Article (Circulaire du 22 juillet 1996 prise pour l'application de la loi no 96-432 du 22 mai 1996 portant adaptation de la législation française aux dispositions de la résolution 955 du Conseil de sécurité des Nations unies instituant un tribunal international en vue de juger les personnes présumées responsables d'actes de génocide ou d'autres violations graves du droit humanitaire commis en 1994 sur le territoire du Rwanda et, s'agissant des citoyens rwandais, sur le territoire d'Etats voisins)
II. - Les modifications apportées par la loi du 22 mai 1996
à la loi du 2 janvier 1995
La loi du 22 mai 1996 a apporté trois modifications à la loi du 2 janvier 1995.
Elle a tout d'abord supprimé la référence au principe de la double incrimination pour les crimes et délits susceptibles d'être jugés par les tribunaux internationaux.
L'article 1er de la loi du 22 mai 1996 ne fait plus référence comme le faisait la loi du 2 janvier 1995 aux « crimes ou délits définis par la loi française », mais aux « actes » qui constituent, au sens du statut du tribunal, des violations graves du droit international humanitaire. L'article 4 de la loi du 22 mai 1996 supprime par coordination cette référence dans la loi du 2 janvier 1995.
Cette suppression répond à l'inquiétude de certains qui s'étaient demandé si l'exigence de la double incrimination, bien qu'elle soit traditionnelle en droit international, n'était pas de nature à paralyser la coopération des juridictions françaises pour les faits commis avant l'entrée en vigueur du nouveau code pénal intervenue le 1er mars 1994, dans la mesure où ce n'est qu'à partir de cette date que notre droit a incriminé de façon spécifique le génocide et les autres crimes contre l'humanité.
En réalité, cette exigence, ainsi que le précisait d'ailleurs la circulaire du 10 février 1995, ne soulevait aucune difficulté d'application, les agissements visés par le statut, compte tenu de leur nature et de leur gravité, ayant toujours constitué des infractions en droit français.
Le principe de la double incrimination n'entraînait donc aucun affaiblissement de la répression, pas plus qu'il ne limitait l'efficacité de la coopération des juridictions françaises. Sa suppression a donc pour seul objet, eu égard au caractère expressif et symbolique de la loi pénale,
surtout lorsque celle-ci a trait à des crimes de cette nature, de répondre aux inquiétudes suscitées par la loi du 2 janvier 1995.
Si les lois du 2 janvier 1995 et 22 mai 1996 font désormais apparaître que le principe de la double incrimination n'est pas retenu en ce qui concerne la coopération internationale de nos juridictions avec les tribunaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda, il convenait toutefois d'éviter que cette modification ait pour conséquence d'empêcher les juridictions françaises, au profit desquelles a été instituée une compétence universelle, de condamner les auteurs de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie et du Rwanda.
En effet, les conventions internationales définissant ces comportements ne prévoyant pas de peine, seules les peines prévues par la loi française pourront être appliquées par les juridictions de notre pays pour réprimer les auteurs de ces actes. C'est donc pour permettre aux juridictions françaises d'exercer pleinement leur compétence que l'article 5 de la loi du 22 mai 1996 a complété l'article 2 de la loi du 2 janvier 1995 qui dispose que les auteurs et complices susceptibles d'être jugés par le tribunal international pour l'ex-Yougoslavie peuvent être poursuivis et jugés par les juridictions françaises s'ils sont trouvés en France, en précisant que ces poursuites et ces jugements devaient être faits « en application de la loi française ».
Le mécanisme de renvoi général à la loi de 1995 auquel procède la loi de 1996 rend cette disposition applicable aux personnes susceptibles d'être jugées par le tribunal international pour le Rwanda.
L'article 6 de la loi du 22 mai 1996 a par ailleurs modifié l'article 13 de la loi du 2 janvier 1995 afin de porter à deux mois le délai dont dispose la chambre criminelle de la Cour de cassation pour examiner les pourvois formés contre les décisions de la chambre d'accusation de Paris ayant ordonné la remise d'un accusé au tribunal international pour l'ex-Yougoslavie ou, par voie de conséquence, au tribunal international pour le Rwanda.
Enfin, les articles 3 et 7 de la présente loi étendent son applicabilité aux territoires d'outre-mer, et prévoient la même extension pour la loi du 2 janvier 1995.
Je vous serais obligé de veiller à la diffusion de la présente circulaire et de m'informer, sous le timbre de la direction des affaires criminelles et des grâces, des procédures engagées en application des dispositions de la présente loi, y compris celles consistant dans l'audition de personnes réfugiées sur notre territoire. Une copie de ces procédures devra être adressée à la direction des affaires criminelles et des grâces afin d'être transmise au procureur du tribunal international pour le Rwanda.