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Article AUTONOME (Décision n° 2008-0896 du 29 juillet 2008 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)

Article AUTONOME (Décision n° 2008-0896 du 29 juillet 2008 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)



II-2.2.2. Sur le marché professionnel et entreprises :
une segmentation selon la taille des clients


Par rapport au marché résidentiel, le nombre d'offreurs est moins élevé sur le marché professionnel et entreprises car les barrières à l'entrée y sont plus importantes (image, force de vente, hétérogénéité des clients visés, etc.).
Concernant les communications fixes sur le segment entreprises, une plus grande sensibilité à la qualité de service conduit les opérateurs à encore privilégier les communications sur RTC, acheminées sur une technologie plus mature et stable que le DSL. De plus, la guerre des prix passée entre Neuf Télécom et Cegetel (alors concurrentes) a entraîné une baisse significative des tarifs sur les communications sortantes. Même si cette baisse s'est ralentie depuis la fusion entre Neuf Télécom et Cegetel, les prix des communications sur le segment entreprises sont à l'heure actuelle réputés parmi les plus bas d'Europe. Le marché de l'accès entreprises est également caractérisé par l'importance de l'offre de services sur RTC et RNIS (réseau numérique à intégration de service), puisque les accès analogiques y sont encore majoritairement achetés par opposition aux achats de service VLB sur le marché résidentiel. Toutefois, ces dernières années de plus en plus d'opérateurs alternatifs se sont repositionnés sur les offres VLB permettant de vendre plus de services à leurs clients et de proposer des produits où les marges brutes sont plus élevées.
Globalement, sur les marchés entreprises des communications et des accès, le positionnement des acteurs diffère selon la taille du client :
― le segment des TPE ou professionnels est caractérisé par une structure de marché proche de celle du marché résidentiel, mis à part une exigence globale de QoS légèrement supérieure. Les opérateurs du marché grands publics comme Neuf Cegetel (mais également des opérateurs entreprises comme B3G) y proposent de plus en plus d'offres d'accès et de communications IP ;
― le marché des PME n'est pas adressé par les opérateurs grand public, une expertise spécifique y étant nécessaire pour répondre aux besoins des clients, en matière de gestion des PABX (« Private Automatic Branch Exchange » ou autocommutateur), de qualité de service ou encore de déploiement réseau. Ce marché est à l'heure actuelle relativement captif, même si on y trouve des acteurs comme Neuf Télécom, B3G ou depuis peu Colt ;
― le marché des MGE est le segment considéré comme présentant le fonctionnement le plus concurrentiel. Les opérateurs (France Télécom, Verizon, Neuf Cegetel, Completel, British Telecom, Colt, etc.) y proposent principalement des offres sur mesures, via notamment des raccordements directs (complétés par de la présélection pour leurs petits sites décentralisés). Ceci s'y traduit par exemple par un trafic intersite ou on net gratuit et une disparition des passerelles GSM ou « hérisson » (prix proches des tarifs fixe vers mobile classiques).
De façon globale, sur le marché entreprise de la téléphonie fixe, on assiste à une baisse du chiffre d'affaires des opérateurs sur l'offre de voix, et à un repositionnement des opérateurs alternatifs sur le transport de données et les accès Internet. Ainsi ces derniers privilégient les appels d'offres avec des lots plus larges incluant voix, données, intégration, gestion des PABX.


II-2.2.3. Consolidation du secteur


Les marchés des communications électroniques ont connu une vague de concentration avec plusieurs opérations de rapprochement ou de fusions-acquisitions, menant à l'apparition d'opérateurs d'envergure.
La fusion des l'ensemble des câblo-opérateurs, dont Noos et Numericable, a donné naissance à un unique câblo-opérateur : Numericable. Par ailleurs, les deux principaux actionnaires de Numericable ont racheté l'opérateur Completel, spécialisé sur la téléphonie du marché entreprises. Puis la fusion entre Neuf Télécom et Cegetel a donné lieu au rapprochement de deux acteurs alternatifs de poids sur le marché de la téléphonie. Enfin, sur le marché de l'ADSL, le nombre d'acteurs a été réduit de moitié en deux ans. A titre d'exemple, Neuf Cegetel a racheté les opérateurs Club Internet et AOL France.
Cette tendance s'explique notamment par le fait que les opérateurs qui ne disposent pas de leur propre réseau risquent de ne pas être en mesure de rester compétitifs face à ceux qui composent leur offre sur la base de leur propre infrastructure. Elle se justifie également par la recherche d'économies d'échelle avec l'élargissement de la base clients et par le début du déploiement de la fibre optique sur les marchés résidentiels, qui nécessite des investissements importants de la part des acteurs. Les opérateurs sont à l'heure actuelle incités à amortir leurs investissements passés et futurs sur le plus grand nombre d'abonnés possible. Ces dernières évolutions ont pour effet de renforcer la concurrence par les infrastructures.
Depuis l'ouverture à la concurrence, la structure du marché des services téléphoniques a ainsi sensiblement évolué. Le nombre d'acteurs offrant des services d'accès et de communications s'est réduit, s'orientant vers une structure de marché oligopolistique, avec des opérateurs alternatifs qui renforcent leu r pouvoir de marché. En comparaison au cycle précédent d'analyse des marchés, les acteurs présents sur le marché résidentiel sont moins nombreux mais plus importants. Les principaux opérateurs alternatifs disposent de certains atouts : un accès plus facile au marché des capitaux, une plus forte notoriété ou encore une base de clientèle plus large afin notamment d'amortir leurs coûts fixes.
Enfin, il convient de préciser que les consolidations observées ces dernières années concernent également des acteurs s'apparentant à des marchés télécoms différents. Par exemple, l'opérateur mobile SFR a racheté les activités de téléphonie fixe et ADSL de Télé 2 France et projette d'augmenter la part du capital qu'elle détient sur l'opérateur Neuf Cegetel. Le début de la convergence entre téléphonie fixe et mobile, via notamment l'utilisation des réseaux IP pour acheminer de la voix fixe, mobile et des contenus audiovisuels, entretient le mouvement de consolidation afin notamment pour les opérateurs alternatifs d'être en mesure de concurrencer les offres convergentes des opérateurs intégrés.


III. - BILAN DE LA RÉGULATION ET PERSPECTIVES
POUR LE DEUXIÈME CYCLE D'ANALYSE
III-1. Bilan de la régulation
III-1.1. Une régulation nécessaire au détail lors du premier cycle d'analyse des marchés


Parmi les différents contrôles qu'exerce l'Autorité sur France Télécom, le contrôle tarifaire ex ante a été l'un de ses outils essentiels depuis l'ouverture des marchés de la téléphonie fixe à la concurrence. Ce contrôle a été appliqué depuis la libéralisation du secteur en 1997 aux offres de détail de téléphonie fixe de France Télécom. Il a été imposé en 2005 par l'Autorité dans le cadre du premier cycle d'analyse des marchés, en même temps que plusieurs autres obligations sur les marchés de détail (cf. I-1).
Le contrôle tarifaire et les obligations sectorielles imposées à France Télécom directement sur les marchés de détail ont permis à l'Autorité de vérifier avant leur commercialisation que les offres envisagées par l'opérateur historique ne posaient pas de problèmes concurrentiels, par exemple qu'elles n'entraînaient pas l'éviction de ses concurrents. En l'absence de cette régulation de détail, dans le cas où France Télécom aurait commercialisé des offres non réplicables par ses concurrents, il aurait été nécessaire d'attendre l'issue d'une procédure de l'Autorité ou du Conseil de la concurrence pour que France Télécom retire ou modifie ces offres. Or, les délais induits par de telles procédures peuvent se révéler pénalisants pour les concurrents, en particulier lorsque ceux-ci sont en phase de développement. La régulation des marchés de détail est donc indispensable tant que les concurrents de l'opérateur historique n'ont pas atteint une masse critique.
Par ailleurs, la régulation des marchés de détail et en particulier le contrôle tarifaire présentent une autre vertu : ils peuvent révéler des problèmes concurrentiels pouvant être réglés via la modification ou la création d'offres de gros. En effet, l'analyse de la réplicabilité de chaque offre de détail de France Télécom constitue un moyen de vérifier que les opérateurs alternatifs sont en mesure, techniquement et économiquement, de proposer des services équivalents grâce aux offres de gros disponibles.
La régulation appliquée par l'Autorité sur les marchés de détail a ainsi participé d'une part au développement d'opérateurs alternatifs en mesure de concurrencer efficacement France Télécom et d'autre part à la mise en place puis au calibrage, sur le marché de gros, d'un ensemble de solutions adaptées aux besoins des opérateurs alternatifs.


III-1.2. Des marchés de détail qui tendent vers la maturité


Les parts de marché des opérateurs alternatifs ont globalement augmenté ces dernières années dans les différents segments de marché de la téléphonie fixe. L'investissement de ces derniers dans le déploiement de leurs propres infrastructures combiné à l'action de l'Autorité sur la mise en place d'offres de gros adaptées a contribué à l'amélioration de la situation concurrentielle sur ces marchés.
En ce qui concerne les marchés de l'accès, la boucle locale cuivre et les infrastructures de génie civil sous-jacentes de l'opérateur historique constituent toujours une facilité essentielle. Ainsi, les parts de marchés de l'opérateur historique représentent encore en 2006 plus de 99 % sur le marché résidentiel et 95 % pour les accès non résidentiels. Les opérateurs alternatifs renforcent tout de même leur présence sur les marchés résidentiels de l'accès en ayant recours à la VGAST. De plus, bien que les accès haut débit ne soient pas des substituts aux accès RTC bas débit (puisqu'ils ne sont pas achetés principalement pour des services voix), le développement des offres de dégroupage total, notamment, entraîne tout de même une baisse des revenus de l'opérateur historique sur les marchés résidentiels de l'accès bas débit puisque leur achat entraîne une résiliation des abonnements classiques bas débit. Ainsi la part des accès RTC continuera probablement de décroître dans le marché global des services de communications électroniques, tandis que les opérateurs alternatifs devraient y renforcer leur présence. Concernant le marché non résidentiel, il convient de préciser que l'offre de France Télécom est avant tout prépondérante sur le segment de marché des PME et des professionnels. En effet, l'intensité concurrentielle sur le segment des accès pour grandes entreprises est élevée, les raccordements directs y étant économiquement viables ; en ce qui concerne les TPE, elles ont de plus en plus recours aux offres haut débit, notamment des opérateurs alternatifs. Enfin, sur les marchés résidentiels, les chantiers relatifs au déploiement de la fibre optique, dans lesquels l'Autorité joue un rôle à travers son action de régulation, devraient également accentuer le développement des parts de marché des accès alternatifs.
S'agissant des marchés des communications résidentielles et non résidentielles, on y observe une plus forte présence des opérateurs alternatifs. Ces opérateurs ont pu concurrencer l'opérateur historique de façon effective et durable en s'appuyant notamment sur la sélection du transporteur. De plus, le succès remporté par les offres sur large bande auprès du grand public a conduit à une réallocation des investissements des opérateurs télécoms dans le haut débit. La pression concurrentielle sur le marché des communications résidentielles s'est ainsi accrue avec l'essor des communications VLB, surtout sur le marché résidentiel. En conséquence, on observe que les opérateurs alternatifs ont, avec la sélection du transporteur et la VLB, introduit un degré significatif d'intensité concurrentielle sur les marchés des communications (principalement sur le segment PME dans le marché entreprises et sur l'ensemble du marché résidentiel). La poursuite du déploiement des réseaux des opérateurs alternatifs pour bénéficier notamment de l'offre de dégroupage devrait alimenter une concurrence forte sur le marché des communications. Ainsi la structure concurrentielle du marché des communications téléphoniques est caractérisée par la présence d'un acteur de poids et d'opérateurs alternatifs qui augmentent leurs parts de marchés.
En proposant à un nombre croissant de consommateurs une offre de services téléphoniques de plus en plus étendue, les opérateurs alternatifs ont pu ainsi accroître leur présence sur les marchés télécoms et atteindre une taille significative. Cette tendance permet aux opérateurs, évoluant dans des marchés caractérisés par la présence d'importants coûts fixes, d'exploiter les économies d'échelle associées et ainsi d'être en mesure de renforcer leur position dans le jeu concurrentiel. Elle est accélérée et solidifiée par le mouvement de consolidation observé ces dernières années sur le marché.


III-1.3. Des offres de gros adaptées


L'action de l'Autorité sur les marchés de la téléphonie fixe accorde à l'heure actuelle une place importante à la régulation des marchés amont, via les offres de gros. Ces offres permettent aux opérateurs alternatifs efficaces de concurrencer les offres de détail de France Télécom.
La sélection du transporteur a ainsi été utilisée comme un moyen simple de contourner les barrières à l'entrée sur la boucle locale de l'opérateur historique et de faciliter ainsi l'entrée des opérateurs sur les marchés des communications. Sur les marchés de l'accès, la mise en place de la VGAST sur les accès analogiques en avril 2006 et sur les accès numériques (accès de base) en juillet 2006 a permis aux opérateurs de répondre aux évolutions des attentes des consommateurs finaux de téléphonie fixe pour les offres couplant accès et communications. Il convient de rappeler également que les offres de gros haut débit (dégroupage, bitstream, ADSL nu, DSLE, services de capacité), dans la mesure où elles peuvent être utilisées pour offrir des services voix, ont également permis aux alternatifs de conquérir de nouveaux clients. L'ensemble de ces offres de gros, mises en place par l'Autorité, a pleinement participé (surtout concernant les marchés des communications) au développement des marchés de détail aval, permettant aux opérateurs alternatifs de commercialiser une large gamme d'offres sur les marchés entreprises et résidentiels.
Ainsi, avec l'ouverture à la concurrence du marché des télécommunications, et notamment à travers l'action de l'Autorité sur les différentes offres de gros citées supra, les opérateurs alternatifs ont pu progressivement proposer plus de services et d'innovations au consommateur final, jusqu'à en devenir, pour certains d'entre eux, leurs interlocuteurs uniques.
L'évolution de la stratégie commerciale, depuis le début de la libéralisation du secteur, des acteurs les plus anciennement présents sur le marché des télécoms est illustratif :
― la première offre disponible a été la sélection appel par appel qui permettait aux clients de choisir un opérateur pour chaque appel. Cette offre a été étendue par la suite avec la présélection. Dans les deux cas l'opérateur ne pouvait toutefois offrir aux consommateurs qu'une seule partie des communications (interurbaines et internationales) et dépendait de France Télécom pour une partie importante de l'acheminement des communications (départ d'appel et terminaison d'appel) ;
― avec les évolutions de la présélection et de la sélection appel par appel, l'opérateur a pu vendre à ses clients quasiment toutes les communications téléphoniques (incluant le trafic fixe vers mobiles et le trafic local) ;
― l'arrivée des offres de dégroupage partiel a permis aux opérateurs de proposer aux consommateurs un autre service que la téléphonie (Internet) ;
― avec le développement du dégroupage total et la mise en place de la VGAST (mais aussi de l'ADSL nu), l'opérateur peut désormais devenir l'unique interlocuteur du consommateur (dans le bas débit comme dans le haut débit). Il convient de préciser que sur les marchés professionnels et entreprises, ce sont principalement les raccordements directs qui sont utilisés par l'opérateur pour fournir à leurs grands clients un service complet de téléphonie. Dans ce cas et dans celui du dégroupage, outre le fait que l'opérateur alternatif est devenu l'opérateur unique de son client, il produit de plus lui-même le départ d'appel et dépend moins du réseau de France Télécom pour l'acheminement technique de ses communications.
L'ouverture de la concurrence s'est ainsi concrètement traduite par un accroissement du nombre d'acteurs dans les différents marchés de la téléphonie, par l'élargissement des services offerts aux consommateurs et par un développement de l'innovation soutenu par un investissement toujours plus important des opérateurs alternatifs dans les infrastructures. Cette tendance devrait se poursuivre dans les années à venir avec le déploiement de la fibre optique visant notamment à enrichir encore plus l'offre finale. La concurrence par les services mise en place au début de la libéralisation du secteur est remplacée par une concurrence par les infrastructures, que ce soit en cœur de réseau ou sur le segment d'accès. On pourra s'attendre à la commercialisation d'un couplage de services de plus en plus large, dans lequel les services de communications téléphoniques représenteront une part décroissante des revenus des opérateurs.
Enfin, il convient de préciser pour terminer qu'en adaptant au fur et à mesure son action sur les offres de gros de la téléphonie, l'Autorité intègre dans son intervention les évolutions constatées sur les marchés de détail avals, afin d'y améliorer la situation concurrentielle. En cela, concernant le marché des communications, les problèmes de qualité de service rencontrés sur les offres de gros haut débit sous-jacentes aux offres de communications VLB (sur les marchés résidentiels et non résidentiels), ont conduit l'Autorité à travailler avec les différents acteurs concernés sur l'amélioration de la qualité des offres et à mettre en place des indicateurs pertinents. Dans le même sens, en ce qui concerne la sélection du transporteur, l'Autorité continue à surveiller de près cette offre, et l'adaptera si besoin aux évolutions constatées sur les marchés de détail avals.


III-1.4. Une concurrence appelée à toujours se développer
dans un contexte de dérégulation des marchés de détail


Dans les premiers temps suivant l'ouverture des marchés à la concurrence, la régulation des marchés de détail a été appliquée comme un remède complémentaire à la construction des offres de gros sur les marchés de détail amont. Dès lors que les offres de gros sont effectives et opérationnelles, et que les obligations imposées sur ces offres permettent d'influencer favorablement le développement du marché, la régulation des marchés de détail n'est plus nécessaire au développement de la concurrence. Ainsi, l'Autorité ayant constaté que les offres de gros régulées permettent aux opérateurs alternatifs de bâtir des offres compétitives sur le marché résidentiel national, a procédé à une revue du dispositif de régulation des marchés de détail de la téléphonie fixe. En 2006 et 2007, deux décisions de l'Autorité ont conduit à un allégement des obligations de détail de France Télécom sur les marchés résidentiels des services téléphoniques. Depuis l'allégement des obligations de France Télécom, la concurrence continue de se développer sur ces marchés, les parts de marché des opérateurs alternatifs sont toujours en hausse sur la VLB et le nombre de contrats d'abonnement aux alternatifs via la VGAST augmente également. En outre à ce jour et depuis ces allégements, le Conseil de la concurrence n'a été saisi d'aucune plainte émanant des acteurs du marché contre une potentielle pratique anticoncurrentielle de l'opérateur historique sur les marchés de détail des communications et des accès RTC. L'action de régulation sur les marchés de gros semble donc suffire à l'heure actuelle à permettre le développement d'une concurrence effective et durable sur les marchés résidentiels de la téléphonie fixe.


III-2. Perspectives


Les interventions du régulateur visent à permettre l'établissement des conditions favorables au développement d'une concurrence effective et ont pour contrainte de rester proportionnées à cet objectif. La régulation se doit donc d'évoluer en fonction de la situation concurrentielle existant sur les marchés. L'Autorité a appliqué une régulation forte à l'ouverture des marchés qu'elle a progressivement allégée eu égard aux évolutions du fonctionnement des marchés. Elle entend poursuivre cette approche dynamique et d'allégement proportionné dans le prochain cycle d'analyse des marchés.


III-2.1. Vers la suppression complète de la régulation asymétrique des marchés de détail


Après avoir observé que les conditions de fonctionnement de certains marchés de détail de la téléphonie fixe avaient évolué notamment sous l'effet de la régulation (avec l'existence d'offres de gros effectives), l'Autorité a d'abord entrepris une démarche d'allégement des obligations de détail de France Télécom sur les marchés résidentiels (communications et accès). L'Autorité entend poursuivre son action de dérégulation des marchés de détail en supprimant les obligations de détail restantes sur les marchés résidentiels et en étendant la dérégulation aux marchés non résidentiels des services téléphoniques, mettant ainsi fin à la régulation asymétrique de France Télécom sur les marchés de détail de la téléphonie fixe. Sur les segments professionnels et entreprises, l'Autorité considère, comme pour le segment résidentiel, que les offres de gros disponibles (sélection du transporteur et VGAST sur les marchés bas débit, dégroupage, DSLE, bistream, services de capacité, sur les marchés haut débit puisqu'elles participent à la fourniture de services voix), permettent en effet aux opérateurs alternatifs de commercialiser des offres innovantes sur le territoire national. Cependant, dans la mesure où la qualité de service constitue un enjeu plus important sur le segment entreprises, une attention particulière sera portée par l'Autorité sur la qualité de service des offres de gros disponibles.
L'Autorité souligne, s'agissant des marchés résidentiels comme des marchés non résidentiels, qu'elle ne disposera plus, au terme de la dérégulation des marchés de détail de la téléphonie fixe, de pouvoir d'intervention ex ante sur les marchés de détail (et notamment de pouvoir d'opposition du contrôle tarifaire), mais que France Télécom ne sera pas pour autant libre de recourir à des pratiques anticoncurrentielles. La suppression des obligations ex ante n'implique pas nécessairement la légalité pour l'opérateur historique des pratiques qu'elles proscrivaient. Le droit commun de la concurrence s'appliquant sur les marchés concernés, le Conseil de la concurrence continuera d'assurer son respect, protégeant ainsi les acteurs du secteur d'éventuels agissements anticoncurrentiels. Les concurrents de France Télécom pourront également dénoncer d'éventuelles pratiques anticoncurrentielles de l'opérateur historique devant le Conseil de la concurrence. Enfin, afin de faciliter ces démarches et d'améliorer la visibilité des acteurs, l'Autorité a publié ― à titre indicatif ― un modèle d'effet de ciseaux tarifaires sur les communications de téléphonie fixe. Ce modèle, qui a servi au contrôle tarifaire ex ante, permettra dorénavant aux opérateurs alternatifs de défendre leurs intérêts ex post en mettant en évidence les éventuels abus de position dominante. L'Autorité continuera également de surveiller activement les marchés de détail, afin notamment d'adapter la régulation qu'elle appliquera aux offres de gros et de saisir le Conseil de la concurrence en cas de comportements potentiellement anticoncurrentiels.
S'agissant spécifiquement des marchés résidentiels, l'Autorité rappelle également que l'allégement de la régulation sur les marchés de détail de la téléphonie fixe ne supprime pas l'ensemble des moyens visant à contrôler et garantir le respect des intérêts du consommateur final. Le législateur a souhaité l'existence d'un service universel, et l'opérateur en charge de ce service, France Télécom, est tenue jusqu'en 2009 de fournir à tous « un service téléphonique de qualité à un prix abordable » (53). Puis en 2009, à nouveau, un opérateur sera désigné pour cette mission de service universel. L'Autorité continuera donc de veiller à la protection du consommateur via le service universel. Les prestations relevant du service universel sont soumises au contrôle de l'ARCEP, qui assure notamment leur caractère abordable et non discriminatoire. A cette fin, un encadrement tarifaire pluriannuel a été mis en place par l'Autorité sur la période 2005-2008 afin de répercuter sur les tarifs des communications téléphoniques du service universel les gains d'efficacité de l'opérateur historique et la baisse des charges externes d'interconnexion et d'accès (notamment les baisses de terminaison d'appel mobile imposées par l'Autorité) et d'assurer une baisse des tarifs des communications téléphoniques. L'Autorité définira pour les années à venir, et à la suite de l'appel à candidatures en vue de la désignation d'un opérateur chargé de fournir la composante service téléphonique du service universel, un nouvel encadrement des tarifs des communications relevant du service universel.

(53) Cf. article L. 35-1 du code des postes et des communications électroniques.