2. Elaboration des textes : règles propres aux différentes catégories de textes
2.1. Règles propres à l'élaboration des projets de loi
2.1.1. Elaboration des projets de loi
2.1.1.1. Contenu des projets de loi.
Les projets de loi doivent correspondre à une véritable nécessité juridique et respecter strictement la Constitution et les principes issus de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Il convient à cette fin que les services élaborant un projet de loi étudient attentivement les questions de constitutionnalité que pourrait poser le texte et saisissent le secrétariat général du Gouvernement suffisamment à l'avance pour lui permettre de se livrer également à cette étude. Le cas échéant, les problèmes de constitutionnalité rencontrés au cours de l'élaboration du projet de loi pourront être exposés au Conseil d'Etat lors de l'examen du texte par celui-ci.
Les projets de loi ne doivent pas comporter de dispositions sans contenu normatif, se limitant à des déclarations de principe ou à la présentation de la philosophie du texte.
En effet, les lois ont pour objet d'autoriser, d'ordonner, d'interdire, de créer des droits et des obligations. Les raisons pour lesquelles elles sont soumises au Parlement, l'esprit dont elles procèdent, les objectifs qu'elles se fixent relèvent de l'exposé des motifs, des explications à fournir au Parlement et au public, voire des commentaires que les ministres responsables doivent en donner après leur promulgation, notamment dans les circulaires.
Les rédacteurs des projets doivent également observer la règle de l'économie des moyens. Elle doit les conduire à modifier les textes existants plutôt qu'en élaborer de nouveaux et à ne leur apporter que les modifications strictement nécessaires.
Sont à proscrire les renvois à des lois futures, ainsi que les dispositions pouvant s'analyser comme une injonction du Parlement au Gouvernement (cf. les décisions du Conseil constitutionnel no 76-73 DC du 29 décembre 1976 et no 78-102 DC du 17 janvier 1979).
2.1.1.2. Partage entre la loi et le règlement.
Il convient de veiller au strict respect du partage, imposé par la Constitution et précisé par la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du Conseil d'Etat, entre la loi et le règlement.
Certes, ce partage ne peut pas toujours s'établir de manière absolue et il est des cas dans lesquels l'intelligibilité d'un texte de loi rend inévitable l'insertion de certaines dispositions de nature réglementaire. Mais ces cas doivent rester exceptionnels.
Dès le début de la procédure d'élaboration d'une loi, il faut éviter que des dispositions de nature réglementaire figurent dans le projet.
Au surplus, la présence de dispositions réglementaires dans une loi est une source de rigidité inutile. Leur modification imposera en effet de ressaisir le Parlement, sauf à utiliser la procédure, elle-même assez lourde, du déclassement par le Conseil constitutionnel.
Il y a donc lieu de suivre l'avis du Conseil d'Etat lorsque celui-ci écarte d'un projet une disposition de nature réglementaire. Au cours du débat parlementaire, la même vigilance s'impose à l'égard des amendements : les ministres ne doivent pas hésiter à soulever l'irrecevabilité prévue par l'article 41 de la Constitution.
La procédure de l'article 41 est aisée à mettre en oeuvre. L'exception peut être soulevée pour une proposition de loi, dès son dépôt, et pour un amendement, tant qu'il n'a pas été soumis au vote. La décision concernant l'irrecevabilité est une prérogative personnelle du président de l'assemblée saisie. Il faut, cependant, rappeler que si le président ne se range pas au point de vue du Gouvernement, la décision est rendue par le Conseil constitutionnel, qui a huit jours pour se prononcer. En ce cas, la discussion du texte en cause est suspendue pendant ce délai.
2.1.1.3. Structure des textes.
Les auteurs des projets de loi doivent enfin s'astreindre à respecter certaines règles concernant la structure des textes.
Dans les domaines où une codification existe, il est impératif de ne pas la détruire en soumettant au Parlement des textes non codifiés. En conséquence, dans tous les cas où la matière traitée a fait l'objet d'une codification, le projet de loi doit se présenter sous forme d'une modification du code ou de l'insertion d'une partie nouvelle dans le code. Sans doute la lecture d'un projet qui modifie les articles d'un code est-elle malaisée, mais il faut avoir conscience de l'avantage que le rassemblement, en un seul document, de dispositions applicables à un même sujet procure au public.
Au stade du projet, il est utile qu'à l'exposé des motifs de la loi s'ajoute un exposé des motifs par article qui explique la portée des modifications ou des adjonctions introduites dans le code en vigueur.
En outre, la même matière ne doit pas être répartie entre plusieurs projets de loi : le législateur est ainsi mieux à même de percevoir la portée des dispositions qu'il prend.