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Article (Décision n° 2007-0128 du 5 avril 2007 portant sur la spécification des obligations de comptabilisation et de restitution des coûts, notamment de séparation comptable, imposées à la société Orange France, à la Société française du radiotéléphone et à la société Bouygues Telecom en raison de leur influence significative sur les marchés de gros des terminaisons d'appels mobiles (voix et SMS) sur leur réseau respectif)

Article (Décision n° 2007-0128 du 5 avril 2007 portant sur la spécification des obligations de comptabilisation et de restitution des coûts, notamment de séparation comptable, imposées à la société Orange France, à la Société française du radiotéléphone et à la société Bouygues Telecom en raison de leur influence significative sur les marchés de gros des terminaisons d'appels mobiles (voix et SMS) sur leur réseau respectif)


A-5.3. Revenus d'un opérateur mobile


Les recettes d'un opérateur mobile relèvent principalement de deux activités complémentaires (activités de gros et de détail) qui permettent de recouvrer les coûts liés à ces activités :
Les revenus tirés de la vente de prestations de gros énumérées au A-2.2.2, parmi lesquelles figurent les prestations d'accès et de départ d'appel (achetées par les MVNO), d'itinérance nationale (en zones blanches), d'itinérance internationale (roaming in), les prestations autres que celles liées à la fourniture de communications interpersonnelles (essentiellement dans le cadre de la fourniture au détail de services à valeur ajoutée, de type SMS Push ou SMS+), et les prestations d'interconnexion et d'accès, notamment celles relatives à l'écoulement du trafic (voix, SMS, MMS, etc.) entrant sur le réseau de l'opérateur mobile et issu d'opérateurs tiers. Ces dernières prestations rémunèrent l'opérateur mobile pour les terminaisons d'appels et sont facturées aux opérateurs interconnectés. Ces revenus comprennent aussi les revenus des prestations physiques d'interconnexion (colocalisation, liaison de raccordement, etc.). Parmi les revenus tirés de la vente de prestations de gros figurent également les loyers perçus par l'opérateur lorsqu'il est propriétaire d'un site occupé conjointement avec d'autres opérateurs.
Les revenus de détail correspondent aux revenus perçus auprès des clients finals : correspondant, entre autres, aux frais de mise en service, abonnements, revenus correspondant au prépayé, revenus des forfaits et du trafic hors forfait, revenus de roaming out, revenus tirés de la vente de terminaux (le plus souvent dans le cadre de la souscription par le client à une offre de communication auprès de l'opérateur). Ces revenus peuvent être partagés en revenus récurrents (entendu, non pas au sens comptable, mais plutôt comme des revenus réguliers) et revenus non récurrents. Ils sont facturés au client final ayant (dans la très grande majorité des cas) souscrit à une offre prépayée ou postpayée utilisant le réseau de l'opérateur mobile métropolitain concerné, directement via un distributeur ou une SCS.


A-6. ALLOCATION AUX PRESTATIONS


L'Autorité considère que l'opérateur doit respecter différents principes généraux, qui sont décrits de manière non exhaustive ci-dessous.
Le premier principe est l'allocation de coûts et de revenus à l'ensemble des prestations techniques fournies par l'opérateur mobile. Ainsi, l'ensemble des coûts de production (coûts de réseau, d'interconnexion, etc.), commerciaux et communs sont portés par l'ensemble des activités de l'opérateur - notamment par son activité d'opérateur de communications électroniques -, les coûts de production étant notamment portés par l'ensemble des prestations techniques fournies par l'opérateur, et ce indépendamment des prestations soumises à une régulation ex ante et du périmètre de restitution réglementaire.
Un exemple concerne les prestations data. Elles sont hors du périmètre de restitution détaillée, mais, comme toute prestation fournie par l'opérateur, portent une partie des coûts commerciaux et des coûts communs.
Le deuxième principe est la causalité. Il s'agit d'affecter les coûts d'un élément ou d'une activité en fonction de ce qui en est la « cause », c'est-à-dire, dans la pratique, en fonction de l'usage de cet élément ou de cette activité. Le respect de ce principe permet de concourir à l'objectif d'auditabilité à travers la traçabilité des coûts ainsi assurée.
Si une seule prestation est à l'origine d'un coût donné, l'application du principe de causalité conduit à allouer de manière directe l'intégralité du coût à la prestation qui l'a induit.
Si plusieurs prestations sont à l'origine d'un coût d'un élément donné, l'application du principe de causalité se traduit par l'allocation du coût de cet élément aux différentes prestations au prorata de la consommation de cet élément, par exemple via l'élaboration d'une matrice de facteurs de routage (ou d'usage des éléments de réseau par les différentes prestations). L'unité d'oeuvre mesurant la consommation de l'élément par les prestations doit être la plus pertinente possible au regard de l'usage de l'élément.
Le troisième principe est la non-discrimination. Cette obligation réglementaire se traduit par le fait que deux usages équivalents d'une même activité ou d'un même élément de réseau doivent se voir affecter des coûts équivalents. Par ailleurs, le coût d'utilisation d'un élément de réseau rapporté à l'unité d'oeuvre adéquate (minute, appel, volume, etc.) est le même, qu'il s'agisse de l'usage interne de l'opérateur (communications de détail) ou de l'usage par des opérateurs tiers (prestations d'interconnexion).
Le quatrième principe est l'auditabilité. L'audit périodique du système fait partie des obligations prévues par les textes tant européens que français (art. L. 38-I [5°] du CPCE). Le système de comptabilisation des coûts est donc construit pour être auditable. Il conserve la trace de tous les calculs et de toutes les données. A cet égard, le CPCE prévoit des audits du système de comptabilisation des coûts, à l'occasion desquels « le respect [des spécifications de comptabilisation des coûts établies par l'Autorité] est vérifié, aux frais de l'opérateur, par un organisme indépendant désigné par l'autorité. Les organismes désignés publient annuellement une attestation de conformité des comptes. »
Au-delà des principes généraux exposés ci-dessus, l'Autorité souhaite prescrire certaines orientations communes de façon à assurer l'homogénéité des données de coûts et de revenus restituées par les opérateurs mobiles. Ainsi, l'Autorité définit dans la suite du document certains traitements et certaines clés d'allocation relatifs à différents postes de coûts que les opérateurs mobiles appliqueront, toujours dans le respect des principes présentés ci-dessus.
Au delà du respect des règles précisées dans cette annexe par l'Autorité, les opérateurs sont amenés en l'absence de spécifications à arrêter des choix, notamment de comptabilisation et d'allocation de coûts. Ces choix peuvent avoir une influence significative sur la restitution réglementaire faite à l'Autorité. Ainsi, les opérateurs transmettent à l'Autorité, ainsi qu'aux organismes de certification désignés par cette dernière, l'ensemble de leurs choix, notamment de comptabilisation et d'allocation des coûts et des revenus, en les expliquant et en les motivant.


A-6.1. Choix réglementaires


La présente partie explicite certains choix réglementaires faits par l'Autorité, qui sont pour certains complétés en section A-6.4.3.3.


Préambule : distinction des coûts 2G et 3G


L'opérateur n'applique pas de méthode d'allocation reposant sur la neutralité technologique pour opérer la distinction 2G-3G exigée par l'Autorité dans la restitution réglementaire. La définition de l'ensemble des facteurs de routage doit donc reposer sur des critères d'utilisation effective de chaque macro-élément de réseau. Dans ce cadre, il est important que l'opérateur prenne distinctement en compte dans son modèle des éléments, notamment de volumétrie, relatifs respectivement à l'utilisation du réseau 2G (et à la BLR 2G) et à celle du réseau 3G (et à la BLR 3G), au moins pour les principaux cas d'appels.


Coût du service universel


Pour rappel, le coût du service universel est établi sur la seule quote-part des revenus relative au chiffre d'affaires de détail : ainsi, l'assiette de déclaration du chiffre d'affaires servant au calcul de la contribution de chaque opérateur au coût net du service universel exclut les revenus de gros.
L'opérateur retient une valeur pertinente pour le coût du service universel. Ainsi, il pourra retenir comme valeur l'ensemble des dépenses réalisées au cours de l'année constatée, éventuellement diminuées des recettes rectificatives perçues l'année constatée, qu'il s'agisse d'opérations relatives au SU prévisionnel, provisionnel ou constaté d'années antérieures, courantes ou futures.


Traitement de l'autorisation UMTS


L'autorisation UMTS de l'opérateur est considérée comme une immobilisation de réseau : elle sera amortie à compter de l'année d'acquisition, sur une durée correspondant à la période de vingt ans, correspondant à la durée de validité de l'autorisation individuelle d'utilisation des fréquences UMTS délivrée à l'opérateur.


Remises et promotions


A l'inverse de ce qui a pu être fait dans le cadre antérieur, les remises et les promotions (par exemple des bonus en SMS ou en minutes gratuites, des réductions initiales sur forfait) ne doivent plus être considérées comme des charges d'exploitation venant en augmentation des coûts : elles seront traitées en déduction du chiffre d'affaires, conformément aux normes françaises, et ce indépendamment des normes comptables adoptées par l'opérateur. Ce traitement est également valable pour les remises consenties aux SCS (sociétés de commercialisations de services).
En tout état de cause, la volumétrie correspondant aux minutes et SMS gratuits doit être prise en compte dans le modèle.


Offres d'abondance


Les minutes ou SMS gratuits visés ci-avant ne sont pas à confondre avec les minutes ou SMS dits « de générosité » ou « d'abondance », c'est-à-dire faisant l'objet d'un forfait, même si ce forfait est « illimité ». Dans ce cas, les minutes et les SMS font effectivement l'objet d'une rémunération, certes forfaitisée, mais bien réelle. Dans ce cadre, les minutes et les SMS de générosité doivent être inclus dans le périmètre du modèle de restitution et ne doivent pas faire l'objet d'un traitement spécifique par l'opérateur.
Toutefois, afin de prendre la mesure du phénomène, l'Autorité invite les opérateurs à indiquer dans le document annexe accompagnant les fiches de restitution les volumes concernés par ces appels dits de générosité pour chaque prestation technique identifiée. Des éléments d'ordre méthodologique sur la manière dont ces appels de générosité sont mesurés peuvent par ailleurs être fournis.


Impayés


Les impayés sont traités en charges commerciales et non en déduction du chiffre d'affaires.


Revenus tirés de la fourniture de services spéciaux


Ainsi que cela a été indiqué au A-5.2.1, soit l'opérateur a choisi un schéma d'achat (de contenu) pour revente : l'ensemble des revenus sera alors considéré comme un produit, et le coût d'achat du contenu sera considéré comme une charge. Dans les autres cas, en cas de reversement à un fournisseur de services, le revenu est pris en compte, d'une part, au niveau des revenus de détail pour ce qui relève des communications vers le fournisseur de service (i.e. « airtime » hors prix du service proprement dit), et, d'autre part, au niveau des revenus de gros pour ce qui relève de la prestation offerte par l'opérateur mobile aux fournisseurs de services ou à des intermédiaires, qui est souvent valorisée sous la forme d'un pourcentage du prix du service.


Appréciation des niveaux de charges relatives aux prestations fournies à l'opérateur
par des sociétés tierces liées à l'opérateur


La présente décision indique (section II-2) qu'« au-delà des données comptables de la société concernée, il convient en particulier d'apprécier la pertinence des niveaux de charges relatives aux prestations (biens ou services) fournies à cet opérateur, notamment pour tout ce qui concerne les prestations qui lui seraient fournies par la ou les sociétés tierces répondant à l'un des deux critères suivants :
- société exerçant un contrôle direct ou indirect sur l'opérateur, ou
- société contrôlée directement ou indirectement par l'opérateur ou par une société exerçant un contrôle sur l'opérateur ;
- la notion de contrôle étant entendu au sens de l'article L. 233-16-II du code du commerce.
Le besoin d'apprécier la pertinence des charges se limite aux prestations intervenant dans la fourniture des prestations d'accès et d'interconnexion relatives aux terminaisons d'appels mobiles (voix et SMS) et dont les charges correspondantes sont déversées dans la rubrique "activités de production. »
L'Autorité précise à ce titre que l'appréciation de la pertinence des niveaux de charges n'incombe pas à l'opérateur. Toutefois, ce dernier doit fournir à l'auditeur et à l'Autorité des éléments, notamment chiffrés, suffisamment documentés pour que la pertinence des niveaux de charges relatives aux prestations ainsi fournies puisse être appréciée.
En conséquence, l'opérateur communique à l'auditeur et à l'Autorité, les éléments suivants pour chacun des contrats ou contrats cadres :
- l'identité du cocontractant ;
- un bref descriptif de la nature des prestations fournies ;
- le montant facturé au titre de l'exercice.
Ces éléments sont renseignés par la société concernée dans le document annexe accompagnant les fiches de restitution.
Sur demande de l'auditeur ou de l'Autorité, l'opérateur fournit une information détaillée permettant d'apprécier la pertinence des niveaux des charges, notamment le contrat, les éléments de tarification complémentaires (unités d'oeuvre, prix unitaire, mode de calcul des remises).


Niveaux de charges d'interconnexion à prendre en compte dans la formation des comptes prévisionnels


Dans le cadre de l'élaboration des comptes prévisionnels, l'opérateur intègre dans son modèle réglementaire les niveaux des charges moyennes des prestations d'accès et d'interconnexion relatives à la terminaison d'appel vocal de chacun des opérateurs mobiles pour l'année considérée quand ces niveaux sont connus. A défaut, l'opérateur prend en compte dans son modèle les niveaux des charges moyennes des prestations d'accès et d'interconnexion relatives à la terminaison d'appel vocal de chacun des opérateurs mobiles qui sont en vigueur à la date de restitution à l'Autorité des comptes prévisionnels.


A-6.2. Allocation des coûts communs


L'opérateur veille à ce que le périmètre des éléments comptabilisés dans la rubrique « coûts communs » soit cohérent avec la définition posée dans la présente décision. Pour rappel, les coûts communs à toute l'entreprise (encore appelés indivis) sont « des coûts des activités non spécifiquement attribuables aux activités de production, de détail ou de gros » (20).
Ainsi, l'opérateur identifie, autant que possible, parmi les coûts comptabilisés dans la rubrique « coûts communs », ceux qui correspondent à des coûts « indirects » devant être imputés en totalité aux coûts de production ou devant être imputés en totalité aux coûts commerciaux. L'opérateur déverse alors, en respectant le principe de causalité, ces coûts indirects dans les rubriques respectivement d'« activités de production », d'« activités commerciales et d'après-vente ».
L'allocation des coûts communs à chaque service se fait au prorata des autres coûts, c'est-à-dire sous la forme d'une majoration proportionnelle aux coûts de réseau (21) et aux coûts commerciaux du service considéré : le principe d'allocation est appelé clé EPMU (Equi-Proportionate Mark-Up).
La définition de la clé permet de procéder de manière équivalente :
- d'abord à l'allocation de tous les autres coûts (de réseau, d'achat d'interconnexion, de prestations de services et commerciaux) à l'ensemble des prestations, puis à l'allocation des coûts communs au prorata des coûts de réseau et des coûts commerciaux à chaque prestation ;
- d'abord à l'allocation des coûts communs sous forme d'une majoration aux coûts de réseau et aux coûts commerciaux, puis à l'allocation des coûts de réseau et commerciaux (préalablement majorés par les coûts communs), ainsi que les coûts relatifs à l'achat d'interconnexion et de prestations de services à chaque prestation.


A-6.3. Allocation des coûts commerciaux


Ainsi que l'Autorité l'a indiqué dans ses décisions n° 2004-937, n° 2004-938 et n° 2004-939, aucun coût commercial n'est alloué à la prestation technique correspondant aux communications vocales entrantes, sauf les coûts commerciaux spécifiques, comme ceux correspondant à la vente, à l'administration des ventes des produits de gros de terminaison d'appel vocal sur le réseau de l'opérateur, ainsi que les coûts spécifiques de facturation et de recouvrement, sous réserve expresse que chacun de ces postes de coûts spécifiques ait été correctement identifié et relève effectivement de l'activité concernée. A défaut, si l'opérateur ne parvient pas à identifier de tels coûts spécifiques, aucun coût commercial n'est alloué à la prestation technique correspondant aux communications vocales entrantes. En particulier, l'Autorité précise que les coûts commerciaux associés aux appels vers les services clients (par exemple lorsque l'abonné rencontre des difficultés de réception) ne sont pas imputés à la prestation technique correspondant aux communications vocales entrantes, mais le sont à la catégorie « autres prestations ».
Le même traitement est attendu pour ce qui concerne les SMS entrants. Ainsi, les coûts commerciaux associés aux SMS servant de support à la relation client (par exemple lorsque l'abonné veut suivre ses consommations) ne sont pas imputés à la prestation technique correspondant aux SMS interpersonnels entrants, mais le sont à la catégorie « autres prestations de SMS entrantes (SMS de contenu, publicité, opt in, marketing direct, services d'alerte, information client, suivi conso, etc.) ». Les seuls coûts commerciaux alloués à la prestation relative aux « SMS interpersonnels entrants » correspondent donc à des seuls coûts spécifiques relatifs à la vente des produits de gros de terminaison d'appel SMS. A défaut, si l'opérateur ne parvient pas à identifier de tels coûts spécifiques, aucun coût commercial n'est alloué à la prestation technique correspondant aux SMS interpersonnels entrants.
S'agissant de l'allocation des coûts commerciaux aux autres prestations voix, aux autres prestations SMS et, de manière générale, aux autres prestations, l'Autorité ne souhaite pas à ce stade prescrire de clé spécifique. Le choix des clés est donc laissé à l'opérateur, dans le respect des grands principes détaillés précédemment, notamment en termes de pertinence de l'inducteur de coût identifié (par exemple le chiffre d'affaires de détail).