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Article (CONSEIL CONSTITUTIONNEL Saisine du Conseil constitutionnel en date du 25 février 1997 présentée par plus de soixante sénateurs, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, et visée dans la décision no 97-388 DC)

Article (CONSEIL CONSTITUTIONNEL Saisine du Conseil constitutionnel en date du 25 février 1997 présentée par plus de soixante sénateurs, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, et visée dans la décision no 97-388 DC)

V. - Les entraves au libre choix

du plan d'épargne retraite (art. 4, 6 et 7)


Les dispositions combinées des articles 4, alinéa 2, 6, premier alinéas, et 7, alinéa 2, autorisent la mise en place, dans les entreprises, de plans d'épargne retraite par décision unilatérale de l'employeur sans que ce dernier participe à leur financement. Cela signifie que, sans être impliqué dans la gestion du plan, l'employeur pourra imposer à ceux des salariés qui le souhaiteront d'adhérer au plan et donc au fonds qu'il aura, seul, choisi. En effet, dans ce cas le salarié ne pourra adhérer au plan de son choix puisqu'un plan aura été mis en place dans l'entreprise. En outre, il ne pourra en changer que tous les dix ans, une fois renouvelable.
Le principe de la participation des salariés à la définition de leurs conditions de travail est, de nouveau, totalement méconnu. Il en va de même de la liberté, pour un salarié, de choisir son contractant. Le fait que l'adhésion soit rendue possible par le contrat d'assurance de groupe souscrit par l'employeur au profit de ses salariés ne contredit pas cette affirmation. D'une part, l'employeur ne joue pas véritablement son rôle de cocontractant ; il est plutôt un intermédiaire entre le fonds d'épargne retraite et ses salariés. D'autre part, la Cour de cassation considère que les opérations d'assurance de groupe ouvertes, c'est-à-dire auxquelles les assurés appartenant à un groupe déterminé sont libres d'adhérer ou non, donne naissance à une double série de rapports contractuels entre le souscripteur (l'employeur) et l'assureur (le fonds d'épargne retraite), d'une part, et entre chaque assuré et l'assureur, d'autre part. La Cour de cassation a, en effet, jugé que « l'adhésion au contrat d'assurance de groupe, bien que conséquence d'une stipulation pour autrui, n'en crée pas moins un lien contractuel direct entre l'adhérent et l'assureur » (1re ch. civile, 7 juin 1989, Revue générale des assurances terrestres, 1989, p. 623, note J.-L.
Aubert).
Le principe constitutionnel de l'autonomie de la volonté, tel qu'il résulte de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui affirme que « la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui » est ici méconnu par le législateur. Le fait que l'adhésion se fasse par l'intermédiaire de l'employeur ne constitue nullement une garantie :
l'employeur n'est pas impliqué financièrement, l'article 6 de la loi l'autorisant à ne pas cotiser, et il n'est pas un professionnel de l'épargne retraite.
En conséquence, les dispositions des articles 4, alinéa 2, 6, premier alinéa, et 7, alinéa 2, sont contraires à la Constitution.