de service des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational ».
c) Publication des spécifications techniques d'interface
L'utilisation d'une offre de gros d'accès haut débit activée sur DSL de France Télécom par les opérateurs alternatifs suppose que ceux-ci interconnectent leur réseau à celui de l'opérateur historique. Les points d'interface entre les équipements de France Télécom et ceux des opérateurs tiers peuvent se situer à trois niveaux :
― l'équipement d'accès. Dans le cas général, les fournisseurs d'accès Internet et opérateurs alternatifs fournissent ou louent aux clients finaux des équipements d'accès, plus ou moins complexes : modem DSL classique, plate-forme modem et multimédia, équipement professionnel, etc. Ces équipements doivent communiquer avec les équipements réseaux de France Télécom (notamment les DSLAM). Les protocoles de communications doivent permettre l'échange de données et peuvent concerner des fonctions plus avancées, comme l'allocation dynamique de bande passante ou la supervision ;
― l'équipement d'interconnexion réseau. Les réseaux des opérateurs alternatifs et celui de France Télécom sont interconnectés physiquement. Les flux de données échangés peuvent être normalisés suivant différents protocoles (notamment IP, ATM, Ethernet en DSL). Dans tous les cas de figure, les protocoles utilisés par les deux équipements doivent être compatibles ;
― la supervision et la commande du réseau. Les progrès des technologies de réseaux et leur normalisation progressive permettent d'envisager d'ores et déjà et à horizon de la présente analyse de marché que des flux d'information concernant la supervision ou des éléments de pilotage du réseau (allocation de bande passante, priorisation de certains flux) peuvent techniquement être transmis entre deux opérateurs de réseaux interconnectés.
Le fonctionnement technique des réseaux haut débit suppose que les opérateurs clients des offres de gros soit parfaitement informés des spécifications techniques d'interface, c'est-à-dire des différents protocoles de communication, utilisés par les équipements de France Télécom, et de leurs évolutions éventuelles, avec un préavis raisonnable.
Par ailleurs, les industriels fabriquant les équipements de réseau susceptibles d'être achetés par les opérateurs alternatifs ou France Télécom elle-même doivent également disposer des spécifications techniques d'interfaces des équipements de France Télécom avec lesquels leurs équipements doivent être capables de communiquer.
Il convient de noter que France Télécom publie d'ores et déjà les spécifications techniques d'interfaces qu'elle propose, lorsque cela est possible. Lorsque les technologies ne sont pas complètement normalisées, France Télécom publie une série de tests permettant aux opérateurs alternatifs et industriels de s'assurer de l'interopérabilité de leurs équipements et de ceux de France Télécom. Cette solution pragmatique peut constituer une manière satisfaisante pour France Télécom d'assurer l'information des acteurs dans des conditions transparentes.
Il apparaît donc nécessaire que France Télécom publie les spécifications techniques d'interface de son réseau, couvrant les trois champs énumérés ci-avant : équipement d'extrémité, équipement de livraison du trafic en cœur de réseau, et le cas échéant flux de données permettant la supervision ou des éléments de pilotage dynamique du service.
Une telle obligation ne saurait être considérée comme disproportionnée dans la mesure où elle constitue le minimum nécessaire permettant d'atteindre les objectifs visés à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques, et notamment ceux visant à garantir « (...) la définition de conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence ».
d) Publication d'une offre de référence technique et tarifaire d'accès
(1) Obligation générique
L'existence et la publication d'une offre de référence répond à plusieurs objectifs : elle pallie la faiblesse du pouvoir de négociation bilatérale des opérateurs clients de l'offre, elle permet d'assurer la non-discrimination dans le traitement des opérateurs alternatifs, elle apporte de la visibilité et de la stabilité aux opérateurs pour l'élaboration de leurs plans de développement, enfin elle permet de découpler les offres en sorte qu'un opérateur n'ait à payer que les prestations dont il a besoin.
La conjonction de la puissance de France Télécom sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, du caractère incontournable de son réseau, non duplicable par les nouveaux entrants, et de l'intégration verticale de France Télécom rend peu probable le fait que les opérateurs alternatifs clients des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, concurrents de France Télécom sur les marchés aval, disposent d'un pouvoir de négociation suffisant pour obtenir une offre adaptée sur ce marché. L'existence d'une offre de référence que l'Autorité a le pouvoir de modifier est de nature à faciliter les négociations bilatérales et à éviter les litiges entre les opérateurs et France Télécom.
Par ailleurs, pour les opérateurs ayant recours à une offre d'accès haut débit activée sur DSL livrée au niveau infranational, les reversements directs à France Télécom représentent une proportion importante de leur chiffre d'affaires, et apparaissent donc comme déterminants dans leur budget. Il est donc nécessaire pour leur équilibre économique de disposer d'une bonne visibilité sur les conditions techniques et tarifaires proposées par France Télécom lors de l'élaboration de leurs plans d'affaires et de leur stratégie technique et commerciale.
Enfin, le recours à une offre de référence publique permet de s'assurer du traitement non discriminatoire des différents opérateurs clients de l'offre.
Ainsi, en application des dispositions de l'article D. 307-II du code des postes et des communications électroniques, la société France Télécom devra publier une offre de référence technique et tarifaire détaillant les prestations relevant du marché de gros des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational.
L'Autorité considère que cette obligation constitue une garantie en vue d'assurer, notamment, l'égalité des conditions de la concurrence sur le marché considéré. En l'absence de mesure permettant d'atteindre, dans des conditions identiques, le même but, l'obligation n'est pas disproportionnée.
(2) Eléments de l'offre de référence
Conformément à l'article D. 307-II précité, il incombe à l'Autorité de fixer la liste des prestations minimales d'une offre de référence.
A la suite de l'analyse menée dans la présente décision, la liste donnée en annexe 1 recense les éléments que devra comporter a minima l'offre de référence. Cette liste recense les prestations que l'offre de référence devra proposer, ainsi que les éléments qu'elle devra préciser pour donner aux opérateurs une visibilité suffisante quant aux modalités financières, techniques et opérationnelles de recours aux offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et aux ressources connexes. Outre les conditions contractuelles type relatives aux tarifs, aux conditions de souscription, aux modalités d'accès à l'offre, l'offre de référence de France Télécom devra ainsi inclure au minimum les prestations d'accès détaillées ainsi que les informations répondant à l'obligation de transparence (interfaces, informations préalables, qualité de service) et de non-discrimination définies dans la présente décision.
Enfin, en vertu du deuxième alinéa de l'article D. 307-II du code, l'offre de référence doit être suffisamment détaillée pour permettre à un opérateur d'estimer un plan d'affaires, donc le coût des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational. A ce titre, l'intégralité des tarifs relevant des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et de leurs prestations connexes devra figurer dans l'offre de référence.
(3) Evolution de l'offre de référence
France Télécom pourra être amenée à faire évoluer au cours du temps son offre de référence pour les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational. Cependant, toute évolution unilatérale sans information préalable serait préjudiciable pour le secteur. Elle peut en effet remettre en question la politique commerciale d'un opérateur, et donc nécessiter un certain préavis avant de pouvoir être prise en compte. Sur le plan technique, elle peut impacter le plan de déploiement des opérateurs, ou nécessiter des adaptations longues à mettre en œuvre. Il est donc nécessaire que France Télécom publie avec un préavis suffisant toute évolution de l'offre de référence.
Ce préavis doit permettre à l'Autorité de s'assurer, le cas échéant, du respect des obligations portant sur les conditions tarifaires et techniques de l'offre. Il a aussi pour finalité de permettre à l'ensemble du secteur de répercuter ces évolutions sur les prix de détail dès leur application, de mettre en œuvre les solutions techniques correspondantes et, le cas échéant, d'adapter leurs processus opérationnels. De manière générale, au regard des délais de mise en œuvre des politiques de marketing, et des délais de commande et de mise en place d'équipements techniques, un préavis de trois mois paraît adapté pour que les opérateurs soient en mesure d'utiliser effectivement les nouvelles modalités d'une offre de gros.
En pratique, ce délai, déjà imposé dans le cadre du précédent cycle d'analyse de marché, est apparu excessif lorsque la modification conduit à une baisse tarifaire d'une des prestations de l'offre. Dans ces cas précis, un préavis plus court, d'un mois, paraît davantage adapté, un préavis de 3 mois n'apparaissant pas alors nécessaire aux objectifs poursuivis.
Ainsi, sur le fondement des dispositions de l'article D. 307-III du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité considère qu'au regard du fonctionnement actuel du marché, une durée de trois mois de préavis (ramené à un mois dans le cas d'une baisse tarifaire) est adaptée au respect des objectifs d'égalité des conditions de la concurrence, sans pour autant représenter une charge excessive pour France Télécom.
Lorsque ces évolutions contraignent l'opérateur alternatif à modifier ou à adapter ses propres installations, France Télécom devra respecter un délai d'un an conformément aux dispositions de l'article D. 99-7 du code des postes et des communications électroniques.
L'obligation de publication avec préavis s'entend sauf décision contraire de l'Autorité. Certains cas particuliers peuvent en effet nécessiter une mise en œuvre immédiate des évolutions de l'offre. Ce cas peut notamment se rencontrer à la suite d'une décision de règlement de litige ou d'une décision de modification de l'offre de référence.
Notamment, s'agissant de la première offre de référence publiée conformément à la présente décision, il n'y a pas lieu d'observer le préavis de 3 mois susmentionné entre sa publication et son entrée en vigueur, et ce afin d'assurer au secteur une mise en œuvre des obligations telles que détaillées dans la présente décision aussi rapide que possible.
Il apparaît cependant raisonnable de laisser à France Télécom jusqu'au 15 septembre 2008 pour publier une offre de référence qui y soit conforme. Ce délai apparaît suffisant au regard du fait que des offres de gros sont déjà en vigueur ou en cours d'élaboration, qu'une offre de référence existe d'ores et déjà en application des précédentes décisions d'analyse des marchés du haut débit et que France Télécom a pris connaissance du maintien de cette obligation durant le processus d'analyse des marchés et de consultation du secteur, en amont de l'entrée en vigueur de la présente décision.
e) Transmission d'informations à l'ARCEP
L'article D. 309 du code précise, au titre de l'obligation de non-discrimination imposée aux opérateurs exerçant une influence significative sur un marché, que « les modalités techniques et financières des services d'interconnexion et d'accès qu'ils offrent à leurs propres services, filiales et partenaires doivent pouvoir être justifiées sur demande de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ».
A ce titre, France Télécom devra transmettre périodiquement à l'Autorité un ensemble d'informations, notamment :
― la liste des répartiteurs ouverts à l'offre de télévision par ADSL d'Orange ;
― des données relatives, d'une part, aux parcs d'Orange et d'autre part aux parcs d'accès de gros achetés par les opérateurs alternatifs ;
― la description précise des processus de qualité de service (commande-livraison, d'une part, et traitement des pannes, d'autre part) mis en œuvre par France Télécom pour son propre compte pour les offres haut débit commercialisées sur le marché de détail.
Il apparaît en effet que les processus mis en œuvre par France Télécom pour ses propres besoins sur le marché de détail constituent un référentiel pertinent d'appréciation des processus mis en œuvre sur les marchés de gros pour les opérateurs tiers.
Par ailleurs, pour permettre à l'Autorité d'apprécier la situation concurrentielle du haut débit et du très haut débit, France Télécom devra transmettre périodiquement à l'Autorité, ou à sa demande, des informations complémentaires relatives au marché de gros des offres haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational et aux marchés situés en aval de celui-ci.
L'ensemble de ces informations, nécessaires à l'Autorité pour la compréhension de l'environnement financier, technique et concurrentiel des offres, est précisé en annexe II de la présente décision.
f) Transmission des conventions
En vertu de l'article D. 307-I du code, l'Autorité peut imposer, au titre de l'obligation de transparence, à tout opérateur exerçant une influence significative sur un marché pertinent, la communication, dès leur conclusion, des conventions d'interconnexion et d'accès.
La publication d'une offre de référence ne s'oppose pas à ce que France Télécom négocie des conditions d'accès qui n'auraient pas été prévues initialement par l'offre, qui doivent être signalées en tant que telles dans la convention.
Toutefois, par référence aux objectifs posés par l'article L. 32-1 du code, l'Autorité doit être en mesure de vérifier qu'aucun opérateur ne fait l'objet d'un traitement discriminatoire tout en veillant parallèlement à ce que le contenu de l'offre de référence réponde de manière satisfaisante aux besoins des opérateurs et à la réalité du marché. En outre, l'obligation de transmission des conventions, à compter de leur signature, est au cas d'espèce un outil qui permet à l'Autorité d'accroître l'efficacité de son action pour promouvoir le développement et l'équilibre des conditions de la concurrence.
Ainsi, eu égard aux spécificités du marché objet de la présente analyse, et afin de permettre la réalisation des objectifs de concurrence effective et loyale dans des conditions de non-discrimination, l'Autorité impose à France Télécom de lui transmettre, dans le délai de 10 jours suivant leur signature, les conventions d'accès pour les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et les avenants y afférent.
Par ailleurs, conformément à l'article D. 99-6 du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité pourra décider de communiquer à la demande d'un tiers intéressé, tout ou partie du texte de la convention, sous réserve des informations couvertes par le secret des affaires.
5. Qualité de service
Après une phase de mise en place progressive des offres de gros portée par une croissance forte du nombre d'abonnés, le haut débit sur DSL est devenu un produit de masse. Les processus de commandes et de traitement des pannes doivent permettre d'assurer un niveau de qualité de service élevé pour l'ensemble des consommateurs et des entreprises souscrivant à des offres haut débit.
La capacité qu'ont les opérateurs alternatifs de proposer des niveaux de qualité de service satisfaisants (délai de livraison, délai de réparation en cas de panne...) est un paramètre déterminant de leur offre, et donc du choix des consommateurs.
Si la qualité de service des offres aval commercialisées par les opérateurs alternatifs dépend de la qualité de leurs propres prestations, elle est également fonction de la qualité des offres de gros achetées auprès de France Télécom à partir desquelles elles sont construites. Une situation dans laquelle France Télécom bénéficierait au niveau du détail d'une qualité de service meilleure que celle qu'elle assure aux opérateurs alternatifs tendrait à biaiser le choix des consommateurs et à distordre la concurrence sur le marché de détail.
Les opérateurs alternatifs ont des besoins légitimes en termes de qualité de service, qui peuvent être résumés par les trois points suivants :
― les niveaux de qualité de service (par exemple délais de livraison, de réparation, taux de panne) annoncés dans les offres de gros doivent être compatibles avec les niveaux de qualité affichés sur le marché de détail, en particulier en comparaison de ceux de France Télécom. Cet objectif correspond notamment à l'obligation de non-discrimination à laquelle est soumise France Télécom. Sur le marché professionnel DSL en particulier, il est essentiel pour les opérateurs alternatifs de pouvoir concurrencer les offres de détail professionnelles d'Orange Business Services non seulement par une réplicabilité technique et tarifaire, mais aussi par des engagements de qualité de service comparables ;
― les niveaux de qualité annoncés dans les offres de gros doivent autant que possible être respectés par France Télécom, afin que les opérateurs alternatifs aient suffisamment de visibilité et puissent s'engager eux-mêmes sur des niveaux de service auprès de leurs clients ;
― les niveaux de qualité de service constatés doivent être satisfaisants non seulement en moyenne, mais également pour des sous-catégories, par exemple pour les consommateurs dont la livraison des accès ou la réparation des pannes est la plus longue.
a) Publication d'indicateurs de qualité de service
Il est souhaitable de donner une incitation à l'efficacité des processus mis en place par France Télécom et de vérifier, en application des dispositions prévues à l'article D. 309 du code des postes et des communications électroniques, que les niveaux de qualité de service de l'offre de gros sont non discriminatoires par rapport à ce que France Télécom propose pour ses propres services sur les marchés aval. Ceci implique que l'opérateur historique mesure et publie mensuellement des indicateurs de qualité de service pour l'ensemble de ses offres de gros, ainsi que pour les offres aval correspondantes.
En application de l'article D. 309 du code, l'Autorité peut en effet imposer à France Télécom de publier des informations concernant les conditions de fourniture des prestations d'accès.
La publication d'indicateurs de niveau de service s'analyse comme une obligation proportionnée pour France Télécom. La réalisation de mesures et la publication périodique de plusieurs indicateurs de suivi constitue en effet une pratique très courante et constitue la mesure la moins contraignante pour France Télécom de s'assurer de l'absence de pratiques discriminatoires et de permettre, notamment au client final, d'apprécier les responsabilités de France Télécom, d'une part, et de l'opérateur alternatif, d'autre part, dans la qualité de service des offres de détail.
Pour les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational, une liste d'indicateurs, mesurés et publiés mensuellement par France Télécom à l'Autorité, existe d'ores et déjà pour les offres actuelles. Ces indicateurs constituent une base pertinente de mesures pour le présent marché et les offres aval correspondantes. Pour tenir compte des évolutions du marché et de l'apparition de nouvelles offres de gros ou de détail, ils pourront toutefois faire l'objet de modifications ponctuelles, après consultation par l'Autorité de France Télécom et des opérateurs clients de l'offre de gros, au regard notamment des indicateurs que France Télécom élabore déjà pour son propre suivi.
A minima, il semble souhaitable que soient traités dans ces indicateurs :
― la livraison des accès et le traitement des pannes ;
― de manière distincte pour la livraison, les offres avec et sans abonnement au service téléphonique commuté ;
― de manière distincte, les offres à destination d'une clientèle résidentielle ou professionnelle ;
― de manière distincte pour la livraison, les offres sur ligne existante ou en construction.
b) Processus opérationnels efficaces et non discriminatoires
La mise en place sur les marchés de gros d'une qualité de service permettant aux opérateurs de répondre aux attentes des consommateurs sur le marché de détail passe par des actions communes de la part de l'ensemble des opérateurs.
En effet, aussi bien lors de la commande que lors du traitement des pannes, l'efficacité de France Télécom dépend de la qualité des informations transmises par les opérateurs tiers. La qualité du pré-diagnostic effectué par ces derniers avant tout envoi de ticket d'incident à France Télécom est donc indispensable pour améliorer la qualité de service.
Lors du comité de l'interconnexion et de l'accès du 12 décembre 2007, France Télécom a proposé de faire évoluer les processus de SAV (service après-vente), en s'appuyant sur les travaux menés par l'ensemble des opérateurs dans les groupes de travail multilatéraux. Sur la base de ces propositions, des expérimentations sont menées depuis mars 2008. Elles visent à inciter chaque partie à détecter puis traiter au mieux ce qui est de son ressort, notamment à limiter les cas de recours aux expertises pour la clientèle professionnelle.
Les évolutions proposées et les premiers résultats des expérimentations sont de nature à améliorer la qualité de service sur les offres de gros haut débit.
Il est cependant souhaitable que les évolutions apportées soient pérennisées au terme de ces expérimentations et que soit donnée de la visibilité aux opérateurs alternatifs sur les opérations effectuées par les techniciens de France Télécom, afin de permettre un diagnostic plus pertinent et une meilleure prise en compte des retours effectués par France Télécom.
Par ailleurs, France Télécom a historiquement installé sur son réseau de boucle locale cuivre des multiplexeurs permettant de mutualiser les signaux téléphoniques commutés de plusieurs abonnés sur une même paire de cuivre, notamment pour les abonnés situés dans des zones éloignés des commutateurs locaux. Ces multiplexeurs permettent de limiter dans ces cas la taille des câbles de cuivre déployés sur une partie significative du tracé de réseau. Des multiplexeurs ont également pu être installés localement pour répondre de façon ponctuelle au raccordement d'un nouvel abonné sans avoir à retirer un nouveau câble de cuivre jusqu'au central téléphonique.
Les multiplexeurs sont incompatibles avec les signaux DSL : un abonné ayant une ligne multiplexée ne peut pas bénéficier de services haut débit sur DSL. Des travaux de réaménagement de la boucle locale peuvent être envisagés pour apporter le DSL aux lignes situées derrière un multiplexeur, consistant soit à la pose de nouveaux câbles cuivre, soit à la mise en place d'un NRA ZO au niveau du multiplexeur.
Lors d'une commande de gros portant sur une ligne inéligible du fait de la présence d'un multiplexeur, il apparaît justifié d'imposer à France Télécom que, lorsque des travaux de réaménagement de la boucle locale sont menés pour rendre la ligne éligible au DSL, la mise en œuvre de ces travaux se fasse dans des délais raisonnables, et que les opérateurs soient informés au mieux des délais encourus.
c) Engagement de niveau de qualité de service
L'efficacité des processus opérationnels doit s'accompagner de principes tarifaires qui incitent chaque partie à détecter et traiter au plus vite et dans les meilleures conditions ce qui est de son ressort.
Il paraît à cet égard nécessaire que France Télécom s'engage sur des niveaux de service dans l'offre de référence et soit incitée financièrement à respecter ces engagements.
Ce principe est conforme à l'article D. 310 du code des postes et des communications électroniques, qui prévoit que l'Autorité « définit en tant que de besoin les conditions de mise en œuvre des obligations (...) de façon à assurer leur exécution dans des conditions équitables et raisonnables ». En outre, ce dispositif fait peser sur France Télécom une contrainte limitée. Ce type d'engagement correspond en effet à des pratiques commerciales courantes sur les marchés concurrentiels.
Ces mécanismes existent déjà dans les offres de référence actuelles de France Télécom et des pénalités sont prévues en cas de livraisons tardives d'un accès de la part de France Télécom.
L'Autorité constate cependant que ces incitations ne remplissent pas leur rôle. En effet, le paiement des compensations financières dues par France Télécom est conditionné par la fourniture et le respect de prévisions de commandes précises par les opérateurs alternatifs. Si une telle condition peut être légitime dans son principe, il semble que le degré de précision demandé par France Télécom crée une contrainte excessive en pratique, à laquelle les opérateurs alternatifs ne se conforment pas.
Il paraît donc nécessaire que France Télécom revoit les modalités d'engagement et de respect des engagement, sous la forme d'un mécanisme de pénalités versées aux opérateurs alternatifs en cas de délais excessifs, y compris pour le traitement des pannes et le respect des délais d'expertises. Pour pouvoir être mises en œuvre en pratique, ces pénalités ne paraissent pas devoir être conditionnées à des prévisions de commandes trop précises de la part des opérateurs. En effet, l'Autorité note que les commandes des opérateurs sur les marchés de gros du haut débit ne représentent qu'une partie des commandes reçues par France Télécom, de par sa position sur le marché de détail du haut débit, et plus généralement de sa connaissance de l'ensemble des commandes, sur les marchés de gros ou de détail, nécessitant l'intervention de techniciens au répartiteur.
L'Autorité invite donc France Télécom à négocier de bonne foi avec les opérateurs alternatifs de nouvelles modalités d'engagements de niveau de qualité de service et de respect de ces engagements.
d) Qualité des accès livrés
Sur le principe, les offres haut débit activées en DSL livrées au niveau infranational doivent permettre aux opérateurs alternatifs de proposer toutes sortes de services sur la base des technologies xDSL, dans la limite des contraintes techniques liées à l'affaiblissement de la paire. La totalité des accès correspondants sont ainsi utilisés en pratique par les opérateurs alternatifs pour proposer a minima des services d'accès à Internet.
Le critère de continuité métallique retenu à ce jour par France Télécom ne permet que de garantir la qualité de service de la voix commutée. Au-delà de ce seul critère, il convient que les processus de rétablissement et de livraison de France Télécom soient satisfaisants pour assurer les services des abonnés finals et des opérateurs. Ceci fera l'objet d'un suivi opérationnel régulier, sur la base des informations remontées par les opérateurs alternatifs, dans le cadre des groupes multilatéraux concernés.
6. Obligation de contrôle tarifaire
L'article L. 38-I (4°) du code des postes et des communications électroniques prévoit que l'Autorité peut imposer un contrôle tarifaire aux opérateurs disposant d'une influence significative.
Dans les zones où France Télécom n'est ni propriétaire ni gestionnaire de la boucle locale (zones aéroportuaires de Paris par exemple), une demande d'accès à ces réseaux formulée auprès de France Télécom ne saurait être considérée comme raisonnable. France Télécom n'est donc pas soumise sur ces zones à l'obligation de fournir des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational. Si elle fait néanmoins le choix d'étendre ses offres à ces zones, l'obligation de contrôle tarifaire n'y est pas applicable.
En pratique, si les propriétaires ou gestionnaires de la boucle locale dans ces zones ne proposaient pas des offres d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational dans des conditions équivalentes à celles fournies par France Télécom sur le reste du territoire, l'Autorité serait amenée à traiter cette situation en règlements de différend.
a) Tarification reflétant les coûts
Alors que près de 13 000 répartiteurs desservent le territoire national, dont la totalité a été équipé par France Télécom pour le DSL, le dégroupage n'est aujourd'hui déployé que sur les 3 200 plus grands sites environ, raccordant moins de 70 % de la population. Sur le reste du territoire, France Télécom ne peut encore être concurrencée en tant qu'offreur sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
Sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational, il convient d'une part d'assurer que les conditions tarifaires dans lesquelles l'accès est accordé sont à même de garantir l'égalité des conditions de concurrence, et d'autre part d'éviter que l'opérateur disposant d'une influence significative, France Télécom, ne recoure à une tarification de monopole, au détriment du consommateur.
Dans cette situation, une obligation de tarification reflétant les coûts permet d'assurer à la fois l'égalité des conditions de concurrence entre les opérateurs alternatifs clients de l'offre et France Télécom en tant que fournisseur sur le marché de détail, et de garantir des prix attractifs pour le consommateur. En effet, la tarification en fonction des coûts de l'offre de gros proposée par l'opérateur historique permet à ce dernier de recouvrer ses coûts tout en faisant bénéficier aux opérateurs alternatifs, qui n'ont pas atteint la même masse critique, de ses économies d'échelle, et en permettant in fine au consommateur sur le marché de détail d'avoir accès à des prix bas.
L'obligation pour les tarifs de refléter les coûts des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational apparaît donc comme la seule à même de répondre aux objectifs de la régulation ex ante fixés à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques.
L'Autorité estime donc qu'il est justifié et proportionné d'imposer à France Télécom l'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts pour les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational et les prestations associées.
Par ailleurs, conformément à l'article D. 311 du code des postes et communications électroniques, l'Autorité considère que les mécanismes de recouvrement des coûts et les méthodes de tarification des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational doivent promouvoir l'efficacité économique, favoriser une concurrence durable et optimiser les avantages pour le consommateur.
Dès lors, les tarifs de l'offre doivent refléter les coûts de long terme d'un opérateur efficace aux caractéristiques comparables à celles de France Télécom.
A ce titre, ils ne doivent pas être marqués par des effets de seuil, et sont établis sur la base de choix économiques rationnels, en ayant recours notamment à des capacités adaptées.
En tant que de besoin, l'Autorité pourra être amenée à faire évoluer le système de comptabilisation et d'allocation des coûts de France Télécom actuellement en vigueur par une décision complémentaire ultérieure.
En outre, l'article D. 311 précise qu'une fois cette obligation imposée, l'opérateur doit être en mesure de démontrer que les tarifs de ses offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational reflètent effectivement les coûts de long terme d'un opérateur efficace.
En particulier, toute modification des prix de cette offre pourrait amener l'Autorité à demander à France Télécom de justifier intégralement ses tarifs au regard de ces coûts.
Par ailleurs, en cas d'absence de justification, l'Autorité est habilitée à exiger l'adaptation de ces tarifs et modifier l'offre de référence.
b) Proscription des tarifs d'éviction
Le dégroupage de la boucle locale joue un rôle fondamental dans le déploiement de la concurrence par les infrastructures sur les marchés français des communications électroniques. Des investissements de grande ampleur ont été engagés par les opérateurs alternatifs pour relier et équiper les répartiteurs de France Télécom.
Les offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational ne doivent pas empêcher les opérateurs alternatifs de rentabiliser ces investissements ou de continuer à déployer leurs réseaux de collecte.
Par suite, l'Autorité estime qu'il est justifié et proportionné aux objectifs fixés à l'article L. 32-1-II du code en particulier les 2° et 4° d'imposer à France Télécom l'obligation de proscrire les tarifs d'éviction. Cela signifie que les tarifs des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational devront éviter tout effet de ciseau tarifaire sur le dégroupage, afin qu'il puisse disposer d'un espace économique suffisant pour concurrencer cette offre, et continuer son déploiement géographique, à tout le moins là où cela apparaît économiquement pertinent.
Sous la même condition, les tarifs des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational devront éviter l'éviction des opérateurs ayant recours à un raccordement très capillaire au titre de cette offre, par ceux bénéficiant d'un raccordement à un niveau moins capillaire.
En conséquence, les tarifs des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL livrées au niveau infranational doivent être compatibles avec les coûts d'un opérateur nouvel entrant efficace suivant une stratégie de déploiement fondée sur le dégroupage. Ces coûts peuvent notamment être évalués sur la base de modèles, tels que ceux développés par l'Autorité en concertation avec le secteur.
Enfin, dans son avis n° 05-A-03, le Conseil de la concurrence avait souligné, lors du précédent cycle d'analyse des marchés du haut débit, les liens existant entre marchés de détail et marché de gros : « Ainsi, des tarifs trop élevés sur les marchés de gros du haut débit, comme les tarifs du dégroupage ou de l'accès haut débit DSL, sont susceptibles d'empêcher les opérateurs tiers de s'aligner sur les tarifs de détails des offres d'accès ADSL sans que ces tarifs n'occasionnent de pertes pour l'entreprise intégrée France Télécom ».
Ainsi, en présence d'une obligation de non-discrimination sur les prestations amont, telle que décrite précédemment, la non-réplicabilité des offres de détail de France Télécom conduit à s'interroger à la fois sur les caractéristiques des offres disponibles sur le marché de gros et sur celles des offres vendues sur le marché de détail.
Si les tarifs prévalant sur les marchés de détail sont susceptibles d'empêcher les opérateurs tiers de s'y aligner, France Télécom devra justifier du respect du principe de non-discrimination en démontrant la compatibilité des offres de gros avec les offres qu'elle propose sur le marché de détail.
Si cette compatibilité n'est pas avérée, l'Autorité sera amenée à imposer des modifications sur les offres de gros correspondantes, à saisir le Conseil de la concurrence, à même de mener une action directe sur les prix de détail, ou encore à sanctionner France Télécom pour non-respect de l'obligation de non-discrimination pesant sur elle.
Compte tenu de la possibilité pour France Télécom de recourir à une tarification de monopole, le contrôle tarifaire constitue le minimum nécessaire pour permettre le développement d'une concurrence durable, l'optimisation des avantages pour le consommateur et l'efficacité économique. Elle n'est donc, par suite, pas disproportionnée.
c) Suivi des obligations de contrôle tarifaire
L'obligation tarifaire imposée à France Télécom pour ses offres de gros d'accès haut débit activées livrées au niveau infranational sur DSL étant double (orientation vers les coûts et proscription des tarifs d'éviction), les tarifs des prestations proposées sur ce marché par France Télécom peuvent donc ne pas refléter les coûts correspondants.
Afin d'être en mesure de vérifier, le cas échéant, le respect par France Télécom de ces obligations, l'Autorité peut être amenée à demander à France Télécom, pour ses offres de gros d'accès haut débit activées livrées au niveau infranational sur DSL :
― de l'informer des coûts qu'elle encourt pour en fournir les différentes composantes (accès, collecte IP, collecte ATM, collecte Ethernet, prestations connexes...) ;
― de justifier son calcul du niveau des tarifs d'éviction.
7. Obligation de séparation comptable
L'article L. 38-I (5°) du code des postes et des communications électroniques prévoit que l'Autorité peut imposer aux opérateurs disposant d'une influence significative d'isoler sur le plan comptable certaines activités.
L'obligation de séparation comptable repose sur la mise en œuvre d'un système de comptabilisation et consiste en un dispositif comptable qui permet, d'une part, d'assurer la transparence des prix des offres de gros et des prix de transferts internes à l'entreprise verticalement intégrée et, de ce fait, de garantir le respect de l'obligation de non-discrimination lorsqu'elle s'applique, et, d'autre part, de prévenir les subventions croisées abusives.
Par ailleurs, la caractéristique d'infrastructure essentielle de la boucle locale cuivre de France Télécom donne à l'opérateur un pouvoir de marché sur l'ensemble des marchés avale, dont la situation concurrentielle est conditionnée par l'accès des opérateurs alternatifs à cette infrastructure essentielle. France Télécom pourrait être tentée d'abuser de cette position en amont pour tenter d'évincer des marchés aval ses concurrents par le biais de subventions croisées ou de pratiques de ciseau tarifaire, et par voie de conséquence limiter l'exercice d'une concurrence effective à la fois sur les marchés de gros et sur les marchés de détail.
Ce double aspect de la position concurrentielle de France Télécom sur les marchés des communications électroniques peut se traduire par des distorsions discriminatoires sur les marchés de gros et les marchés de détail, qui peuvent être mises sous surveillance grâce à l'imposition d'une obligation de séparation comptable.
Ainsi, compte tenu, d'une part, du caractère verticalement intégré de France Télécom et, d'autre part, du caractère d'infrastructure essentielle de la boucle locale et, enfin, de la dynamique concurrentielle des marchés amont et aval, l'obligation de séparation comptable est justifiée et constitue le minimum nécessaire pour s'assurer de l'absence de subventions croisées et de pratiques de ciseau tarifaire destinées à évincer des concurrents. Elle est donc proportionnée aux objectifs fixés à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques et en particulier les 2° et 9°.
L'obligation de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées au titre la présente analyse doit s'appliquer à l'ensemble du marché pertinent, y compris aux offres de gros activées sur fibre. Cette obligation constitue un minimum pour s'assurer de l'absence de subventions croisées et de pratiques de ciseau tarifaire. Elle est donc proportionnée aux objectifs fixés à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques et en particulier les 2° et 9°.
Les modalités de mise en œuvre de l'obligation de séparation comptable ont été précisées dans la décision n° 2006-1007 en date du 7 décembre 2006 portant sur les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées à France Télécom. L'Autorité estime qu'il convient de maintenir les dispositions prévues par la décision n° 2006-1007 concernant le marché de gros des offres haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational sur la période d'application de la présente décision, sans préjudice de toute décision ultérieure.
8. Traitement des offres de gros d'accès haut débit et très haut débit activées
livrées au niveau infranational fondées sur la fibre
De la même manière que la régulation du haut débit a permis la mise en place de conditions favorables à la concurrence par les infrastructures, il est nécessaire de définir un cadre permettant à l'ensemble des opérateurs d'investir dans le très haut débit.
L'Autorité estime que l'accès aux infrastructures de génie civil est un levier important pour abaisser les barrières à l'entrée pour un opérateur souhaitant déployer un réseau très haut débit.
Ceci conduit l'Autorité à proposer, dans le cadre du présent cycle d'analyse des marchés du haut débit et du très haut débit, une régulation de l'accès aux infrastructures de génie civil de la boucle locale de France Télécom, qui constituent une infrastructure essentielle.
A côté de ce dispositif propre à France Télécom, l'Autorité a indiqué qu'elle souhaitait faire appliquer, en ce qui concerne la partie terminale des réseaux fibre, un principe de mutualisation s'appliquant à tous les opérateurs.
Le projet de loi de modernisation de l'économie, en discussion au Parlement, prévoit de poser un tel principe. Dans ce contexte, l'Autorité a lancé une consultation publique portant sur le déploiement et la mutualisation de la partie terminale des réseaux FttH, dont l'objectif est de définir les conditions concrètes de mise en œuvre de la mutualisation.
Compte tenu des travaux en cours, il ne semble ni nécessaire ni proportionné, à ce stade, d'imposer spécifiquement à France Télécom au titre de l'analyse des marchés, l'obligation de faire des offres de gros fondées sur la fibre. Si la boucle locale cuivre et les infrastructures de génie civil sont des infrastructures héritées de l'ancien monopole public, ce n'est pas le cas de la fibre, qui est en cours de déploiement, et ce par plusieurs opérateurs. L'obligation de fournir des offres de gros fondées sur la fibre relève donc de la régulation symétrique et non de l'analyse des marchés.
Toutefois, dans l'hypothèse où le dispositif de régulation du très haut débit, notamment les obligations prévues par le présent document, ne suffirait pas à permettre le développement d'une concurrence effective, l'Autorité pourra amender son dispositif, et imposer, le cas échéant, à France Télécom des obligations supplémentaires dans le cadre de l'analyse des marchés du haut débit et du très haut débit.
V. ― AVIS DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE
Conformément à l'article L. 37-1 du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité a sollicité l'avis du Conseil de la concurrence sur la délimitation des marchés pertinents et sur la désignation d'un opérateur exerçant une influence significative.
1. Sur la délimitation des marchés pertinents
Le conseil indique que dans le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational « sont incluses les offres, effectives ou potentielles, à destination des clients résidentiels fondées aussi bien sur le DSL que sur le câble ou la fibre, indépendamment de leur interface de livraison (IP, ATM ou Ethernet), même si à ce jour de telles offres ne sont disponibles que sur la boucle locale cuivre ».
En outre, le conseil confirme l'existence d'une substituabilité entre les offres activées sur DSL destinées, d'une part, à la clientèle résidentielle et, d'autre part, à la clientèle professionnelle.
Concernant la délimitation géographique du marché, le conseil conclut à sa dimension nationale. Il précise à ce titre que « l'avancée du dégroupage par les opérateurs alternatifs et les collectivités territoriales ne fait apparaître aucun élément permettant de déterminer, à ce stade, une éventuelle partition du territoire national en deux ou plusieurs sous-marchés distincts. S'agissant de la demande émanant des opérateurs déployant des réseaux très haut débit d'offres d'accès activées sur fibre ou sur câble, elle est nationale ».
2. Sur l'exercice, par France Télécom, d'une puissance significative sur ces marchés
Le conseil relève que « dans les zones non dégroupées par les opérateurs alternatifs, soit pour un tiers de la population, France Télécom est l'unique offreur et reste donc incontournable. Dans ces conditions, la part de marché de France Télécom restera très élevée à l'horizon de l'analyse de marché ».
En conséquence, le conseil conclut à l'exercice par France Télécom d'une puissance significative sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
3. Sur le caractère régulable de ces marchés
Le conseil rejoint l'ARCEP sur la nécessité d'une régulation ex ante pour remédier aux problèmes de concurrence structurels existants sur le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational.
Le conseil précise que « la réglementation ex ante a pour objet, à titre transitoire, de permettre la concurrence entre les services et la liberté de choix de l'acheteur mais, également, de favoriser les investissements de développement des infrastructures concurrentes de celles de l'opérateur historique. La prise en compte de cet objectif peut effectivement justifier la mise en œuvre, par les pouvoirs publics, d'une action de nature pro-concurrentielle allant au-delà de la seule sanction ou même de la prévention de comportements anticoncurrentiels. La régulation ex ante peut donc permettre de poursuivre des objectifs plus spécifiques que ceux recherchés par le droit de la concurrence ».
Enfin, le conseil invite l'Autorité à ce que la régulation ex ante s'attache « d'une part, à éviter que le développement des technologies basées sur la fibre ne remettent en question les acquis du premier cycle et, d'autre part, à préserver les incitations des opérateurs à investir dans ces nouvelles technologies. A cet égard, une vigilance particulière devra être apportée à la cohérence entre les obligations imposées sur le marché 4 et celles imposées sur le marché 5 ».
VI. ― COMMENTAIRES DES AUTORITÉS RÉGLEMENTAIRES NATIONALES
ET OBSERVATIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
La Commission européenne a formulé les observations suivantes s'agissant de l'analyse du marché pertinent de gros des offres haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational présentée par l'Autorité.
1. Sur l'inclusion des offres fondées sur le câble dans le marché pertinent
La Commission doute que « les services fournis via les réseaux câblés fassent partie du marché ». Elle relève à ce titre que « l'ARCEP admet elle-même que les réseaux câblés ne peuvent se substituer que de façon hypothétique en raison des frais de migration extrêmement élevés ».
En outre, la Commission précise que « indépendamment du fait que les preuves fournies ne semblent pas suffire pour étayer la conclusion selon laquelle les offres de gros d'accès haut débit livrées via un réseau [téléphonique] et un réseau câblé appartiennent au même marché, l'exclusion des offres de gros via le câble de la définition de marché n'aurait pas abouti sur un résultat différent de l'analyse de la puissance significative sur le marché dans ce cas particulier ».
En conséquence, l'Autorité a amendé son projet de décision initial afin d'exclure les offres haut débit activées fondées sur le câble du marché pertinent.
2. Sur l'inclusion des offres fondées sur la fibre dans le marché pertinent
La Commission relève que l'ARCEP a inclus les offres activées fondées sur la fibre dans le marché pertinent « en raison de l'homogénéité des contraintes concurrentielles sur les marchés des offres de gros d'accès haut débit activées sur DSL et sur fibre ».
En outre, la Commission constate que « l'ARCEP n'a pas réalisé une analyse de substituabilité détaillée entre les offres d'accès haut débit activées sur DSL et les offres d'accès très haut débit activées sur fibre » mais note qu'en l'absence d'obligations imposées à France Télécom pour ses offres activées sur fibre, « l'absence de cette analyse ne débouche pas sur un résultat différent dans le présent cas ».
La Commission précise qu'à terme les offres de détail fondées sur les réseaux de nouvelle génération « peuvent générer une demande d'offres de gros d'accès haut débit aux caractéristiques différentes des offres de gros d'accès haut débit actuellement incluses dans le marché pertinent ».
Par conséquent, la Commission « invite l'ARCEP à réaliser une analyse de substituabilité détaillée des offres d'accès haut débit sur le marché de détail et des offres de gros correspondantes dans sa prochaine analyse de marché (...) ».
3. Sur la délimitation géographique du marché pertinent
La Commission souligne qu'un « défi majeur auquel font face actuellement les autorités réglementaires nationales consiste à évaluer l'ampleur des différences géographiques des conditions concurrentielles et à déterminer comment ces différences pourraient être abordées de la manière la plus appropriée par la réglementation ex ante ».
La Commission précise en particulier que « l'analyse de la distribution et de l'évolution dans le temps des parts de marchés régionaux revêt une importance particulière, tout comme la tarification des opérateurs historiques et alternatifs et son évolution dans le temps dans les différentes zones ». La Commission ajoute qu'il « importe également que toute frontière du marché proposée soit suffisamment stable avec le temps ».
Sur la base des informations fournies par l'Autorité, la Commission constate qu'« il ne semble y avoir à ce stade aucune preuve concluante de l'existence de différences suffisamment établies et stables dans les conditions concurrentielles du marché de la fourniture en gros d'accès à large bande. Par conséquent, la Commission ne s'oppose pas à la conclusion de l'ARCEP concernant la définition d'un marché national ».
4. Sur les réseaux d'accès de nouvelle génération (NGA)
La Commission précise qu'elle « travaille actuellement sur une recommandation relative aux obligations dans les NFA de façon à ce qu'une approche réglementaire cohérente soit appliquée à de tels réseaux dans l'ensemble de l'Union européenne. A la lumière de ces considérations, la Commission invite l'ARCEP à revoir son analyse conformément à cette recommandation, une fois qu'elle aura été adoptée »,
Décide :