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Article (Décision n° 2005-0571 du 27 septembre 2005 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)

Article (Décision n° 2005-0571 du 27 septembre 2005 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)




I-3.4.2. Délimitation en termes géographiques


France Télécom, dans sa réponse de 2003 aux questionnaires de l'Autorité, a estimé que la partition naturelle du territoire que constituent ses zones de transit doit servir de base à une segmentation géographique des marchés de gros, au vu des conditions concurrentielles différentes qui existent entre les zones de transit correspondant aux régions denses, et celles correspondant aux régions peu denses.
France Télécom estimait qu'il était nécessaire de segmenter le marché du transit en métropole pour tenir compte des différences de densité concurrentielle selon ses zones de transit, en avançant notamment le niveau de raccordement de ses CA dans 14 de ses 18 zones de transit.
Les « lignes directrices » de la Commission, paragraphe 57, soulignent que « la délimitation géographique des marchés s'effectue suivant les mêmes principes que ceux indiqués [dans la partie relative à la délimitation des marchés de produits] pour l'appréciation des possibilités de substitution du côté de l'offre et de la demande en cas d'augmentation des prix relatifs ». La Commission préconise ainsi l'utilisation du « test du monopoleur hypothétique » tel que précisé en introduction à la présente décision.
L'Autorité reconnaît que le raccordement des commutateurs d'abonnés de France Télécom est effectivement plus développé dans certaines zones que dans d'autres. Cela étant, une analyse des possibilités de substitution du côté de l'offre suffit à montrer qu'en cas d'augmentation des prix relatifs des prestations de transit de France Télécom sur certaines zones des opérateurs feront le choix de raccorder quelques commutateurs d'abonnés supplémentaires pour proposer des offres compétitives d'acheminement en transit. Par conséquent, sur la base de la conduite systématique d'un tel test du monopoleur hypothétique, aucune frontière ne peut être clairement identifiée entre « zones de forte densité de raccordement » et « zones de faible densité de raccordement ».
Les différences de niveau de raccordement s'expliquent par ailleurs par l'importance des volumes de trafic acheminés sur ces zones par des opérateurs alternatifs, ou, autrement dit, par la prise de parts de marché au niveau des marchés de détail par les opérateurs alternatifs (le trafic au départ des abonnés de France Télécom reste captif). En aucun cas ces différences ne peuvent s'expliquer par des facteurs structurels justifiant une segmentation géographique des marchés de gros. En conséquence, les niveaux de raccordement des opérateurs alternatifs pourront évoluer en fonction du développement de la concurrence sur les marchés de détail, lesquels ont été définis sur le territoire d'analyse.
L'Autorité estime par ailleurs que les conditions concurrentielles de la fourniture du transit intra territorial sont homogènes sur l'ensemble du territoire d'analyse.
En outre, il n'existe pas d'instruments juridiques législatifs ou réglementaires permettant de déterminer des zones géographiques distinctes.
L'Autorité estime qu'il est donc nécessaire de définir le marché du transit intra territorial sur le territoire d'analyse.


I-3.4.3. Conclusion


L'Autorité définit par conséquent le marché du transit intra territorial sur le territoire d'analyse. Il inclut les prestations permettant l'acheminement de tout trafic bande étroite acheminé en transit entre deux commutateurs ou routeurs, quels que soient leurs réseaux d'appartenance et leurs niveaux hiérarchiques.


I-3.5. Les marchés du transit inter territoires


L'Autorité analyse à présent les prestations de transit inter territoires mentionnées au point précédent.
Ces prestations présentent des caractéristiques propres du fait de l'utilisation d'infrastructures de transmission spécifiques telles que des câbles sous-marins ou des liaisons satellitaires.


I-3.5.1. Délimitation en termes de produits et services


Les éléments principaux justifiant la définition des marchés pertinents du transit inter territoires sont :
- la non-substituabilité avec les prestations de transit intra territorial ;
- la substituabilité des prestations réciproques « territoire 1 territoire 2 » et « territoire 2 territoire 1 » ;
- la non-substituabilité entre elles des prestations sur les différentes relations retenues.


(a) Non-substituabilité des prestations de transit inter territoires
et des prestations de transit intra territorial


L'Autorité a déjà justifié le fait que les prestations d'acheminement de trafic en transit entre deux commutateurs d'un même territoire ne sont pas substituables avec les prestations de transit inter territoires.


b) Substituabilité des relations réciproques
« territoire 1 territoire 2 » et « territoire 2 territoire 1 »


L'Autorité estime que, du côté de l'offre, les prestations d'acheminement d'un territoire 1 à un territoire 2 et celles consistant à acheminer le trafic en sens inverse, du territoire 2 vers le territoire 1, sont substituables.
En effet, un opérateur possédant les moyens de production nécessaires à l'acheminement de trafic dans un sens est en mesure, sans avoir à les modifier de manière substantielle et coûteuse, d'acheminer du trafic dans l'autre sens.
Les marchés de « relations de transit » définis ici seront donc systématiquement bidirectionnels.


c) Non-substituabilité des prestations d'acheminement sur des relations distinctes


Pour les mêmes raisons que celles invoquées pour justifier une définition distincte du marché du transit intra territoire et fondées sur des logiques de non-substituabilité du côté de l'offre, on doit considérer, concernant ces prestations de transit inter territoires, que les différentes relations existantes, à savoir par exemple métropole-Réunion, métropole-Guyane, Guyane-Réunion, etc., ne font pas non plus partie d'un marché pertinent unique.

En effet, si un opérateur est par exemple présent sur le marché de la fourniture de prestations de transit entre la métropole et la Réunion, il ne pourra, sans investir de manière conséquente, acquérir les moyens de production nécessaires à l'acheminement de trafic entre la métropole et la Guyane.
Il faudrait donc définir autant de marchés pertinents que de relations de transit entre deux territoires.
L'Autorité estime toutefois que certaines prestations ne doivent pas faire l'objet de marchés pertinents spécifiques. En effet, au vu des informations dont elle dispose et des volumes de trafic en cause, il apparaît qu'une prestation de transit entre un territoire 1, situé sur l'océan Indien (Réunion ou Mayotte) et un territoire 2, situé de l'autre côté de l'océan Atlantique (Guadeloupe, Martinique, Guyane ou Saint-Pierre-et-Miquelon), se découpe en fait en une prestation de transit entre le territoire 1 et la métropole et une prestation de transit entre la métropole et le territoire 2.
De même, une prestation de transit entre Saint-Pierre-et-Miquelon et la Guyane, la Martinique ou la Guadeloupe, se découpe de manière analogue en une prestation de transit Saint-Pierre-et-Miquelon-métropole et métropole-Guyane (ou métropole-Martinique ou métropole-Guadeloupe).
Il n'est par conséquent pas justifié d'identifier comme marchés pertinents les prestations d'acheminement de trafic sur les relations Réunion-Guadeloupe, Réunion-Guyane, Réunion-Martinique, Réunion-Saint-Pierre-et-Miquelon, Mayotte-Guadeloupe, Mayotte-Guyane, Mayotte-Martinique, Mayotte-Saint-Pierre-et-Miquelon, Guyane-Saint-Pierre-et-Miquelon, Martinique-Saint-Pierre-et-Miquelon et Guadeloupe-Saint-Pierre-et-Miquelon.


I-3.5.2. Délimitation en termes géographiques


La délimitation des marchés inter territoires en termes de produits et de services correspond également par nature à leur délimitation géographique.


I-3.5.3. Conclusion


L'Autorité définit donc les marchés du transit inter territoires comme étant les marchés des prestations permettant l'acheminement d'appels bande étroite entre deux points d'interconnexion situés de part et d'autre de chacune des relations suivantes :
métropole-Martinique ;
métropole-Guadeloupe ;
métropole-Guyane ;
métropole-Réunion ;
métropole-Mayotte ;
métropole-Saint-Pierre-et-Miquelon ;
Guadeloupe-Martinique ;
Guadeloupe-Guyane ;
Guyane-Martinique ;
Réunion-Mayotte.
L'analyse de la puissance (cf. infra) proposera toutefois un regroupement de ces marchés en trois groupes de marchés possédant des caractéristiques concurrentielles suffisamment homogènes pour en permettre une analyse conjointe.


I-3.6. Le marché de la terminaison d'appel vers les numéros
géographiques sur le réseau de France Télécom


Le marché considéré dans cette partie est celui des prestations de gros de terminaison d'appel vendues par France Télécom pour l'acheminement des numéros géographiques.
La terminaison d'appel correspond à une prestation offerte entre un point de commutation ou de routage et un utilisateur.
L'Autorité n'analyse ici que le marché de la terminaison d'appel à destination de numéros géographiques de France Télécom, identifiés conformément à la segmentation du territoire en zones de numérotation élémentaires définie dans le plan national de numérotation établi par l'Autorité dans sa décision n° 98-75 modifiée en date du 3 février 1998 approuvant les règles de gestion du plan national de numérotation. Ces numéros sont dits « géographiques » en ce qu'ils contiennent une information sur la localisation géographique des installations qu'ils désignent.
Cette analyse ne couvre donc pas le cas des prestations de terminaison des appels interpersonnels fournies par France Télécom dans le cadre des récentes offres commerciales de Wanadoo permettant aux abonnés d'être joints sur des numéros non géographiques (du type 087B).
L'Autorité estime en effet que les prestations de terminaison d'appel fournies dans ce cas sont techniquement différentes, et soumises à des conditions concurrentielles différentes, étant donné que l'opérateur désirant terminer l'appel ne connaît pas la localisation géographique de l'appelé, et qu'il n'est donc pas en mesure de livrer l'appel au plus près de l'appelé, comme il s'efforce de le faire dans le cas d'un numéro géographique.
Elle estime par ailleurs qu'il est trop tôt pour mener une analyse pertinente de l'ensemble des critères de puissance listés par la Commission européenne sur ces prestations, et tout particulièrement l'existence ou non de contre-pouvoirs d'acheteurs sur ces marchés. Elle sera particulièrement vigilante à l'évolution de ce marché.
L'analyse de l'Autorité est confirmée sur ce point par l'avis du Conseil de la concurrence sur l'analyse des marchés de la terminaison d'appel géographique sur les réseaux alternatifs fixes (22), où il précise que « la pression concurrentielle pouvant s'exercer entre les tarifs de terminaison d'appel sur des numéros géographiques d'une part, et sur des numéros non géographiques d'autre part, paraît trop faible pour pouvoir considérer que ces prestations appartiennent au même marché pertinent, que ces tarifs soient fixés par le même opérateur ou deux opérateurs différents ».