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Article (Décision n° 2005-0571 du 27 septembre 2005 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)

Article (Décision n° 2005-0571 du 27 septembre 2005 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)



IV-5.3. Conditions techniques et tarifaires des prestations d'accès fournies par France Télécom
au titre de la sélection du transporteur


En vertu de l'article D. 313 du code, il incombe à l'Autorité de « fixer, en tant que de besoin, les prestations d'interconnexion et d'accès mentionnées au II de l'article L. 38 ainsi que leurs modalités de et délais de mise en oeuvre. Les tarifs de ces prestations reflètent les coûts correspondants ».
France Télécom étant puissante sur les marchés de détail des communications, ainsi que sur les marchés de gros sous-jacents, il est nécessaire qu'elle fournisse l'ensemble des prestations d'accès relatives à la sélection et la présélection du transporteur dans des conditions transparentes et non discriminatoires, notamment pour garantir l'égalité des conditions de concurrence sur les marchés de détail.
Par ailleurs, l'Autorité entend réexaminer prochainement les conditions précises d'application de cette obligation.
A titre transitoire, elle impose à France Télécom de continuer à fournir les prestations d'accès relatives à la sélection et présélection du transporteur dans les conditions techniques et tarifaires définies aux décisions précitées (décisions n° 97-345, n° 99-490, n° 99-1077 et n° 2001-691 susvisées).
En particulier, France Télécom, exerçant une influence significative sur le marché du départ d'appel et sur celui du transit, elle devra continuer à fournir ces prestations d'accès au titre de la sélection et présélection sur l'ensemble de ses commutateurs ouverts à l'interconnexion, commutateurs d'abonnés et commutateurs de transit.
Par ailleurs, les mécanismes de sélection et présélection du transporteur sont aujourd'hui restreints aux communications interpersonnelles locales, nationales et internationales vers des numéros géographiques en position déterminée, et à destination des abonnés des réseaux mobiles. A l'inverse, lorsqu'un abonné sélectionne un opérateur de transport alternatif, les communications d'accès au réseau Internet, les communications interpersonnelles vers les numéros non géographiques en position déterminée (numéro de type 087B PQMCDN) et les communications vers les services spéciaux vocaux et de données continuent à être acheminées par France Télécom.
L'Autorité consultera les acteurs sur l'opportunité d'étendre les mécanismes de sélection du transporteur aux communications interpersonnelles vers les numéros non géographiques en position déterminée (numéro de type 087B PQMCDN), et plus généralement sur l'opportunité d'étendre ces mécanismes pour l'ensemble des numéros qui en sont aujourd'hui exclus.
En attendant, France Télécom devra fournir les prestations d'accès nécessaires à la sélection et la présélection du transporteur des appels inclus déjà concernés, dans les conditions fixées par les décisions précitées susvisées.


IV-6. Publication d'une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion et d'accès
dite « offre de référence Interconnexion et sélection du transporteur »
IV-6.1. Objectif de l'obligation


L'article L. 38-I du code précité précise, en son 1°, qu'une obligation de transparence spécifique peut être imposée aux opérateurs « réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques ». Ces derniers peuvent ainsi se voir imposer de « publier une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion ou d'accès lorsqu'ils sont soumis à des obligations de non discrimination ».
France Télécom est soumise à une obligation de transparence et de non-discrimination par la présente décision. L'obligation de publication d'une telle offre technique et tarifaire ou offre de référence poursuit quatre objectifs :
- concourir à la mise en place de processus transparents, pour limiter la capacité de l'opérateur exerçant une influence significative à déstabiliser ses concurrents ou favoriser ses filiales ;
- donner de la visibilité aux acteurs sur les termes et les conditions dans lesquelles ils s'interconnectent avec l'opérateur sur qui pèse l'obligation ;
- pallier le déficit de pouvoir de négociation des opérateurs alternatifs ;
- permettre l'élaboration d'une offre cohérente de prestations aussi découplées que possible les unes des autres pour permettre à chaque opérateur de n'acheter que les prestations dont il a besoin.
Elle contribue ainsi grandement à la stabilité du marché, et permet aux opérateurs alternatifs de développer un plan d'affaires et de programmer leurs investissements avec une visibilité suffisante sur des paramètres qui conditionnent fortement leur structure de coûts. Imposée sur les prestations d'accès et d'interconnexion structurantes, au sens où elles conditionnent la possibilité même des acteurs de faire des offres sur les marchés de détail, l'obligation de publier une offre technique et tarifaire d'interconnexion et d'accès est ainsi décisive pour le développement d'investissements efficaces, et garantit l'égalité des conditions de concurrence et son exercice, dans des conditions loyales, au bénéfice des utilisateurs.
Dès lors, l'Autorité estime que cette obligation, en ce qu'elle constitue le minimum nécessaire qui doive être imposé à France Télécom pour les atteindre, est nécessaire et proportionnée aux objectifs mentionnés à l'article L. 32-1, notamment aux 2°, 3° et 4°, pour certaines prestations d'interconnexion particulièrement décisives pour les opérateurs, et détaillées en annexe A de la présente décision, ainsi que sur les prestations d'accès associées permettant l'utilisation effective de ces offres par les opérateurs pour proposer des services sur les marchés de détail : les prestations d'accès aux sites d'interconnexion, et la prestation de facturation pour compte de tiers.
L'Autorité souligne en particulier que, pour tenir compte de l'existence d'un début de concurrence sur certaines prestations de transit intra territorial, elle estime qu'il n'est pas justifié d'imposer à France Télécom d'inscrire à cette offre les conditions techniques et tarifaires de sa prestation de double transit. Au demeurant, cette offre n'était pas inscrite dans les dernières versions du « catalogue d'interconnexion » de France Télécom.
Par ailleurs, au regard des mêmes objectifs, et pour les mêmes raisons, l'obligation de publier une offre technique et tarifaire d'accès apparaît nécessaire et proportionnée pour les prestations d'accès relatives à la sélection et la présélection du transporteur.

L'Autorité propose que France Télécom ne publie qu'une seule offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion et d'accès, regroupant l'ensemble de ces prestations.


IV-6.2. Principes


Conformément au II de l'article D. 307 du code des postes et des communications électroniques, l'offre de référence devra être « suffisamment détaillée pour que l'opérateur demandeur ne paye que l'utilisation des moyens strictement liés à la prestation demandée ».
En application des II et III de l'article D. 307 précité, l'Autorité estime justifié que cette offre comprenne, outre les prestations d'accès devant y figurer, les conditions contractuelles types relatives aux tarifs, aux conditions de souscription, aux modalités d'accès à l'offre, les engagements de qualité de services, ainsi que les informations répondant à l'obligation de transparence et de non-discrimination définies dans la présente décision. En particulier, tous les tarifs devront être effectivement inscrits dans l'offre de référence et non uniquement dans les conventions conclues entre les parties.
En outre, il importe que la tarification de certaines prestations « sur devis » ne soit envisagée qu'à titre exceptionnel. Le cas échéant, il reviendra à France Télécom de justifier des contraintes l'empêchant d'établir un tarif fixé à l'avance dans l'offre de référence.
Les prestations y figurant seront clairement détaillées, et accompagnées des modalités de fourniture, des conditions techniques et tarifaires correspondant à ces offres ainsi qu'aux prestations qui leur sont associées. Afin de pouvoir apprécier le respect par France Télécom de ses obligations tarifaires imposées sur les marchés du départ d'appel, du transit et de la terminaison d'appel respectivement, France Télécom distinguera dans son offre tarifaire le prix de la prestation de transit de celui de la prestation de départ d'appel ou de terminaison d'appel.
L'Autorité précise en annexe A de la présente décision la liste minimale des prestations d'interconnexion et d'accès devant figurer à l'offre, y compris les prestations qui leur sont associées, les informations à publier, le niveau de détail requis et le mode de publication.
Pour en assurer une diffusion satisfaisante, l'Autorité souhaite que l'offre de référence soit publiée sur un site internet librement accessible. Certaines informations, concernant notamment la localisation et les caractéristiques d'équipements de réseau et pouvant être qualifiées de sensibles, pourront être mises en annexe, afin d'en limiter la diffusion aux seuls opérateurs.
France Télécom pourrait être amenée à faire évoluer au cours du temps son offre de référence « interconnexion et sélection du transporteur ». Une évolution unilatérale sans concertation préalable risquerait cependant de s'avérer préjudiciable pour le secteur. Elle pourrait en effet, sur le plan tarifaire, remettre en question la politique commerciale d'un opérateur ou, sur le plan technique, impacter le plan de déploiement d'un opérateur et nécessiter des adaptations techniques longues à mettre en oeuvre.
Les prestations ayant vocation à figurer à l'offre de référence sont particulièrement structurantes pour les marchés. Les acteurs ont par conséquent grandement besoin de visibilité sur les conditions de fourniture de ces prestations, qui représentent souvent la majorité (jusqu'à 60 %) de leurs charges annuelles, pour optimiser leurs choix d'investir ou non dans des infrastructures de transport, conformément à l'objectif mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du code.
Il est donc nécessaire que France Télécom publie avec un préavis suffisant toute évolution de l'offre de référence.
Ce préavis aura pour fin de permettre à l'ensemble du secteur de répercuter ces évolutions sur les prix de détail dès leur application, de mettre en oeuvre les solutions techniques correspondantes et, le cas échéant, d'adapter leurs processus opérationnels.
Par conséquent, sur le fondement des dispositions de l'article D. 307-III du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité considère que les modifications des conditions inscrites à l'offre de référence devront respecter un délai de préavis raisonnable, qui ne saurait être inférieur à un mois. En cas d'évolution tarifaire, ce préavis sera de trois mois minimum, et il sera porté à un an en cas d'évolution de nature à contraindre les opérateurs à modifier leurs installations. Cette condition apparaît essentielle pour garantir aux opérateurs une visibilité suffisante sur leurs investissements. Elle est donc adaptée au respect des objectifs d'égalité des conditions de la concurrence fixés à l'article L. 32-1 du code, sans pour autant représenter une charge excessive pour France Télécom.
L'obligation de publication avec préavis pour l'entrée en vigueur des modifications apportées s'entend sauf décision contraire de l'Autorité ou de toute autre autorité ou juridiction habilitée à imposer une telle modification. Certains cas particuliers peuvent en effet nécessiter une mise en oeuvre immédiate des évolutions de l'offre. Ce cas peut notamment se rencontrer à la suite d'une décision de règlement de différend ou d'une décision de modification de l'offre de référence. De même, aucun préavis ne sera nécessaire en cas de modification consistant simplement à répercuter une modification, à la hausse ou à la baisse, décidée par un autre opérateur et qui impacte une des conditions inscrites à l'offre. A titre d'exemple, la hausse du tarif de terminaison d'appel d'un opérateur alternatif devra être immédiatement répercutée par France Télécom dans son offre de transit à destination du réseau de cet opérateur, dans la mesure où cette dernière couple la prestation de transit proprement dite et l'offre de terminaison d'appel de l'opérateur tiers, et qu'elle est soumise à une obligation de reflet des coûts (cf. infra).
S'agissant de la première offre de référence publiée conformément à la présente décision, il y a lieu de réduire ce préavis en cas d'évolution tarifaire susmentionné entre sa publication et son entrée en vigueur, afin d'assurer au secteur une mise en oeuvre aussi rapide que possible des obligations détaillées dans la présente décision tout en gardant une visibilité minimale obligatoire pour permettre aux opérateurs de prendre en compte d'éventuelles évolutions tarifaires. L'Autorité impose donc l'entrée en vigueur de cette offre au 1er janvier 2006.
Il apparaît cependant raisonnable de laisser à France Télécom un délai d'un mois à compter de l'entrée en vigueur de la présente décision pour préparer une offre de référence qui y soit conforme et la communiquer à l'Autorité. Ce délai d'un mois apparaît suffisant au regard du fait qu'une offre préexistait dans l'ancien cadre.
Durant la période de transition qui en découlera, il apparaît nécessaire, dans un souci de sécurité juridique pour l'ensemble du secteur, mais également au vu de l'importance des prestations concernées explicitée ci-dessus, de disposer d'une continuité dans l'offre de France Télécom. Par conséquent, il est nécessaire et proportionné, notamment au regard de l'objectif visant à garantir l'égalité des conditions de concurrence, de prévoir un maintien transitoire des dispositions techniques et tarifaires offertes sur les prestations couvertes par la présente analyse et prévues à l'offre technique et tarifaire d'interconnexion en vigueur depuis le 1er janvier 2005, approuvée par la décision n° 2004-1000 susvisée de l'Autorité.


IV-7. Publication d'une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion et d'accès
dite « offre de référence service téléphonique »


France Télécom est soumise à des obligations de transparence et de non-discrimination sur l'ensemble des marchés de gros sur lesquels elle exerce une influence significative.
L'Autorité a par ailleurs justifié la nécessité que France Télécom permette aux opérateurs alternatifs de proposer aux utilisateurs finals raccordés au réseau de France Télécom des offres globales de services de communications électroniques en bande étroite, incluant à la fois une offre d'accès analogique ou numérique de base et une offre de communications à destination de l'ensemble des numéros du plan national de numérotation.
Les conditions dans lesquelles France Télécom fournira les prestations d'accès nécessaires à la définition de telles offres seront déterminantes pour leur utilisation effective, et au final pour le développement de conditions loyales de la concurrence sur les marchés de détail.
France Télécom devra proposer plusieurs prestations d'accès, notamment pour permettre aux opérateurs de proposer aux clients des options traditionnellement associées à leur « abonnement France Télécom », par exemple la présentation du numéro, dont l'intelligence est située dans des équipements de réseau de France Télécom, en l'occurrence ses commutateurs d'abonnés, et qu'il ne peut être demandé aux opérateurs de répliquer.
Des prestations d'accès impliquant les systèmes de facturation, les systèmes d'information gérant les processus de commandes, ou encore des systèmes logiciels d'assistance opérationnelle seront également indispensables au fonctionnement global des prestations.
Au vu de l'importance des processus mis en jeu et de leurs interactions, il apparaît indispensable que France Télécom publie un document de référence, une offre technique et tarifaire d'interconnexion et d'accès, détaillant notamment l'ensemble des prestations, leurs conditions techniques et tarifaires, ainsi que les processus de commande sous-jacents.
Conformément aux objectifs cités dans la partie précédente de l'intérêt d'une offre de référence, seule cette obligation permettrait de garantir une utilisation efficace des prestations de gros de France Télécom dont il est question.
Il apparaît dès lors proportionné aux objectifs mentionnés notamment aux 2° et 3° de l'article L. 32-1 du code d'imposer à France Télécom de publier une offre technique et tarifaire d'interconnexion et d'accès détaillant l'ensemble des prestations offertes aux opérateurs désirant proposer aux utilisateurs raccordés à son réseau des services de communications électroniques en bande étroite incluant une offre d'accès analogique ou numérique de base et une offre de communications à destination de l'ensemble des numéros du plan national de numérotation.
Des travaux multilatéraux, réunissant les services de l'Autorité, de France Télécom et des opérateurs alternatifs, sont en cours, et permettront à l'Autorité de spécifier prochainement la liste minimale des prestations d'interconnexion et d'accès devant figurer à l'offre, les informations à publier, le niveau de détail requis et le mode de publication.
Cette obligation sera donc précisée dans une décision ultérieure de l'Autorité.


IV-8. Contrôle des tarifs


L'article L. 38-I du code précité précise, en son 4°, qu'il peut être imposé aux opérateurs « réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques » de « ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et de pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants ».
France Télécom est aujourd'hui soumise, pour l'ensemble des prestations qu'elle fournit sur les marchés de l'interconnexion, à l'obligation de fixer des tarifs reflétant les coûts correspondants.
Cette obligation consiste à imposer une tarification égale aux coûts subis par l'opérateur pour fournir la prestation en tenant compte d'une rémunération raisonnable des capitaux employés.
Actuellement, les tarifs de l'interconnexion sont fixés conformément aux principes énoncés dans la décision n° 2002-1027 de l'Autorité en date du 5 novembre 2002. Ainsi, les coûts de référence utilisés pour calculer les tarifs d'interconnexion de France Télécom sont les coûts moyens incrémentaux de long terme.
L'article D. 311-II du code des postes et des communications électroniques dispose que, pour la mise en oeuvre de l'obligation de contrôle tarifaire, l'Autorité peut, le cas échéant, notamment préciser les méthodes de tarification ou de comptabilisation des coûts. Elle peut également « prendre en compte les prix en vigueur sur les marchés comparables en France ou à l'étranger ». Enfin, elle doit veiller « à ce que les méthodes retenues promeuvent l'efficacité économique, favorisent une concurrence durable et optimisent les avantages pour le consommateur. Elle veille également à assurer une rémunération raisonnable des capitaux employés, compte tenu du risque encouru ».
La définition d'une méthodologie de valorisation des coûts doit poursuivre un double objectif d'efficacité et de proportionnalité : il s'agit à la fois de donner le bon signal économique aux opérateurs acheteurs sur ce marché et de permettre à l'opérateur historique de recouvrer ses coûts et d'investir pour entretenir et développer son réseau.
De façon générale, la méthode retenue par l'Autorité permet en principe d'optimiser les décisions des opérateurs alternatifs, en les incitant à n'investir dans des infrastructures que lorsque cela est économiquement souhaitable.
Cette méthode permet aux seuls opérateurs efficaces, i.e. ayant un coût de production inférieur ou égal au tarif, de rentrer sur le marché en investissant.
La fixation de tarifs reflétant les coûts permet dans certains cas de rapprocher les tarifs de ceux qui seraient choisis par l'opérateur en environnement concurrentiel, et contribue d'autre part à la mise en oeuvre de l'obligation de non-discrimination à laquelle l'opérateur puissant est soumis, et qui l'enjoint notamment d'offrir aux opérateurs tiers des conditions tarifaires équivalentes à celles dont il bénéficie en interne.
La méthodologie actuelle de valorisation des coûts pour l'interconnexion, y compris les prestations qui leur sont associées, telle que développée dans la décision n° 2002-1027 précédemment mentionnée, est maintenue. Par ailleurs, et dans un souci de cohérence avec les obligations comptables qui sont imposées à France Télécom et décrites ci-après, il est demandé à France Télécom de produire l'ensemble de ses comptes individualisés en CMILT calculés sur la base de son modèle top-down en coûts de remplacement. L'Autorité examinera ultérieurement l'opportunité d'adapter ou de modifier cette méthodologie.


IV-8.1. Contrôle des tarifs des prestations de départ d'appel,
de terminaison d'appel et de transit inter territoires


France Télécom dispose d'une position durable de puissance sur les marchés correspondants, compte tenu notamment de la difficulté de dupliquer les infrastructures de boucle locale et les infrastructures inter territoires.
L'analyse de la puissance de France Télécom sur les marchés correspondants a montré que ces prestations sont incontournables pour l'ensemble des opérateurs de communications électroniques en France, qui ne disposent dès lors d'aucun contrepouvoir sur la latitude de fixation des tarifs dont dispose France Télécom.
France Télécom, en position quasi monopolistique sur ces marchés, pourrait fixer les tarifs de ces prestations indépendamment de toute pression concurrentielle au désavantage de ses concurrents sur les marchés aval et, in fine, des consommateurs.
L'Autorité note que l'absence d'obligation de reflet des coûts permettrait à France Télécom de bénéficier d'une rente liée à son monopole ou à son contrôle quasi exclusif d'infrastructures sous-marines. Une telle rente fausserait les conditions de développement d'une concurrence équitable sur les marchés.
L'Autorité estime donc que les tarifs de ces prestations doivent refléter les coûts. En l'absence de mesure moins contraignante qui permettrait de prévenir toute distorsion de concurrence, cette obligation est proportionnée aux objectifs de l'article L. 32-1 II du code et en particulier à l'exercice « d'une concurrence effective et loyale », au développement de la compétitivité ou encore à « l'égalité des conditions de concurrence ». Cette obligation concerne donc notamment tous les éléments de l'offre technique et tarifaire « Interconnexion et sélection du transporteur » relatifs à ces prestations de départ d'appel, transit inter territoires et terminaison d'appel.
Concernant plus particulièrement le marché de la terminaison d'appel, l'Autorité précise qu'elle n'a pas imposé la même obligation aux opérateurs de boucle locale alternatifs proposant des prestations similaires, bien que ces derniers soient également puissants sur leur marché de la terminaison d'appel.
En effet, au vu de la part de marché de France Télécom sur le marché de détail de l'accès (supérieure à 95 %), le tarif de sa terminaison d'appel a un impact important sur l'ensemble des charges supportées par les opérateurs tiers, l'analyse desquelles leur permet de formuler une stratégie tarifaire sur les marchés de détail. Dès lors, si France Télécom pouvait fixer ce tarif indépendamment des coûts qu'elle supporte pour produire la prestation, elle pourrait créer une distorsion concurrentielle majeure, en empêchant les opérateurs alternatifs de proposer des tarifs aussi compétitifs qu'elle sur le marché de détail. C'est pourquoi l'Autorité a estimé justifié de soumettre France Télécom à l'obligation de fixer des tarifs reflétant les coûts correspondants.
A l'inverse, seule une faible proportion des appels au départ du réseau d'un opérateur se termine sur le réseau d'un opérateur de boucle locale alternatif fixe. Ainsi, le poids de la terminaison d'appel d'un tel opérateur sur le modèle économique des opérateurs tiers, France Télécom notamment, reste limité.
Ainsi l'Autorité a-t-elle estimé que, concernant la terminaison d'appel d'un opérateur alternatif, un tarif ne reflétant pas les coûts, mais soumis à une obligation de non-excessivité, ne pourrait contraindre la capacité des opérateurs tiers à proposer des offres globales compétitives. La notion d'excessivité d'un tarif doit notamment s'apprécier au regard de son impact concurrentiel sur l'ensemble des opérateurs, y compris France Télécom. A ce titre, le tarif de terminaison d'appel de France Télécom, reflétant les coûts, constituera un élément parmi d'autres dans l'analyse du caractère excessif ou non du tarif de terminaison d'appel d'un opérateur alternatif.
L'Autorité estime donc proportionné aux objectifs de concurrence loyale et effective recherchés de différencier les obligations tarifaires imposées à France Télécom de celles imposées aux opérateurs alternatifs, en imposant à France Télécom de fixer des tarifs reflétant les coûts, tout en limitant la contrainte tarifaire des opérateurs alternatifs à une interdiction de fixer des tarifs excessifs.


IV-8.2. Contrôle des tarifs des prestations
de transit intra territorial
IV-8.2.1. Interdiction des tarifs excessifs et d'éviction


L'analyse de la puissance a montré l'influence significative qu'exerce France Télécom sur le marché du transit intra territorial. En particulier, France Télécom sera encore en mesure durant les prochaines années de se comporter, sur ce marché, indépendamment de ses clients et de ses concurrents, grâce notamment à sa puissance sur les divers marchés situés en amont (détail et gros) et aux avantages structurels dont il bénéficie.
L'analyse a néanmoins permis de constater l'existence d'une certaine concurrence via l'accès à des offres de transit alternatives. Les opérateurs proposant de telles alternatives ont dû consentir de lourds investissements pour déployer les infrastructures capillaires nécessaires, et notamment pour raccorder tout ou partie des commutateurs d'abonnés de France Télécom.
Conformément à l'objectif de développement efficace dans les infrastructures, mentionné au 3° du II de l'article L. 32-1, l'Autorité estime qu'il est nécessaire et proportionné, afin, d'une part, de ne pas nuire aux investissements déjà consentis et, d'autre part, de maintenir une incitation suffisante pour les opérateurs à se déployer plus bas dans le réseau, d'interdire à France Télécom de fixer une tarification d'éviction de ses prestations de transit intra territorial.
Par ailleurs, l'analyse a montré qu'en tout état de cause le début de concurrence constaté reste limité à certaines zones, pour certains acheteurs et pour certaines prestations précises, générant des volumes de trafic importants. En particulier, les prestations de France Télécom restent notamment indispensables à certains opérateurs de boucle locale très localisés ou spécialisés dans des services à forte valeur ajoutée, qui ont fait le choix de ne pas déployer d'infrastructures à l'échelle nationale.
Par conséquent, afin de garantir l'égalité des conditions de concurrence et de veiller à l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale, conformément aux objectifs cités au 2° et 4° de l'article L. 32-1-II précité, l'Autorité estime également nécessaire et proportionné d'imposer à France Télécom l'obligation de ne pas pratiquer de tarifs excessifs sur ce marché.


IV-8.2.2. Contrôle tarifaire spécifique à certaines prestations
de transit intra territorial


L'Autorité a précédemment motivé l'interdiction des tarifs excessifs et d'éviction qu'elle impose à France Télécom sur le marché du transit intra territorial.
Elle souligne que cette obligation représente un allègement du contrôle tarifaire imposé jusqu'à présent à France Télécom, sur laquelle pesait une obligation de fixer des tarifs reflétant les coûts correspondants pour l'ensemble de ses tarifs d'interconnexion en vertu de l'ancien cadre réglementaire. Cet allègement se justifie par la prise en compte d'un début réel, bien que limité, de concurrence sur le marché.

Pour autant, l'Autorité estime que, concernant certaines prestations du marché, il n'est pas possible de lever immédiatement l'obligation de reflet des coûts, au regard du positionnement de ces prestations sur le marché ou de leurs spécificités.
Elle explicite ci-dessous son analyse.
a) Prestations de transit intra territorial sous-jacentes aux prestations actuellement fournies, dites de « simple transit », de France Télécom
L'Autorité a déjà évoqué les prestations actuelles de simple transit offertes par France Télécom. Celles-ci correspondent à des prestations consistant à acheminer du trafic entre le point de terminaison de réseau d'un abonné raccordé au réseau de France Télécom et le commutateur de transit situé directement en amont du commutateur de raccordement de cet abonné. Fonctionnellement, elle peut ainsi être considérée, en collecte (respectivement en terminaison) comme une prestation de départ d'appel (respectivement de terminaison d'appel) couplée à une prestation d'acheminement entre un commutateur d'abonné et le commutateur de transit de son réseau le raccordant directement, laquelle est incluse dans le marché du transit.
Cette offre est disponible en collecte et en terminaison, et l'Autorité a justifié, dans le cadre de cette analyse, la nécessité et la proportionnalité d'imposer à France Télécom de continuer à l'offrir.
Bien que l'analyse ait mis en exergue l'existence d'offres de transit alternatives, concurrençant notamment France Télécom sur ses prestations de simple transit, celles-ci restent très largement utilisées par une partie substantielle du secteur, comme en témoignent entre autres les réponses des opérateurs aux consultations publiques menées par l'Autorité dans le cadre de cette analyse de marchés.
Compte tenu de l'importance de ces prestations d'acheminement de trafic, dont l'utilisation est le préalable indispensable à la commercialisation de service téléphonique au détail, l'Autorité estime qu'il serait préjudiciable pour le secteur de supprimer, sans préavis, l'obligation de reflet des coûts qui pèse aujourd'hui sur France Télécom. En effet, un acteur qui souhaiterait, suite à la levée de cette obligation et à l'augmentation possible des tarifs qui s'ensuivrait, développer son taux d'interconnexion aux CA de France Télécom ou construire une interconnexion physique avec un opérateur proposant une offre concurrente équivalente pour s'affranchir de plus en plus de sa prestation de simple transit ne pourrait le faire que progressivement, dans un délai de plusieurs mois, compte tenu de l'inertie liée à une modification d'architecture. L'Autorité évalue le temps moyen nécessaire aux opérateurs alternatifs pour se déployer, le cas échéant, aux CA de France Télécom à au plus un an.
Eu égard aux éléments précités, il apparaît nécessaire et proportionné de maintenir à titre transitoire, jusqu'au 31 décembre 2006, l'obligation pour France Télécom de fixer des tarifs reflétant les coûts pour ses prestations d'acheminement entre ses commutateurs d'abonnés et les commutateurs de hiérarchie supérieure les raccordant directement, sous réserve du respect par France Télécom de son obligation de ne pas pratiquer des tarifs d'éviction.
Cette obligation est conforme à l'objectif de développement efficace dans les infrastructures, mentionné au 3° du II de l'article L. 32-1, ainsi qu'à ceux de garantir l'égalité des conditions de concurrence et de veiller à l'exercice, au bénéfice des utilisateurs, d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques, mentionnés aux 2° et 4° du II du même article.
Cette phase transitoire permettra en effet de ne pas nuire aux investissements déjà consentis, notamment pour déployer les infrastructures capillaires nécessaires et pour raccorder tout ou partie des commutateurs d'abonnés de France Télécom, tout en maintenant une incitation suffisante pour les opérateurs à se déployer plus bas dans le réseau, en leur garantissant la possibilité de continuer à offrir leurs offres actuelles de détail dans de bonnes conditions.


b) Prestations de transit intra territorial au départ
et à destination des réseaux alternatifs


L'Autorité a déjà évoqué, dans son analyse, le fait que France Télécom reste en position de quasi-monopole sur l'offre de prestations de transit à destination des réseaux alternatifs. En effet, elle a souligné le fait que, pour rentabiliser les importants investissements que représenterait une interconnexion directe entre leurs réseaux, les opérateurs alternatifs doivent miser sur l'existence de volumes de trafic très importants. Les volumes critiques ne sont aujourd'hui atteints que dans des cas qui restent marginaux et il n'existe ainsi que très peu d'interconnexions directes entre les opérateurs alternatifs.
Or l'importance de disposer, dans de bonnes conditions, d'une connectivité généralisée avec l'ensemble des réseaux n'est plus à démontrer, dès lors qu'elle se traduit par la possibilité de proposer au détail des offres de communications à destination de l'ensemble des réseaux.
En l'absence d'une obligation de fixer des tarifs reflétant les coûts, France Télécom pourrait profiter de sa situation d'opérateur interconnecté, pour des raisons historiques, avec l'ensemble des réseaux, pour fixer des tarifs à un niveau largement supérieur au tarif qu'elle fixerait en présence de concurrents compétitifs. Par ailleurs, des tarifs élevés ne reflétant pas les coûts pourraient nuire à la capacité des opérateurs alternatifs à faire des offres de détail compétitives pour les communications à destination des réseaux alternatifs tiers. Outre le problème concurrentiel que cela ne manquerait pas de créer sur les marchés de détail, cela pourrait de surcroît avoir pour effet, en freinant le développement des volumes de communications échangées entre réseaux alternatifs, de retarder l'apparition généralisée d'interconnexions directes entre tous les réseaux.
L'Autorité estime donc nécessaire et proportionné, notamment eu égard aux objectifs de l'article L. 32-1-II du code et en particulier à l'exercice « d'une concurrence effective et loyale », au développement de la compétitivité ou encore à « l'égalité des conditions de concurrence », d'imposer à France Télécom de fixer des tarifs de transit intra territorial à destination des réseaux alternatifs reflétant les coûts correspondants, sous réserve du respect par France Télécom de son obligation de ne pas pratiquer des tarifs d'éviction.
L'Autorité souligne que cette obligation inclut les tarifs d'acheminement à destination des numéros portés pour lesquels France Télécom assure une prestation de transit.
France Télécom, dans sa réponse à la consultation de l'Autorité lancée le 29 juillet 2005, estime que les prestations de transit à destination des réseaux alternatifs n'ont jamais fait l'objet d'une régulation.
L'Autorité rappelle que lesdites prestations offertes par France Télécom, bien que ne figurant pas à l'offre technique et tarifaire d'interconnexion approuvée chaque année par l'Autorité, étaient cependant soumises aux obligations notamment prévues à l'article L. 34-8-III et IV de l'ancien code des postes et des télécommunications en tant que prestations d'interconnexion (59).