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Article (Décision n° 2005-0571 du 27 septembre 2005 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)

Article (Décision n° 2005-0571 du 27 septembre 2005 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)



b) Fourniture de prestations de transit intra territorial


En dehors de certaines communications locales, qui ne commutent qu'au niveau du commutateur d'abonnés, toutes les communications sont acheminées sur le réseau de transit d'un ou de plusieurs opérateurs de communications électroniques.

Lorsqu'un opérateur ne possède pas les éléments de réseau nécessaires lui permettant d'acheminer sur son réseau l'ensemble des communications, il doit, à défaut d'investir massivement dans des infrastructures, solliciter une prestation de transit d'un opérateur tiers.
La duplication systématique par les opérateurs d'infrastructures leur permettant d'acheminer le trafic de leurs abonnés n'est pas économiquement viable, au regard de l'importance des investissements correspondants (cf. analyse de la puissance de France Télécom).
Dès lors, les opérateurs doivent pouvoir solliciter l'accès aux réseaux existants en vue de collecter le trafic au départ de leurs abonnés, ou de terminer le trafic de leurs abonnés sur les boucles locales tierces.
L'analyse de la puissance de marché a montré que bien qu'une certaine concurrence existe sur le marché du transit intra territorial, notamment à destination du réseau de France Télécom, cette dernière y exerce une influence significative.
Ainsi, et même si certains opérateurs sont largement déployés sur les commutateurs de France Télécom, cette dernière possède, d'une part, un nombre de points de présence significativement supérieur à ceux de ses concurrents, et est, d'autre part, la seule, pour des raisons historiques, à être interconnectée avec l'ensemble des opérateurs. L'observation combinée des volumes modestes au départ des abonnés des opérateurs alternatifs et des volumes tout aussi modestes à destination de ce type d'abonnés explique qu'il n'est pas économiquement rentable pour un opérateur tiers de consentir les investissements nécessaires au raccordement de l'ensemble des réseaux. L'Autorité constate d'ailleurs que les interconnexions directes entre opérateurs tiers restent encore aujourd'hui largement marginales. La prestation de transit fournie par France Télécom apparaît ainsi comme indispensable au développement de la concurrence et à l'acheminement des communications.
Cela explique que, d'une part, les opérateurs localisés dans des zones où aucune offre alternative n'est disponible et les potentiels nouveaux entrants devront, sous peine de ne pas pouvoir accéder à l'ensemble des réseaux français, solliciter des prestations de transit de France Télécom, et que, d'autre part, pour échanger du trafic avec d'autres opérateurs alternatifs, tout opérateur doit également solliciter de telles prestations.
L'obligation de fournir des prestations de transit intra territorial doit donc être imposée à France Télécom.
Cette dernière propose aujourd'hui des prestations dites de « simple transit » et de « double transit » en collecte et en terminaison. Elles consistent en des prestations d'acheminement entre un abonné et un commutateur de transit, en collecte ou en terminaison.
En collecte, elles correspondent à une prestation de départ d'appel à laquelle s'ajoute une prestation de transit. En terminaison, elles correspondent à une prestation de transit à laquelle s'ajoute une prestation de terminaison d'appel.
France Télécom fournit aussi des prestations d'acheminement entre ses commutateurs et ceux des opérateurs de boucle locale tiers, afin de permettre aux opérateurs de transiter par son réseau pour joindre les abonnés des autres opérateurs de boucle locale.
France Télécom devra continuer à fournir ces mêmes prestations. En effet, aucune autre prestation ne peut leur être substituée à moyen terme. Leur suppression aurait donc pour conséquence de déstabiliser le marché et la stratégie des opérateurs alternatifs.
Le nombre et la localisation des points d'accès à ces offres doivent permettre de répondre aux demandes raisonnables des acteurs souhaitant s'interconnecter avec l'opérateur. France Télécom proposera au minimum les points d'interconnexion actuels.
Eu égard à l'ensemble de ces éléments, l'obligation de faire droit aux demandes d'accès aux prestations de transit intra territoire existantes répond aux critères de l'article L. 38-V du code, en particulier les b et d.
Au vu des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques, et notamment de ceux mentionnés aux 1°, 2° et 3° de cet article, il est donc nécessaire et proportionné d'imposer à France Télécom une obligation de répondre aux demandes raisonnables de transit intra territorial ainsi spécifiées. Cette obligation, conforme à l'article D. 310 (1°) du code, constitue le seul moyen permettant de répondre aux problèmes de concurrence démontrés ci-avant.


c) Fourniture de prestations de transit inter territoires


L'analyse de la puissance de marché sur l'ensemble des marchés de transit inter territoires a permis de montrer que France Télécom contrôle les infrastructures sous-marines permettant de faire la jonction entre les différents territoires géographiques français.
Il serait déraisonnable de contraindre les opérateurs désirant collecter ou terminer leur trafic sur un territoire français distant de celui sur lequel ils sont physiquement présents à dupliquer systématiquement ces coûteuses infrastructures, comme le démontre l'analyse qu'a faite l'autorité de la puissance de France Télécom sur ces marchés.
L'analyse de ces marchés a par ailleurs mis en évidence que les alternatives disponibles, reposant sur des solutions satellitaires, ne constituent pas de réelles solutions de substitution.
France Télécom fournit aujourd'hui de telles prestations de transit inter territoires, et devra par conséquent continuer à faire droit aux demandes pour ces mêmes prestations.
Le nombre et la localisation des points d'accès à ces prestations doivent permettre de répondre aux demandes raisonnables des acteurs souhaitant s'interconnecter avec l'opérateur. France Télécom proposera au minimum les points d'interconnexion actuels.
Eu égard à l'ensemble de ces éléments, l'obligation de faire droit aux demandes d'accès aux prestations de transit inter territoires existantes répond aux critères de l'article L. 38-V du code, en particulier les b et d.
L'obligation imposée à France Télécom de répondre aux demandes raisonnables de transit inter territoires ainsi spécifiées est donc nécessaire et proportionnée aux objectifs poursuivis, notamment aux objectifs mentionnés aux 2°, 3° et 4° de l'article L. 32-1 du code précité. Cette obligation, conforme à l'article D. 310 (1°) du code, constitue le seul moyen permettant de répondre aux problèmes de concurrence démontrés ci-avant.


d) Fourniture de prestations de terminaison d'appel
à destination des numéros géographiques sur le réseau de France Télécom


Comme l'a mis en évidence l'analyse de ce marché, un opérateur concurrent ne pourrait proposer des offres commercialement viables s'il n'était pas en mesure d'assurer une connectivité avec l'ensemble des services et abonnés raccordés par France Télécom.

France Télécom propose aujourd'hui des prestations de terminaison d'appel à destination des numéros géographiques de son réseau à chacun de ses commutateurs d'abonnés.
Il est nécessaire que France Télécom continue à fournir ces prestations. En effet, leur suppression ou modification aurait pour conséquence de déstabiliser le marché et les plans d'affaire des opérateurs alternatifs. Dans la mesure où ces prestations sont déjà offertes aujourd'hui et sont nécessaires à l'activité des opérateurs tiers, leur imposition répond aux critères de l'article L. 38-V du code, en particulier les b et d.
D'une manière générale, le nombre et la localisation des points d'accès à cette offre doivent permettre de répondre aux demandes raisonnables des acteurs souhaitant s'interconnecter avec l'opérateur. France Télécom proposera au minimum les points d'interconnexion actuels.
Il est donc nécessaire et proportionné aux objectifs poursuivis, notamment ceux listés aux 2°, 3° et 4° de l'article L. 32-1 du code précité, d'imposer à France Télécom de fournir des prestations de terminaison d'appel à destination de ces numéros géographiques. Cette obligation, conforme à l'article D. 310 (1°) du code, constitue le seul moyen permettant de répondre aux problèmes de concurrence démontrés ci avant.


e) Interconnexion forfaitaire pour l'internet


France Télécom fournit, depuis l'année 2002, une offre de départ d'appel spécifique pour l'internet tarifée à la capacité, baptisée « Interconnexion forfaitaire à internet », pour permettre aux opérateurs de collecter forfaitairement du trafic internet.
La mise en oeuvre de cette offre, demandée par l'Autorité, visait à permettre le développement d'offres d'accès internet bas débit illimitées et forfaitaires sur les marchés de détail.
Elle comprend la fourniture d'une telle prestation aux commutateurs d'abonnés et aux commutateurs de transit.
Par ailleurs, une possibilité de débordement sur un faisceau tarifé à la minute est prévue en cas de pic de trafic sur un commutateur d'abonnés sur lequel un opérateur a souscrit à l'offre forfaitaire.
(i) Fourniture de l'IFI :
L'apparition de forfaits sur le marché de détail de l'internet bas débit a permis de répondre à la demande du consommateur final de bénéficier d'offres adaptées à une consommation poussée.
Moins d'un an après sa mise en oeuvre, en mai 2002, l'Autorité avait adressé un questionnaire aux opérateurs afin d'effectuer, comme le prévoyait l'offre technique et tarifaire d'interconnexion pour l'année 2002, une évaluation de la mise en oeuvre opérationnelle du mécanisme d'interconnexion forfaitaire.
Malgré l'avènement progressif du haut débit, les offres d'accès à internet en bas débit restent largement utilisées. A titre d'illustration, les questionnaires adressés par l'Autorité aux opérateurs dans le cadre de cette analyse de marché ont permis d'évaluer le volume de minutes internet consommées en bas débit en 2003 à près de 70 milliards de minutes.
L'interconnexion forfaitaire est très largement utilisée par les opérateurs alternatifs collectant du trafic internet découlant d'offres illimitées ou d'offres forfaitaires. Au vu des parts de marché de France Télécom sur les marchés de détail de l'accès, l'essentiel des volumes de l'internet bas débit provient des abonnés raccordés par le réseau de France Télécom. L'offre d'interconnexion forfaitaire à internet de France Télécom est donc devenue un élément central du plan d'affaire des fournisseurs d'accès à internet en bande étroite.
(ii) Débordement aux commutateurs d'abonnés :
Concernant plus particulièrement l'interconnexion au commutateur d'abonnés, il apparaît qu'aucun opérateur n'a choisi l'offre forfaitaire sans débordement.
Le débordement sur un faisceau tarifé à la minute est utilisé au CA par les opérateurs comme un outil opérationnel de gestion des pointes de trafic liées à la plus forte volatilité des volumes de trafic internet à ce niveau.
Or l'équilibre économique des opérateurs est très sensible au remplissage de leurs faisceaux : un surdimensionnement augmente sensiblement le coût de collecte par minute et réduit l'intérêt du forfaitaire. Le dimensionnement au plus juste présente un risque pour la qualité de service. Ceci est d'autant plus sensible au niveau du commutateur d'abonnés, où l'effet de seuil s'avère important.
Ainsi, la suppression du débordement conduirait à augmenter sensiblement le nombre de BPN à commander pour écouler le trafic à volume constant (environ 1,7 fois selon les données fournies par un opérateur), au détriment des opérateurs ayant mis en oeuvre l'interconnexion forfaitaire au CA.
Seul un « effet volume » serait à même d'atténuer les effets liés à la volatilité du trafic internet.
Or, si cet effet peut être suffisant pour l'ensemble des opérateurs au niveau des commutateurs de transit, les opérateurs alternatifs ne possèdent pas les économies d'échelle et de gammes suffisantes au niveau des commutateurs d'abonnés.
Par conséquent, l'Autorité estime nécessaire de maintenir l'obligation faite à France Télécom d'offrir une possibilité de débordement sur faisceau tarifé à la minute au commutateur d'abonnés.
(iii) Conclusion :
En conséquence, conformément à l'article D. 310 (1°) du code, l'Autorité impose à France Télécom l'obligation de fournir les prestations d'interconnexion forfaitaire à internet qu'elle offre actuellement en vertu de l'offre technique et tarifaire d'interconnexion approuvée pour l'année 2005, soit une offre sur l'ensemble de ses commutateurs d'abonnés et de transit ouverts à l'interconnexion, avec une possibilité de débordement au CA. Cette obligation répond ainsi aux critères a, b et d mentionnés à l'article L. 38-V du code.
Le retrait ou la dégradation des conditions de ces offres serait notamment contraire aux objectifs cités aux 2° et 3° de l'article L. 32-1 du code. En effet, ils seraient de nature à déstabiliser l'ensemble du secteur des fournisseurs d'accès à internet et à fausser le jeu concurrentiel au profit du groupe France Télécom, qui serait en mesure d'exercer un effet de levier à partir des marchés des services en bande étroite, marchés sur lesquels il est puissant, vers le marché des fournisseurs d'accès à internet en bande étroite.


f) Continuité des obligations dans un contexte
d'évolution technologique


France Télécom devra dans un premier temps fournir les prestations mentionnées ci-dessus selon le protocole SS7 utilisé actuellement, prestations pour lesquelles la capacité technique de France Télécom à satisfaire la demande n'est plus à démontrer.
Le développement récent d'offres de communications sur accès large bande laisse entrevoir l'apparition de nouvelles architectures d'interconnexion, basées sur des interfaçages en protocole VoIP. Ces nouvelles architectures pourraient ainsi donner lieu à de nouvelles prestations de gros, ayant vocation à se substituer aux prestations fournies actuellement par France Télécom en mode SS7. Plus sensibles aux gains d'économies d'échelle, elles généreront un gain d'efficacité pour l'ensemble du secteur. Elles permettront par ailleurs à l'ensemble des acteurs de proposer des offres innovantes et plus compétitives.
C'est pourquoi, dans un souci de neutralité technologique et afin de ne pas fausser le jeu concurrentiel, il est nécessaire et proportionné, au regard des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du code, en particulier les 3° et 4°, que France Télécom fasse droit aux demandes raisonnables des opérateurs relatives à ces nouvelles architectures d'interconnexion. Ces demandes devront être conformes aux critères imposés par l'article L. 38-V du CPCE.


IV-1.2.2. Prestations d'accès et d'interconnexion associées


Pour assurer leur activité d'acheminement de communications électroniques de bout en bout, les opérateurs alternatifs doivent acheter des prestations d'accès et d'interconnexion. Par conséquent, les offres d'accès et d'interconnexion incluent un ensemble de prestations élémentaires dont la fourniture est nécessaire au bon acheminement des communications des opérateurs alternatifs et à leur activité. Ces prestations associées comprennent notamment les prestations de raccordement aux sites d'interconnexion et d'accès, la facturation pour compte de tiers et la fourniture de l'ensemble des informations nécessaires à un opérateur alternatif pour exercer son activité.


a) Raccordement des sites d'interconnexion et d'accès


L'utilisation effective de prestations d'acheminement suppose le raccordement physique des réseaux de communications électroniques entre eux. Ainsi, les offres de gros d'accès au réseau de France Télécom ne peuvent être opérationnelles que si elles sont accompagnées de prestations connexes adaptées, nécessaires à leur utilisation par les opérateurs alternatifs.
L'Autorité estime que les obligations de faire droit aux demandes raisonnables d'accès précitées doivent dès lors s'accompagner d'obligations connexes concernant l'accès aux sites d'interconnexion.
La Commission précise à ce propos qu'en l'absence de concurrence effective sur un marché recensé, « il peut être nécessaire d'imposer plusieurs obligations pour parvenir à une solution globale du problème. (...) Si on estime que des mesures correctrices particulières s'imposent pour un segment technique donné, il n'est ni nécessaire ni opportun, pour y imposer des obligations, de recenser chaque segment technique comme étant un marché pertinent. On peut citer, par exemple, le cas où une obligation de fournir un accès dégroupé à la boucle locale est complétée par des obligations connexes concernant l'accès aux installations de colocalisation ».
Il est donc nécessaire que l'opérateur historique propose aux opérateurs alternatifs une offre de raccordement de leurs équipements dans ses propres sites. En l'absence d'une telle offre, l'obligation de fournir un accès aux prestations de départ d'appel, de transit ou de terminaison d'appel serait vidée de son sens puisque aucun opérateur ne pourrait placer ses équipements de réseau.
France Télécom propose actuellement les solutions de raccordement suivantes :
- une offre de colocalisation, qui permet à un opérateur de pouvoir accéder au site de l'opérateur en installant ses équipements de transmission directement dans les locaux de l'opérateur ;
- une offre de liaisons de raccordement, qui permet à un opérateur de pouvoir livrer son trafic de terminaison au niveau de son point de présence, l'acheminement du trafic entre ce point et le point d'interconnexion se faisant sur un lien pris en charge par un opérateur tiers ;
- une offre dite « in span », qui est une solution intermédiaire où l'interconnexion physique des réseaux se fait non pas dans les locaux de France Télécom mais dans un lieu proche de ce dernier.
La colocalisation est la solution la plus directe, mais elle représente des frais d'investissement importants pour l'opérateur : un tel investissement ne se justifie donc qu'au-delà d'un certain seuil de trafic.
L'opérateur peut pallier aux limites de la colocalisation en sollicitant les deux autres offres disponibles :
- la liaison de raccordement, qui, permet de ne pas investir soi-même dans le lien entre le point de présence et le point d'interconnexion. Elle représente des coûts variables et récurrents et se prête à des volumes de trafic plus faibles. Une liaison de raccordement peut être fournie par France Télécom, ou par un autre opérateur, colocalisé dans le site de l'opérateur, qui met à la disposition de tiers de la capacité sur sa liaison ;
- l'offre in span, qui permet de raccorder les équipements de transmission de France Télécom sans avoir à aller jusqu'au commutateur.
Tous ces moyens d'accès sont nécessaires au développement de la concurrence sur les marchés de gros de la téléphonie fixe en ce qu'ils permettent à un opérateur de disposer de plusieurs options dans sa logique de déploiement et de pouvoir se déployer au niveau d'un site d'interconnexion même avec des volumes relativement faibles.
Il est donc nécessaire que France Télécom continue à fournir ces prestations. En effet, leur suppression ou modification aurait pour conséquence de déstabiliser le marché et les plans d'affaire des opérateurs alternatifs. Dans la mesure où ces prestations sont déjà offertes aujourd'hui et sont nécessaires à l'activité des opérateurs tiers, leur imposition répond aux critères de l'article L. 38-V du code, en particulier les a, b, c et d.
Conformément aux objectifs imposés par l'article L. 32-1-II du code, et en particulier les 2°, 3° et 4°, et en l'absence de mesures moins contraignantes qui permettraient d'atteindre le même but, l'Autorité considère comme proportionné que France Télécom propose au titre de l'article D. 310 (1° et 3°) du code une offre de raccordement des équipements des opérateurs alternatifs, adaptée à chaque type de site, comprenant a minima les trois offres précitées.


b) Facturation pour compte de tiers


(i) Définition :
La facturation pour compte de tiers correspond à la possibilité, pour un opérateur, de confier à un tiers la facturation des services qu'il offre à ses clients via l'interconnexion.
France Télécom fournit actuellement cette prestation, inscrite à l'offre technique et tarifaire d'interconnexion approuvée pour l'année 2005, dans les deux cas suivants :
Communications vers les services spéciaux :
France Télécom facture ses abonnés au nom du fournisseur de services et prélève une part du montant facturé au titre de la prestation de facturation pour compte de tiers.
Dans le cas des services à coûts partagés, France Télécom inclut les sommes dues par les clients dans le deuxième volet de la facture, qui comprend la facturation de l'ensemble de ses services, et procède par conséquent au recouvrement des sommes éventuellement impayées par les clients.
Par ailleurs, elle inclut l'ensemble de ses services à revenus partagés et de ceux des opérateurs tiers dans le troisième volet de la facture et, dans le cas d'impayés sur le service d'un de ces opérateurs, exécute une première relance auprès de l'abonné, puis fournit les éléments d'information nécessaires au recouvrement des impayés au fournisseur de services concerné.
Communications d'accès à internet :
Dans le cas des offres d'accès à internet via des numéros non géographiques fixes payants (0860 PQ MCDU), France Télécom facture les communications pour le fournisseur d'accès à internet, inclut les sommes correspondantes dans le deuxième volet de la facture, avec l'ensemble de ses services, et procède par conséquent au recouvrement des sommes impayées.
(ii) Obligation de fournir une prestation de facturation pour compte de tiers :
Lorsqu'un opérateur est puissant sur les marchés de détail de l'accès et des communications, notamment vers les services spéciaux ainsi que sur le marché de gros du départ d'appel, comme c'est le cas de France Télécom, la fourniture d'une prestation de facturation pour compte de tiers des services spéciaux apparaît indispensable à l'exercice d'une concurrence effective.
En effet, l'entrée sur le marché de la fourniture de services spéciaux est impossible si les potentiels nouveaux entrants doivent mettre en place un dispositif de facturation dont le coût est élevé par rapport aux revenus apportés par ce type de services, par définition fluctuants, et pour la plupart utilisés de façon occasionnelle.
Sans la fourniture de cette prestation par France Télécom, aucun service à valeur ajoutée d'un opérateur tiers ne serait viable, et cette absence de concurrence serait préjudiciable aux prestataires de services et aux utilisateurs finals.
En ce qui concerne les communications d'accès à internet, le modèle de « l'internet gratuit », dans lequel les abonnés ne paient que les communications (pas de frais d'abonnement), reste un moyen significativement utilisé par les utilisateurs. Or ce modèle n'est envisageable que si l'opérateur historique facture les communications internet pour le compte du fournisseur d'accès.
France Télécom propose aujourd'hui des prestations de facturation pour compte de tiers, dont les conditions dépendent de la catégorie du service appelé : service à coûts partagés, service à revenus partagés, internet...
L'Autorité prévoit d'analyser plus spécifiquement le marché des services spéciaux, et son fonctionnement tant au niveau des marchés de détail que des marchés de gros sous-jacents, dès le second semestre 2005. A cette occasion, elle réétudiera plus finement les conditions dans lesquelles France Télécom devra, le cas échéant, continuer à fournir une prestation de facturation pour compte de tiers.
A titre transitoire, l'Autorité impose en vertu de l'article D. 310 à France Télécom de continuer à fournir ces mêmes prestations, dans les mêmes conditions qu'actuellement, à savoir celles approuvées par la décision n° 2004-1000 susvisée pour l'offre technique et tarifaire d'interconnexion pour l'année 2005, à l'ensemble des opérateurs pour qui elle assure la collecte de trafic non géographique au départ de sa boucle locale, conformément aux objectifs listés à l'article L. 32-1, notamment celui de veiller à l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseaux et les fournisseurs de services de communications électroniques. Eu égard aux éléments susmentionnés, le maintien de cette obligation répond aux critères de l'article L. 38-V, a, b et d.


IV-1.3. Vente en gros de l'accès au service téléphonique


L'analyse des marchés a permis de montrer que France Télécom exerce une influence significative sur le marché de gros du départ d'appel ainsi que sur l'ensemble des marchés de détail de la téléphonie fixe de l'accès et des communications.
Sur les marchés des communications, France Télécom est soumise à une concurrence croissante sur l'ensemble du territoire national de la part des opérateurs de sélection du transporteur et de présélection.
Sur les marchés de détail de l'accès (accès analogique et numérique de base, à l'exclusion de toute autre forme d'accès), France Télécom, qui possède toujours plus de 99 % de parts de marché, reste très largement puissante et les offres concurrentes demeurent très limitées dans leur portée géographique. Il semble probable que la concurrence sur le marché de l'accès se développe progressivement sur la base du dégroupage total de la paire de cuivre. Néanmoins, cette perspective n'est pas de nature à remettre en cause la puissance de France Télécom sur l'horizon de cette analyse de marché. Par ailleurs, elle ne concerne, à court terme, que les utilisateurs situés sur les zones géographiques éligibles au dégroupage, et qui seuls bénéficient à court terme d'une possibilité de choix pour leur opérateur d'accès téléphonique (complétée, le cas échéant, par une offre téléphonie d'un câblo-opérateur).
Enfin, l'impossibilité pour les opérateurs de proposer des offres couplant accès et communications contraint le développement d'offres tarifaires innovantes couplant accès et communications.
L'Autorité revient ci-dessous plus en détail sur ces deux arguments.
Compte tenu de la puissance de France Télécom sur le marché du départ d'appel, et afin de développer l'exercice d'une concurrence effective et loyale sur les marchés de détail précités et d'inciter le secteur à l'innovation, conformément à l'article D. 310 (4°) et aux objectifs mentionnés aux 2° et 3° de l'article L. 32-1 du CPCE, l'Autorité estime raisonnable et proportionné d'imposer à France Télécom de répondre aux demandes raisonnables d'accès des opérateurs ayant pour objet la vente, au détail, de prestations d'accès au service téléphonique utilisant le réseau de France Télécom.

Par ailleurs, France Télécom, dans le cadre du processus d'homologation (53) de la hausse du tarif de l'abonnement principal et des frais de mise en service liés à cet abonnement, a proposé et s'est publiquement engagée à établir une offre de vente en gros de l'accès au service téléphonique au 15 septembre 2005, pour une commercialisation de ces premières offres dans le courant du premier trimestre 2006. L'Autorité souligne que France Télécom a effectivement publié une telle offre le 15 septembre 2005.
L'ensemble de ces éléments et en particulier le caractère volontaire de la démarche de France Télécom démontrent que les critères évoquées au V de l'article L. 38 sont remplis, et notamment que les prestations de gros concernées sont techniquement réalisables.
Au demeurant, le fait qu'une offre équivalente ait été mise en place dans plusieurs pays européens, notamment au Royaume-Uni, en Irlande, en Norvège et au Danemark n'en constitue qu'une preuve supplémentaire.
Enfin, des discussions multilatérales qui ont lieu parallèlement à l'élaboration de la présente décision, sous l'égide de l'Autorité, entre France Télécom et les opérateurs alternatifs, n'ont pas identifié de points bloquants.
Les paragraphes suivants détaillent par conséquent les motifs qui conduisent d'ores et déjà l'Autorité à estimer que les demandes des opérateurs ayant pour objet de proposer des offres d'accès au service téléphonique comparables aux offres d'accès analogique (ligne isolée ou groupement de lignes) et d'accès numériques de base à la norme RNIS (accès de base isolés et groupements d'accès de base) de France Télécom sont raisonnables.
En ce qui concerne les accès numériques primaires, l'Autorité ne dispose pas d'informations suffisantes, à ce stade, pour juger de la nécessité et de la proportionnalité d'un tel remède, notamment au regard des perspectives d'évolution du dégroupage sur ce type d'accès. Elle n'impose donc pas à ce stade à France Télécom de faire droit aux demandes des opérateurs ayant pour objet de proposer ce type d'accès aux utilisateurs raccordés à son réseau, tout en se réservant la possibilité de modifier son analyse sur ce point dès lors qu'elle disposera d'éléments le justifiant.