Article (Observations du Gouvernement en réponse à la saisine du Conseil constitutionnel en date du 20 décembre 1995 présentée par plus de soixante députés)
B. - Sur le fait que les dispositions du II de l'article 33
seraient étrangères au domaine des lois de finances
D'une manière générale, il faut relever que la réforme de la dotation globale d'équipement des communes (D.G.E.) organisée par l'article 33 du projet de loi de finances, modifie profondément le régime de cette intervention, en ce qu'elle supprime l'une des deux parts de la subvention.
Or les textes régissant jusqu'à présent la D.G.E. des communes, tant dans leur rédaction que quant au fond du dispositif qu'ils organisent, mêlent de façon très imbriquée le régime applicable aux première et deuxième parts,
notamment s'agissant des règles de répartition.
La suppression de la première part de la D.G.E. des communes, qui trouve bien sa place dans une loi de finances, comme l'atteste son impact sur les charges du budget de l'Etat en 1996 (- 626 MF), a nécessité des dispositions permettant de la rendre effectivement applicable.
Les dispositions de l'article 33, qui n'ont pas trait directement à la suppression de la première part de la D.G.E. des communes, sont néanmoins indissociables de cette mesure, qui ne pourrait être mise en oeuvre en leur absence.
Plus précisément :
1. S'agissant des dispositions du II de l'article :
La suppression de la première part de la dotation globale d'équipement des communes et le remplacement de la deuxième part par une dotation nouvelle dont les seuils d'attribution en fonction de la population sont modifiés,
rend caduc le dispositif de répartition figurant dans la loi du 7 janvier 1983, et notamment dans son article 103-3, relatif à la répartition de la deuxième part de la dotation entre communes et groupements de communes.
Afin de rendre possible l'attribution de subventions au titre de la nouvelle D.G.E. instituée par l'article 33, il était donc impératif de prévoir simultanément des dispositions de répartition de cette dotation entre les bénéficiaires concernés. Ainsi, bien que ces dispositions n'affectent pas le montant global de cette dotation, elles ne peuvent cependant être dissociées de la mesure de suppression de la première part de la D.G.E. dont elles constituent le complément indispensable.
2. De même, s'agissant des dispositions du III relatives à la composition de la commission départementale :
Elles ne font que tirer les conséquences, sur la composition de la commission départementale, de la suppression de la première part de la dotation globale d'équipement des communes et du remplacement de la deuxième part par une dotation nouvelle, à laquelle sont éligibles des communes et groupements répondant à un critère de seuil de population modifié. L'absence de représentation d'une partie des communes éligibles au sein de cette commission, qui résulterait du strict maintien des textes existants, serait clairement contraire à la volonté du législateur, qui a entendu modifier les règles d'éligibilité des communes à la D.G.E. Par la perte de légitimité qu'elle entraînerait dans les conditions d'application de cette réforme, elle risquerait d'entraîner l'impossibilité de sa mise en oeuvre.
D'une manière générale, les dispositions des II et III de l'article sont aussi proches que possible des dispositions antérieures correspondantes de la loi du 7 janvier 1983, s'agissant notamment des critères de calcul des enveloppes départementales et des conditions d'intervention de la commission départementale.
En d'autres termes, on se trouve en présence des éléments indivisibles d'un dispositif financier d'ensemble, au sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel (décision no 85-201-DC du 28 décembre 1985).
VI. - Sur les redevances aériennes
(articles 62 et 63 devenus articles 97 et 98)
A. - En ce qui concerne l'article 97
Cet article entend tirer les conséquences de l'annulation, par une décision rendue le 10 février 1995 par le Conseil d'Etat, d'un arrêté ministériel en date du 21 décembre 1992 fixant les conditions d'établissement et de perception de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne.
Il prévoit d'autoriser la substitution de nouveaux titres de perception à ceux qui avaient été émis au titre des années 1991 à 1995.
La situation née de cette annulation contentieuse a créé un vide juridique préjudiciable au budget de l'Etat. Les sommes en cause s'élèvent en effet à 240 MF. L'intervention du législateur s'imposait donc afin de permettre, dans l'intérêt général, de remplacer avec effet rétroactif les titres de perception ainsi frappés de précarité, dès lors que les dispositions applicables aux années antérieures à celles directement censurées par le Conseil d'Etat encouraient les mêmes critiques.
1. En ce qui concerne le domaine des lois de finances :
Les auteurs de la saisine font valoir que cette mesure porte sur un objet étranger au domaine des lois de finances qui peuvent, en vertu de l'article 1er de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, régir les « impositions de toute nature » mais non des redevances, lesquelles ne constituent ni des impôts ni des taxes.
Cette argumentation est inopérante, dès lors que cet article n'a, en tout état de cause, ni pour objet ni pour effet d'instituer une redevance pour service rendu. Ainsi que l'a fréquemment rappelé le Conseil constitutionnel, toute disposition ayant une incidence sur le montant des ressources de l'Etat ressortit au domaine des lois de finances (cf., par exemple, décisions no 82-154-DC du 29 décembre 1982 et no 93-330-DC du 29 décembre 1993), même si la jurisprudence admet que la loi ordinaire peut également, dans une certaine mesure, comporter des dispositions susceptibles d'avoir des répercussions financières.
Il n'est en tout cas pas douteux qu'une disposition par laquelle le législateur définit de manière rétroactive, comme lui seul peut le faire, les mesures permettant de préserver les recettes du budget annexe de l'aviation civile est au nombre de celles qui peuvent figurer dans une loi de finances. 2. En ce qui concerne le respect de la chose jugée :
Il est fait grief à cet article de méconnaître la chose jugée par le Conseil d'Etat, au motif qu'il permettrait de calculer la redevance sur une base forfaitaire, et non sur la base d'une contrepartie directe et proportionnelle au service effectivement rendu, ce qui a précisément constitué le principal motif d'annulation de l'arrêté.
Ce moyen manque en fait.
D'une part, en effet, et ainsi que le reconnaissent les auteurs de la saisine, l'article contesté formule expressément la réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée. Il n'a donc pas pour objet, et ne peut avoir pour effet, de faire échec à un droit à remboursement de la redevance qu'une telle décision aurait reconnu à un usager du service.
D'autre part, le législateur a clairement encadré l'habilitation ainsi donnée à l'autorité administrative, afin de modifier rétroactivement le mode de calcul de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne :
cette modification doit se faire « dans le respect des prescriptions de l'article R. 134-4 du code de l'aviation civile ». Cette précision ne peut s'entendre que comme imposant le respect des principes rappelés par la décision du Conseil d'Etat.
Ce dernier n'a en effet pas remis en cause la conformité de l'article R.
134-4 aux principes régissant les redevances pour services rendus. Il a simplement estimé que l'assiette de la redevance avait été déterminée, au cas particulier, en méconnaissance de ces principes.
Les mesures qui seront prises en application de l'article contesté permettront précisément d'y remédier.
On précisera enfin que les dépenses en cause sont bien certaines, clairement identifiables et chiffrables. Pour autant, il est normal que le budget annexe de l'aviation civile pour 1996 ne fasse pas apparaître en dépenses le montant des sommes à rembourser aux compagnies aériennes. En effet, compte tenu de la nécessité d'établir de nouvelles assiettes des redevances, ce qui conduit à mettre en place une nouvelle comptabilité analytique, les remboursements ne devraient intervenir qu'en 1997. Si les textes étaient cependant prêts dès 1996, le financement pourrait s'effectuer, en gestion, par arrêté du ministre des finances pris en vertu de l'article 21 de l'ordonnance organique.