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Article Annexe (Décret n° 2006-116 du 31 janvier 2006 portant publication du protocole d'application de la Convention alpine de 1991 dans le domaine des « Forêts de montagne » (protocole « Forêts de montagne »), fait à Brdo le 27 février 1996 (1))

Article Annexe (Décret n° 2006-116 du 31 janvier 2006 portant publication du protocole d'application de la Convention alpine de 1991 dans le domaine des « Forêts de montagne » (protocole « Forêts de montagne »), fait à Brdo le 27 février 1996 (1))


PROTOCOLE D'APPLICATION


DE LA CONVENTION ALPINE DE 1991 DANS LE DOMAINE DES « FORÊTS DE MONTAGNE » (PROTOCOLE « FORÊTS DE MONTAGNE »)


Préambule


La République fédérale d'Allemagne,
La République d'Autriche,
La République française,
La République italienne,
La Principauté de Liechtenstein,
La Principauté de Monaco,
La République de Slovénie,
La Confédération suisse,
ainsi que la Communauté européenne,
Conformément à leur mission découlant de la Convention sur la protection des Alpes (Convention alpine) du 7 novembre 1991 d'assurer une politique globale de protection et de développement durable de l'espace alpin ;
En application de leurs obligations découlant de l'article 2, paragraphes 2 et 3, de la Convention alpine ;
Convaincues que la population locale doit être en mesure de définir son propre projet de développement social, culturel et économique et de participer à sa mise en oeuvre dans le cadre institutionnel existant ;
Reconnaissant que la forêt de montagne représente la forme de végétation - qui s'étend fréquemment bien au-delà des régions de montagne - pouvant garantir la protection la plus efficace, la moins chère et la plus esthétique contre les risques naturels tels que l'érosion, les inondations, les avalanches, les glissements de terrain et les chutes de pierres ;
Sachant que la forêt puise du gaz carbonique de l'atmosphère lors de la production du bois et, de cette façon, fixe le carbone pour un temps prolongé, assurant ainsi son effet sur le climat ;
Conscientes que la forêt de montagne est indispensable à l'équilibre climatique régional, à la purification de l'air et à la régulation du régime des eaux ;
Considérant que la fonction récréative de la forêt de montagne est d'une importance croissante pour tous les hommes ;
Sachant que la forêt de montagne est une source de matières premières renouvelables ayant une importance spéciale dans un monde de consommation croissante des ressources, mais qu'elle présente également une signification essentielle en tant que lieu de travail et source de revenus, justement en région rurale ;
Reconnaissant que les écosystèmes des forêts de montagne sont des habitats importants pour une faune et une flore d'une grande diversité ;
Convaincues que c'est surtout le respect du principe du développement durable tel qu'il est instauré et développé traditionnellement dans l'économie forestière européenne, qui garantit toutes les fonctions importantes de la forêt également pour les générations futures ;
Convaincues que certains problèmes ne peuvent être résolus que dans un cadre transfrontalier et exigent des mesures communes de la part des Etats alpins,
sont convenues de ce qui suit :


Chapitre Ier
Dispositions générales
Article 1er
Objectif


1. L'objectif du présent protocole est la conservation de la forêt de montagne en tant qu'écosystème proche de la nature, son développement et son extension si nécessaire et l'amélioration de sa stabilité. Pour remplir les fonctions mentionnées dans le préambule, une gestion respectueuse, proche de la nature et durable de la forêt de montagne est la condition sine qua non.
2. Les Parties contractantes s'engagent notamment à assurer avant tout :
- la régénération naturelle de la forêt ;
- des peuplements étagés et bien structurés, composés d'essences adaptées à la station ;
- l'utilisation de plants forestiers de provenance autochtone et
- une prévention de l'érosion et du compactage des sols grâce à des procédés d'exploitation et de débardage soigneux.


Article 2
Prise en considération des objectifs
dans les autres politiques


Les Parties contractantes s'engagent à prendre également en considération les objectifs du présent protocole dans leurs autres politiques. Ceci s'applique notamment aux domaines suivants :
a) Polluants atmosphériques. - Les polluants atmosphériques sont à réduire graduellement jusqu'à ce qu'ils ne soient plus nuisibles aux écosystèmes forestiers concernés. Ceci s'applique également aux charges dues aux polluants atmosphériques transfrontaliers ;
b) Grand gibier. - Le grand gibier doit être limité à une quantité compatible avec la régénération naturelle des forêts de montagne adaptées à la station, sans mesure de protection particulière. Dans les régions proches des frontières, les Parties contractantes s'engagent à harmoniser leurs mesures de régulation du gibier. Pour rétablir une sélection naturelle du grand gibier, et dans le souci de la protection de la nature, les Parties contractantes préconisent la réintroduction de prédateurs, adaptée aux besoins globaux de la région ;
c) Pâturage en forêt. - La conservation d'une forêt de montagne qui soit en état d'assurer ses fonctions passe avant le pâturage en forêt. Pour cette raison, le pâturage en forêt est soit à interdire, le cas échéant, soit tout au moins à réduire à un niveau permettant la régénération de forêts adaptées à la station, évitant les dégradations du sol et préservant avant tout la fonction protectrice de la forêt ;
d) Utilisation à des fins récréatives. - La fonction récréative de la forêt de montagne doit être dirigée et le cas échéant limitée pour ne pas menacer la conservation des forêts de montagne et leur régénération naturelle. Dans ce contexte, les besoins des écosystèmes forestiers doivent être respectés ;
e) Exploitation de la forêt de montagne. - Vu l'importance d'une exploitation durable du bois pour l'économie nationale et la gestion des forêts, les Parties contractantes encouragent l'utilisation accrue du bois en provenance de forêts gérées de façon durable;
f) Risque d'incendies de forêt. - Les Parties contractantes agissent contre le risque d'incendies de forêt par des mesures préventives adéquates et une lutte efficace contre le feu ;
g) Personnel forestier. - Dans la mesure où une sylviculture respectueuse de la nature et visant notamment à permettre à la forêt de remplir toutes ses fonctions requiert un personnel qualifié, les Parties contractantes s'engagent à assurer la présence d'un personnel qualifié en nombre suffisant.


Article 3
Participation des collectivités territoriales


1. Dans le cadre institutionnel existant, chaque Partie contractante détermine le meilleur niveau de coordination et de coopération entre les institutions et les collectivités territoriales directement concernées afin de promouvoir une solidarité dans la responsabilité, notamment pour exploiter et développer les synergies dans l'application des politiques forestières ainsi que dans la mise en oeuvre des mesures qui en découlent.
2. Les collectivités territoriales directement concernées sont parties prenantes aux différents stades de préparation et de mise en oeuvre de ces politiques et mesures dans le respect de leurs compétences, dans le cadre institutionnel existant.


Article 4
Coopération internationale


Les Parties contractantes conviennent :
a) De procéder à des évaluations communes du développement de la politique forestière ainsi que de garantir une consultation réciproque avant l'adoption de décisions importantes pour la mise en oeuvre du présent protocole ;
b) D'assurer la réalisation des objectifs et des mesures établis par le présent protocole par la coopération transfrontalière de toutes les autorités compétentes et tout particulièrement des administrations régionales et des collectivités locales ;
c) D'encourager les échanges de connaissances et d'expériences aussi bien que des initiatives communes à travers la coopération internationale entre les instituts de recherche et de formation, entre les organisations forestières et environnementales, ainsi qu'entre les médias.


Chapitre II
Mesures spécifiques
Article 5
Bases de planification


Pour la mise en oeuvre des objectifs mentionnés dans le présent protocole, les Parties contractantes se chargent de l'élaboration des bases de planification nécessaires. Ces dernières comprennent également une analyse des fonctions de la forêt tenant compte en particulier de sa fonction protectrice, ainsi qu'une connaissance suffisante du site.


Article 6
Fonction protectrice de la forêt de montagne


1. Pour les forêts de montagne ayant une fonction de protection importante pour leur propre site, ou surtout pour les agglomérations, pour les infrastructures de transports, pour les surfaces cultivées agricoles et autres, les Parties contractantes s'engagent à accorder la priorité à cette fonction protectrice et à orienter leur gestion forestière selont l'objectif de protection. Ces forêts de montagne doivent être conservées sur le site même.
2. Les mesures nécessaires doivent être planifiées et réalisées avec compétence dans le cadre des projets d'entretien ou d'amélioration des forêts protectrices. Elles doivent prendre en compte les objectifs de la protection de la nature et de l'entretien des paysages.


Article 7
Fonction de production de la forêt de montagne


1. Dans les forêts de montagne à fonction de production dominante, et où les conditions économiques régionales l'exigent, les Parties contractantes font en sorte que l'économie forestière de montagne se développe en tant que source de travail et de revenu pour la population locale.
2. Les Parties contractantes s'engagent à effectuer la régénération de la forêt avec des espèces d'arbres adaptées à la station et à réaliser une exploitation forestière avec soin, en ménageant le sol et les peuplements.


Article 8
Fonctions sociales et écologiques de la forêt de montagne


La forêt de montagne devant remplir d'importantes fonctions sociales et écologiques, les Parties contractantes s'engagent à prendre les mesures nécessaires garantissant :
- ses effets sur les ressources en eau, l'équilibre climatique, l'épuration de l'air, la protection contre le bruit ;
- sa biodiversité, ainsi que
- la découverte de la nature et la récréation.


Article 9
Desserte forestière


Les Parties contractantes conviennent que, pour la protection de la forêt contre les dommages, une exploitation et un entretien respectueux de la nature, des mesures de desserte sont nécessaires et doivent être planifiées et réalisées avec soin, tout en tenant compte des exigences de la protection de la nature et des paysages.


Article 10
Réserves de forêt naturelle


1. Les Parties contractantes s'engagent à délimiter un nombre et une étendue suffisants de réserves de forêt naturelle, et à les traiter en conséquence, aux fins de garantie de la dynamique naturelle et de recherche, dans l'intention soit d'arrêter par principe toute exploitation, soit de l'adapter à l'objectif de la réserve. Lors du choix de ces surfaces, il faut veiller à ce que, si possible, tous les écosystèmes forestiers de montagne soient représentés. La fonction protectrice nécessaire de ces peuplements doit être garantie dans tous les cas.
2. La délimitation de réserves de forêt naturelle devrait, en principe, se faire dans le sens d'une protection contractuelle efficace de la nature, avec effet à long terme.
3. Les Parties contractantes mettent en place la collaboration nécessaire lors de la planification et de la délimitation de réserves de forêt naturelle transfrontalières.


Article 11
Aide et compensation


1. Tenant compte de l'aggravation des conditions économiques dans l'espace alpin, et considérant les prestations fournies par l'exploitation des forêts de montagne, les Parties contractantes s'engagent, vu les contraintes financières et tant que cela est nécessaire pour assurer ces prestations, à une attribution d'aides forestières suffisantes, notamment pour les mesures indiquées dans les articles 6 à 10.
2. Si l'on exige de l'économie forestière de montagne des prestations dépassant les obligations légales existantes, et si leur nécessité est fondée dans des projets, le propriétaire de la forêt peut prétendre à une compensation adéquate et orientée selon les prestations.
3. Les Parties contractantes s'engagent à créer les instruments nécessaires au financement de mesures d'aide et d'indemnisation. Pour le financement, il faut tenir compte, outre de l'avantage au niveau de l'économie nationale pour l'ensemble de la population, de l'intérêt que trouvent certains particuliers.


Article 12
Mesures complémentaires


Les Parties contractantes peuvent prendre, pour l'économie forestière de montagne, des mesures complémentaires à celles envisagées par le présent protocole.


Chapitre III
Recherche, formation et information
Article 13
Recherche et observation


1. Les Parties contractantes encouragent et harmonisent, en étroite collaboration, la recherche et l'observation systématique qui s'avèrent utiles pour atteindre les objectifs du présent protocole.
2. Elles encouragent notamment des projets de recherche relatifs à la création, l'entretien, la protection et les prestations de l'écosystème forestier de montagne, ainsi que des projets scientifiques permettant d'établir des comparaisons internationales entre les inventaires et les enquêtes nationaux.
3. Les Parties contractantes veillent à ce que les résultats nationaux de la recherche et de l'observation systématique soient intégrés dans un système commun d'observation et d'information permanentes et soient rendus accessibles au public dans le cadre institutionnel existant.
4. Elles établissent notamment un relevé comparable relatif aux objectifs et mesures fixés par le présent protocole, qui doit être mis à jour périodiquement.


Article 14
Formation et information


1. Les Parties contractantes favorisent la formation initiale et continue ainsi que l'information du public pour ce qui est des objectifs, des mesurse et de la mise en oeuvre du présent protocole.
2. Elles assurent notamment l'assistance-conseil et la formation des propriétaires de forêts en conformité avec le contenu du protocole.


Chapitre IV
Mise en oeuvre, contrôle et évaluation
Article 15
Mise en oeuvre


Les Parties contractantes s'engagent à veiller à la mise en oeuvre du présent protocole en prenant toute mesure appropriée dans le cadre institutionnel existant.


Article 16
Contrôle du respect des obligations


1. Les Parties contractantes font régulièrement rapport au Comité permanent sur les mesures prises en vertu du présent protocole. Les rapports traitent également la question de l'efficacité des mesures prises. La Conférence alpine détermine la périodicité des rapports.
2. Le Comité permanent examine ces rapports afin de vérifier que les Parties contractantes ont rempli leurs obligations qui découlent du présent protocole. Il peut aussi demander des informations complémentaires aux Parties contractantes concernées ou recourir à d'autres sources d'informations.
3. Le Comité permanent établit un rapport sur le respect, par les Parties contractantes, des obligations qui découlent du présent protocole, à l'attention de la Conférence alpine.
4. La Conférence alpine prend connaissance de ce rapport. Si elle constate un manquement aux obligations, elle peut adopter des recommandations.


Article 17
Evaluation de l'efficacité des dispositions


1. Les Parties contractantes examinent et évaluent, de façon régulière, l'efficacité des dispositions du présent protocole. Dans la mesure où cela s'avère nécessaire pour la réalisation des objectifs, elles envisagent l'adoption des amendements appropriés au présent protocole.
2. Dans le cadre institutionnel existant, les collectivités territoriales sont associées à cette évaluation. Les organisations non gouvernementales actives dans ce domaine peuvent être consultées.


Chapitre V
Dispositions finales
Article 18
Liens entre la Convention alpine et le protocole


1. Le présent protocole constitue un protocole de la Convention alpine au sens de l'article 2 et des autres articles pertinents de la convention.
2. Nul ne peut devenir Partie contractante au présent protocole s'il n'est pas Partie contractante à la Convention alpine. Toute dénonciation de la Convention alpine vaut également dénonciation du présent protocole.
3. Lorsque la Conférence alpine délibère de questions relatives au présent protocole, seules les Parties contractantes au présent protocole peuvent prendre part au vote.


Article 19
Signature et ratification


1. Le présent protocole est ouvert à la signature des Etats signataires de la Convention alpine et de la Communauté européenne le 27 février 1996 et auprès de la République d'Autriche, dépositaire, à partir du 29 février 1996.
2. Le présent protocole entre en vigueur pour les Parties contractantes qui ont exprimé leur consentement à être liées par ledit protocole trois mois après la date à laquelle trois Etats auront déposé leur instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation.
3. Pour les Parties contractantes qui expriment ultérieurement leur consentement à être liées par le protocole, le protocole entre en vigueur trois mois après la date du dépôt de l'instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation. Après l'entrée en vigueur d'un amendement au protocole, toute nouvelle Partie contractante audit protocole devient Partie contractante au protocole tel qu'amendé.


Article 20
Notifications


Le dépositaire notifie à tout Etat visé au préambule et à la Communauté européenne, pour ce qui concerne le présent protocole :
a) Toute signature ;
b) Le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation ;
c) Toute date d'entrée en vigueur ;
d) Toute déclaration faite par une Partie contractante ou signataire ;
e) Toute dénonciation notifiée par une Partie contractante, y compris sa date d'effet.
En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé le présent protocole.
Fait à Brdo, le 27 février 1996, en français, allemand, italien, slovène, les quatre textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives d'Etat de la République d'Autriche. Le dépositaire communique copie certifiée conforme à toutes les Parties signataires.