Articles

Article (CONSEIL CONSTITUTIONNEL Décision no 96-387 DC du 21 janvier 1997)

Article (CONSEIL CONSTITUTIONNEL Décision no 96-387 DC du 21 janvier 1997)

Sur les griefs tirés de l'incompétence négative du législateur :


Considérant que les auteurs de la saisine soutiennent que le législateur aurait méconnu à divers titres sa compétence en consentant des délégations au pouvoir réglementaire sans suffisamment les limiter ou les assortir de conditions, alors que la garantie du respect d'exigences de valeur constitutionnelle, telle que la sécurité matérielle des vieux travailleurs proclamée par le onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, ne saurait être abandonnée à la compétence de ce pouvoir ; qu'ils ajoutent, dans leur mémoire en réplique, que l'objet de la loi relève directement de l'article 34 de la Constitution dans la mesure où ce dernier vise les principes fondamentaux de la sécurité sociale ;
Considérant qu'ils critiquent en premier lieu le premier alinéa de l'article 2 qui renvoie au règlement la détermination des conditions d'âge, de degré de dépendance et de ressources ouvrant droit à la prestation spécifique dépendance ; qu'ils mettent en cause en deuxième lieu le premier alinéa de l'article 6 en ce qu'il donne compétence au pouvoir réglementaire pour fixer les plafonds dans la limite desquels la prestation spécifique dépendance pourra se cumuler avec les ressources des intéressés, de leur conjoint ou de leur concubin ; qu'en troisième lieu ils articulent ce grief à l'encontre de l'article 23-III dans la mesure où celui-ci prévoit que les montants des prestations pris en compte pour la tarification des établissements sociaux,
médico-sociaux ou de santé accueillant des personnes âgées dépendantes « sont modulés selon l'état de la personne accueillie et déterminés dans des conditions fixées par voie réglementaire » ; qu'ils contestent enfin les dispositions du deuxième alinéa de l'article 27, modifiant le I de l'article 39 de la loi d'orientation susvisée du 30 juin 1975, qui instituent le principe d'une limite d'âge pour bénéficier de l'allocation compensatrice pour tierce personne en renvoyant à un décret la fixation de cette limite ;
Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant : ... les successions et les libéralités... La loi détermine les principes fondamentaux : ... de la libre administration des collectivités locales, de leurs compétences et de leurs ressources ;... du régime des obligations civiles... », notamment ; qu'il incombe, tant au législateur qu'au Gouvernement, conformément à leurs compétences respectives, de déterminer, dans le respect des principes proclamés par le onzième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, les modalités de leur mise en oeuvre ;
Considérant que le législateur a donné compétence au département pour l'attribution et la gestion de la prestation spécifique dépendance, laquelle relève de l'aide sociale ; que cette collectivité territoriale exerce une compétence de même nature s'agissant de l'allocation compensatrice pour tierce personne créée en faveur des personnes handicapées par la loi précitée du 30 juin 1975 ; que dès lors, en application des dispositions susmentionnées de l'article 34 de la Constitution, relèvent du domaine de la loi, outre l'institution de ces formes d'aide sociale, des règles essentielles relatives à leur régime juridique dont notamment la nature des conditions exigées pour leur attribution et la détermination des catégories de prestations ; qu'il revient au Gouvernement de mettre en oeuvre les règles ainsi posées par le législateur, en particulier par la fixation des éléments qui concernent les conditions d'attribution notamment ceux relatifs à l'âge du bénéficiaire, par la définition précise de la nature des prestations dont il s'agit et la détermination des modes de fixation de ces prestations en tenant compte, le cas échéant, conformément à la loi, d'autres ressources par l'application de règles de cumul ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en soumettant le bénéfice de la prestation spécifique dépendance à des conditions d'âge, de ressources, de degré de la dépendance subie, définie en fonction du besoin de surveillance régulière ou d'aide nécessaire à l'accomplissement des actes essentiels de la vie, et en renvoyant au pouvoir réglementaire pour la précision des éléments de ces conditions, le législateur n'est pas resté en deçà de la compétence qu'il tient de l'article 34 de la Constitution ; qu'il n'a pas davantage méconnu celle-ci en renvoyant au décret la fixation des plafonds de cumul de ressources des intéressés et, le cas échéant, de leur conjoint ou de leur concubin ; qu'il a pu également renvoyer au pouvoir réglementaire la modulation, selon l'état des personnes, des montants de prestation de dépendance pris en compte pour la tarification d'établissements qui accueillent ces personnes ; qu'il a pu enfin sans méconnaître non plus sa compétence poser le principe d'une limite d'âge pour que les personnes handicapées bénéficient de l'allocation compensatrice pour tierce personne en prévoyant que la fixation de cet âge serait effectuée par décret ; qu'ainsi les griefs articulés par les auteurs de la saisine doivent être écartés ;