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Article (Décision n° 2006-0593 du 27 juillet 2006 portant sur la définition des marchés pertinents de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles en métropole, la désignation d'opérateur disposant d'influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)

Article (Décision n° 2006-0593 du 27 juillet 2006 portant sur la définition des marchés pertinents de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles en métropole, la désignation d'opérateur disposant d'influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)



2.3.3.4. Conclusion sur l'absence de substituabilité sur les marchés de détail


L'analyse du marché de détail montre qu'une personne souhaitant envoyer un SMS vers un client mobile, que ce soit d'un réseau mobile, d'un réseau fixe ou d'Internet, ne dispose pas de réels services de substitution à l'horizon de la période couverte par la présente décision.


2.3.4. Analyse de la substitution du côté de l'offre


En première analyse, il ne semble pas qu'il y ait de substitution du côté de l'offre envisageable sur la période couverte par la présente décision. En effet, celle-ci supposerait que, en cas d'augmentation des prix de l'offre d'interconnexion SMS par un opérateur mobile, un opérateur en place ou un nouvel entrant pourrait offrir ce service de terminaison. Une telle éventualité n'est pas possible du fait que, dans le système actuel, l'opérateur de terminaison est l'opérateur qui offre l'accès au réseau mobile et qui maîtrise le terminal du client.
Néanmoins, l'analyse des marchés ayant un caractère prospectif et non contingent et étant donné à la fois le développement rapide du SMS et la qualification juridique des acteurs examinée dans la partie 1.6, il paraît réaliste que d'autres opérateurs que les opérateurs mobiles, notamment les fournisseurs d'accès Internet et les agrégateurs de SMS, puissent offrir leurs services dans des conditions d'interconnexion. En d'autres termes, ce n'est pas parce que les FAI et les agrégateurs de SMS n'achètent pas à ce jour une offre d'interconnexion SMS qu'ils ne le feront pas demain. Etant donné qu'ils peuvent être qualifiés d'exploitants de réseau de communications électroniques ouvert au public au sens de l'article L. 32-3 du CPCE, rien ne les empêche d'obtenir de telles conditions à l'horizon de cette analyse.
Ainsi, en considérant cette hypothèse et en se plaçant dans une perspective prospective, dans laquelle tous les exploitants de réseau de services de communications électroniques ouvert au public ont accès non seulement aux offres de SMS Push des opérateurs mobiles, mais également à l'interconnexion SMS, la substituabilité entre les offres d'interconnexion SMS et celles de SMS Push (cf. 2.3.2.3) se trouve confortée : si le prix des offres de SMS Push des opérateurs mobiles augmente de manière sensible et durable, toutes choses égales par ailleurs, les agrégateurs de SMS, les FAI et les opérateurs fixes préféreront acheter une prestation d'interconnexion SMS. Certains acteurs, notamment les agrégateurs de SMS dont c'est le coeur de métier, seront même en mesure de proposer à leurs clients (éditeurs de services) des offres Push à un prix inférieur aux offres Push proposées par les opérateurs mobiles eux-mêmes.
Du point de vue de l'offre, les offres d'interconnexion SMS constituent donc des substituts aux offres de SMS Push.


2.3.5. Conclusion sur l'analyse de la substituabilité


A l'issue de cette analyse, il ressort donc que les offres d'interconnexion SMS sont substituables aux offres de terminaison d'appel SMS dans une analyse prospective.
En outre, le seul substitut à ces offres sur réseau mobile, envisagé individuellement, est la vente en gros de SMS-MT (SMS Push). En effet, l'analyse de la substituabilité montre que l'interconnexion SMS est substituable au SMS Push du point de vue de la demande, tandis que le SMS Push est substituable à l'interconnexion SMS du point de vue de l'offre : en cas de hausse de la charge d'interconnexion SMS, les demandeurs préféreraient acheter du SMS Push, tandis que, en cas de hausse du prix du SMS Push, des agrégateurs achèteraient une offre d'interconnexion SMS pour vendre du SMS Push à un prix inférieur. Au bilan, les deux produits se trouvent donc soumis à des contraintes concurrentielles identiques. Ces produits couvrent les SMS-MT qu'ils soient 2G, 3G, ou reroutés par l'international.
Au-delà, il n'existe pas d'autre produit de substitution envisageable à l'horizon de la période couverte par cette décision.
En raison de l'impossibilité technique pour un opérateur de terminer un appel vers un terminal mobile dont il n'est pas propriétaire de la carte SIM, il n'y a pas d'autre substitution du côté de la demande, non seulement sur le marché de gros, mais aussi sur les marchés de détail, entre voix, SMS et autres services de messagerie mobiles. Il n'est donc pas envisageable de définir un marché national de la terminaison d'appel SMS.
En raison de l'absence de substitution du côté de la demande, il est donc envisageable de définir, pour chaque opérateur de réseau mobile, le marché de la terminaison d'appel SMS sur son réseau, comprenant l'ensemble des offres d'interconnexion SMS, ainsi que les offres de SMS Push, à destination de ses clients.


2.4. Délimitation géographique des marchés de gros


Il est ensuite nécessaire de définir le périmètre géographique de ces marchés. S'agissant de réseaux mobiles, la notion de segmentation géographique est sans doute plus complexe que pour le fixe. Ainsi, un client d'un opérateur mobile français peut voyager dans l'ensemble des pays où un réseau est compatible GSM-UMTS et recevoir des SMS. Cependant, il n'en demeure pas moins que les clients restent généralement dans une aire géographique limitée, correspondant à la zone de couverture de l'opérateur. De plus, à l'extérieur de la zone de couverture de l'opérateur, l'appelé reçoit ses SMS grâce à l'itinérance.
L'étendue de la couverture des opérateurs mobiles dépend des périmètres d'autorisations de fréquences, qui eux-mêmes suivent le découpage administratif de la France. La segmentation géographique retient donc un périmètre métropolitain, qui correspond à l'étendue des autorisations d'usage de fréquences des opérateurs Orange France, SFR et Bouygues Telecom.


2.5. Liste des marchés de gros


Les marchés de gros recensés dans le cadre de cette analyse de marché sont les suivants :
- marché de gros de la terminaison de SMS sur le réseau d'Orange France ;
- marché de gros de la terminaison de SMS sur le réseau de SFR ;
- marché de gros de la terminaison de SMS sur le réseau de Bouygues Telecom ;
Comme indiqué précédemment, l'Autorité inclut dans ce marché toute prestation de terminaison SMS (offres d'interconnexion SMS et SMS Push) quelle que soit l'origine du SMS (mobile, fixe, Internet, nationale ou internationale), quel que soit le destinataire, client de l'opérateur ou d'un MVNO recourant au réseau de l'opérateur, et quelle que soit la technologie utilisée pour produire cette prestation (GSM ou UMTS).

Les obstacles au développement d'une concurrence effective relevés en section 4.1.1 justifient que l'Autorité considère comme pertinents ces marchés au sens de l'article L. 37-1.
Conformément à l'article 7 de la directive « Cadre », ces marchés vérifient également les trois critères définis par la Commission dans sa recommandation (cf. section 4.1.3).


2.6. Prise en compte des contributions aux consultations publiques
sur la définition des marchés de gros
2.6.1. Principales remarques des acteurs sur la définition des marchés de gros
2.6.1.1. Tableau synthétique des contributions à la première consultation publique
concernant la définition des marchés de gros


Le tableau ci-dessous a pour objectif de donner une vision synthétique des contributions reçues par l'ARCEP suite à la première consultation publique qu'elle a lancée. Par nature, ce tableau ne peut pas refléter le sens complet des contributions qui, pour certaines, sont couvertes par le secret des affaires, mais donne une idée du point de vue défendu par chacun.
Les cases non renseignées signifient que le contributeur ne s'est pas prononcé explicitement pour ou contre la proposition de l'Autorité.


Acteurs ayant exprimé un accord avec le point de vue défendu par l'ARCEP
dans son projet d'analyse de marché




2.6.1.2. Sur la délimitation des marchés de gros et l'analyse de la substituabilité


L'Autorité note tout d'abord que plusieurs acteurs, en particulier [SDA], Télé2 et Télégate/le 118000, approuvent l'analyse développée par l'ARCEP.
Pour l'AdUF (Association des Utilisateurs de Free), il est nécessaire de ne pas limiter le marché de gros à la terminaison sur les seuls réseaux mobiles, mais d'inclure également les réseaux fixes, notamment celui de France Télécom.

MMA France (Mobile Marketing Association) ne partage quant à elle pas l'analyse de l'ARCEP sur la non-substituabilité entre l'activité de Push SMS et celle de Push MMS texte, estimant que l'une est substituable à l'autre.
Enfin, de manière générale, les opérateurs mobiles estiment que l'Autorité ne procède pas à une analyse suffisamment prospective du marché, ce qui conduirait, selon eux, l'Autorité à retenir un périmètre de marché inexact :
[SDA] estime tout d'abord que la TA SMS et l'offre de SMS Push n'appartiennent pas au même marché de gros. La société considère en effet que la TA SMS et l'offre de Push SMS ne sont pas substituables en raison des différences d'usage, mais aussi des différences techniques. La société note que l'offre de SMS Push est en revanche substituable à d'autres services de transmission en ligne. [SDA] estime ensuite que les services SMS au détail ne constituent pas un marché à part entière dans la mesure où, d'une part, il n'y a pas de demande, ni d'offre isolée pour les SMS et, d'autre part, les SMS sont substituables à d'autres services. Ainsi, l'opérateur considère que les SMS de personne à personne sont substituables à d'autres services de communications interpersonnelles (communication vocale, message vocal, message data), tandis que les SMS de contenu sont substituables à d'autres services en ligne (services vocaux, Wap, i-mode, MMS).
Pour Orange France, l'analyse du marché de détail mobile ne permet pas de définir un « marché des SMS » : les services mobiles sont consommés de manière groupée par les clients finals, l'offre mobile étant perçue comme un bien système articulé autour des usages de communications personnelles. Les services mobiles (émission et réception d'appels vocaux, de messages SMS, MMS, e-mail, etc.) sont à la fois complémentaires et substituables en termes d'usage pour les consommateurs. C'est pourquoi, selon la société, si l'on regarde de plus près les usages clients liés au SMS, notamment l'échange de messages interpersonnels en mode asynchrone en situation de mobilité, on peut constater que les SMS, les MMS, les e-mails mobiles et les messages instantanés remplissent tous cet office. Si ces divers supports n'en sont pas au même stade de développement et ne se présentent pas exactement sous la même forme à l'heure actuelle, les évolutions attendues dans les années à venir vont dans le sens d'une très forte homogénéisation de ces services de messagerie mobile.
[SDA] estime quant à elle que la définition du marché proposée par l'ARCEP repose sur un examen fragile et partiel des substituabilités. D'une part, la société attire l'attention de l'ARCEP sur le fait qu'il est difficile de corréler deux courbes d'usage et d'en tirer un principe de non-substituabilité. Pour ce faire, [SDA] s'appuie sur une étude interne tendant à montrer l'existence d'une certaine substituabilité des courbes voix et SMS prépayées pour la Grèce. D'autre part, selon la société, l'ARCEP oublie tout un pan de l'analyse de substituabilité nécessaire à la détermination d'un marché pertinent : l'analyse de la substituabilité du côté de l'offre et des contraintes concurrentielles. De ce point de vue, [SDA] estime qu'il existe une réelle substituabilité entre les SMS et les autres services de communications mobiles, comme illustrée dans plusieurs études citées par la société prédisant une décroissance du SMS au profit des nouvelles messageries.
Dans sa contribution à la consultation publique lancée le 16 juin 2006, [SDA] estime qu'à l'horizon 2008 l'échange de services de messages textes sur mobile, au-delà des SMS, se développera via d'autres supports comme les MMS, les e-mails ou les messageries instantanées, et ce en France comme dans d'autres pays. [SDA] prend d'ailleurs l'exemple de Ten, MVNO lancé commercialement en juin dernier, comme illustration des évolutions à venir sur le marché de détail. Dans le mesure où selon [SDA], ces différentes solutions techniques remplissent le même usage, cet acteur considère que la substituabilité entre les différents services de messagerie mobile sur le marché de détail se matérialisera avant la fin de période de validité de l'analyse de l'Autorité.


2.6.2. Réponses de l'Autorité


A titre liminaire, l'Autorité souligne que les arguments avancés par les opérateurs mobiles concernant la délimitation d'un marché de détail de la téléphonie mobile sont sans objet eu égard à la définition du marché de gros analysé dans la présente décision. Au surplus, l'Autorité fait remarquer que les positions défendues par Orange France, [SDA] et, dans une certaine mesure, par [SDA] la conduiraient à définir un marché de gros global de la terminaison d'appels pour toutes les communications mobiles (voix, SMS, MMS, visiophonie) ou pour toutes les communications de données (SMS, MMS). D'une part, cette démarche n'est pas cohérente avec celle retenue par la commission dans le cadre de sa recommandation, puisqu'elle identifie un marché de gros de la terminaison d'appel vocal (marché n° 16). D'autre part, quand bien même un marché de gros de terminaison des services de données sur les réseaux mobiles pourrait être identifié, les implications en termes de régulation sectorielle seraient rigoureusement identiques pour ce qui concerne les SMS.
En réponse à l'AdUF, l'Autorité constate que les SMS ont aujourd'hui un caractère essentiellement « mobile ». Si son action vise bien à diffuser le service au-delà du seul monde mobile, l'Autorité estime néanmoins qu'il est prématuré à ce stade d'examiner la situation concurrentielle de la TA SMS sur les réseaux fixes. L'Autorité précise toutefois qu'elle dispose de la faculté de réviser son analyse avant son terme, si la situation du marché et son évolution le justifient. Si tant est que cela soit opportun, l'Autorité note que l'inclusion des réseaux fixe et mobile dans le périmètre de l'analyse ne changerait rien à l'examen de la puissance de marché des acteurs en présence (cf. section 3.2.2.2.4) et les conclusions en termes de régulation pour les opérateurs mobiles demeureraient inchangées.
En réponse à MMA France, l'Autorité, si elle s'interroge effectivement sur l'existence possible d'une substituabilité à long terme entre le SMS Push et le Push MMS texte pour les activités de services en ligne, considère que ce commentaire n'est pas pertinent pour les usages de SMS interpersonnels qui représentent la majeure partie des envois de SMS. Concernant plus spécifiquement le Push MMS texte, l'Autorité précise qu'à sa connaissance ce produit, essentiellement destiné aux éditeurs de services et aux annonceurs désirant mener une campagne de marketing sur mobile, n'est apparu qu'au cours du second semestre de l'année 2005. D'une part, dans le cas du Push MMS texte, une telle campagne nécessite que les annonceurs aient accès à une base composée exclusivement de clients possédant un terminal compatible MMS, contrairement aux campagnes de SMS Push qui touchent potentiellement tous les clients mobiles ayant donné leur accord. D'autre part, il n'existe pas encore d'offre de gros, ni de grille tarifaire clairement identifiées, comme c'est le cas notamment pour le SMS Push. Dans ces conditions, même à supposer que le Push MMS texte connaisse une percée rapide sur ce segment d'activité spécifique, l'Autorité considère qu'une substituabilité, telle que décrite par MMA France, ne pourrait commencer à s'opérer qu'après la période couverte par la présente décision, c'est-à-dire à l'horizon 2009.
En réponse à la première partie des commentaires de [SDA], l'Autorité précise tout d'abord que l'étude quantitative, jointe dans l'annexe D de la présente analyse, si elle ne suffit pas à elle seule à démontrer un principe général de non-substituabilité, n'en constitue pas moins un faisceau d'indices précis et concordants. Ensuite, l'Autorité note que l'étude présentée par la société sur la substituabilité entre les courbes voix et SMS en Grèce portent sur un segment très particulier qui est celui des offres prépayées, qui représentent en France, selon les derniers chiffres publiés par l'ARCEP (55), environ 35 % du parc total de clients. Outre le fait que cette étude oublie potentiellement 65 % des utilisateurs du SMS, il est fort probable que cette catégorie de clients, par essence moins consommatrice de services vocaux, a un comportement spécifique quant à l'utilisation du SMS. Par ailleurs, compte tenu des courbes présentées, l'Autorité juge que la conclusion de [SDA] sur la substituabilité possible entre la voix et le SMS n'est pas probante. Enfin, si tant est que l'on puisse tirer de ces courbes une conclusion extrapolable à l'ensemble des segments prépayés et postpayés du marché français, cette étude n'est par définition valable que pour la Grèce et ne tient pas compte d'éventuelles spécificités nationales.
Enfin, sur l'absence de vision prospective, l'Autorité ne partage pas la position des différents contributeurs ayant exprimé cet avis :
- d'une part, dans son analyse de la substituabilité, l'Autorité a bien pris en compte (cf. sections 2.3.1.1 et 2.3.2.1) le phénomène de convergence des réseaux qui s'observe actuellement et dont le secteur s'accorde à dire qu'il modifiera en profondeur la manière dont seront acheminées demain les communications électroniques en précisant, dans le présent document, que l'exploitant de réseau ouvert au public dont il était question pouvait « être aussi bien, dans une vision prospective, un opérateur mobile, un opérateur fixe, un FAI ou encore un agrégateur ». De la même manière, l'analyse de la substituabilité du côté de l'offre menée par l'Autorité dans la section 2.3.4 comporte bien un caractère prospectif, qui conduit notamment l'Autorité à conclure qu'il existe une réelle substituabilité entre les offres d'interconnexion SMS et de SMS Push et qui justifie, contrairement à ce que soutient [SDA], de les inclure dans le même marché de gros ;
- d'autre part, l'Autorité relève un certain nombre de contradictions dans les études prévisionnelles présentées par les opérateurs mobiles et note que certaines d'entre elles, loin de justifier leur position, légitiment au contraire l'action de l'Autorité dans la mesure où elles mettent en avant une possible décroissance du SMS à l'horizon 2008-2010, alors que la période couverte par la présente analyse ne porte que sur une période d'une durée de trois ans. Enfin, l'Autorité précisait dans le présent document que « (...) si les évolutions des caractéristiques du marché le justifiaient, l'Autorité réexaminerait pendant cette période le marché de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles et pourrait, le cas échéant, être amenée à prendre une nouvelle décision ».