II-A-2-h-(ii). Précision de l'obligation
Une offre de raccordement de site distant peut, en théorie, être active ou passive. Une offre active, telle que celle actuellement décrite dans l'offre de référence dégroupage, consiste en une offre de bande passante livrée sous une certaine interface technique dont les plus courantes sont : liaisons louées, SDH, ATM et Ethernet. Une offre de raccordement passive serait constituée d'une offre de location de fourreau ou de fibre.
Les offres de raccordement actives répondent mal aux besoins des opérateurs dégroupeurs, contrairement aux offres passives :
- les tarifs des offres passives sont indépendants du débit ; l'opérateur les utilisant est donc incité à proposer à ses clients des offres innovantes et utilisant beaucoup de bande passante, satisfaisant ainsi la demande en n'augmentant que marginalement ses coûts de collecte ;
- les offres passives sont classiquement proposées sous forme d'IRU (6) de longue durée. Ils permettent une bonne visibilité des coûts à long terme. L'opérateur dégroupeur utilisant une telle offre est moins dépendant des stratégies tarifaires de court terme de ses concurrents, et notamment de l'opérateur exerçant une influence significative sur les marchés du haut débit, en ayant moins de coûts récurrents et plus de coûts fixes. Ainsi, les offres sous forme d'IRU permettent de fonder une concurrence pérenne ;
- finalement, les offres passives sont très neutres d'un point de vue technologique ; l'opérateur louant un fourreau ou une fibre reste complètement maître de son architecture technique sur les équipements actifs et de transmission, et peut donc choisir les technologies les mieux adaptées à ses besoins et à ses projets.
Les offres actives présentent en général des caractéristiques inverses : une sensibilité du tarif au débit qui tend à décourager l'innovation, des coûts récurrents élevés permettant à l'opérateur historique de pratiquer une grille tarifaire induisant un espace économique faible sur le segment de la collecte et sur les seuls coûts variables, une dépendance de l'opérateur client aux choix technologiques de l'opérateur historique. A titre d'exemple, l'offre active de raccordement prévue par l'offre de référence dégroupage est incompatible avec la fourniture d'un service de diffusion audiovisuelle dans des conditions économiques viables et les opérateurs alternatifs estiment que son coût au mégabit par seconde est trop élevé pour laisser un espace économique permettant l'extension géographique du dégroupage.
L'ensemble de ces éléments conduit l'Autorité à estimer que l'offre de raccordement la mieux adaptée aux besoins des opérateurs dégroupeurs, au développement du marché du haut débit et à l'aménagement du territoire serait une offre de raccordement passif, constituée d'une offre de location de longue durée de fourreau ou de fibre. L'article D. 310 (6°) du code des postes et des communications électroniques prévoit ainsi que l'Autorité peut imposer à France Télécom de fournir la possibilité de « partage des gaines ». France Télécom ne saurait cependant être tenue de fournir une telle offre sur les segments où elle ne disposerait ni de fourreau ni de fibre en nombre suffisant.
L'Autorité invite France Télécom et les opérateurs alternatifs à engager des négociations de bonne foi en ce sens, portant à la fois sur la fourniture d'informations préalables - la disponibilité et la localisation des ressources -, les modalités techniques de commande et de livraison et finalement le tarif d'une offre de raccordement des sites distants.
Compte tenu des objectifs poursuivis précités, de la marge laissée à France Télécom pour élaborer la solution qu'elle proposera et de l'absence de risque du point de vue de l'investissement pris par France Télécom, cette obligation est proportionnée. Dans l'éventualité où les négociations échoueraient ou n'auraient pas avancé dans un délai raisonnable, typiquement à l'automne 2005, l'Autorité pourrait être amenée à faire évoluer l'offre de référence sur ce point.