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Article (Décision n° 2005-0571 du 27 septembre 2005 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)

Article (Décision n° 2005-0571 du 27 septembre 2005 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)



b) Economies de gammes et d'échelle, intégration verticale


Par ailleurs, et tout comme sur les marchés de gros précédents, sur lesquels ces critères ont été développés, France Télécom profite également sur ces marchés de son intégration verticale, et notamment des économies d'échelle et de gamme substantielles qui en découlent.


c) Evolution prospective du marché


Sur un plan prospectif, cette situation est peu susceptible d'évoluer à l'horizon de la présente analyse. En Guyane et à la Réunion, aucune infrastructure nouvelle ne devrait être construite dans les années à venir. Un projet de câble reliant la Guadeloupe à Porto Rico, mené par le conseil régional de Guadeloupe, a toutefois récemment été concrétisé par la signature d'une délégation de service public avec un opérateur, pour une mise en service prévue à l'automne 2005. L'éventualité d'une extension de ce câble vers la Martinique a cependant été remise à l'étude.
La puissance actuelle de France Télécom n'est donc a priori pas amenée à disparaître à l'horizon de cette analyse (2005-2008).
L'Autorité se réserve toutefois la possibilité d'anticiper une nouvelle analyse de marché au regard de l'évolution de la situation sur ces marchés, et notamment de la mise en service effective de nouveaux câbles ou des modifications des conditions d'accès à l'ensemble des infrastructures en place.


II-3.3.3. Analyses des marchés du groupe 2


Rappel : ce groupe de marchés concerne les relations suivantes : métropole-Mayotte et métropole-Saint-Pierre-et-Miquelon.
L'Autorité estime que France Télécom est un opérateur puissant sur l'ensemble de ces marchés.


a) Détention par France Télécom d'infrastructures difficiles
à dupliquer et absence de contre-pouvoir d'acheteurs


Les seules infrastructures de sortie (et d'entrée) de trafic du territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon vers le reste du monde sont :
- un lien satellite de France Télécom d'une capacité de 60 canaux voix de 64 kbits/s (environ 3,8 Mbits/s) pour les liaisons vers l'ensemble des destinations mondiales excepté le Canada ;
- un lien FH analogique d'une capacité de 20 canaux voix (environ 1,3 Mbits/s), également propriété de France Télécom, pour les liaisons vers le Canada ;
- et un lien FH numérique d'une capacité de 8 x 1,6 Mbits/s, propriété de SPM Télécom, utilisé aujourd'hui pour l'accès au réseau internet uniquement.
Pour sortir du trafic de Mayotte (ou pour y entrer), les éléments recueillis par l'Autorité semblent indiquer qu'outre les infrastructures de France Télécom, une seule solution est disponible : le lien satellite d'une capacité de 2 x 2 Mb/s commercialisé par Gensat, et reliant Mayotte et la Réunion, utilisé par SRR, territoires sur lesquels cet opérateur dispose d'une autorisation de téléphonie mobile.
L'essentiel du trafic à destination de Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon se compose statistiquement de trafic au départ des abonnés de France Télécom en métropole, pour lequel France Télécom assure elle-même le transit vers ces deux territoires.
Concernant le trafic au départ de Saint-Pierre-et-Miquelon et à destination de la métropole, l'unique acteur local sur Saint-Pierre-et-Miquelon, SPM Télécom, étant une filiale de France Télécom, cette dernière achemine la quasi-totalité du trafic.
Sur Mayotte, outre France Télécom, il n'existe qu'un seul opérateur, l'opérateur mobile SRR (filiale de SFR), qui dispose de moins de 40 000 clients, et qui dispose de sa propre solution de sortie du territoire de Mayotte, comme déjà mentionné.

Au vu de la taille des marchés (6 000 habitants à Saint-Pierre-et-Miquelon, 150 000 à Mayotte), les acteurs qui achètent des prestations de transit entre Mayotte ou Saint-Pierre-et-Miquelon et la métropole ne génèrent donc pas de trafic suffisant pour exercer un réel contre-pouvoir d'acheteurs sur France Télécom, ni pour être en mesure de dupliquer les infrastructures de transit vers ces territoires.


b) Economies de gammes et d'échelle, intégration verticale


Par ailleurs, et tout comme sur les marchés de gros précédents, sur lesquels ces critères ont été développés, France Télécom profite également sur ces marchés de son intégration verticale, et notamment des économies d'échelle et de gamme substantielles qui en découlent.


c) Evolution prospective du marché


Sur un plan prospectif, cette situation est peu susceptible d'évoluer à moyen terme, compte tenu de l'étroitesse des marchés et de l'influence significative qu'exerce actuellement France Télécom sur ceux-ci.
A Saint-Pierre-et-Miquelon, une solution actuellement à l'étude par l'acteur local, SPM Télécom, consisterait à utiliser des solutions de voix sur IP sur les canaux FH numériques qu'il possède déjà vers le Canada pour sa connectivité internet. Mais cette solution n'aurait en aucun cas vocation à remplacer la solution satellitaire actuelle, l'opérateur envisageant d'utiliser les deux possibilités en partage de charge. Par ailleurs, la solution, encore à l'étude, n'est pas en mesure de remettre en cause la validité de l'analyse précédente sur les trois prochaines années.
A Mayotte, au vu des informations dont dispose l'Autorité, aucune solution de nature à modifier l'analyse précédente n'est envisagée dans les toutes prochaines années.
L'Autorité se réserve toutefois la possibilité d'anticiper une nouvelle analyse de marché au regard de l'évolution de la situation sur ces marchés.


II-3.3.4. Analyses des marchés du groupe 3


Rappel : ce groupe de marchés correspond aux marchés : Guadeloupe-Martinique, Guadeloupe-Guyane, Guyane-Martinique et Réunion-Mayotte.


a) Détention par France Télécom
d'infrastructures difficiles à dupliquer


Malgré un questionnaire spécifique aux marchés du transit inter territoires envoyé à l'été 2004 à l'ensemble des acteurs concernés, l'Autorité dispose de particulièrement peu d'informations sur ces marchés.
Néanmoins, sur toutes ces relations, un câble sous-marin permet de joindre au moins l'un des territoires concernés. Or, dans les zones géographiques tropicales, les solutions reposant sur des infrastructures en fibre optique offrent une qualité de service bien supérieure. En particulier, comme exposé ci-dessus, le taux de disponibilité des solutions reposant sur des solutions hertziennes ou satellites est fortement dégradé en période de turbulences climatiques (cyclones...).
Par conséquent, France Télécom possédant déjà les moyens de production permettant d'acheminer du trafic sur ces relations, et ayant de surcroît des parts dans les consortia qui possèdent les câbles sous-marins, semble disposer d'un avantage structurel conséquent sur ces marchés.


b) Economies de gammes et d'échelle, intégration verticale


Par ailleurs, et tout comme sur les marchés de gros précédents, sur lesquels ces critères ont été développés, France Télécom profite également sur ces marchés de son intégration verticale, et notamment des économies d'échelle et de gamme substantielles qui en découlent.


c) Evolution prospective du marché


Il paraît peu probable, au regard du petit volume de trafic qui est acheminé sur chacun de ces marchés, qu'un opérateur qui sollicite des prestations d'acheminement sur une de ces relations puisse raisonnablement créer ses propres infrastructures, au risque de ne pouvoir rentabiliser ses investissements dans un délai convenable.


II-3.3.5. Conclusion


Au vu des éléments qui précèdent, l'Autorité estime que France Télécom détient une influence significative sur l'ensemble des marchés du transit inter territoires sur la période d'analyse.


II-3.4. Le marché de la terminaison d'appel
sur le réseau de France Télécom
II-3.4.1. Analyses des parts de marché


La part de marché de France Télécom sur le marché de la terminaison d'appel vers les numéros géographiques sur son réseau est de 100 %.
Cela provient de l'impossibilité pour un opérateur tiers de fournir cette prestation à sa place. Comme le souligne le Conseil de la concurrence dans son avis n° 2005-A-10 du 11 mai 2005 précité (§ 14) « chaque opérateur alternatif est en position de monopole sur le marché de la terminaison, sur la boucle locale, des appels vers des numéros géographiques ». Ce raisonnement s'applique également à France Télécom.
Une telle part de marché constitue un indicateur important d'une présomption de puissance de marché. Il est toutefois nécessaire d'examiner les autres critères afin d'en évaluer la portée.


II-3.4.2. Absence de contre-pouvoirs des acheteurs


Des contre-pouvoirs d'acheteurs existeraient si les acheteurs de terminaison d'appel avaient la capacité de s'opposer à une hausse éventuelle par France Télécom de ses prix de terminaison d'appel ou de contraindre ceux-ci à une baisse.
L'Autorité estime qu'aucun opérateur alternatif n'est en mesure d'exercer un tel contre-pouvoir.

En effet, comme on l'a vu précédemment lors de la délimitation de ce marché, il n'existe pas d'alternative effective à l'achat de terminaison d'appel à France Télécom pour l'acheminement des communications jusqu'aux abonnés raccordés à son réseau.
Par ailleurs, compte tenu de l'importance de la taille du parc d'abonnés raccordés au réseau de France Télécom par rapport à celui de ses concurrents, la possibilité théorique dont disposent les opérateurs tiers de menacer de cesser l'achat de terminaison d'appel sur le réseau de France Télécom en cas de hausse significative de ses tarifs n'est pas susceptible d'exercer une contrainte sur les prix de ces prestations.
En effet, France Télécom peut supporter dans une certaine mesure, compte tenu de la taille des autres réseaux de boucle locale, les conséquences de l'impossibilité qui en résulterait pour ses abonnés d'être appelés par les utilisateurs de l'un de ces autres réseaux.
En revanche, l'impossibilité pour les utilisateurs raccordés à un autre opérateur de téléphonie de joindre les abonnés raccordés au réseau de France Télécom, qui représentent entre 95 % et 99 % du parc total d'abonnés aux réseaux de téléphonie fixe en France, serait extrêmement pénalisante et compromettrait la viabilité de l'activité commerciale de cet opérateur.
Enfin, les services de détail de France Télécom sont les plus gros acheteurs en volume de prestations de terminaison d'appel, ce qui rend très peu probable la perspective d'une pression à la baisse sur les prix de ces offres par le principal acheteur de ce marché.


II-3.4.3. Evolution prospective du marché


De façon prospective, au vu des perspectives de développement sur le marché de détail de l'accès bande étroite, sur lequel France Télécom exerce une influence significative, les conditions concurrentielles du marché de la terminaison d'appel sur son réseau ne devraient pas évoluer dans les prochaines années.


II-3.4.4. Conclusion


France Télécom détient une influence significative sur le marché de gros de la terminaison d'appel sur son réseau pour la période couverte par la présente analyse (2005-2008).


II-4. Commentaires sur l'analyse de l'Autorité


L'analyse conduite par l'Autorité sur l'influence significative de France Télécom sur les marchés pertinents a fait l'objet d'un avis du Conseil de la concurrence (II-4.1) et d'observations de la Commission européenne (II-4.2).


II-4.1. Avis du Conseil de la concurrence


Conformément à l'article L. 37-1 du CPCE, l'Autorité a sollicité l'avis du Conseil de la concurrence, notamment sur la liste des opérateurs réputés exercer une influence significative sur les marchés pertinents qu'elle a identifiés, le 5 janvier 2005. Le Conseil de la concurrence a rendu public son avis n° 2005-A-05 le 16 février 2005 (51).
Au sujet des marchés de détail de la téléphonie fixe, le conseil conclut (§ 76) que : « France Télécom exerce une influence significative sur l'ensemble des marchés et segments de marchés délimités par l'ART ».
En ce qui concerne les marchés de gros, le conseil a analysé plus particulièrement le marché du transit intra territorial.
Il émet les commentaires suivants :
- il rappelle que la fourniture de prestations intragroupes ne doit pas être prise en compte dans le calcul des parts de marché. A ce titre, l'achat de prestations de transit par Orange France à France Télécom devrait être exclu du calcul des parts de marché ;
- d'autres facteurs que la seule part de marché permettent d'asseoir l'influence significative de France Télécom, à savoir :
- les effets d'économie d'échelle rendus possibles grâce à l'importante autoconsommation ;
- le fait que France Télécom soit directement interconnecté à la totalité des opérateurs français peut constituer un avantage concurrentiel important.
Il conclut de l'ensemble de ces éléments que les réserves qui pourraient être formulées quant au calcul des parts de marché ne sont pas de nature à remettre en cause l'influence significative de France Télécom sur le marché du transit intra territorial. Toutefois, il signale qu'il convient de vérifier si d'autres opérateurs que France Télécom ne disposeraient pas également d'une influence significative sur ce marché.
Enfin, le conseil conclut (§ 76) que « France Télécom exerce une influence significative sur l'ensemble des marchés et segments de marché délimités par l'ART. Mais le conseil recommande une analyse plus poussée du marché de gros du transit d'appel intra-territorial, afin de vérifier si, en fonction des parts de marché calculées hors autoconsommation et des autres facteurs plus qualitatifs pouvant déterminer une puissance de marché, une telle influence significative ne peut ou non être également exercée par d'autres opérateurs sur ce marché ».
Ces remarques ont été prises en compte par l'Autorité, qui a amendé en conséquence son analyse des parts de marché concernées, comme démontré dans les parties précédentes.