IV-2.6.4. Processus de transition entre les modalités
Comme exposé précédemment, les différentes réunions multilatérales avec le secteur ainsi que les réponses à la consultation publique d'avril 2008 de l'Autorité ont montré que France Télécom et les opérateurs alternatifs soutiennent la fermeture à terme des modalités de sélection du transporteur actuelles, à savoir la modalité « hors ZLT & 09AB »et la modalité excluant les appels à destination des numéros de la tranche 09AB (appelée par la suite modalité « hors 09AB »). A terme, il existerait une unique modalité de sélection du transporteur définie comme comprenant l'ensemble des communications interpersonnelles.
Cependant, les opérateurs et leurs clients doivent pouvoir bénéficier de suffisamment de temps pour leur permettre de gérer la transition, tant d'un point de vue opérationnel que du point de vue des aspects contractuels et légaux qui s'imposent à eux.
IV-2.6.4.1. Principes de transition vers la nouvelle modalité
La création de la nouvelle modalité incluant les appels à destination de la tranche 09AB permettra aux opérateurs de proposer à leurs nouveaux clients en sélection du transporteur de choisir d'utiliser cette modalité. Dans le cas général, l'activation d'un client sur cette modalité se fera de manière comparable à ce qui est pratiqué à la date de cette décision pour les anciennes modalités, c'est-à-dire ligne par ligne. Un opérateur sera donc en mesure de proposer à chacun de ses clients, au cas par cas, de les présélectionner sur une des trois modalités prévues.
Cependant, lors des discussions avec le secteur, il est apparu nécessaire de prévoir également des demandes groupées qui permettent aux opérateurs d'activer sur la nouvelle modalité tout ou partie de leurs clients « en masse » et de manière simultanée, afin de mutualiser les opérations à réaliser au niveau du réseau de France Télécom, et ainsi de réduire les coûts induits par opérations. Les opérateurs ont la possibilité de conserver une partie de leurs clients sur les anciennes modalités s'ils le décident. De plus, ces demandes groupées pourront inclure des clients anciennement présélectionnés comme les clients nouvellement présélectionnés.
Dans sa consultation publique, l'Autorité a interrogé les acteurs sur le calendrier et le nombre de demandes groupées nécessaires pour réaliser ces opérations. France Télécom a indiqué qu'elle proposait de procéder en deux étapes, le 1er février 2009 et le 1er octobre 2009. Certains opérateurs alternatifs ont demandé à effectuer une demande groupée par trimestre au cours de l'année 2009. L'Autorité estime que les opérateurs doivent pouvoir disposer de délais et d'un nombre raisonnable de demandes groupées afin de gérer cette transition. Les opérateurs alternatifs et France Télécom devront s'entendre de manière concertée afin de déterminer le nombre de demandes groupées et le calendrier à suivre. Les opérateurs devront veiller, lors de la commercialisation de ces offres, à respecter les dispositions légales applicables, notamment celles du code de la consommation. L'Autorité estime a priori raisonnable de prévoir trois vagues de demandes groupées, dont deux en 2009 et une en 2010, la première ayant lieu dans les meilleurs délais et au plus tard le 1er février 2009, afin de permettre un étalement des demandes groupées suffisant pour tous les opérateurs.
Par ailleurs, étant donné que les opérateurs alternatifs auront la possibilité de conserver une partie de leurs clients sur les anciennes modalités, un opérateur qui souhaiterait utiliser les trois modalités aura besoin de disposer de trois préfixes de sélection du transporteur distincts. Or ce nombre de préfixe est pour le moment limité à deux par opérateurs dans le cadre de la décision n° 2005-1085. L'Autorité estime par conséquent qu'il sera nécessaire de faire évoluer ses règles de gestion afin de permettre aux opérateurs qui en feraient la demande de disposer provisoirement d'un troisième préfixe de sélection du transporteur.
Enfin, ces demandes groupées ayant comme objet la mutualisation des opérations sur le réseau de France Télécom, elles n'induisent pas les mêmes coûts qu'une activation de présélection ligne par ligne comme dans le cas général, et ne doivent donc pas faire l'objet de la même tarification. Par conséquent, France Télécom devra proposer une offre tarifaire forfaitaire par demande groupée.
IV-2.6.4.2. Principes de fermeture des anciennes modalités
a) Principes communs
Les modalités devant être fermées à terme sont la modalité ne comprenant pas les appels locaux (modalité « hors ZLT & 09AB ») et la modalité ne comprenant pas les appels à destination des numéros de la tranche 09AB (modalité « hors 09AB »). L'Autorité n'a reçu aucune réponse à sa consultation publique qui rejette ces fermetures. Il est nécessaire de prévoir une période de transition raisonnable pour permettre aux opérateurs de gérer leur transition vers la nouvelle modalité. Par conséquent, pour chacune des modalités qui doivent être fermées à terme, l'Autorité estime, comme elle l'a proposé dans sa consultation publique, qu'il convient de procéder de la manière suivante :
― une date D1 détermine l'arrêt des commandes d'activation de présélection sur la modalité ;
― une date D2 détermine la fermeture totale de la modalité.
La date D1 d'arrêt d'activation sur les anciennes modalités ne saurait intervenir avant l'ouverture de la nouvelle modalité, qui doit intervenir dans les meilleurs délais et au plus tard le 1er février 2009. Par ailleurs, l'Autorité constate qu'il ressort des réponses des opérateurs à sa consultation publique que les opérateurs alternatifs n'émettent pas d'objection à ce que cet arrêt de commandes intervienne au moment de l'ouverture de la nouvelle modalité, à condition qu'ils bénéficient d'un préavis suffisant. Par conséquent, l'Autorité estime que l'arrêt des commandes sur les modalités « hors ZLT & 09AB » et « hors 09AB » pourrait intervenir peu de temps après la date de la première vague de demandes groupées. L'Autorité juge que le 1er avril 2009 est une date raisonnable pour l'arrêt des activations.
Le choix de la date D2 doit être fait afin de prendre en compte les délais nécessaires pour que tous les clients des opérateurs de sélection du transporteur n'utilisent plus une ancienne modalité. Par conséquent, il apparaît que les dates D2 d'arrêt total de la modalité « hors ZLT & 09AB » et de la modalité « hors 09AB » peuvent différer, notamment à la lumière des critères suivants :
― le nombre d'opérateurs qui utilisent encore la modalité ;
― le nombre de lignes activées sur ces modalités ;
― les difficultés opérationnelles prévues par les opérateurs pour gérer leurs clients.
France Télécom doit informer les opérateurs alternatifs ayant recours à son offre de sélection du transporteur des modifications prévues sur ces modalités (arrêt des commandes, fermeture définitive et création d'une nouvelle modalité) ainsi que du calendrier retenu par l'Autorité, afin que ces opérateurs soient en mesure de gérer leurs propres offres basées sur la sélection du transporteur. Afin de donner un préavis suffisant aux opérateurs alternatifs, France Télécom doit les informer dans les trente jours de la notification de la présente décision.
b) Modalité « hors ZLT & 09AB »
D'après les échanges que l'Autorité a eus avec France Télécom, il n'existe plus à l'heure actuelle qu'un seul opérateur qui utilise la modalité « hors ZLT & 09AB » et pour un nombre très réduit de lignes. Dans sa réponse à la consultation publique de l'Autorité, cet opérateur a estimé qu'il serait en mesure d'effectuer la migration de ses clients sur la nouvelle modalité à condition que le calendrier soit raisonnable, à savoir qu'il soit prévu un échelonnement des demandes groupées par trimestre sur l'année 2009. Sur la base des échanges que l'Autorité a pu avoir avec cet opérateur, une fermeture de la modalité « hors ZLT & 09AB » début 2010 apparaît compatible avec la gestion par l'opérateur de ses clients utilisant cette modalité.
L'Autorité estime donc qu'un arrêt total de la modalité « hors ZLT & 09AB » pourrait intervenir après la dernière vague de demandes groupées effectuée sur la nouvelle modalité et ne saurait avoir lieu avant 2010. Comme exposé précédemment, l'Autorité favorise une approche consistant à effectuer une dernière vague de demandes groupées au cours de l'année 2010. Afin de donner de la lisibilité aux opérateurs ainsi qu'à leurs clients utilisant encore cette modalité, l'Autorité estime que la date de fermeture de cette modalité doit être précisée dans cette décision, alors même que la dernière date de demandes groupées doit être discutée entre les acteurs. L'Autorité estime qu'une fermeture de la modalité « hors ZLT & 09AB » au 1er juin 2010 laisse un délai raisonnable aux opérateurs pour effectuer leurs demandes groupées sur la nouvelle modalité et permet à l'opérateur qui utilise encore la modalité « hors ZLT & 09AB » de gérer son parc clients sans contrevenir aux dispositions légales applicables.
c) Modalité « hors 09AB »
La quasi-totalité des clients de la sélection du transporteur utilise actuellement la modalité « hors 09AB ». Par conséquent, contrairement à la modalité « hors ZLT & 09AB », la totalité des opérateurs est concernée par la fermeture de la modalité « hors 09AB ». Par ailleurs, cette modalité est utilisée par tous les types de clients, résidentiels, acheteurs publics et entreprises. D'après les échanges que l'Autorité a eus avec les opérateurs, il ressort que ces derniers ont estimé être en mesure de gérer la suppression de la modalité « hors 09AB » dans des délais relativement brefs, voire simultanément à l'ouverture de la nouvelle modalité.
Cependant, du fait de l'importance du nombre d'opérateurs et de clients utilisant la modalité « hors 09AB », l'Autorité juge nécessaire de prévoir une période de transition plus longue que pour la modalité « hors ZLT & 09AB », notamment afin de ne pas placer les opérateurs dans la situation de contrevenir aux clauses de leurs contrats ou aux dispositions légales.
L'Autorité estime qu'un délai raisonnable de fermeture de la modalité « hors 09AB » devrait notamment prendre en considération la durée de vie d'un marché public pour un lot de communications téléphoniques. A la suite de discussions avec des acheteurs publics, l'Autorité a pu constater que ce type de contrat n'excédait pas quatre ans. Par ailleurs, un délai de quatre ans semble suffisant pour que les opérateurs gèrent leurs relations contractuelles avec leurs clients résidentiels et leurs clients entreprises suivant les règles applicables. Etant donné qu'aucune activation sur la modalité « hors 09AB » ne pourra intervenir à compter du 1er avril 2009, comme exposé précédemment, il semble donc raisonnable de prévoir que les opérateurs auront eu la possibilité de gérer l'ensemble de leurs clients, notamment les acheteurs publics, au 1er avril 2013. Le 1er avril 2013 peut donc être retenu comme la date de fermeture de la modalité « hors 09AB ».
d) Fermeture anticipée en cas de non-utilisation des modalités
L'Autorité s'est attachée à définir un délai raisonnable pour la fermeture totale des modalités « hors ZLT & 09AB » et « hors 09AB ». Cependant, l'Autorité estime qu'au cas où ces modalités ne seraient plus utilisées par aucun opérateur avant leur date de fermeture programmée, alors il serait légitime que France Télécom puisse fermer ces modalités de manière anticipée et libérer les ressources associées dans son réseau, après information préalable de son intention à l'ensemble des opérateurs utilisateurs de l'offre de sélection du transporteur, recueil de leurs commentaires et après accord de l'Autorité.
IV-2.6.5. Règles applicables à la sélection du transporteur
IV-2.6.5.1. Nombre d'opérateurs pouvant être présélectionnés sur une ligne donnée
Dans sa décision n° 99-1077, l'Autorité avait estimé qu'il convenait de limiter à un le nombre d'opérateurs pouvant être présélectionnés sur une ligne donnée, notamment dans un souci de simplicité et de clarté pour les utilisateurs de la présélection. L'Autorité soulignait que les utilisateurs conservaient la possibilité de recourir à d'autres opérateurs dans le cadre de la sélection appel par appel.
L'Autorité estime que ces conditions sont toujours justifiées et note qu'elles n'ont pas été remises en cause lors de sa consultation publique du 11 avril 2008. L'Autorité juge donc opportun de continuer à limiter à un le nombre d'opérateurs présélectionnés sur une ligne donnée et de permettre à un utilisateur client d'une offre principalement téléphonique de France Télécom de recourir à d'autres opérateurs dans le cadre de la sélection appel par appel.
IV-2.6.5.2. Procédures opérationnelles de la présélection
L'activation de la présélection pour les utilisateurs qui le demandent nécessite la mise en œuvre de procédures d'échanges d'informations et de commandes entre opérateurs et le respect par France Télécom de certaines obligations.
IV-2.6.5.3. Principe du guichet unique
La gestion opérationnelle de la présélection et les échanges d'information entre les opérateurs se trouvent simplifiés si un point de contact unique est identifié au sein de chaque opérateur. France Télécom dispose d'une entité centralisée chargée de la gestion de la présélection qui est le point de contact unique qui est contacté par les entités en charge de la présélection chez les opérateurs. Il est distinct des services commerciaux de France Télécom en relation avec les clients finals, afin de garantir la confidentialité nécessaire au traitement des demandes de présélection.
D'une manière générale, France Télécom doit garantir un traitement des demandes de présélection respectant les dispositions prévues dans le décret n° 1997-188 du 3 mars 1997 relatif à l'interconnexion, en particulier le deuxième alinéa de l'article D. 99-6 : « Les opérateurs disposant d'informations dans le cadre d'une négociation ou de la mise en œuvre d'un accord d'interconnexion ne peuvent les utiliser qu'aux seules fins explicitement prévues lors de leur communication. En particulier, ces informations ne sont pas communiquées à d'autres services, filiales ou partenaires pour lesquels elles pourraient constituer un avantage concurrentiel. »
IV-2.6.5.4. Délais d'activation d'une présélection
Il s'agit du délai entre la réception d'une demande par France Télécom et l'activation de la présélection. L'Autorité estime que ce délai d'activation ne peut excéder 72 heures.
IV-2.6.5.5. Courrier envoyé a posteriori par France Télécom
Dans l'hypothèse où France Télécom déciderait d'envoyer un courrier à ses abonnés ayant demandé la présélection de leur ligne, les principes suivants devraient être respectés :
― le courrier envoyé se limite à informer l'abonné que son service a changé (i.e. que ses communications seront désormais acheminées par un opérateur tiers), et ne devrait pas pouvoir être perçu comme une tentative de récupérer le client, ou de dénigrer les services de l'opérateur présélectionné. En particulier, il ne doit contenir aucune information de nature commerciale (information sur des services offerts par France Télécom, par exemple) ;
― les coûts d'envoi ne sont pas répercutés, directement ou indirectement, sur les opérateurs ;
― conformément aux dispositions de l'article D. 99-6 du code des postes et des communications électroniques, l'envoi du courrier ne doit pas avoir pour conséquence d'informer, directement ou indirectement, les services commerciaux de détail de France Télécom des demandes de présélection des clients ;
― le courrier n'est envoyé qu'après la mise en œuvre effective de la présélection. France Télécom veille en particulier à ce que l'opérateur présélectionné soit informé avant le client de l'activation de la présélection ;
― le courrier ne doit pas contenir le nom de l'opérateur présélectionné car le client final n'est pas nécessairement en contact direct avec cet opérateur, et peut notamment avoir contractualisé avec une société de commercialisation de services. A terme, le courrier pourrait contenir le nom de l'opérateur commercial.
IV-2.6.5.6. Conditions non discriminatoires
Les demandes de présélection ou de modification de présélection doivent être traitées par France Télécom dans des conditions non discriminatoires, notamment en termes de délais et de procédures, conformément aux dispositions du code des postes et télécommunications, en particulier du deuxième paragraphe de l'article D. 99-11.
Afin de respecter ce principe de non-discrimination, il est nécessaire que France Télécom demande et obtienne une preuve de toute demande qui lui est directement adressée par le client afin de supprimer une présélection et bénéficier des services de communication de France Télécom.
En outre, des engagements similaires à ceux pris par les opérateurs présélectionnés doivent s'appliquer à France Télécom :
― conserver la preuve pendant toute la période où la demande du client reste valide, et au moins un an au-delà ;
― transmettre la preuve de la demande du client dans les meilleurs délais, et dans un délai maximal de trois jours, en cas de litige ;
― envoyer systématiquement les preuves des demandes d'annulation de présélection à un opérateur présélectionné qui aurait constaté des irrégularités et obtenu l'accord de l'Autorité.
Par ailleurs, France Télécom doit traiter toutes les demandes relatives à la présélection (activation, modification ou suppression), quelle que soit leur origine, dans des délais équivalents.
IV-2.6.5.7. Modification de ligne
Pour toute modification de ligne n'affectant pas le numéro de ligne, la présélection est maintenue par France Télécom. Lorsque le numéro de ligne est modifié, France Télécom informe sans délai l'opérateur concerné du nouveau numéro de ligne. L'opérateur concerné doit reformuler la demande d'activation de présélection auprès de France Télécom, sans qu'un nouveau mandat soit nécessaire.
IV-2.7. Vente en gros de l'accès au service téléphonique
IV-2.7.1. Contexte
Dans sa décision d'analyse des marchés n° 2005-0571, en application de l'article L. 38 (3°) du CPCE, 1'Autorité a décidé d'imposer à France Télécom « de faire droit aux demandes raisonnables d'accès permettant aux opérateurs alternatifs de proposer des offres compétitives et globales de service téléphonique, englobant une offre d'accès analogique ou numérique de base (lignes isolées ou groupements de lignes) au service téléphonique, et une offre de communications à destination de l'ensemble des numéros du plan national de numérotation ». Cette obligation faisait suite notamment à un engagement pris par France Télécom de proposer une offre de vente en gros de l'accès au service téléphonique.
En 2006, dans sa décision n° 2006-0162, l'Autorité a défini les modalités techniques et tarifaires de l'offre VGAST, qui a été créée la même année.
IV-2.7.2. Nécessité de l'existence d'une offre de vente en gros
de l'accès au service téléphonique
En 2005, l'Autorité avait estimé que l'existence d'une offre de revente de l'abonnement était nécessaire pour deux raisons principales : l'insuffisance des offres de gros de dégroupage et de bitstream régional, d'une part, et la nécessité d'un remède complémentaire à la sélection du transporteur, d'autre part.
Concernant les offres de gros haut débit, il apparaît aujourd'hui que de nombreux opérateurs alternatifs tentent de concurrencer les services de l'opérateur historique en proposant principalement des offres composées de plusieurs services, par exemple les offres « triple play ». Toutefois, l'Autorité a démontré dans la partie relative à la délimitation des marchés que de telles offres n'étaient pas substituables à une offre principalement dédiée à la téléphonie, tel l'abonnement principal de France Télécom. Ainsi, sur le segment résidentiel et le bas de segment professionnel, les opérateurs ne proposant à ce jour pas d'offres principalement dédiées à la téléphonie via l'achat d'offres de gros haut débit, seule l'offre VGAST permet aux opérateurs alternatifs de concurrencer les offres d'abonnement de France Télécom auprès de la clientèle ne désirant pas souscrire d'offres de type « triple play ».
Ensuite, si la sélection du transporteur permet aux opérateurs de concurrencer les offres de communications de France Télécom, le fait pour France Télécom de vendre par ailleurs l'accès constitue un avantage concurrentiel indéniable. En tant qu'opérateur d'accès, France Télécom bénéficie en effet d'un accès privilégié à l'information sur les clients potentiels, ce qui lui facilite la conservation ou la reconquête de clients. De plus, les clients en sélection du transporteur reçoivent forcément au moins deux factures, l'une de France Télécom, les autres des opérateurs sélectionnés, ce qui peut constituer un frein pour certains clients. Enfin, les opérateurs en sélection du transporteur ne sont pas en mesure de proposer des offres couplant accès et communications. Or ce type d'offre semble correspondre à une véritable tendance du marché puisque l'ensemble des opérateurs ayant mis en œuvre la VGAST, ainsi que France Télécom, proposent désormais de tels couplages.
L'offre VGAST a connu une croissance assez importante en 2007, et le parc d'abonnés achetant de la VGAST était supérieur à 700 000 à la fin de l'année.
En conséquence, l'Autorité estime qu'il convient de continuer d'imposer à France Télécom de faire droit aux demandes raisonnables d'accès permettant aux opérateurs alternatifs de proposer des offres compétitives et globales de service téléphonique, englobant une offre d'accès analogique ou numérique de base (lignes isolées ou groupements de lignes) au service téléphonique et une offre de communications à destination de l'ensemble des numéros du plan national de numérotation.
Cette obligation est un remède d'interconnexion et d'accès imposé au titre de l'influence significative exercée par France Télécom sur les marchés de détail de l'accès au service téléphonique et sur le marché de gros du départ d'appel.
La décision n° 2006-0162 prévoit les conditions techniques et tarifaires dans lesquelles France Télécom propose son offre de VGAST. Ces modalités pourront être modifiées par l'Autorité, conformément aux articles D. 303 et D. 310 du CPCE.
Certains opérateurs insistent sur la nécessité de revoir les tarifs de l'offre VGAST à la baisse. Ils souhaitent également, afin d'assurer la réplicabilité de l'ensemble des offres de détail de France Télécom, que plusieurs améliorations soient apportées aux offres de gros disponibles (dégroupage, VGAST, etc.), tant au niveau de la qualité de service que des processus. Neuf Cegetel donne ainsi une liste de plusieurs points d'amélioration précis à apporter à l'offre VGAST.
L'Autorité signale qu'une revue des modalités de la VGAST est en cours afin de poursuivre l'amélioration de la fonctionnalité de l'offre et qu'elle examinera l'ensemble des demandes présentées à cette occasion. La tarification de la VGAST est orientée vers les coûts et est par conséquent analysée au vu des résultats des exercices de comptabilisation des coûts de l'opérateur historique. Néanmoins, l'espace économique existant au niveau de l'offre VGAST analogique étant relativement faible, l'Autorité s'efforcera d'améliorer fonctionnellement l'offre afin de minimiser les coûts additionnels supportés par les opérateurs pour sa mise en œuvre. Par ailleurs, il est de la responsabilité de France Télécom, du fait de son influence significative sur les marchés de la téléphonie fixe, de veiller à ce qu'il existe un espace économique entre ses offres de détail et ses offres de gros.
IV-2.8. Publication d'une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion
et d'accès dite « Téléphonie fixe »
En application de l'article L. 38-I du CPCE, l'Autorité estime justifié de maintenir l'obligation de publication d'une offre de référence par France Télécom, en application de ses obligations de non-discrimination et de transparence.
Une offre technique et tarifaire ou offre de référence poursuit quatre objectifs :
― concourir à la mise en place de processus transparents, pour limiter la capacité de l'opérateur exerçant une influence significative à déstabiliser ses concurrents ou favoriser ses filiales ;
― donner de la visibilité aux acteurs sur les termes et les conditions dans lesquelles ils s'interconnectent avec l'opérateur sur qui pèse l'obligation ;
― pallier le déficit de pouvoir de négociation des opérateurs acheteurs ;
― permettre l'élaboration d'une offre cohérente de prestations aussi découplées que possible les unes des autres pour permettre à chaque opérateur de n'acheter que les prestations dont il a besoin.
L'offre de référence contribue ainsi grandement à la stabilité du marché, et permet aux opérateurs alternatifs de développer un plan d'affaires et de programmer leurs investissements avec une visibilité suffisante sur des paramètres qui conditionnent fortement leur structure de coûts.
L'Autorité estime donc que cette obligation est nécessaire et proportionnée aux objectifs mentionnés à l'article L. 32-1, notamment aux 2°, 3° et 4°, pour certaines prestations d'interconnexion particulièrement décisives pour les opérateurs, et détaillées en annexe B de la présente décision. Cette obligation doit également porter sur les prestations d'accès associées permettant l'utilisation effective de ces offres par les opérateurs pour proposer des services sur les marchés de détail : les prestations d'accès aux sites d'interconnexion et la prestation de reversement.
Dans un souci de lisibilité, France Télécom constituera une unique offre de référence et a minima pour les prestations d'interconnexion et d'accès aujourd'hui disponibles. Cette offre se décomposera en une partie décrivant notamment les conditions techniques de fourniture de l'offre et une partie tarifaire pour chacune desdites prestations.
Par ailleurs, au regard des mêmes objectifs, et pour les mêmes raisons, l'obligation de publier une offre technique et tarifaire d'accès apparaît nécessaire et proportionnée pour les prestations d'accès relatives à la sélection et la présélection du transporteur ainsi que celles relatives à l'offre de vente en gros de l'accès au service téléphonique.
En application des II et III de l'article D. 307 du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité estime justifié que cette offre comprenne, outre les prestations d'accès devant y figurer, les conditions contractuelles types relatives aux tarifs, aux conditions de souscription, aux modalités d'accès à l'offre, les engagements de qualité de services, ainsi que les informations répondant à l'obligation de transparence et de non-discrimination. En particulier, tous les tarifs devront être effectivement inscrits dans l'offre de référence et non uniquement dans les conventions conclues entre les parties.
En outre, il importe que la tarification de certaines prestations « sur devis » ne soit envisagée qu'à titre exceptionnel. Le cas échéant, il reviendra à France Télécom de justifier des contraintes l'empêchant d'établir un tarif fixé à l'avance dans l'offre de référence.
L'Autorité précise en annexe de la présente décision la liste minimale des prestations d'interconnexion et d'accès devant figurer à l'offre, y compris les prestations qui leur sont associées, les informations à publier, le niveau de détail requis et le mode de publication.
Concernant l'offre de VGAST, France Télécom détaillera notamment, dans son offre « Téléphonie fixe », l'ensemble des prestations décrites dans la décision n° 2006-0162, leurs conditions techniques et tarifaires et les processus de commande sous-jacents, dans une partie identifiée à cet effet.
Pour en assurer une diffusion satisfaisante, l'Autorité souhaite que l'offre de référence soit toujours publiée sur un site Internet librement accessible. Certaines informations, concernant notamment la localisation et les caractéristiques d'équipements de réseau et pouvant être qualifiées de sensibles, pourront être mises en annexe, afin d'en limiter la diffusion aux seuls opérateurs.
Enfin, pour des raisons évidentes de protection des investissements réalisés par les opérateurs alternatifs, les évolutions que France Télécom pourrait apporter à son offre de référence « Téléphonie fixe » devront respecter un délai de préavis suffisant selon la nature de l'évolution proposée et qui ne saurait être inférieur à un mois, excepté dans les cas d'évolutions des tarifs à la baisse, pour lesquelles une application immédiate peut être effectuée, le cas échéant. En cas d'évolution tarifaire à la hausse, ce préavis sera de trois mois minimum, et il sera porté à douze mois en cas d'évolution de nature à contraindre les opérateurs à modifier leurs installations, sauf accord mutuel ou si l'Autorité en décide autrement. Cette condition apparaît essentielle pour garantir aux opérateurs une visibilité suffisante sur leurs investissements. Elle est donc adaptée au respect des objectifs d'égalité des conditions de la concurrence fixés à l'article L. 32-1 du code, sans pour autant représenter une charge excessive pour France Télécom.
L'obligation de publication avec préavis pour l'entrée en vigueur des modifications apportées s'entend sauf décision contraire de l'Autorité ou de toute autre autorité ou juridiction habilitée à imposer une telle modification. Certains cas particuliers peuvent en effet nécessiter une mise en œuvre immédiate des évolutions de l'offre. Ce cas peut notamment se rencontrer à la suite d'une décision de règlement de différend ou d'une décision de modification de l'offre de référence. De même, aucun préavis ne sera nécessaire en cas de modification consistant simplement à répercuter une modification, à la hausse ou à la baisse, décidée par un autre opérateur et qui impacte directement une des conditions inscrites à l'offre.
IV-2.9. Observations de la Commission européenne
La Commission européenne ne formule aucune observation sur les obligations non tarifaires imposées à France Télécom.
IV-3. Obligations non tarifaires imposées aux opérateurs puissants sur les marchés
de gros de la terminaison d'appel autres que France Télécom
L'influence significative qu'exerce chaque opérateur alternatif sur le marché de gros de la terminaison d'appel sur son réseau rend nécessaire l'imposition de remèdes sur ces marchés.
L'Autorité justifie dans cette partie la nécessité et la proportionnalité des obligations non tarifaires qu'elle impose à chaque opérateur alternatif : l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès (IV-3.1), l'obligation de non-discrimination (IV-3.2) et l'obligation de transparence (IV-3.3).
Ces obligations sont imposées à chaque opérateur alternatif pour la durée de validité de cette analyse, sans préjudice de l'éventuel réexamen que l'Autorité pourrait être amenée à anticiper conformément à l'article D. 303 du CPCE.
IV-3.1. Obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès
L'article L. 38-I (3°) du code des postes et des communications électroniques prévoit que l'Autorité peut imposer des obligations de faire droit aux demandes raisonnables d'accès aux opérateurs exerçant une influence significative sur un marché pertinent.
L'Autorité estime nécessaire d'imposer à chaque opérateur fixe déclaré puissant sur au moins un marché pertinent de telles obligations, et en précise la teneur ci-dessous.
D'une manière générale, tout refus de l'opérateur exerçant une influence significative de fournir ces prestations devra être dûment motivé, et les conditions techniques et tarifaires de ces prestations devront être suffisamment détaillées pour faire apparaître les divers éléments propres à répondre à la demande. En particulier, la fourniture d'une prestation d'accès ne doit pas être subordonnée à la fourniture de services, de moyens ou de toute autre ressource, qui ne seraient pas nécessaires à la fourniture de cette prestation.
En premier lieu, compte tenu des investissements consentis par les opérateurs pour se déployer et s'interconnecter sur l'un ou l'autre des réseaux des OBL, et en vertu de l'article D. 310 (3°) du CPCE, il est proportionné d'imposer à chacun des OBL de ne pas retirer un accès déjà accordé à un opérateur, sauf accord préalable exprès de l'Autorité ou du cocontractant concerné, conformément à l'objectif de développement efficace dans les infrastructures et de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du code précité.
De plus, chaque opérateur alternatif réputé exercer une influence significative au titre de la présente analyse est tenu de faire droit à toute demande raisonnable d'accès aux prestations de terminaison d'appel vers l'ensemble de ses numéros. Ces prestations étant déjà fournies aujourd'hui, cette obligation est proportionnée.
Comme cela est prévu par l'article L. 38-I du CPCE, cette obligation s'applique également aux demandes raisonnables de fourniture de prestations connexes permettant le raccordement physique et logique au réseau de l'OBL et nécessaires à l'achat des prestations de terminaison d'appel.
D'une manière générale, les opérateurs déclarés puissants devront faire droit aux demandes raisonnables des opérateurs, lorsque le caractère proportionné de l'obligation qui en découlera aura été vérifié, en conformité avec les dispositions de l'article L. 38-V du code.
Enfin, les opérateurs exerçant une influence significative sur le marché de la terminaison d'appel sur leur propre réseau doivent s'engager sur un niveau satisfaisant de qualité de service des prestations de raccordement physique et logique à leur réseau (20), dans la mesure où la livraison ou la réparation des accès en fonction d'un délai précis constitue une modalité de mise en œuvre concrète de l'obligation de faire droit aux demandes d'accès raisonnables.
Ils devront également, conformément à l'article D. 310 (2°), négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent des prestations d'accès à leur réseau, afin d'une part de minimiser les cas de litige et d'autre part de ne pas profiter de l'influence significative qu'ils exercent sur leur marché pertinent pour durcir les négociations avec les opérateurs.
Ces obligations sont conformes aux critères fixés par l'article L. 38-V en particulier les a, b et d en ce qu'elles sont aujourd'hui fournies par les OBL et permettent le développement de la concurrence.