II-A-2-i. Informations préalables
Afin de réaliser des choix pertinents en matière de déploiement et d'offre commerciale, les opérateurs clients des offres de dégroupage doivent avoir accès à différentes informations préalables. L'accès à ces informations est primordial, puisqu'il est nécessaire pour garantir l'effectivité des différentes prestations d'accès proposées par France Télécom sur le présent marché ; c'est un moyen associé à l'accès dégroupé au réseau proprement dit.
Ces informations peuvent être scindées en deux catégories.
Une première catégorie d'informations permet aux acteurs intéressés par l'offre de gros de France Télécom d'identifier les investissements qu'ils devront consentir pour pouvoir utiliser l'offre de France Télécom ainsi que la clientèle à laquelle ils auront accès selon leur architecture de raccordement. Cette catégorie d'informations doit être mentionnée à l'offre de référence publique, sauf si la publicité de ces données porte atteinte à la sécurité du réseau ; ce point sera traité au paragraphe II.C-1 sous la rubrique « publication d'informations préalables ».
Dans un deuxième temps, les opérateurs déjà clients de l'offre ont besoin d'informations plus fines, notamment pour adapter, en fonction des caractéristiques de la ligne du client final, l'offre technique et tarifaire qu'ils peuvent lui proposer. A ce titre, la fourniture, à tout opérateur ayant signé la convention d'accès à la boucle locale de France Télécom, a minima des informations suivantes, par accès unitaire, apparaît nécessaire :
- les codes du répartiteur et du sous-répartiteur ;
- les caractéristiques techniques de la ligne (longueur et calibre des tronçons, du répartiteur jusqu'au point de concentration) ;
- l'éligibilité au dégroupage en cas de demande d'activation d'un accès préexistant par tronçons.
A ce titre, France Télécom a mis en oeuvre un serveur d'éligibilité, commun avec ses propres offres de gros d'accès large bande.
Par ailleurs, les opérateurs ont aussi besoin d'informations liées à la cohabitation physique des équipements sur les différents sites (disponibilité de solutions de cohabitation sur un site donné, saturation d'un équipement sur un site donné...).
Une obligation de fourniture des informations préalables, notamment celles citées ci-dessus, apparaît comme proportionnée aux objectifs du code des postes et des communications électroniques ; notamment, elle est une condition sine qua non de l'effectivité des offres d'accès, et apparaît donc comme nécessaire pour préserver la concurrence à long terme, répondant ainsi notamment au critère de l'article L. 38-V c du code, et représente un investissement spécifique faible pour France Télécom. Elle est également proportionnée aux objectifs fixés à l'article L. 32-1 (II) du code des postes et des communications électroniques, en particulier les 2°, 3° et 4°. Enfin, elle constitue, au regard de la contrainte imposée à France Télécom au regard des objectifs poursuivis, le minimum nécessaire.
Au regard de ce qui précède, et sur le fondement de l'article L. 38-I (3°) du code qui permet à l'Autorité d'imposer à l'opérateur puissant l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des moyens associés, France Télécom devra donner accès sur le marché de gros de l'accès dégroupé aux informations préalables nécessaires à la mise en oeuvre effective de l'offre, en tant que ressource associée au dégroupage.
II-B. - Obligation de fournir l'accès dans des conditions non discriminatoires
II-B-1. Obligation générique
L'article L. 38-I (2°) du code des postes et des communications électroniques prévoit la possibilité d'imposer une obligation de non-discrimination à un opérateur réputé exercer une influence significative.
L'article D. 309 du code précise que les obligations de non-discrimination font notamment en sorte que « les opérateurs appliquent des conditions équivalentes dans des circonstances équivalentes aux autres opérateurs fournissant des services équivalents, et qu'ils fournissent aux autres des services et informations dans les mêmes conditions et avec la même qualité que ceux qu'ils assurent pour leurs propres services, ou pour ceux de leurs filiales ou partenaires ».
Le principe de non-discrimination s'oppose ainsi notamment à ce que, au plan tarifaire, France Télécom valorise différemment les mêmes éléments de son réseau, ou utilise des règles d'allocation des coûts distincts, pour les prestations utilisées en interne et celles proposées sur les marchés de gros. Il s'oppose en particulier à ce que les offres de gros de France Télécom soient dimensionnées de sorte qu'elles ne soient accessibles aux conditions les plus avantageuses que pour ses propres services ou filiales. Au plan technique, il porte notamment sur la qualité de service des offres, leur richesse fonctionnelle, ainsi que la fourniture d'informations préalables à l'utilisation de ces offres d'accès.
De la même façon, un traitement discriminatoire d'opérateurs situés dans des situations équivalentes aurait pour conséquence d'affaiblir la dynamique concurrentielle sur le marché de détail, en favorisant artificiellement telle ou telle situation ou choix stratégique.
France Télécom est un opérateur verticalement intégré, actif sur les marchés du dégroupage et sur les marchés de gros aval des offres régionales et nationales d'accès large bande. Il est aussi présent à travers sa filiale Transpac, notamment, sur le marché de détail de l'accès large bande pour le segment « entreprises », et à travers les marques France Télécom et Wanadoo sur le segment « grand public ».
La réintégration de Wanadoo au sein de France Télécom en 2004 est venue renforcer ce phénomène d'intégration verticale, en changeant notamment le mode d'approvisionnement de Wanadoo, qui auparavant utilisait les mêmes contrats de gros que les fournisseurs d'accès à Internet (FAI) alternatifs et utilise désormais des prestations internes à France Télécom.
Or, en tant qu'opérateur verticalement intégré, France Télécom utilise les mêmes ressources amont pour produire, d'une part, ses propres offres de détail et, d'autre part, les offres de gros destinées à ses concurrents pour construire leurs offres de détail.
Dans ces conditions et en l'absence d'une obligation de non-discrimination, France Télécom pourrait être incitée à offrir à ses concurrents des conditions techniques ou tarifaires moins avantageuses que celles qu'elle s'accorde à elle-même, à ses filiales ou à ses partenaires, afin de renforcer sa position sur les marchés de détail, ce qui aurait pour effet de limiter artificiellement le développement de la concurrence sur ces marchés.
Il apparaît en conséquence nécessaire, sur le fondement de l'article D. 309 précité du code, d'imposer à France Télécom de fournir l'accès sur le marché du dégroupage de la boucle cuivre et sous boucle cuivre dans des conditions non discriminatoires.
Cette obligation ne saurait être considérée comme disproportionnée dans la mesure où elle constitue le minimum nécessaire permettant d'atteindre les objectifs visés à l'article L. 32-1 (II) du code et en particulier à ceux visant à garantir « l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques » et « l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des opérateurs ».
II-B-2. Précision de l'obligation
II-B-2-a. Processus opérationnels liés au dégroupage
Afin de garantir le bon fonctionnement du dégroupage, France Télécom doit veiller à ce que les processus opérationnels mis en place dans le cadre du dégroupage ne fassent pas peser sur les opérateurs des charges ou des contraintes indues qui les pénaliseraient par rapport aux autres offres de gros et de détail de France Télécom.
Au regard de l'article D. 309 du code, l'Autorité considère comme proportionné que France Télécom mutualise au maximum les prestations vendues aux opérateurs dans le cadre du dégroupage avec celles qu'elle utilise pour ses autres offres, de gros et de détail, et proscrive les processus faisant peser des contraintes indues sur les opérateurs, notamment au regard des processus existant pour ses offres aval.
Le mandat de dégroupage, notamment, devra adopter une forme aussi peu contraignante que possible tout en assurant la protection du consommateur.
A ce titre, il convient de rappeler que le Conseil de la concurrence, dans un avis n° 2004-A-01 du 8 janvier 2004 relatif à une demande d'avis de l'AFORS sur les principes généraux des relations contractuelles entre les utilisateurs et les différents acteurs du dégroupage, avait précisé que ce mandat doit en particulier être rédigé de façon à ne pas comprendre des conditions de transfert d'un abonné de l'opérateur historique à un opérateur concurrent, rendues plus difficile que celles d'un retour à l'opérateur historique, ni imposer d'obligations indues aux abonnés au regard des conditions de la ligne et ne contenir que des dispositions strictement nécessaires à l'information des acteurs concernés (cf. § 47 et suivants de l'avis du Conseil de la concurrence).
II-B-2-b. Introduction de nouvelles technologies
L'introduction de nouvelles technologies à la boucle locale ou à la sous-boucle peut venir perturber le fonctionnement des systèmes déjà en place, voire restreindre le développement de futures technologies, en cours de normalisation, qui semblent prometteuses.
Suite à la décision n° 2002-752 de l'Autorité du 19 septembre 2002 portant constitution d'un comité d'experts pour l'introduction de nouvelles techniques sur la boucle locale, un comité d'experts, composé de France Télécom, des opérateurs alternatifs ayant signé la convention de dégroupage et d'industriels du secteur, est chargé d'émettre un avis sur les questions techniques relatives à l'introduction de nouvelles technologies à la boucle locale et à la sous-boucle. Il procède successivement à des simulations théoriques, à des tests en réseau captif puis éventuellement à des expérimentations sur le terrain.
Au regard de l'article D. 309 du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité considère comme justifié et proportionné, au regard de l'objectif d'égalité des conditions de concurrence, de ne pas permettre à France Télécom d'utiliser pour son compte propre, dans un objectif commercial et hors expérimentation, des technologies à la boucle locale ou à la sous-boucle dont elle interdirait l'usage aux opérateurs ayant recours au dégroupage.
A ce titre, il convient de rappeler que le Conseil de la concurrence, dans un avis n° 2004-A-01 du 8 janvier 2004 susmentionné, avait précisé que « toutefois, compte tenu du caractère évolutif des services rendus dans le cadre du dégroupage de la boucle locale et dans l'hypothèse où ces services nécessiteraient la mise en place d'équipements dans des emplacements situés dans une relative proximité des utilisateurs finaux, il est utile de préciser que l'offre de référence ne devrait pas permettre à France Télécom de refuser aux opérateurs l'installation d'équipements qu'il s'autorise à lui-même ou à ses filiales, afin que les utilisateurs finaux puissent disposer du libre choix de leurs prestataires ».
II-C. - Obligation de publication d'informations concernant l'accès
Conformément au 1° de l'article L. 38-I du code des postes et des communications électroniques, les opérateurs réputés exercer une influence significative sur le marché peuvent se voir imposer l'obligation de « rendre publiques des informations concernant l'interconnexion ou l'accès, notamment publier une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion ou d'accès lorsqu'ils sont soumis à des obligations de non-discrimination ; l'Autorité de régulation des télécommunications peut imposer, à tout moment, des modifications à une telle offre pour la mettre en conformité avec les dispositions du présent code. L'opérateur communique à cette fin à l'Autorité de régulation des télécommunications toute information nécessaire ».
II-C-1. Publication d'informations préalables
Afin de réaliser des choix pertinents en matière de déploiement et d'offre commerciale, les acteurs, notamment les opérateurs ou les investisseurs, intéressés par l'offre de dégroupage de France Télécom, doivent être informés des investissements qu'ils devront consentir pour pouvoir utiliser cette offre, des points de raccordement au réseau de France Télécom correspondant et des zones de clientèle auxquelles ils auront accès grâce à cette offre.
Ce type d'informations est nécessaire pour tout acteur souhaitant établir un plan d'affaires et élaborer une stratégie reposant sur l'utilisation d'une offre de gros d'accès large bande de France Télécom.
Dès lors que ces renseignements ne révèlent pas de données stratégiques et que leur mise à disposition ne porte pas atteinte à la sécurité des réseaux, la publicité de ces informations permet d'améliorer la visibilité de l'offre à l'attention d'un plus grand nombre d'opérateurs et d'investisseurs.
Il apparaît d'ores et déjà indispensable à ce titre que France Télécom publie dans son offre de référence la liste des répartiteurs, avec leur nombre de lignes et leur commune de rattachement, dont la publicité ne porte pas atteinte à la sécurité des réseaux.
L'adresse des répartiteurs, dont la diffusion peut porter atteinte à la sécurité et à l'intégrité du réseau de France Télécom, pourra quant à elle ne pas être publique et n'être communiquée qu'au cas par cas aux opérateurs intéressés.
Dans ces conditions, sur le fondement de l'article D. 307-I du code et notamment des dispositions qui prévoient la publication des « spécifications techniques des prestations (...) d'accès » et des « caractéristiques du réseau », il est nécessaire d'imposer à France Télécom l'obligation de publier les informations préalables susmentionnées. Au regard des objectifs visant à permettre le développement d'une concurrence effective et loyale, la proportionnalité de cette obligation est vérifiée en ce qu'elle constitue le minimum nécessaire qui doive être imposé à France Télécom pour les atteindre.
II-C-2. Publication d'une offre technique et tarifaire d'accès
II-C-2-a. Obligation générique
Conformément à l'article D. 308 du code des postes et des communications électroniques, « lorsqu'un opérateur est tenu de faire droit aux demandes raisonnables d'accès à la boucle locale à paire torsadée métallique en application de l'article D. 310, il publie une offre technique et tarifaire pour l'accès à la boucle locale. Cette offre contient une description des prestations liées à l'accès à la boucle locale ainsi que des modalités, conditions et prix qui y sont associés. Elle inclut en outre les prestations associées à l'accès à la boucle locale, notamment la fourniture des informations nécessaires à sa mise en oeuvre, une offre de colocalisation des équipements ».
L'existence et la publication d'une offre de référence répond à plusieurs objectifs : elle pallie la faiblesse du pouvoir de négociation bilatérale des opérateurs clients de l'offre avec France Télécom, elle permet d'assurer la non-discrimination dans le traitement des opérateurs alternatifs, elle apporte de la visibilité et de la stabilité aux opérateurs dans l'élaboration de leurs plans de développement, enfin elle permet de découpler les prestations de sorte qu'un opérateur n'a à payer que ce dont il a besoin.
Sur le marché de l'accès dégroupé à la boucle locale, la conjonction de la puissance de France Télécom, de l'absence de réplicabilité de la boucle locale cuivre, de l'intégration verticale de l'opérateur historique et de son rôle sur les marchés en aval rend peu probable le fait que les opérateurs dégroupeurs, concurrents de France Télécom sur les marchés en aval, disposent d'un pouvoir de négociation suffisant pour obtenir une offre adaptée sur ce marché. L'existence d'une offre de référence que l'Autorité a le pouvoir de modifier facilite les négociations bilatérales et limite les litiges entre les opérateurs et France Télécom.
Par ailleurs, pour les opérateurs ayant recours au dégroupage, les reversements directs à France Télécom représentent une proportion importante de leur chiffre d'affaires, et apparaissent donc comme déterminants dans leur budget. Les opérateurs alternatifs ont donc besoin, lors de l'élaboration de leurs plans d'affaires et de leurs stratégies techniques et commerciales, de disposer d'une bonne visibilité sur les conditions techniques et tarifaires proposées par France Télécom.
Enfin, le recours à une offre de référence publique permet d'assurer un traitement non discriminatoire entre les différents opérateurs clients de l'offre.
Ainsi, en application des dispositions de l'article D. 308 du code des postes et des communications électroniques, la société France Télécom doit publier une offre de référence technique et tarifaire détaillant les offres relevant du marché de gros de l'accès dégroupé à la boucle et à la sous-boucle locale.
L'Autorité considère que cette obligation constitue une garantie en vue d'assurer, notamment, l'égalité des conditions de la concurrence sur le marché considéré. Elle est proportionnée aux objectifs de l'article L. 32-1 II du code et en particulier aux 3°, 4° et 9°, en ce qu'elle constitue le minimum nécessaire qui doive être imposé à France Télécom pour les atteindre.
II-C-2-b. Eléments de l'offre de référence
Conformément à l'article D. 308 précité, cette offre doit contenir « une description des prestations liées à l'accès à la boucle locale ainsi que des modalités, conditions et prix qui y sont associés. Elle inclut en outre les prestations associées à l'accès à la boucle locale, notamment la fourniture des informations nécessaires à sa mise en oeuvre, une offre de colocalisation des équipements. » Elle doit notamment comporter au minimum les éléments listés à ce même article.
A la suite de l'analyse menée dans la présente décision, et conformément à la liste prévue à l'article D. 308 du code, l'annexe à la présente décision recense les éléments que devra comporter a minima l'offre de référence. Cette liste recense les prestations que l'offre de référence devra proposer, ainsi que les éléments qu'elle devra préciser pour donner aux opérateurs une visibilité suffisante : les modalités financières, techniques et opérationnelles de recours à l'offre de dégroupage et aux ressources connexes. Outre les conditions contractuelles type relatives aux tarifs, aux conditions de souscription, aux modalités d'accès à l'offre, l'offre de référence de France Télécom devra ainsi inclure au minimum les prestations d'accès détaillées ainsi que les informations répondant à l'obligation de transparence et de non-discrimination définies dans la présente décision.
Il incombe ainsi notamment à France Télécom de préciser l'ensemble des tarifs, en vertu de l'article D. 308 du code. Par conséquent, tous les tarifs doivent être effectivement inscrits dans l'offre de référence et non uniquement dans la convention de dégroupage conclue entre l'opérateur et France Télécom. En outre, il importe que les tarifs « sur devis » ne soient envisagés qu'à titre exceptionnel. Le cas échéant, il reviendra à France Télécom de justifier des contraintes l'empêchant d'établir un tarif fixé à l'avance dans l'offre de référence.
II-C-2-c. Evolution de l'offre de référence
France Télécom est amenée à faire évoluer au cours du temps son offre de référence pour le dégroupage. Une évolution unilatérale sans concertation préalable risque cependant de s'avérer préjudiciable pour le secteur. Elle peut en effet, sur le plan tarifaire, remettre en question la politique commerciale d'un opérateur ou, sur le plan technique, impacter le plan de déploiement d'un opérateur et nécessiter des adaptations techniques longues à mettre en oeuvre. Il est donc nécessaire que France Télécom publie avec un préavis suffisant toute évolution de l'offre de référence.
Ce préavis doit permettre à l'Autorité de s'assurer, le cas échéant, du respect des obligations portant sur les conditions tarifaires et techniques de l'offre. Il a aussi pour fin de permettre à l'ensemble du secteur de répercuter ces évolutions sur les prix de détail dès leur application, de mettre en oeuvre les solutions techniques correspondantes et, le cas échéant, d'adapter leurs processus opérationnels. Au regard des délais de mise en oeuvre des politiques de marketing, et des délais de commande et de mise en place d'équipements techniques, un préavis de trois mois paraît adapté pour que les opérateurs soient en mesure d'utiliser effectivement les nouvelles modalités d'une offre de gros.
Ainsi, sur le fondement des dispositions de l'article D. 307-III du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité considère qu'au regard du fonctionnement actuel du marché une durée de trois mois de préavis est adaptée au respect des objectifs d'égalité des conditions de la concurrence, sans pour autant représenter une charge excessive pour France Télécom.
Lorsque ces évolutions contraignent l'opérateur alternatif à modifier ou à adapter ses propres installations, France Télécom devra respecter un délai de un an conformément aux dispositions de l'article D. 99-7 du code des postes et des communications électroniques.
L'obligation de publication avec préavis s'entend sauf décision contraire de l'Autorité. Certains cas particuliers peuvent en effet nécessiter une mise en oeuvre immédiate des évolutions de l'offre. Ce cas peut notamment se rencontrer à la suite d'une décision de règlement de litige ou d'une décision de modification de l'offre de référence.
Notamment, s'agissant de la première offre de référence publiée conformément à la présente décision, il n'y a pas lieu d'observer le préavis de trois mois susmentionné entre sa publication et son entrée en vigueur, et ce afin d'assurer au secteur une mise en oeuvre des obligations telles que détaillées dans la présente décision aussi rapide que possible.
Il apparaît cependant raisonnable de laisser à France Télécom un délai d'un mois à compter de l'entrée en vigueur de la présente décision pour publier une offre de référence qui y soit conforme. Ce délai d'un mois apparaît suffisant au regard du fait qu'une offre pré-existait dans l'ancien cadre, et que France Télécom a pris connaissance des obligations qu'il était envisagé de lui appliquer durant le processus d'analyse des marchés et de consultation du secteur, en amont de l'entrée en vigueur de la présente décision.
II-C-2-d. Transmission des conventions
En vertu de l'article D. 307-I du code, l'Autorité peut imposer, au titre de l'obligation de transparence, à tout opérateur exerçant une influence significative sur un marché pertinent la communication, dès leur conclusion, des conventions d'interconnexion et d'accès.
La publication d'une offre de référence ne s'oppose pas à ce que France Télécom négocie des conditions d'accès qui n'auraient pas été prévues initialement par l'offre, lesquelles doivent être signalées en tant que telles dans la convention.
Toutefois, par référence aux objectifs posés par l'article L. 32-1 du code, l'Autorité doit être en mesure de vérifier qu'aucun opérateur ne fait l'objet d'un traitement discriminatoire tout en veillant parallèlement à ce que le contenu de l'offre de référence réponde de manière satisfaisante aux besoins des opérateurs et à la réalité du marché. En outre, l'obligation de transmission des conventions, à compter de leur signature, est un outil qui permet à l'Autorité d'accroître au cas d'espèce l'efficacité de son action pour promouvoir le développement et l'équilibre des conditions de la concurrence.
Ainsi, eu égard aux spécificités du marché objet de la présente décision, et afin de permettre la réalisation des objectifs de concurrence effective et loyale dans des conditions de non-discrimination, l'Autorité impose à France Télécom de lui transmettre, dans le délai de dix jours suivant leur signature, les conventions d'accès à la boucle locale et les avenants y afférant.
Par ailleurs, conformément à l'article D. 99-6 du code des postes et des communications électroniques, l'Autorité pourra décider de communiquer à la demande d'un tiers intéressé, tout ou partie du texte de la convention, sous réserve des informations couvertes par le secret des affaires.
II-D. - Qualité de service du dégroupage
Conformément à ses missions qui résultent des objectifs fixés dans les dispositions de l'article L. 32-1 du code, l'Autorité est particulièrement attachée à ce que le développement de la concurrence sur les marchés de gros du haut débit améliore l'attractivité des offres de détail, en maintenant notamment une qualité de service élevée dans l'intérêt des consommateurs.
La capacité qu'ont les opérateurs alternatifs de proposer à leurs clients des niveaux de qualité de service satisfaisants (délai de livraison, délai de réparation en cas de panne...) est un paramètre déterminant pour l'établissement d'une concurrence durable sur les marchés de détail, dans le respect des intérêts du consommateur.
Notamment, la bonne qualité de service des offres influe fortement sur la réputation des opérateurs. Sur le marché résidentiel, la réputation du FAI est le deuxième critère cité comme étant déterminant dans le choix des consommateurs (c'est le premier critère de choix pour 25 % des consommateurs) (7) ; cet effet « réputation » joue aussi à travers le conseil des proches, qui est déterminant pour 16 % des consommateurs (8).
Sur le marché professionnel, la qualité de service et la réputation de l'opérateur sont les premiers critères lors du choix d'un opérateur (9), avant toute considération tarifaire. En outre, les offres de détail proposées sur ce marché prévoient généralement des engagements explicites en termes de qualité de service, tels que des délais maximum de temps de rétablissement.
Si la qualité de service des offres aval commercialisées par les opérateurs alternatifs dépend de la qualité de leurs propres prestations, elle est également fonction de la qualité des offres de gros achetées auprès de France Télécom à partir desquelles elles sont construites.
Dans ces circonstances, les opérateurs alternatifs ont des besoins légitimes en termes de qualité de service qui peuvent être résumés par les deux points suivants :
- les niveaux de qualité de service (délais de livraison, de réparation, taux de panne, délai de fourniture d'informations, etc.) annoncés dans les offres de gros doivent être compatibles avec les niveaux de qualité pratiqués, en particulier par France Télécom, sur les marchés de détail - cet objectif correspond notamment à l'obligation de non-discrimination à laquelle est soumise France Télécom ;
- les niveaux de qualité annoncés dans les offres de gros doivent être respectés par France Télécom, afin que les opérateurs alternatifs aient suffisamment de visibilité et puissent s'engager eux-mêmes sur des niveaux de service auprès de leurs clients.
Or, l'historique des marchés de gros du haut débit a mis en évidence que ces deux conditions au développement de la concurrence sur les marchés aval n'étaient pas remplies sans la mise en place de mécanismes spécifiques. Notamment, l'exemple du dégroupage a montré que la simple inscription à l'offre de référence de délais maximaux pour la livraison ou le rétablissement des paires n'était pas suffisant pour garantir leur respect. De plus, comme l'Autorité l'a rappelé dans différents avis (10), la qualité de service du dégroupage n'est toujours pas alignée sur les niveaux de qualité prévalant pour d'autres offres de France Télécom.
Dans ces conditions, l'Autorité estime qu'un dispositif de régulation en deux volets est nécessaire pour assurer que les conditions, en termes de qualité de service, du développement d'une concurrence loyale soient réunies.