I-3.3.3.2. Les prestations de terminaison d'appel fournies
par des opérateurs distincts sont incluses dans des marchés distincts
Pour déterminer si les offres d'opérateurs de boucle locale distincts doivent être regroupées ou non dans un même marché, il convient d'examiner les possibilités de substitution entre les prestations de terminaison d'appel offertes sur deux réseaux distincts pour l'acheminement de communications à destination de mêmes clients.
Lorsqu'un opérateur souhaite terminer un appel vers un abonné d'un OBL, il ne dispose d'aucune solution de substitution à la prestation de terminaison d'appel de cet OBL, seul ce dernier étant capable d'acheminer l'appel sur la dernière partie du réseau, jusqu'à son abonné. Il en résulte que les prestations de terminaison d'appel fournies par des opérateurs distincts ne peuvent être considérées comme substituables du point de vue de l'offre.
Cette analyse rejoint d'ailleurs l'analyse de la Commission européenne dans sa recommandation sur les marchés pertinents.
I-3.3.3.3. Les prestations de terminaison d'appel vocal mobile et de terminaison
d'appel fixe d'un même opérateur ne sont pas incluses dans le même marché
Comme indiqué supra, il semble pertinent d'inclure dans le même marché toutes les prestations de terminaison d'appel fixe d'un opérateur pour des raisons d'identité des conditions d'offre et de demande de ces prestations.
A l'inverse, les prestations de terminaison d'appel fixe et de terminaison d'appel mobile d'un opérateur donné ne sont pas substituables. En effet, les ressources en numérotation utilisées pour offrir une prestation de terminaison d'appel mobile sont différentes des ressources utilisées pour la terminaison d'appel fixe. De plus, les architectures d'interconnexion peuvent également différer pour ces deux prestations. Enfin, la nature même du service fourni est différente : un appel à destination d'un client de réseau mobile ne peut se substituer à un appel à destination d'un poste fixe dans la mesure notamment où l'usage des services mobiles et fixes peuvent différer en particulier en situation de mobilité.
Néanmoins, à terme, l'Autorité veillera à accroître la cohérence entre les terminaisons d'appel fixe et mobile.
I-3.3.3.4. Les offres couplant terminaison et transit ne font pas partie du marché
Certaines offres de terminaison d'appel peuvent inclure une prestation supplémentaire de transit. C'est par exemple le cas lorsqu'il est techniquement possible, pour l'opérateur sollicitant la prestation, de s'interconnecter à un équipement A situé à un niveau plus bas du réseau, mais qu'il choisit plutôt de s'interconnecter à un équipement B situé plus haut dans le réseau et de confier l'acheminement de trafic entre B et A à l'opérateur de terminaison.
Pour autant, les opérateurs pourront a priori connaître soit au regard de la localisation de l'abonné appelé ou appelant, soit par une information fournie par l'opérateur appelé (cf. base des numéros portés), l'équipement techniquement et économiquement le plus pertinent sur lequel livrer l'appel à destination dudit abonné. Ils pourront par conséquent choisir de s'interconnecter directement à cet équipement, ou de livrer plutôt l'appel à un niveau supérieur ou simplement à un autre équipement d'interconnexion, sollicitant par là même une prestation supplémentaire de transit.
L'Autorité estime que les offres de terminaison sur un réseau donné incluant le transit vers ce même réseau ne peuvent être considérées comme des substituts à la terminaison d'appel vendue par chacun des opérateurs de boucle locale fixe au niveau des éléments de commutation ou de routage les plus pertinents permettant d'assurer la prestation de terminaison d'appel. Ces offres de « transit + terminaison d'appel » doivent en effet être considérées, dans la segmentation des marchés retenue par l'Autorité, comme un couplage entre deux prestations faisant partie de deux marchés distincts, à savoir le transit, d'une part, et la terminaison d'appel, d'autre part. La pertinence de ce choix de délimitation entre les marchés de la terminaison d'appel et du transit s'explique principalement par le fait que la terminaison d'appel, au contraire du transit, ne peut être fournie que par l'opérateur de boucle locale, ainsi que par les différences significatives de niveaux tarifaires entre les prestations de terminaison d'appel et les prestations de transit incluant la terminaison d'appel.
Par conséquent, les prestations fournies actuellement décrites sous le terme de « terminaison » et qui incluent le transit permettant l'accès à ces prestations de terminaison d'appel au niveau des commutateurs ou routeurs pertinents et, plus généralement, de tout point d'interconnexion pertinent pour la fourniture de cette offre seront réputées comme n'appartenant pas au marché pertinent de la terminaison d'appel mais comme regroupant terminaison d'appel et transit.
I-3.3.3.5. Cas particulier du marché de la terminaison d'appel de France Télécom
Comme pour tous les opérateurs, les prestations de terminaison d'appel fournies par France Télécom sont réalisées au niveau d'équipements sur lesquels il est possible de proposer l'interconnexion, et au-delà desquels seul l'opérateur de réseau de l'abonné appelé est capable de terminer l'appel. Ces équipements constituent le goulot d'étranglement structurel, le point le plus « bas » offert par l'opérateur pour livrer l'appel. Cette définition s'applique aussi bien au réseau commuté qu'au réseau VoIP de France Télécom.
Comme exposé supra, le réseau de France Télécom est historiquement un réseau en mode commuté, organisé de manière hiérarchique avec deux niveaux possibles d'interconnexion.
Compte tenu des démonstrations précédentes, les prestations d'interconnexion de France Télécom au niveau des CT sont considérées comme des prestations couplant terminaison d'appel (pour la partie CA-abonné) et transit (pour la partie CT-CA). Ces prestations ne font pas partie du même marché que la prestation d'interconnexion au niveau des CA. De plus, France Télécom a déployé une architecture d'interconnexion particulière pour les appels à destination des ses abonnés raccordés en VoIP, en définissant un nombre limité de CT comme points d'interconnexion VoIP. Conformément au principe de neutralité technologique de la régulation et aux raisonnements développés ci-dessus, les prestations de terminaison d'appel vers les abonnés VoIP vendues à ces points font partie du même marché que les prestations de terminaison d'appel aux CA vendues pour les abonnés raccordés au réseau commuté de France Télécom.
Au demeurant, ce regroupement est valable pour tout opérateur distinguant plusieurs architectures d'interconnexion pour joindre ses abonnés.
I-3.3.4. Délimitation en termes géographiques
Dans la mesure où le marché de produits a été défini comme étant la terminaison d'appel sur le réseau individuel de chaque opérateur de boucle locale fixe, la dimension géographique du marché de la terminaison d'appel sur ce réseau coïncide avec la couverture géographique du réseau de boucle locale de l'opérateur considéré.
I-3.3.5. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité
Numéricâble conteste le projet d'analyse des marchés de la terminaison d'appel menée par l'Autorité : l'opérateur estime notamment que la terminaison d'appel vers son propre réseau est substituable à la terminaison d'appel sur le réseau de France Télécom, dès lors qu'un de ses abonnés est généralement raccordé aussi au réseau de France Télécom.
L'Autorité maintient son analyse concernant la non-substituabilité des terminaisons d'appel de deux opérateurs différents. En effet, même dans l'hypothèse où un client disposerait de deux lignes téléphoniques à son domicile, ces deux lignes sont associées à deux numéros de téléphone différents. Par conséquent, un opérateur devant acheminer un appel vers un de ces numéros n'aura pas la possibilité de substituer cet appel par un appel vers l'autre numéro, dans la mesure où il est tenu d'acheminer la communication vers le numéro composé par l'appelant. Les deux terminaisons d'appel ne sont donc pas substituables.
L'AFORST et Colt regrettent l'absence de prise en compte de la qualité de service dans le projet d'analyse des marchés de la terminaison d'appel et demandent une segmentation des marchés en fonction de la qualité de service fournie.
L'Autorité relève qu'à ce jour il n'existe aucun opérateur qui propose deux prestations de terminaison d'appel distinctes selon le niveau de qualité fourni.
I-3.3.6. Avis du Conseil de la concurrence
Le Conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité en ce qui concerne la délimitation des marchés de la terminaison d'appel sur chacun des réseaux des opérateurs français.
I-3.3.7. Observations de la Commission européenne
La Commission européenne ne formule aucune observation concernant la délimitation des marchés de la terminaison d'appel fixe.
I-3.3.8. Conclusion
L'Autorité identifie donc un marché de la terminaison d'appel fixe sur chaque réseau individuel de chacun des opérateurs de boucle locale fixe comme étant le marché de gros sur le territoire d'analyse des prestations nécessaires à l'acheminement d'un appel depuis le point d'interconnexion pertinent le plus proche d'un abonné, point au-delà duquel seul l'opérateur de l'abonné appelé peut acheminer l'appel, au point de terminaison du réseau de cet abonné.
La liste des opérateurs de boucle locale fixe pour lesquels un marché de la terminaison d'appel a été identifié est fournie en annexe A du présent document.
I-3.4. Le marché du départ d'appel
I-3.4.1. Définition de la prestation de départ d'appel
Le départ d'appel fixe désigne les prestations d'acheminement d'appels fournies par un opérateur de boucle locale (OBL) à d'autres opérateurs afin de permettre à ces derniers d'établir, via l'interconnexion de leur réseau au réseau de cet OBL, des communications téléphoniques au départ des abonnés raccordés à cet OBL. Du fait du sens des communications ainsi acheminées, on dit de l'opérateur qui achète une telle prestation qu'il « collecte » l'appel. Cela signifie qu'il « récupère » le trafic pour en assurer l'acheminement ultérieur sur son propre réseau (ou éventuellement sur celui d'autres opérateurs auprès desquels il sollicite d'autres prestations de gros).
Un service de départ d'appel est fourni par un opérateur A :
― pour du trafic vocal interpersonnel, pour permettre l'acheminement de l'appel passé depuis une ligne fixe de l'opérateur A ;
― pour du trafic Internet, lorsqu'un utilisateur final bénéficiant d'une ligne fixe d'un opérateur A se connecte à Internet bas débit (offres Internet bas débit) ;
― pour du trafic services à valeur ajoutée, lorsqu'un utilisateur final bénéficiant d'une ligne fixe d'un opérateur A compose le numéro d'une plate-forme de services (en général, un 08 AB, ou un numéro court à 4 chiffres du type 3BPQ).
I-3.4.2. Délimitation en termes de produits et services
Le service de départ d'appel considéré ici est associé à plusieurs services de détail, les communications voix au départ des postes téléphoniques en position déterminée, qu'elles soient locales, nationales, internationales ou à destination des mobiles, les communications vers Internet (accès bas débit) et les communications vers les plates-formes de services à valeur ajoutée. L'Autorité a déjà montré que les prestations de gros sous-jacentes à ces différents trafics sont substituables sur les marchés de gros.
Un opérateur devant collecter un appel au départ d'un abonné d'un opérateur fixe A pourrait théoriquement solliciter une prestation de départ d'appel en plusieurs points d'interconnexion, de niveau hiérarchique plus ou moins élevé dans le réseau, le cas échéant.
En particulier, pour collecter du trafic au départ d'un utilisateur raccordé sur le réseau de l'opérateur A, l'opérateur a le choix entre :
i) L'offre d'interconnexion de l'opérateur A, au niveau du premier équipement pertinent pour l'interconnexion traversé sur le réseau de l'opérateur A ;
ii) L'offre d'interconnexion de l'opérateur A ou d'un opérateur tiers, au niveau d'un équipement pertinent pour l'interconnexion situé ailleurs dans le réseau.
L'Autorité considère que par rapport à l'offre i), l'offre ii) inclut une prestation supplémentaire de transit entre le premier équipement pertinent pour l'interconnexion traversé sur le réseau de l'opérateur de départ et un autre équipement pertinent pour l'interconnexion. Les opérateurs acheteurs de départ d'appel peuvent a priori connaître soit au regard de la localisation de l'abo nné appelant, soit par une information fournie par l'opérateur appelant, l'équipement techniquement et économiquement le plus pertinent offert par l'opérateur départ sur lequel collecter l'appel en provenance dudit abonné. Ils pourront par conséquent choisir de s'interconnecter directement à cet équipement, ou de collecter plutôt l'appel à un niveau supérieur ou simplement à un autre équipement d'interconnexion, sollicitant par là même une prestation supplémentaire de transit.
L'Autorité estime que les offres de départ d'appel incluant le transit au départ de ce même réseau ne peuvent être considérées comme des substituts au départ d'appel vendu au niveau des éléments de commutation ou de routage les plus pertinents pour l'interconnexion et qu'elles offrent seulement un couplage entre deux prestations de deux marchés distincts, à savoir le marché du départ d'appel et le marché du transit.
I-3.4.3. Délimitation en termes géographiques
Pour procéder à la délimitation géographique du marché, il convient de tenir compte du fait que France Télécom exploite entre 95 % et 99 % en volume des accès au service téléphonique et que son réseau couvre la métropole, les départements d'outre-mer et les collectivités d'outre-mer de Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
L'Autorité estime par ailleurs que les conditions concurrentielles de la fourniture du départ d'appel sont homogènes sur l'ensemble du territoire d'analyse. En outre, il n'existe pas d'instruments juridiques législatifs ou réglementaires permettant de déterminer des zones géographiques distinctes.
L'Autorité considère donc que le marché géographique du départ d'appel correspond au territoire d'analyse, à savoir la métropole, les départements d'outre-mer et les collectivités d'outre-mer de Mayotte, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
I-3.4.4. Commentaires des acteurs sur l'analyse de l'Autorité
L'ADRT regrette que l'analyse du départ d'appel ne distingue pas le départ d'appel des numéros SVA de celui des communications interpersonnelles. Cet acteur craint notamment que les opérateurs fixes autres que France Télécom ne continuent pas de fournir de prestations de départ d'appel comme ils le font aujourd'hui.
L'Autorité note que la distinction demandée par l'ADRT est contraire à toutes les analyses de marché précédentes de l'Autorité ainsi qu'aux recommandations successives adoptées par la Commission européenne en 2003 et 2007 sur les marchés susceptibles d'être soumis à une régulation ex ante et qu'aux analyses des autres régulateurs européens. Par ailleurs, l'Autorité souligne que le Conseil, dans son avis n° 08-A-11 sur le projet d'analyse des marchés de la téléphonie fixe de l'Autorité, n'a émis aucune observation quant à la délimitation des marchés proposée.
Pour autant, l'Autorité rappelle qu'elle a imposé, par la décision n° 07-0213 du 16 avril 2007, des obligations « symétriques » c'est-à-dire s'appliquant à l'ensemble des acteurs concernés, indépendamment de leur puissance de marché. Les opérateurs de boucle locale doivent notamment faire droit aux demandes raisonnables d'accès et de reversement de la part des fournisseurs de services SVA.
I-3.4.5. Avis du Conseil de la concurrence
Le conseil de la concurrence souscrit à l'analyse de l'Autorité en ce qui concerne la délimitation du marché du départ d'appel.
I-3.4.6. Observations de la Commission européenne
La Commission européenne ne formule aucune observation concernant la délimitation du marché du départ d'appel en position déterminée.
I-3.4.7. Conclusion
L'Autorité identifie donc le marché du départ d'appel comme étant le marché de gros sur le territoire d'analyse des prestations nécessaires à l'acheminement d'un appel téléphonique au départ d'une ligne du réseau téléphonique public fixe, depuis le point de terminaison du réseau jusqu'au premier point d'interconnexion pertinent offert par l'opérateur départ, point en deçà duquel seul l'opérateur de l'abonné appelant peut acheminer l'appel.
Cette délimitation correspond à la délimitation du marché du départ d'appel sur le réseau téléphonique public en position déterminée retenue par la Commission européenne dans sa recommandation.
II. - PERTINENCE DES MARCHÉS POUR UNE RÉGULATION EX ANTE
II-1. Introduction sur la pertinence des marchés
L'article L. 37-1 du code des postes et des communications électroniques dispose que l'Autorité doit définir les marchés pertinents pour l'application d'une régulation ex ante, « au regard notamment des obstacles au développement d'une concurrence effective ». Ainsi, pour estimer la pertinence d'un marché au regard de la régulation sectorielle, il convient de mener une analyse concurrentielle de ce marché.
En application des directives susvisées, la Commission européenne a publié les « lignes directrices » précitées, relatives au processus d'analyse de marché. Elle a également adopté une première recommandation « marchés pertinents » en 2003, définissant une liste de 18 marchés susceptibles d'être pertinents pour une régulation sectorielle, puis une seconde recommandation « marché pertinent » du 17 décembre 2007, dans laquelle elle ramène à 7 le nombre de marchés appartenant à la nouvelle liste. L'Autorité a tenu le plus grand compte de ces documents dans l'élaboration de son analyse de marché.
Pour définir les marchés de la téléphonie fixe pouvant être considérés pertinents pour une régulation sectorielle, les recommandations « marchés pertinents » de 2003 et de 2008 de la Commission européenne préconisaient de démontrer la présence de trois critères :
― la présence de barrières à l'entrée élevées et non provisoires ;
― l'absence d'évolution vers une situation de concurrence effective ;
― l'efficacité insuffisante du droit de la concurrence.
L'Autorité considère, conformément au paragraphe 36 des lignes directrices de la Commission européenne susvisées, que, s'agissant d'un marché recensé par la Commission européenne, il ne lui est pas nécessaire de démontrer à nouveau les éléments qui ont déjà été pris en compte par la Commission européenne dans sa recommandation « marchés pertinents » et sur lesquels l'Autorité porte la même appréciation. La note explicative de la Commission sur la nouvelle recommandation « marchés pertinents » précise en effet : « For those markets listed, the Recommendation creates a presumption for the NRA that the three criteria are met and therefore NRAs do not need to reconsider the three criteria. » Toutefois, conformément à l'article L. 37-1 du CPCE, elle s'attachera, dans le cadre de la présente analyse, à démontrer les obstacles au développement effectif de la concurrence.
II-2. Pertinence des marchés de détail de l'accès
II-2.1. Dans la nouvelle recommandation de la Commission
Le marché de détail de l'accès figure dans la nouvelle recommandation « marchés pertinents » du 17 décembre 2007 en tant que marché susceptible d'être régulé ex ante. Dans sa recommandation, la Commission européenne estime que la seule régulation de gros pouvant influer sur le contexte concurrentiel de ce marché de détail est la régulation des infrastructures d'accès, notamment le dégroupage. Or, concurrencer l'opérateur historique par le dégroupage suppose un déploiement important et nécessite beaucoup de temps et d'investissements. Par ailleurs, en pratique, les opérateurs dégroupeurs ne s'appuient pas sur l'offre de dégroupage pour proposer des offres d'accès bas débit. La régulation appliquée sur les infrastructures ne permet ainsi pas de supprimer les barrières à l'entrée importantes et durables existant sur le marché de l'accès au service téléphonique qui est donc susceptible d'être régulé ex ante.
Dans sa note explicative sur la nouvelle recommandation sur les marchés pertinents, la Commission européenne explique ainsi : « Regarding retail access to the public telephone network at a fixed location, the only wholesale regulation that could impact on competition in this market is the regulation of the wholesale infrastructure access market, which enables new entrants to provide narrowband access services to retail customers. However, exploiting wholesale infrastructure access requires time and significant investments, a large portion of which are sunk. Moreover, new entrants in principle do not lease infrastructure access to provide narrowband access only. Wholesale infrastructure access therefore does not remove the high and non-transitory barriers to enter the retail access market at a fixed location, nor does it make this market tend towards effective competition. Even in combination with the development of other infrastructures such as cable or fibre-to-the-home etc., such a tendency is not observed yet at the European level. Therefore, even in the presence of wholesale regulation, the retail market for access to the public telephone network at a fixed location remains susceptible to ex ante regulation. »
Dès lors que le marché de détail de l'accès fait partie des marchés pertinents de la nouvelle recommandation de la Commission européenne, l'Autorité n'est plus tenue de démontrer sa pertinence pour une régulation ex ante. L'Autorité montre néanmoins dans la partie suivante que l'analyse de la Commission européenne s'applique bien au cas français et que, comme imposé par l'article L. 37-1 du CPCE, l'analyse des obstacles au développement d'une concurrence effective confirme sa pertinence.
II-2.2. Obstacles au développement d'une concurrence effective en France
France Télécom continue de bénéficier en France d'une très grande part de marché sur les accès au service téléphonique, sur le segment résidentiel comme sur celui des non résidentiels.
Sur la clientèle résidentielle, les opérateurs alternatifs ont pu développer des offres d'accès concurrentes grâce au dégroupage, d'une part, et à la vente en gros de l'accès au service téléphonique, d'autre part. Mais les offres en dégroupage sont des offres « multiplay », dont l'usage principal ne se limite pas à la téléphonie et qui ne font donc pas partie du marché de l'accès résidentiel délimité dans la partie I.2. Les seules offres d'accès au service téléphonique alternatives sont donc celles des opérateurs acheteurs de VGAST et une offre du câblo-opérateur qui ne comprend que de la téléphonie. Comme détaillé dans la partie suivante, la part de marché en volume de France Télécom sur le marché résidentiel de l'accès était donc en 2006 supérieure à 99 %. Sans prise en compte des offres basées sur la VGAST, cette part de marché est donc également supérieure à 99 %.
Sur le marché non résidentiel, les opérateurs peuvent proposer des offres d'accès grâce aux offres de gros haut débit de France Télécom (dégroupage, bitstream, etc.), grâce aux offres de services de capacité de France Télécom, grâce à la VGAST et enfin en raccordant leurs clients en propre dès lors que la taille de ceux-ci le permet. Les opérateurs ont ainsi été en mesure de développer davantage la concurrence sur le marché de l'accès non résidentiel. Néanmoins, la mise en œuvre de ces différentes solutions n'est viable que pour une très petite partie des clients. Notamment, le raccordement des plus petits clients n'est pas toujours rentable dans la mesure où il engendre des coûts importants pour des revenus modestes. Ainsi, la part de marché de France Télécom sur le marché de l'accès non résidentiel, qui est détaillé dans la partie suivante, restait en 2006 d'environ 95 %. Cette part de marché est sensiblement la même sans prise en compte des offres de détail fondées sur la VGAST, dont le volume était encore très faible en 2006.
Les marchés de détail de l'accès ne connaissent encore pas une situation de concurrence effective. En outre, la régulation appliquée sur les marchés de gros et pouvant influer sur cette situation concurrentielle (le dégroupage, les services de capacité, etc.) ne suffit pas à permettre à elle seul, et à un horizon raisonnable, l'avènement d'un contexte de concurrence effective. Ces solutions, qui supposent des investissements importants, ne permettent pas aux opérateurs alternatifs de concurrencer France Télécom sur toutes les franges de marché. Pour les clients résidentiels, les opérateurs alternatifs ne proposent ainsi que des offres couplées, destinées aux clients les plus demandeurs de services de communication électronique. Sur les marchés non résidentiels, ils ne sont en mesure de raccorder que les clients ayant de gros volumes ou situés dans les zones les plus denses du territoire. Il ressort donc que les seuls remèdes imposés au titre de la régulation des marchés de gros (6) ne suffisent pas à supprimer d'importantes barrières à l'entrée sur les marchés de détail de l'accès au service téléphonique résidentiels et non résidentiels et qu'il demeure, malgré leur existence, d'importants obstacles au développement d'une situation de concurrence effective. Le seul droit de la concurrence apparaît comme insuffisant pour remédier aux problèmes de concurrence structurels existant sur ce marché.
En conséquence, les marchés de détail de l'accès au service téléphonique sont considérés pertinents pour l'application d'une régulation ex ante.