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Article (Saisine du Conseil constitutionnel en date du 20 décembre 1995 présentée par plus de soixante députés, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, et visée dans la décision no 95-369 DC)

Article (Saisine du Conseil constitutionnel en date du 20 décembre 1995 présentée par plus de soixante députés, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, et visée dans la décision no 95-369 DC)

V. - Sur l'article 19 de la loi déférée


Cet article vise, aux termes de l'exposé des motifs du projet de loi, à supprimer la première part de la dotation globale d'équipement des communes. Devant les critiques quasi unanimes de parlementaires des deux assemblées,
appartenant tant à la majorité qu'à l'opposition, il a subi bien des avatars au cours de la procédure budgétaire, la commission des finances de l'Assemblée nationale ayant même voté un amendement de suppression.
Dans sa rédaction définitivement adoptée par le Parlement, il réserve le bénéfice de la dotation globale d'équipement (D.G.E.) des communes à celles dont la population n'excède pas 20 000 habitants en métropole (ou 35 000 habitants dans les départements d'outre-mer) et dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur à 1,3 fois la moyenne par habitant des communes métropolitaines correspondantes, ainsi qu'aux groupements de communes dont la population n'excède pas 20 000 habitants en métropole (et 35 000 habitants dans les départements d'outre-mer).
Ce faisant, il viole à trois égards le principe constitutionnel d'égalité devant la loi :
- en ce qu'il dote identiquement les groupements de communes de faible population, quel que soit leur potentiel fiscal par habitant ;
- en ce qu'il traite différemment communes et groupements de communes, les premières bénéficiant ou non de la D.G.E. selon le niveau de leur potentiel fiscal par habitant alors qu'en ce qui concerne les seconds ce critère est indifférent ;
- en ce qu'il exclut du bénéfice de la D.G.E. les communes et groupements de communes dont la population dépasse 20 000 habitants en métropole (et 35 000 habitants dans les départements d'outre-mer) quel que soit leur potentiel fiscal par habitant.
En effet, sur ces trois points qui relèvent d'une même logique, la loi déférée ne fait dépendre l'octroi de la dotation que de critères purement démographiques en méconnaissant la distribution très inégale du potentiel fiscal entre collectivités à population équivalente, ce qui revient à traiter identiquement des communes et groupements placés dans des situations fort différentes au regard de l'objet de la dotation.
Au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel (voir a contrario la décision no 91-291-DC du 6 mai 1991), la violation du principe d'égalité est manifeste.
En outre, les dispositions du II de l'article 19 concernent non le montant de la dotation globale d'équipement qui grève le budget de l'Etat, mais sa répartition entre collectivités et groupements, ce qui n'affecte pas l'ampleur des charges financières de l'Etat.
Il s'agit donc d'une disposition étrangère au contenu des lois de finances qui ne pourra qu'être censurée qu'en tant que cavalier budgétaire.