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Article (Décision n° 2006-1007 du 7 décembre 2006 portant sur les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées à France Télécom)

Article (Décision n° 2006-1007 du 7 décembre 2006 portant sur les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées à France Télécom)


INTRODUCTION


La présente décision concerne les modalités de mise en oeuvre des obligations comptables de France Télécom, à savoir l'obligation de comptabilisation des coûts, l'obligation de séparation comptable sur les marchés de l'accès et de l'interconnexion (les marchés de gros), et l'obligation de tenir une comptabilité des activités et des services sur les marchés de détail, lorsque l'entreprise a été désignée puissante et que ces obligations lui ont été imposées.
Comme le dispose l'article 1er de la recommandation de la Commission susvisée : « l'obligation de mettre en oeuvre un système de comptabilisation des coûts a pour but de garantir que les opérateurs notifiés appliquent des critères équitables, objectifs et transparents pour allouer leurs coûts aux services fournis dans le cas où ils sont soumis à des obligations de contrôle des prix ou d'orientation des prix vers les coûts ». En effet, un système de comptabilisation des coûts est construit de façon à répartir l'ensemble des coûts encourus par l'entreprise sur l'ensemble des produits qu'elle commercialise et de les confronter aux revenus de ces produits. Il est ainsi une vue d'ensemble et de référence sur les coûts, nécessaire aux objectifs de régulation, en particulier pour vérifier le respect des obligations de contrôle tarifaire.
En ce qui concerne l'objet de l'obligation de séparation comptable, le même article dispose qu'il est « de représenter le plus fidèlement possible le comportement de parties de l'entreprise de l'opérateur notifié comme si elles avaient fonctionné en qualité d'entreprises distinctes et, dans le cas d'entreprises verticalement intégrées, d'empêcher les discriminations en faveur de leurs propres activités et les subventions croisées abusives ». Ainsi, la séparation comptable consiste en la production de comptes séparés en fonction d'une découpe pertinente de l'entreprise soumise à cette obligation, nécessaires pour poursuivre les objectifs de la régulation, et en particulier pour vérifier le respect de l'obligation de non discrimination, lorsqu'elle s'applique, et l'absence de subventions croisées abusives.
Ces deux obligations, d'accès et d'interconnexion, trouvent leur pendant sur les marchés de détail, à travers l'obligation de tenir une comptabilité des services et des activités.


I. - CONTEXTE ET CADRE RÉGLEMENTAIRE
I-1. Le nouveau cadre réglementaire et juridique


A l'issue d'une analyse de marché pertinent, l'Autorité est en mesure d'imposer différentes obligations aux opérateurs disposant d'une influence significative sur un marché donné. Au titre des obligations d'interconnexion et d'accès, elle peut, conformément à l'article L. 38 du code des postes et des communications électroniques (CPCE), imposer des obligations de transparence, de non-discrimination, d'accès, de contrôle tarifaire, de séparation comptable et de comptabilisation des coûts. Elle peut également imposer des obligations sur les marchés de détail, conformément à l'article L. 38-1 du CPCE, si celles imposées sur les marchés de gros sont insuffisantes pour atteindre les objectifs de l'article L. 32-1, et en particulier des obligations de non-discrimination, de contrôle tarifaire et de comptabilité des services et des activités.
La comptabilisation des coûts et la séparation comptable apparaissent ainsi comme deux obligations distinctes.

Sur les marchés de gros, la comptabilisation des coûts entre dans le cadre des obligations relatives au contrôle des prix et se décline à ce titre selon plusieurs axes, notamment les obligations liées au recouvrement des coûts et à l'orientation des tarifs vers les coûts. En effet, l'article 13 de la directive accès susvisée dispose que « les autorités réglementaires nationales peuvent, conformément aux dispositions de l'article 8, imposer des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l'orientation des prix en fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d'interconnexion et/ou d'accès, lorsque l'analyse du marché indique que l'opérateur pourrait, en l'absence de concurrence efficace, maintenir des prix à un niveau excessivement élevé, ou comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals. [...] ».
La séparation comptable est prévue à l'article 11 de la directive accès susvisée, transposé à l'article L. 38-I (5°) du CPCE, qui prévoit les obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts dans les termes suivants : « Isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès, ou tenir une comptabilisation des services et activités qui permette de vérifier le respect des obligations imposées au titre du présent article [...] ». Les obligations comptables doivent ainsi permettre de vérifier en particulier le respect de l'obligation de non-discrimination dans la fourniture de prestations d'interconnexion ou d'accès, et des obligations de ne pas pratiquer des tarifs excessifs ou d'éviction et de pratiquer des tarifs reflétant les coûts.
Les modalités d'application de l'article L. 38-I (5°) sont explicitées à l'article D. 312 du CPCE. En outre, dans le cas où l'opérateur se voit imposer des obligations de contrôle tarifaire, l'article D. 311 du CPCE dispose que l'Autorité est compétente pour préciser les mécanismes de recouvrement des coûts ainsi que les méthodes de tarification et de comptabilisation des coûts, ces dernières pouvant être distinctes de celles appliquées par l'opérateur.
Dans le cas où l'opérateur se voit imposer une obligation de non-discrimination, l'article D. 309 dispose que « les modalités techniques et financières des services d'interconnexion et d'accès qu'ils [les opérateurs] offrent à leurs propres services, filiales et partenaires doivent pouvoir être justifiées sur demande de l'Autorité ».
Par ailleurs, sur les marchés de détail, l'article 17 de la directive service universel susvisée précise que l'Autorité doit veiller à ce que « lorsqu'une entreprise est soumise à une réglementation relative aux tarifs de détail, les systèmes nécessaires et appropriés de comptabilité des coûts soient mis en oeuvre. Les autorités réglementaires nationales peuvent spécifier le format et les méthodologies comptables à utiliser. La conformité avec le système de comptabilité des coûts est vérifiée par un organisme compétent indépendant. [...] ».
De même, l'article L. 38-1 (I, 3°) du CPCE dispose que l'Autorité peut imposer sur un marché de détail une obligation de « tenir une comptabilité des services et des activités qui permette de vérifier le respect des obligations prévues par le présent article », à savoir des obligations de non-discrimination et de contrôle tarifaire. L'article D. 314 du CPCE précise que pour la mise en oeuvre de cette obligation de comptabilisation des coûts, les dispositions de l'article D. 312 sont applicables.
Enfin, dans une perspective d'harmonisation de la mise en oeuvre des obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable, la Commission européenne a publié la recommandation du 19 septembre 2005 susvisée. Le Groupe des régulateurs européens (GRE) a également travaillé sur ce sujet et publié différents documents : d'une part, un avis sur la révision de la recommandation sur la séparation comptable et la comptabilisation des coûts de 1998, accompagné d'annexes détaillées portant sur les aspects de mise en oeuvre opérationnelle de ces obligations (ERG [04] 15 rev1), et d'autre part la position commune susvisée portant sur les « Lignes directrices de mise en oeuvre de la recommandation sur la séparation comptable et la comptabilisation des coûts ».


I-2. Les obligations comptables imposées à France Télécom
aux termes des analyses de marché


France Télécom a été soumise sur l'ensemble des marchés pertinents où elle a été déclarée puissante d'une part aux obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable sur les marchés de gros et d'autre part à une obligation de comptabilité des services et des activités sur les marchés de détail.


I-2.1. Les marchés du haut débit


Les marchés de gros des offres d'accès dégroupés à la boucle locale et des offres d'accès large bande livrés au niveau régional :
La décision n° 2005-0275 en date du 19 mai 2005 définit le marché pertinent de gros des offres d'accès dégroupés à la boucle locale cuivre et à la sous-boucle locale cuivre, indépendamment du type de dégroupage utilisé. Le périmètre du marché pertinent correspond géographiquement au territoire métropolitain, aux départements d'outre-mer et à Mayotte. Cette décision désigne France Télécom comme opérateur exerçant une influence significative sur ce marché.
La décision n° 2005-0278 en date du 19 mai 2005 définit le marché pertinent de gros des offres d'accès large bande livrés au niveau régional, qui comprend les offres de gros d'accès large bande par DSL livrés au niveau régional indépendamment du type de clientèle finale visée et de l'interface de livraison utilisée. Il correspond géographiquement au territoire métropolitain, aux départements d'Outre-mer et à Mayotte. Elle désigne France Télécom comme opérateur exerçant une influence significative sur ce marché.
Les décisions n° 2005-0277 et n° 2005-0280 susvisées qui portent sur les obligations imposées à France Télécom au titre de sa puissance sur les deux marchés précités prévoient, respectivement en leurs articles 10 et 11, que France Télécom est soumise à une obligation de séparation comptable et à une obligation de comptabilisation des coûts des prestations d'accès concernant ces marchés.
Ces décisions ont une durée de validité de trois ans dont le terme arrive à échéance le 1er mai 2008.
Le marché des offres de gros d'accès large bande livrés au niveau national :
La décision n° 2005-0281, en date du 28 juillet 2005, définit le marché pertinent de gros des offres d'accès large bande livrés au niveau national, qui comprend les offres de gros d'accès large bande DSL livrés au niveau national indépendamment du type de clientèle finale visée et de l'interface de livraison, et correspond géographiquement au territoire métropolitain, aux départements d'outre-mer et à Mayotte. Elle désigne également France Télécom comme opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et détermine les obligations qui lui sont imposées à ce titre.
Cette décision impose dans son article 5 une obligation de séparation comptable et une obligation de comptabilisation des coûts. En outre, l'article 6 impose également une obligation de formalisation des conditions tarifaires et techniques de cession interne entre la ou les entités opérant les réseaux de communications électroniques nécessaires à la fourniture de services haut débit sur le marché résidentiel et la ou les entités assurant les fonctions traditionnellement assurées par les fournisseurs d'accès à Internet.
Cette décision d'une durée de validité d'un an est arrivée à terme le 23 septembre 2006.
L'Autorité a procédé à un réexamen de l'analyse du marché de gros des offres d'accès large bande livrés au niveau national et a soumis à consultation publique, du 20 juillet au 21 août 2006, un projet de décision portant sur la levée de la régulation ex ante sur ce marché. Dans ce projet, l'Autorité souligne que le marché en question n'est plus pertinent au titre de la régulation ex ante et que sa structure permet de présager de son évolution vers une situation de concurrence effective ; ainsi, la régulation ex post exercée par le Conseil de la concurrence suffit à remédier aux éventuelles défaillances du marché. A cet égard, elle considère que la mise en application des dispositions relatives aux obligations comptables de France Télécom, en particulier sur l'ensemble des marchés du haut débit, et prévues dans la présente décision, permettront de détecter les éventuelles pratiques anticoncurrentielles auxquelles pourrait se livrer France Télécom.
Suite à la consultation publique et à la prise en compte des contributions reçues du secteur, l'Autorité a sollicité, dans ses courriers datés des 25 septembre et 6 octobre 2006, l'avis du Conseil de la concurrence sur ce projet. Le Conseil de la concurrence s'est déclaré, dans son avis n° 2006-A-21 du 17 novembre 2006, favorable à la levée de la régulation sur le marché considéré. Dans cet avis, « le Conseil de la concurrence émet un avis favorable au projet de décision que lui a transmis l'ARCEP et invite cette dernière à faire diligence pour que les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable de France Télécom soient rapidement effectives. ».


I-2.2. Les marchés de la téléphonie fixe


La décision n° 2005-0571 en date du 27 septembre 2005 susvisée définit les marchés pertinents de la téléphonie fixe, désigne France Télécom comme opérateur exerçant une influence significative sur lesdits marchés et détermine les obligations imposées à ce titre.
Cette décision désigne France Télécom puissante sur les marchés pertinents de détail. Conformément à la recommandation de la Commission européenne sur les marchés pertinents, l'Autorité a défini deux marchés de l'accès, l'un pour la clientèle résidentielle, l'autre pour la clientèle professionnelle, qui comprennent les produits d'accès utilisés par ces clientèles principalement pour accéder au réseau téléphonique public. Elle a également défini quatre marchés des communications électroniques en fonction du type de clientèle visée (résidentielle ou professionnelle) et de la nature de la communication (nationale ou internationale).
Cette décision définit également les marchés de gros pertinents de la téléphonie fixe, à savoir les marchés de gros du départ d'appels fourni sur des accès en position déterminée, du transit (sous segmenté en raison de l'existence de liaisons métropole-outre-mer et de certaines liaisons outre-mer-outre-mer), et de la terminaison d'appels à destination de numéros géographiques sur le réseau de France Télécom.

L'Autorité a imposé sur l'ensemble des marchés de gros précités une obligation de séparation comptable et une obligation de comptabilisation des coûts (art. 24) et sur l'ensemble des marchés de détail précités, pour une partie des prestations, une obligation de tenir une comptabilité des services et des activités (art. 31).
Elle a également imposé à France Télécom l'obligation de créer une offre de vente en gros de l'accès au service téléphonique (VGAST), sur laquelle les obligations comptables s'appliquent. Cette offre s'entend comme une offre de gros comportant les prestations d'accès et d'interconnexion nécessaires à un opérateur alternatif pour lui permettre de commercialiser un service téléphonique global, incluant notamment le raccordement au service téléphonique et l'ensemble des communications émises.
La décision n° 2006-0840 en date du 28 septembre 2006 portant modification de la décision n° 2005-0571 du 27 septembre 2005 d'analyse des marchés de la téléphonie fixe réexamine certaines des obligations imposées à France Télécom sur les marchés de détail. Au demeurant, le dispositif consolidé ne modifie pas le périmètre des obligations comptables imposées à France Télécom prévu par la décision initiale.
La décision n° 2005-0571 modifiée par la décision n° 2006-0840 a une durée de validité de trois ans dont le terme arrive à échéance le 1er septembre 2008.


I-2.3. Les marchés de services de capacité


La décision n° 2006-0592 en date du 26 septembre 2006 susvisée définit les différents marchés pertinents de services de capacité :
- le marché de détail des services de capacité inclut toutes les liaisons louées indépendamment des débits et de la technologie employée. Ce marché comprend notamment les liaisons louées normalisées par l'ETSI et les services de capacité à interface Ethernet ou ATM point à point ou multipoints. Il ne comprend pas les réseaux privés virtuels IP, les services de transmission de données, tels les liens Frame Relay ou X.25, et les services de support physique. Le périmètre géographique du marché pertinent correspond au territoire métropolitain, aux départements d'outre-mer et à Mayotte ;
- le marché de gros des prestations de segment terminal de services de capacité comprend les interfaces classiques et les interfaces alternatives et exclut les services support et de transmission, ainsi que les offres d'accès large bande livrés au niveau régional. Le périmètre géographique du marché pertinent correspond au territoire métropolitain, aux départements d'outre-mer et à Mayotte ;
- le marché de gros des prestations de circuit interurbain intraterritorial comprend les interfaces classiques et les interfaces alternatives. Il exclut les services support et de transmission. Le périmètre géographique du marché pertinent correspond au territoire métropolitain, aux départements d'outre-mer et à Mayotte ;
- les marchés de gros des prestations de transit interterritoires suivants :
- le marché de gros des prestations de circuit interurbain interterritorial entre la métropole et la Martinique ;
- le marché de gros des prestations de circuit interurbain interterritorial entre la métropole et la Guadeloupe ;
- le marché de gros des prestations de circuit interurbain interterritorial entre la métropole et la Guyane ;
- le marché de gros des prestations de circuit interurbain interterritorial entre la métropole et la Réunion ;
- le marché de gros des prestations de circuit interurbain interterritorial entre la Guadeloupe et la Martinique ;
- le marché de gros des prestations de circuit interurbain interterritorial entre la Martinique et la Guyane.
Le circuit interurbain interterritorial exclut les services de transmission de données et les services support.
Cette décision désigne France Télécom comme opérateur exerçant une influence significative sur l'ensemble des marchés de gros et de détail des services de capacité définis ci-avant.
Pour l'ensemble des marchés de gros, France Télécom est soumise aux obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable (art. 18). Ces obligations s'appliquent de ce fait à l'ensemble des prestations d'accès et d'interconnexion relatives à ces marchés.
Par ailleurs, sur le marché de détail, France Télécom est soumise à une obligation de tenir une comptabilité des services et des activités (art. 20 et art. 23).
La décision n° 2006-0592 a une durée de validité de trois ans dont le terme arrive à échéance le 1er septembre 2009.


I-2.4. Les éléments de justification de l'imposition des obligations comptables


L'ensemble des décisions précitées imposent des obligations comptables à France Télécom.
L'objet de la présente décision est de spécifier les modalités de mise en oeuvre de ces obligations, dont l'imposition et la proportionnalité ont été justifiées par l'Autorité au regard des objectifs qu'elle s'est fixés pour remédier aux problèmes concurrentiels constatés.
Pour évaluer la nécessité et le caractère justifié de telles obligations, elle a notamment pris en compte dans ses analyses de marché les éléments suivants :
- le caractère verticalement intégré de l'entreprise France Télécom SA, renforcé après la réintégration de ses filiales Wanadoo et Transpac ;
- sa puissance sur les marchés pertinents concernés ;
- sa possibilité de bénéficier d'effets de levier verticaux et horizontaux entre les différents marchés ;
- la détention d'une infrastructure essentielle, en l'occurrence la boucle locale de cuivre ;
- la nécessité de détecter d'éventuels comportements anticoncurrentiels, tels que la pratique de tarifs d'éviction, de subventions croisées, de couplages abusifs... ;
- la nécessité de disposer des outils permettant la vérification des autres obligations imposées, notamment de contrôle tarifaire et de non discrimination.
Les arguments développés dans les différentes décisions précitées sont rappelés en annexe A de la présente décision.


I-3. Processus d'adoption et durée de validité de la présente décision
I-3.1. Processus d'adoption


Toutes les décisions précitées soulignent qu'à titre transitoire France Télécom demeure soumise à l'ensemble des obligations comptables qui lui étaient imposées en vertu de l'article 18 du cahier des charges de France Télécom annexé au et approuvé par le décret n° 96-1225 du 27 décembre 1996, au chapitre XIII de l'annexe de l'arrêté du 12 mars 1998 susvisé, et dans les décisions n° 98-901 du 28 octobre 1998 et n° 2001-650 du 4 juillet 2001 de l'Autorité.
Elles indiquent également que, dans un souci de cohérence et d'homogénéité des obligations comptables imposées sur ces différents marchés, une décision ultérieure commune à tous les marchés doit préciser ces obligations. C'est précisément l'objet de la présente décision.
Parallèlement, depuis l'été 2005, l'Autorité a engagé un processus de concertation avec le secteur en proposant un document d'orientation sur les obligations comptables de France Télécom et en organisant des réunions multilatérales avec France Télécom, les opérateurs alternatifs et d'autres acteurs du secteur. L'objet de ces réunions était de préciser les objectifs de ces obligations et les modalités envisagées pour leur mise en oeuvre.
Conformément à ce qui a été précisé dans les décisions précitées, et aux dispositions de l'article L. 32-1 (II) du CPCE, l'Autorité a ensuite mis en consultation publique, du 29 juin au 29 juillet 2006, un projet de décision portant sur les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable imposées à France Télécom. Elle a reçu cinq contributions non soumises au secret des affaires, qu'elle a rendues publiques le 17 octobre 2006 et qui ont fait l'objet d'une synthèse publiée à cette même date. Des modifications ont été apportées au projet de décision pour tenir compte des contributions reçues.
Enfin, elle a soumis son projet de décision n° 2006-1007 amendé à la Commission européenne, aux autres autorités compétentes des Etats membres et l'a soumis en parallèle à une consultation publique du 17 octobre au 17 novembre 2006. L'Autorité a reçu deux contributions. Des modifications ont été apportées au projet de décision pour tenir compte des commentaires exprimés par les acteurs ayant répondu.
Elle a également obtenu les observations de la Commission européenne le 17 novembre 2006, qui a validé les modalités de mise en oeuvre des obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable de France Télécom et a formulé un commentaire relatif à la publication des informations comptables.
En particulier, « la Commission invite [...] l'ARCEP à motiver davantage les raisons pour lesquelles certaines informations comptables sont ou non publiées en tenant compte du secret des affaires, en particulier en ce qui concerne les restitutions réglementaires indiquant, par exemple, les coûts moyens des composants de réseau ».
L'Autorité a tenu compte des observations de la Commission en apportant les éléments de motivation requis dans la version définitive de la décision.

Enfin, l'Autorité n'a pas reçu de commentaires des autres autorités de régulation nationales.


I-3.2. Durée de validité de la présente décision


Conformément à l'article D. 303 du CPCE, la durée de validité des obligations imposées par l'Autorité à l'issue d'une analyse de marché ne peut dépasser la date de révision des décisions prises en vertu de l'article D. 301, qui définissent les marchés pertinents.
Or, l'article D. 301 du CPCE dispose que l'inscription d'un marché sur la liste de l'ensemble des marchés pertinents « est prononcée pour une durée maximale de trois ans ». L'Autorité doit réviser cette liste, de sa propre initiative, « lorsque l'évolution de ce marché le justifie », ou encore « dès que possible après la modification de la recommandation de la Commission européenne ».
La date de validité pour chacune des analyses de marché concernées a été rappelée précédemment. Il en ressort que la présente décision sera d'application jusqu'au 1er mars 2008 pour les marchés concernés du haut débit (dégroupage et offres régionales), jusqu'au 1er septembre 2008 pour les marchés concernés de la téléphonie fixe et enfin jusqu'au 1er septembre 2009 pour les marchés concernés des services de capacité.
Eu égard aux conséquences d'une telle décision pour l'opérateur régulé et à son importance pour le secteur, il convient d'assurer une certaine stabilité au cadre ainsi mis en place. Par conséquent, l'Autorité estime justifié d'imposer une durée de validité de la présente décision de trois ans avec un terme qui sera identique à celui de l'analyse de marchés des services de capacité ; les nouvelles analyses des marchés du haut débit et de la téléphonie fixe devant intervenir dans l'intervalle préciseront le cas échéant si le cadre défini par la présente décision reste d'application.
De ce fait, la présente décision sera d'application jusqu'au 1er septembre 2009.
Toutefois, si des évolutions des caractéristiques des marchés le justifiaient, l'Autorité réexaminerait pendant cette période la présente décision et pourrait, le cas échéant, être amenée à prendre une nouvelle décision.
Enfin, il est envisageable qu'au cours de la période de validité de la présente décision, l'Autorité ait à modifier des paramètres relatifs aux modalités des obligations comptables décrites dans la présente décision. De telles modifications, que l'Autorité spécifiera, ne remettront pas en cause les principes et la structure des obligations comptables décrits et imposés au titre de la présente décision.


I-4. Les objectifs des obligations comptables
I-4.1. Les obligations comptables ne peuvent être définies isolément des autres obligations


La finalité des obligations comptables est significativement liée, tant selon les directives européennes que les textes nationaux, à la vérification par le régulateur du respect des autres obligations. Elles constituent ainsi un outil indispensable à l'exercice par ce dernier de ses missions.
En effet, le cadre réglementaire prévoit explicitement l'articulation entre les obligations comptables et les obligations de non-discrimination, de contrôle tarifaire et de transparence.
Ainsi, l'article 11 de la directive accès susvisée précise qu'au titre de l'obligation de séparation comptable, « Elles [les autorités réglementaires nationales] peuvent, notamment, obliger une entreprise intégrée verticalement à rendre ses prix de gros et de transferts internes transparents, entre autres pour garantir le respect de l'obligation de non-discrimination prévue à l'article 10 ou, en cas de nécessité, pour empêcher des subventions croisées abusives. [...] ». Cette finalité est reprise à l'article L. 38-I (5°) du CPCE précité.
De même, la recommandation de la Commission européenne datant du 19 septembre 2005 susvisée précise dans son deuxième considérant que les obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts « ont pour objet de rendre les transactions entre opérateurs plus transparentes et/ou de déterminer le coût réel des services fournis. Par ailleurs, les autorités réglementaires nationales peuvent utiliser la séparation comptable et la mise en place de systèmes de comptabilisation des coûts pour compléter leur arsenal réglementaire (par exemple, en matière de transparence, de non-discrimination, d'orientation en fonction des coûts) à l'égard des opérateurs notifiés. »
L'article 1er de cette même recommandation souligne par ailleurs que : « L'obligation de mettre en oeuvre un système de comptabilisation des coûts a pour but de garantir que les opérateurs notifiés appliquent des critères équitables, objectifs et transparents pour allouer leurs coûts aux services fournis dans le cas où ils sont soumis à des obligations de contrôle des prix ou d'orientation des prix vers les coûts.
L'obligation de séparation comptable a pour objet de conférer aux informations un niveau de détail plus élevé que celui qui ressort de la comptabilité sociale de l'opérateur notifié, de représenter le plus fidèlement possible le comportement de parties de l'entreprise de l'opérateur notifié comme si elles avaient fonctionné en qualité d'entreprises distinctes et, dans le cas d'entreprises verticalement intégrées, d'empêcher les discriminations en faveur de leurs propres activités et les subventions croisées abusives ».
Les obligations comptables sont par conséquent indispensables pour vérifier le respect par un opérateur puissant des obligations qui lui sont le cas échéant imposées en matière de contrôle des prix ou de non-discrimination.
Pour ce qui est du respect des obligations de contrôle des prix, les restitutions comptables relatives à l'obligation de comptabilisation des coûts sur les marchés de gros et à l'obligation de tenir une comptabilité des activités et des services sur les marchés de détail offrent à l'Autorité une connaissance fine des coûts de l'opérateur, de leur répartition et de leur allocation. Elles permettent notamment de s'assurer de la cohérence des tarifs pratiqués par l'opérateur avec ses coûts dans le cadre d'une obligation d'orientation des prix vers les coûts ou encore fournissent les éléments de coûts précis et nécessaires à la réalisation des tests de ciseau tarifaire.
Pour ce qui est de l'obligation de non-discrimination, la séparation comptable, elle-même constituée d'éléments rendus disponibles par l'obligation de comptabilisation des coûts, permet de façon générale de vérifier que l'opérateur régulé octroie à ses concurrents des conditions équivalentes entre eux mais également entre eux et l'opérateur régulé.
Enfin, pour ce qui est de l'obligation de transparence, il convient de noter qu'au titre des obligations comptables, l'opérateur régulé doit rendre publique une description du système de comptabilisation des coûts en faisant notamment apparaître les principales catégories au sein desquelles les coûts sont groupés et les règles d'allocation de ces coûts. En outre, l'Autorité peut publier des données issues du dispositif de séparation comptable. Cette transparence, qui doit être réalisée dans le respect du secret des affaires, peut permettre au secteur de vérifier le respect du principe de non-discrimination et l'égalité des conditions de concurrence.


I-4.2. L'insuffisance de la comptabilité sociale pour les objectifs de la régulation


La comptabilité sociale est conçue pour enregistrer toutes les opérations qui affectent le patrimoine de l'entreprise ; elle permet notamment de dégager son résultat, sous la forme d'un compte de résultat, et de présenter la situation comptable des éléments actifs et passifs en fin d'exercice, sous la forme d'un bilan. L'information comptable et financière d'une entreprise est avant tout destinée aux investisseurs, actionnaires et bailleurs de fonds, comme un signal de son activité opérationnelle. A ce titre, le code de commerce prévoit que cette information, présentée sous la forme de comptes annuels, soit régulière, sincère et reflète fidèlement l'image du patrimoine de l'entreprise.
L'Autorité, au titre de ses objectifs réglementaires, a besoin de restitutions comptables et financières de la part de France Télécom. En effet, comme démontré ci-avant, l'information comptable est un élément indispensable dans la mise en oeuvre d'un certain nombre d'obligations.
Bien que la comptabilité sociale de l'entreprise présente les propriétés adéquates à l'utilisation à laquelle elle est destinée, elle est insuffisante pour atteindre les objectifs propres à la régulation.
En effet, le cadre réglementaire relatif aux communications électroniques adopte une définition économique et concurrentielle des marchés, par des analyses de substituabilité des produits et services qu'ils comprennent, non reflétée dans la comptabilité sociale de l'entreprise. C'est aussi dans cette optique de pertinence économique et concurrentielle que différentes méthodes de valorisation des coûts (telles que la comptabilité en coûts courants économiques) ou différentes méthodes d'allocation des coûts (telles que les coûts incrémentaux) peuvent être requises dans un système de comptabilisation des coûts réglementaire, alors que leur utilité n'est pas justifiée dans un système non réglementaire.
Il apparaît donc nécessaire à l'Autorité de formaliser un système de comptabilité réglementaire qui tienne compte des objectifs et des principes décrits dans la présente décision. Bien que ce système soit différent du système de comptabilité sociale de France Télécom, ce dernier constitue la principale base de données du premier.


I-4.3. Le dispositif de l'ancien cadre réglementaire ne respecte pas l'ensemble de ces contraintes


Les obligations comptables imposées à France Télécom dans l'ancien cadre réglementaire étaient encadrées par des mesures précisées dans son arrêté d'autorisation et dans le cahier des charges de l'opérateur.
En particulier, dans le chapitre XIII (paragraphe 13.1) de l'arrêté susvisé de France Télécom, était mentionné que l'opérateur devait produire, à partir de la comptabilité réglementaire prévue à l'article 18 de son cahier des charges, des comptes individualisés de produits et de charges relatifs aux services et activités suivants : le réseau général, le réseau d'accès commuté, l'interconnexion, le service téléphonique au public, les services de capacité ainsi qu'un compte rassemblant les autres activités couvertes par son autorisation.

L'objectif de l'encadrement réglementaire de la comptabilité de France Télécom était d'assurer une concurrence loyale sur le marché ou les marchés où l'entreprise était présente, en respectant les principes de non-discrimination, de transparence comptable et de transparence dans ses relations avec les autres entités de son groupe et avec les opérateurs alternatifs.
L'article 18 du cahier des charges de France Télécom précité précisait que France Télécom devait tenir un système d'information et de comptabilité analytique de ces services et activités de façon à permettre la vérification de l'orientation de ses tarifs vers les coûts, en justifiant la bonne allocation des coûts communs de l'entreprise et en valorisant activités, services et éléments de réseaux à leur prix de cession externe. Il était également prévu que la restitution des éléments pertinents du système de comptabilité reste à la disposition de l'Autorité sur demande et qu'elle fasse l'objet d'un audit périodique et régulier, de façon à vérifier l'application du code des postes et des télécommunications.
L'Autorité avait publié en février 2001 des recommandations relatives à la production par France Télécom des six comptes individualisés, précisant les activités, les coûts et les charges qui devaient apparaître dans ces six comptes.
Cependant, les restitutions prévues par le système de l'ancien cadre réglementaire ne permettent pas d'atteindre les objectifs prévus par le nouveau cadre, et ce pour plusieurs raisons.
En ce qui concerne l'obligation de comptabilisation des coûts :
Comme il est décrit ci-après dans la décision, le système de comptabilisation des coûts doit produire des éléments d'information qui rendent compte de ses évolutions, concomitantes aux évolutions des activités de France Télécom. Plusieurs axes d'approche sont concernés pour la production de restitutions comptables adaptées, les deux principaux étant les suivants :
- les évolutions technologiques des réseaux des communications électroniques vers les réseaux de nouvelle génération justifient une approche prospective de la comptabilisation des coûts, par exemple l'intégration de nouveaux éléments et architectures de réseau au système ou encore la modification de la répartition des coûts d'une technologie vers une autre ;
- le poids croissant des coûts de systèmes d'information dans la production et la fourniture d'offres commerciales par France Télécom.
Enfin, les nouvelles dispositions de l'obligation de comptabilisation des coûts mettent l'accent sur l'amélioration du degré de transparence, vis-à-vis de l'Autorité comme des acteurs tiers du secteur, conformément aux dispositions du nouveau cadre réglementaire, notamment en ce qui concerne la description du système de comptabilisation des coûts et des méthodes d'allocation qui le structurent.
En ce qui concerne l'obligation de séparation comptable :
L'évolution du marché des communications électroniques et la découpe en marchés imposée par le nouveau cadre réglementaire rendent inappropriées la répartition de l'ensemble des activités de France Télécom sur six comptes individualisés.
En effet, la régulation du marché de l'interconnexion en tant que telle n'est plus au coeur du système de séparation comptable, en raison notamment de la reconnaissance de l'infrastructure d'accès, la boucle locale de cuivre, comme une infrastructure essentielle dont dépend le fonctionnement d'un certain nombre de marchés régulés.
En outre, le nouveau cadre réglementaire est caractérisé par une découpe fine des marchés, en particulier des marchés de gros, qui doit être reflétée dans la structure du dispositif de séparation comptable.
Par ailleurs, pour atteindre les objectifs de vérification des obligations de non-discrimination et de transparence imposées le cas échéant à l'opérateur régulé, l'obligation de séparation comptable, comme il le sera exposé et motivé dans cette décision, doit présenter des modalités de formalisation des prix de cession interne.
Enfin, l'intégration des filiales Wanadoo (en 2004) et Transpac (début 2006) de France Télécom n'avait pas eu lieu. La séparation structurelle entre ces entités et France Télécom permettait en effet un contrôle de leurs transactions plus aisé que celui qu'il est possible d'effectuer à ce jour. Comme exposé par le Conseil de la concurrence dans son avis sur l'analyse des marchés pertinents du haut débit (avis n° 2005-A-03 du 31 janvier 2005), une obligation de séparation comptable appropriée notamment à la structure nouvellement intégrée de l'entreprise s'avère désormais indispensable pour retracer de telles transactions.
Ainsi, il apparaît nécessaire de prévoir des aménagements au système de comptabilisation des coûts de France Télécom ainsi qu'aux restitutions comptables réglementaires qu'il produit, et de mettre en place un nouveau dispositif de séparation comptable, tel qu'exposé respectivement dans les parties II « La comptabilisation des coûts de France Télécom » et III « L'obligation de séparation comptable de France Télécom » de la présente décision.
La partie IV de la présente décision concerne les modalités d'application de l'obligation de tenir une comptabilité des services et des activités propre à la régulation des marchés de détail.
Enfin, la partie V traite le cas particulier de la comptabilisation des coûts et revenus relatifs à la fourniture par France Télécom des composantes du service universel.


II. - LA COMPTABILISATION DES COÛTS DE FRANCE TÉLÉCOM


Comme rappelé ci-dessus, les modalités de mise en oeuvre de l'obligation de comptabilisation des coûts sont précisées à l'article D. 312 du CPCE.
En particulier, il est mentionné qu'un système de comptabilisation des coûts est un dispositif qui permet l'attribution des coûts, des revenus et du capital employé à chaque activité et service offerts sur les marchés considérés.
L'Autorité est compétente pour, le cas échéant, définir les spécifications du système de comptabilisation des coûts imposé à un opérateur au titre de la régulation des marchés pertinents sur lesquels il est reconnu comme exerçant une influence significative. Ainsi, le format des restitutions comptables produites par le système de comptabilisation des coûts est défini par l'Autorité, et le degré de détail de ces restitutions est déterminé en fonction des objectifs de régulation, notamment le respect des obligations éventuelles de contrôle tarifaire.
Les méthodes de valorisation et d'allocation des coûts utilisées dans la préparation des restitutions du système de comptabilisation des coûts doivent par ailleurs satisfaire les principes d'efficacité, de non discrimination et de pertinence.
L'obligation de tenir un système de comptabilisation des coûts réglementaire comporte elle-même deux finalités :
- quand elle est utilisée à des fins de séparation comptable, elle s'applique sur un périmètre large correspondant à l'ensemble des activités de l'entreprise ;
- quand elle est utilisée à des fins de contrôle tarifaire, elle peut être imposée sur un marché particulier selon des modalités adaptées aux conditions concurrentielles.


II-1. Les principes de l'information comptable
II-1.1. Les principes de traitement de l'information comptable


L'information comptable réglementaire doit vérifier un certain nombre de propriétés, qui assurent sa fiabilité.
La complétude :
Par construction, un système de comptabilisation des coûts doit vérifier la propriété de complétude, c'est-à-dire que les données d'entrée du système doivent couvrir l'ensemble des charges, d'immobilisation ou non, et des produits de l'ensemble des activités de l'entreprise. Ces données sont issues de la comptabilité sociale et patrimoniale de l'entreprise.
La causalité et la technique ABC de contrôle de gestion :
La technique de contrôle de gestion ABC (Activity-Based Costing) permet d'établir la relation de causalité nécessaire entre les coûts encourus, directement (coûts directement attribuables) ou indirectement (coûts indirectement attribuables), et les activités exercées, services ou produits offerts et par conséquent d'améliorer l'efficacité des processus de production. Ses propriétés permettent notamment de satisfaire aux principes de pertinence et d'efficacité.

La recommandation de la Commission européenne sur la comptabilisation des coûts et la séparation comptable susvisée recommande l'utilisation de cette méthode pour satisfaire le principe de causalité des coûts.
Une approche similaire peut être adoptée pour l'allocation des recettes aux activités, services ou produits.
L'affectation non discriminatoire des coûts :
Deux usages équivalents d'une même activité (par exemple de support ou commerciale) ou d'un même élément de réseau doivent se voir affecter les mêmes coûts (et recettes le cas échéant).
L'application de la méthode ABC ou d'une méthode reposant sur les principes de causalité vérifie la propriété de non-discrimination dans l'affectation des coûts.
Le rapprochement de la comptabilité sociale et de la comptabilité réglementaire :
La réconciliation des états produits par la comptabilité sociale et la comptabilité réglementaire est un objectif que poursuit l'Autorité. Il est important que puissent être retracés et justifiés les écarts entre ces deux référentiels. Plusieurs aspects peuvent être anticipés :
- les charges d'exploitation (hors charges et frais financiers) de la comptabilité sociale doivent être confrontées aux coûts d'exploitation du système de comptabilisation réglementaire en justifiant des retraitements effectués ;
- les charges et frais financiers sont remplacés dans la comptabilité réglementaire par la rémunération du capital immobilisé ;
- les dotations aux amortissements dans chacune des comptabilités ne peuvent être rapprochées directement, en raison des différences de méthodologies d'évaluation des coûts.
La disponibilité et l'auditabilité :
Le cadre réglementaire, et notamment l'article D. 312-III du CPCE, prévoit que les éléments pertinents du système d'information et les données comptables relatifs aux obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable sont tenus à la disposition de l'Autorité pendant une période de cinq ans.
Par ailleurs, ce même article prévoit que le respect des obligations comptables doit être vérifié par un processus d'audit. A ce titre, les informations comptables doivent être conçues de façon à rendre ce processus réalisable.


II-1.2. Les méthodes d'allocation des coûts
II-1.2.1. Définitions


Les coûts sont susceptibles d'être appréhendés selon plusieurs caractéristiques, constituant autant d'axes de ventilation et par suite d'axes d'analyse des coûts. S'agissant de caractéristiques rendant compte de différentes propriétés des coûts, ces axes d'analyse ne sont pas concurrents.
Ainsi, peuvent être distingués trois axes :
- l'axe traitant de l'analyse de la causalité des coûts : dans ce cadre, les coûts sont ventilés entre les catégories « directs », « indirects » (1) ou « indivis », signifiant respectivement :
- pour les coûts directs, qu'il existe une relation de causalité immédiate entre le coût considéré et la production des activités, services ou produits analysés ;
- pour les coûts indirects, qu'il existe une relation de causalité moins explicite, quelquefois complexe, entre les dépenses considérées et les activités, services ou produits, et enfin ;
- pour les coûts indivis, qu'il n'existe pas de relation de causalité susceptible d'être établie ;
- l'axe traitant du degré de partage des coûts : dans ce cadre, les coûts sont dits spécifiques (ou propres), joints, ou communs, signifiant respectivement :
- pour les coûts spécifiques, qu'ils sont engagés dans le cadre de la production d'un seul produit ou service ;
- pour les coûts joints, qu'ils sont liés à la production conjointe de plusieurs produits ou services, et enfin ;
- les coûts communs correspondant au cas particulier de coûts joints communs à toutes les activités ;
- l'axe traitant de la sensibilité des coûts aux volumes : dans ce cadre, les coûts sont classés en coûts fixes ou coûts variables, signifiant respectivement :
- pour les coûts fixes, que le coût considéré varie pas ou peu en fonction d'une évolution de la production des activités avec lesquelles un lien de causalité a été établi ;
- pour les coûts variables, qu'il existe une corrélation entre l'évolution du coût considéré et l'évolution de la production des activités avec lesquelles un lien de causalité a été établi.


II-1.2.2. Les méthodes d'allocations des coûts attribuables


Les coûts attribuables sont des coûts qui présentent une relation de causalité, directe ou indirecte, avec les activités, services ou produits offerts.
Les méthodes d'allocation se distinguent les unes des autres par le périmètre des coûts encourus par l'entreprise pris en compte pour déterminer le coût d'une activité, d'un service ou d'un produit. Le choix d'une méthode dépendra notamment des objectifs de contrôle tarifaire (orientation des tarifs vers les coûts, tarification non excessive, test de ciseau tarifaire...) et du contexte concurrentiel :
- la méthode des coûts complets distribués (2) consiste à allouer l'intégralité des coûts encourus par l'entreprise sur l'ensemble des produits ou services fournis. Cette allocation se fait en fonction d'inducteurs de coûts déterminés en fonction de la relation de causalité (directe ou indirecte) ;
- le coût incrémental est le coût attribué spécifiquement à un produit ou un service (l'incrément). Raisonner en « coût incrémental » consiste ainsi à identifier le coût propre à la production de cet incrément ;
- la méthode du coût de production isolée (3) consiste à retenir l'intégralité des coûts encourus pour la production d'un produit, dans l'hypothèse où l'entreprise ne produirait que ce produit.
Il existe une relation entre les trois standards de coûts résultant de ces méthodes, le coût incrémental correspondant au coût plancher et le coût de production isolée correspondant au coût plafond des produits ou services considérés.
Enfin, le coût complet distribué correspond à un coût intermédiaire, dont le niveau dépend des choix d'affectation de l'ensemble des coûts de l'entreprise sur l'activité ou le service considéré.
Les choix d'affectation sont reflétés par des clés d'allocation, qui permettent la ventilation de masses plus ou moins importantes de coûts vers des activités, des services ou des produits. La détermination des clés d'allocation se fait en fonction des relations de causalité identifiées. En cas de lien de causalité directe, les clés d'allocation peuvent refléter les facteurs d'usage, par exemple d'un équipement par un service ou encore d'une activité de support par un produit. En cas de causalité indirecte, il est nécessaire d'identifier des inducteurs de coûts qui justifient l'allocation. Le processus de détermination des clés d'allocation doit vérifier les propriétés de pertinence, d'efficacité, et de non-discrimination conformément à l'article D. 312-IV du CPCE.


II-1.2.3. Les méthodes d'allocations des coûts non attribuables


Tout coût qui ne présente pas de relation de causalité est dit « indivis » ou coût « non attribuable ». L'exemple caractéristique est le salaire du dirigeant de l'entreprise.
Les coûts indivis sont donc tels qu'aucun inducteur de coût évident ne peut être identifié. Dans ce cas, la méthode de répartition appelée EPMU (4), qui consiste à allouer à la fourniture d'un produit ou service un montant de coûts indivis proportionnel au montant relatif des coûts de ce produit ou service sur l'ensemble des coûts de l'opérateur, peut être utilisée, comme recommandé dans la position commune du GRE susvisée.