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Article AUTONOME (Décision n° 2008-0835 du 24 juillet 2008 portant sur la définition du marché pertinent de gros des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire, sur la désignation d'un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur sur ce marché)

Article AUTONOME (Décision n° 2008-0835 du 24 juillet 2008 portant sur la définition du marché pertinent de gros des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire, sur la désignation d'un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur sur ce marché)



d) Définition des termes employés
(1) L'accès dégroupé à la boucle locale


L'article L. 32 (3° ter) du code des postes et des communications électroniques définit la boucle locale comme l'« installation qui relie le point de terminaison du réseau dans les locaux de l'abonné au répartiteur principal ou à toute autre installation équivalente d'un réseau de communications électroniques fixe ouvert au public ». Dans le cas du réseau téléphonique commuté, la boucle locale est une paire de cuivre torsadée, dénommée dans l'analyse qui suit « boucle locale cuivre ». On parle de sous-boucle locale cuivre pour désigner le tronçon de la boucle locale cuivre reliant l'abonné au sous-répartiteur.
Le dégroupage de la boucle locale consiste en la mise à disposition d'un opérateur d'un accès direct à la boucle locale, au niveau du répartiteur. Le dégroupage de la sous-boucle locale cuivre correspond à l'accès donné à un opérateur tiers, au niveau du sous-répartiteur, à la sous-boucle locale cuivre. Dans la suite du document, et sauf mention contraire, le dégroupage désignera toujours le dégroupage de la boucle ou de la sous-boucle locale cuivre.
Deux formes de dégroupage sont mises en œuvre en France. Le dégroupage total correspond à la mise à disposition de l'intégralité de la boucle locale. Le dégroupage partiel correspond quant à lui à la mise à disposition d'un opérateur tiers, par l'intermédiaire d'un filtre, des seules fréquences hautes de la paire de cuivre. L'utilisation des fréquences hautes de la paire de cuivre, rendue possible grâce aux technologies xDSL, permet la fourniture à l'abonné de multiples services tels que l'accès Internet haut débit, la voix sur large bande ou encore la télévision sur DSL, tandis que les fréquences basses restent disponibles pour le service téléphonique traditionnel.


(2) L'accès aux infrastructures de génie civil


Les infrastructures de génie civil apparaissent, à la lecture des articles L. 32 (8°) et L. 37-1 du CPCE et de l'article 2, a de la directive « accès » 2002/19/CE, comme des infrastructures physiques dont l'accès constitue pour son bénéficiaire, à travers des éléments de réseau ou à des moyens qui y sont associés, une ressource matérielle en vue de fournir des services de communications électroniques.
Pour déployer leurs réseaux de communications électroniques, les opérateurs utilisent deux types de pose : l'aérien et le souterrain. En zone urbaine, le déploiement aérien est le plus souvent proscrit par les règles d'urbanisme. Les infrastructures de génie civil correspondent au cas d'un déploiement souterrain.
Il s'agit tout d'abord des conduits à l'intérieur desquels sont tirés les câbles. Les conduits, encore appelés gaines ou fourreaux, sont déposés et stabilisés par lots au fond de la tranchée, puis recouverts de terre. La matière utilisée a été dans un premier temps le béton. Il s'agit désormais de dérivés plastiques (en PVC ou PEHD notamment).
Les conduits sont par ailleurs interrompus régulièrement par des chambres. Il s'agit d'espaces souterrains de dimension variable permettant d'effectuer toute opération sur les câbles : tirage, retrait, épissurage. Les chambres hébergent également des équipements passifs (boîtiers d'épissurage, coupleurs) ainsi que les amplificateurs des réseaux câblés.
La pose d'infrastructures de génie civil se distingue d'un autre mode de déploiement souterrain : la pose en pleine terre. Dans ce cas, les câbles sont simplement posés au fond de la tranchée et recouverts de terre. Ce mode de pose, plus économique, est utilisé lorsque le réseau nécessite peu d'interventions. C'est souvent le cas du réseau de transmission des opérateurs (réseau dorsal national, réseau de collecte régional).
En revanche, les réseaux de boucle locale sont rarement posés en pleine terre, en raison des interventions plus nombreuses. Ainsi, des fourreaux sont généralement posés en surcapacité et, en théorie, un fourreau de manœuvre reste toujours inoccupé.
A titre d'illustration, la boucle locale cuivre de France Télécom a été posée dans des infrastructures de génie civil dans des zones couvrant au total plus de 20 millions de foyers.
On distingue deux niveaux hiérarchiques dans le réseau d'accès : le réseau de transport et le réseau de distribution.
Le réseau de transport passe sous les principales voies pour relier les sous-répartiteurs et les répartiteurs téléphoniques. Un nombre important de fourreaux est généralement installé. Le réseau de transport est entrecoupé par des chambres de tirage tous les 200 à 300 mètres environ.
Le réseau de distribution passe sous les rues pour relier les sous-répartiteurs aux bâtiments à desservir. Des chambres sont installées tous les 50 mètres environ. Le nombre de fourreaux installé en distribution est moindre qu'en transport.
L'adduction est la partie du réseau permettant la desserte d'immeuble et se situe entre la dernière chambre de tirage et l'intérieur du logement de l'abonné final, partiellement sur le domaine privé. Elle est réalisée soit en souterrain avec un nombre de fourreaux souvent faible, soit en aérien, par l'intermédiaire de poteaux.
Il existe à ce jour plusieurs offres de gros d'accès aux infrastructures de génie civil. France Télécom propose notamment deux offres destinées aux opérateurs tiers sur le marché professionnel, l'offre LGC DPR (location de génie civil en domaine public routier) qui vise à répondre aux dispositions de l'article L. 47 du code des postes et des communications électroniques, et l'offre LGC ZAC, spécifique aux zones d'aménagement concerté dans lesquelles des fourreaux n'appartiennent pas à France Télécom. Par ailleurs, l'opérateur Numericable bénéficie d'une offre d'occupation des fourreaux de France Télécom issue de la cession des réseaux du plan câble.
Enfin, France Télécom s'est engagée en septembre 2007 à proposer une offre d'accès à ses infrastructures de génie civil pour permettre le déploiement d'un réseau très haut débit en fibre optique par un opérateur tiers. Une première version de cette offre a été communiquée aux opérateurs alternatifs fin 2007. Des expérimentations sont en cours pour valider les processus et les règles d'ingénierie de cette offre.


(3) L'accès à la fibre passive


Par « accès à la fibre passive », on entend toute offre de mise à disposition de fibre optique jusqu'à l'abonné final ou de liaison passive en fibre optique permettant de remplacer ou de se superposer à tout ou partie de la boucle locale sur les réseaux cuivre ou coaxial existants, en vue de proposer des services très haut débit.
Dans le cas de la fibre dans la boucle locale, par analogie avec le dégroupage de la boucle locale cuivre, il est envisageable de considérer des offres passives d'accès à des éléments de réseau. En fonction du choix de technologie de l'opérateur, ces offres peuvent prendre différentes formes.
En FttH, la technologie point-à-point permet, par construction, la mise à disposition d'un accès passif sous la forme d'une fibre en point à point du NRO (nœud de raccordement optique, concentrant plusieurs milliers de lignes) jusqu'à un abonné donné. Dans le cas des réseaux point-à-multipoints de type PON, une fibre est dédiée par abonné seulement sur la partie terminale. En amont, des offres de fibre noire sont également possibles si l'opérateur a déployé de la fibre en surcapacité, sans pour autant permettre d'adresser chaque abonné avec une fibre dédiée depuis le NRO. La situation est la même qu'en PON pour la technologie FttLA mise en œuvre par le câblo-opérateur.


II. ― DÉFINITION DU MARCHÉ PERTINENT
1. Délimitation du marché
en termes de produits et services
a) Principes


La délimitation des marchés du point de vue des services repose sur l'analyse de :
― la substituabilité du côté de la demande : deux produits appartiennent à un même marché s'ils sont suffisamment « interchangeables » (2), pour leurs utilisateurs, notamment du point de vue de l'usage qui est fait des produits et services, de leurs caractéristiques, de leur tarification, de leurs conditions de distribution, des coûts de « migration » d'un produit vers l'autre. Afin d'apprécier cette notion d'interchangeabilité, l'analyse doit entre autres prouver que la substitution entre les deux produits est rapide (3) et doit prendre en compte les « coûts d'adaptation » (4) qui en découlent ;
― la substituabilité du côté de l'offre : la substituabilité du côté de l'offre est caractérisée lorsqu'un opérateur qui n'est pas actuellement présent sur un marché donné est susceptible d'y entrer rapidement en réponse à une augmentation du prix des produits qui y sont vendus.
Pour établir l'existence d'une éventuelle substituabilité du côté de la demande ou de l'offre, l'analyse peut impliquer la mise en œuvre de la méthode dite du « test du monopoleur hypothétique », ainsi que le suggèrent les lignes directrices de la Commission (5). Ce test consiste à étudier les effets qu'aurait sur la demande une augmentation légère mais durable des prix d'un service (5 à 10 %), de manière à déterminer s'il existe des services considérés comme substituables par les demandeurs vers lesquels ils sont susceptibles de s'orienter. Ce test doit être appliqué jusqu'à ce qu'il puisse être établi qu'une augmentation des prix relatifs à l'intérieur des marchés géographiques et de produits définis ne conduira pas les consommateurs à opter pour des substituts directement disponibles ou à s'adresser à des fournisseurs établis sur d'autres territoires. Ainsi que le mentionnent les lignes directrices, l'utilité essentielle de cet outil réside dans son caractère conceptuel, sa mise en œuvre n'impliquant pas une étude économétrique systématique poussée.
Conformément au point 5 des lignes directrices, l'Autorité se référera aux « principes et [aux] méthodes du droit de la concurrence pour définir les marchés qui devront être soumis à une réglementation ex ante ».
Dans ce qui suit, l'Autorité délimite de manière successive, au terme d'une analyse de substituabilité, deux segments de marché : celui des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire pour le haut débit, d'une part, et celui des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire pour le très haut débit, d'autre part.
Dans un second temps, l'Autorité conclut à la substituabilité de ces deux segments de marché à l'horizon de la présente analyse.

(2) Point 51 des lignes directrices 2002/C 165/03 de la Commission des Communautés européennes du 11 juillet 2002. (3) Point 49 de ces lignes directrices. (4) Point 50 de ces lignes directrices. (5) Point 40 de ces lignes directrices.