I-1.3. Introduction sur la pertinence des marchés
L'article L. 37-1 du code des postes et des communications électroniques dispose que l'Autorité doit définir les marchés, « au regard notamment des obstacles au développement d'une concurrence effective ». Ainsi, pour qualifier un marché pertinent au regard de la régulation sectorielle, il convient de mener une analyse concurrentielle de ce marché.
En application des directives susvisées, la Commission européenne a publié les « lignes directrices » précitées, relatives au processus d'analyse de marché. Elle a également adopté sa recommandation « marchés pertinents » définissant une liste de 18 marchés susceptibles d'être pertinents pour une régulation sectorielle.
L'Autorité a tenu le plus grand compte de cette recommandation « marchés pertinents » et de ces « lignes directrices » dans l'élaboration de son analyse de marché.
Pour définir les marchés de la téléphonie fixe pouvant être considérés pertinents pour une régulation sectorielle, la recommandation « marchés pertinents » de la Commission s'appuie sur trois critères :
- la présence de barrières à l'entrée élevées et non provisoires ;
- l'absence d'évolution vers une situation de concurrence effective ;
- l'efficacité insuffisante du droit de la concurrence.
L'Autorité considère, conformément au paragraphe 36 des lignes directrices de la Commission susvisées, que, s'agissant d'un marché recensé par la Commission, il ne lui est pas nécessaire de démontrer à nouveau les éléments qui ont déjà été pris en compte par la Commission dans sa recommandation « marchés pertinents » et sur lesquels l'Autorité porte la même appréciation. La recommandation « marchés pertinents » précise en effet que ces critères doivent être réexaminés par les autorités réglementaires nationales lorsqu'elles recensent des « marchés qui ne figurent pas dans la recommandation ».
Toutefois, conformément à l'article L. 37-1, elle s'attachera, dans le cadre de la présente analyse, à démontrer les obstacles au développement de la concurrence.
I-2. Définition des marchés de détail
Tout d'abord, sont définies les prestations incluses dans les marchés de détail de la téléphonie fixe (I-2.1), puis ces marchés sont délimités géographiquement (I-2.2), et enfin ils sont considérés comme pertinents (I-2.3).
I-2.1. Définition des prestations incluses dans les marchés de détail
L'analyse de marché conduit à distinguer diverses catégories de service (I-2.1.1), en particulier les prestations d'accès (I-2.1.2) et les prestations de communications (I-2.1.3).
I-2.1.1. Périmètre des marchés de détail
L'analyse de marché conduit à considérer que les services mobiles ne sont pas substituables aux services fixes (a), que les services d'accès et de communications sont distincts (b), et que parmi chacun d'eux on distingue les services destinés à la clientèle résidentielle et ceux destinés à la clientèle professionnelle (c).
a) Les services mobiles ne sont pas substituables aux services fixes
Un accès mobile comporte une spécificité intrinsèque liée au fait même que l'utilisateur peut y avoir recours indépendamment de sa localisation ; cette fonctionnalité de mobilité conduit par nature à ce que l'utilisateur perçoive ces services comme différents des services « en position déterminée » (c'est-à-dire « fixes »). En outre, les réseaux mobiles reposent sur des technologies radio qui ne permettent pas de garantir une qualité de service uniforme sur le territoire couvert, ni permanente dans le temps. De plus, les technologies radio sont plus coûteuses que les technologies filaires. Les accès mobiles et les communications qui en dépendent ne sont donc pas substituables à leurs équivalents fixes.
On observe néanmoins des effets de substituabilité limités, ou porosités, entre les deux types de services. L'Autorité observe qu'un usager final pourra utiliser un accès mobile sur le lieu où il dispose de son accès fixe (la réciproque étant fausse par nature). Ces comportements, s'ils sont couramment observés, ne sont pas généralisables et découlent principalement des politiques de forfaits quasi-généralisées sur les réseaux mobiles, et du niveau relativement élevé du prix des communications depuis un poste fixe vers un mobile en comparaison de celui des communications d'un mobile vers un autre.
L'analyse des marchés de gros de la terminaison d'appel mobile menée par l'Autorité (9) a soulevé ce point et conclu à la non-substituabilité entre les appels entre postes fixes et les appels depuis un mobile. L'avis du Conseil de la concurrence (10) relatif à l'analyse des marchés de gros de la terminaison d'appel mobile a confirmé cette conclusion.
Cette séparation entre les marchés des services de téléphonie mobile et des services de téléphonie fixe correspond à celle que propose la Commission dans sa recommandation « marchés pertinents ».