4.1.5. Prise en compte de l'avis du Conseil de la concurrence
sur l'examen des trois critères et la pertinence des marchés
4.1.5.1. Avis du Conseil de la concurrence
Sur le respect des trois critères définis par la Commission européenne, le Conseil de la concurrence rappelle dans son avis du 10 mars 2006 précité (§ 26) que « l'inscription de marchés pertinents sur la liste des marchés régulables au titre de l'application des articles L. 38, L. 38-1 et L. 38-2 du CPCE ne se justifie que si trois critères cumulatifs sont remplis : l'existence de barrières à l'entrée et d'entraves au développement de la concurrence, l'absence de dynamisme de la concurrence, enfin l'insuffisance du droit de la concurrence pour remédier à ces obstacles ».
S'agissant du premier critère, le Conseil de la concurrence indique (§ 27) que « en l'espèce, les barrières à l'entrée sur les marchés de la terminaison SMS sont très fortes : le nombre limité de licences GSM et UMTS conjugué au coût considérable du développement d'un réseau rend peu probable le déploiement d'un nouveau réseau de téléphonie mobile en métropole ».
S'agissant du second critère, le Conseil de la concurrence constate (§ 27 et § 28) que « seule l'émergence de Full MVNO (MVNO étendus disposant de tous les éléments de réseaux) permettrait d'animer la concurrence sur le marché de gros de la terminaison SMS » et que « l'absence de pression concurrentielle sur le niveau de la terminaison SMS explique que celle-ci soit restée stable pendant près de six années : seule l'intervention de l'ARCEP a provoqué une baisse en novembre 2005 ».
Enfin, s'agissant du troisième critère, le Conseil de la concurrence souligne (§ 28) que « la terminaison SMS pourrait être analysée, du point de vue du droit de la concurrence, comme une charge d'accès à une infrastructure essentielle, devant répondre à des conditions de transparence, d'objectivité et de non-discrimination, et permettre l'exercice d'une concurrence effective sur les marchés de détail, sans effet de ciseau tarifaire. Toutefois, la position de monopole des trois opérateurs sur les marchés concernés ainsi que le rôle différencié joué par les ressources correspondantes dans l'équilibre financier de chaque opérateur peuvent justifier une régulation plus précise de ces tarifs, à même d'assurer que ne soit pas affaiblie la position d'un acteur en particulier, et notamment celui qui dispose de la part de marché la plus faible ».
4.1.5.2. Commentaires de l'Autorité
L'Autorité note que le Conseil de la concurrence a clairement confirmé dans son avis que les trois critères utilisés par la Commission européenne pour la définition des marchés pertinents étaient bien remplis en l'espèce.
4.1.6. Commentaires des autorités réglementaires nationales et de la Commission européenne
Aucune autorité réglementaire nationale n'a transmis d'observation à l'Autorité.
La Commission européenne n'a pas transmis d'observation à l'Autorité sur cette partie de l'analyse ; elle a ainsi validé la création de ce nouveau marché pertinent pour une régulation ex ante.
4.2. Obligations
4.2.1. Périmètre des obligations
Conformément à l'article 16 de la directive « cadre » et à l'article D. 303 du CPCE, l'Autorité doit imposer au moins une obligation à un opérateur disposant d'une influence significative sur un marché pertinent. Néanmoins, une obligation peut n'être imposée que sur une partie des prestations offertes par cet opérateur sur le marché identifié.
Cette possibilité a déjà été reconnue par la Commission européenne dans ses lettres de commentaire dans le cadre de la procédure de notification des analyses de marchés, notamment en ce qui concerne les marchés de détail de la téléphonie fixe notifiés par l'Autorité (cf. lettre de la Commission européenne du 14 septembre 2005, cas FR/2005/0221 à 226).
Au cas d'espèce, les obligations imposées par la présente décision ne visent pas l'ensemble des prestations faisant partie des marchés de gros de la terminaison d'appel SMS, tels que délimités au 2.5, mais les prestations d'accès et d'interconnexion relatives aux seules offres d'interconnexion SMS, à l'exclusion des offres de SMS Push.
Dans une analyse prospective, l'Autorité considère en effet que les agrégateurs, les FAI et les opérateurs de téléphonie fixe enverront des SMS sur les réseaux mobiles via l'interconnexion et non par le biais des offres de SMS Push, comme c'est le cas actuellement (cf. 1.6). Lors de la phase de négociation des modalités d'interconnexion avec Orange France, SFR et Bouygues Telecom, les tarifs de terminaison d'appel SMS pratiqués par les opérateurs mobiles pour les prestations d'interconnexion SMS constitueront un élément de référence pour la négociation des tarifs d'une prestation d'interconnexion qui pourra ouvrir une architecture distincte, pour un exploitant de réseau tiers non mobile.
En outre, la régulation des offres d'interconnexion SMS est susceptible de bénéficier aux acheteurs d'offres SMS Push (comme les éditeurs par exemple), dans la mesure où les niveaux des tarifs relatifs aux offres d'interconnexion SMS, en particulier celui de la TA SMS, constitueront un élément de référence pertinent pour la fixation des prix des services SMS Push.
L'Autorité rappelle qu'elle dispose de la possibilité, si les évolutions du marché le justifient, d'anticiper une nouvelle analyse de marché avant le terme de la présente décision.
4.2.2. Obligation d'accès et d'interconnexion
L'article L. 38 (I, 3°) du CPCE et l'article 12 de la directive « accès » prévoient que l'Autorité peut imposer des obligations d'accès à un opérateur disposant d'une influence significative.
Afin de permettre l'interopérabilité des services et des investissements efficaces au titre de l'interconnexion ou de l'accès et compte tenu de la position monopolistique de chaque opérateur mobile sur le marché, l'Autorité estime nécessaire d'imposer à chaque opérateur mobile une obligation de faire droit à toute demande raisonnable d'interconnexion et d'accès relatives aux offres d'interconnexion SMS, à des fins de terminer du trafic SMS à destination des clients d'Orange France, de SFR et de Bouygues Telecom (ou de MVNO utilisant leur réseau respectif) conformément à l'article D. 310 (1°) du CPCE. Tout refus d'une de ces sociétés de fournir ces prestations doit être dûment motivé.
L'Autorité constate que ces trois opérateurs font déjà droit à ce type de demande. Elle ne constitue donc pas une obligation disproportionnée pour eux.
Il est également nécessaire et proportionné, au regard notamment de l'objectif de développement efficace dans les infrastructures et de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du code précité, que les conditions techniques et tarifaires des prestations d'accès fournies par chacun des opérateurs mobiles soient suffisamment détaillées pour faire apparaître les divers éléments propres à répondre à la demande, et qu'ils ne subordonnent pas l'octroi d'une prestation d'accès ou d'interconnexion relative aux offres d'interconnexion SMS à la fourniture de services, de moyens ou de toute autre ressource, afin de ne pas conduire les acteurs à payer pour des prestations qui ne leur seraient pas nécessaires.
En outre, l'Autorité estime également nécessaire que, face à une demande relative aux prestations des marchés pertinents précités, ou aux prestations qui leur sont associées, ces trois opérateurs puissants négocient de bonne foi avec l'exploitant de réseau ouvert au public qui demande la fourniture de prestations, conformément à l'article D. 310 (2°) afin, d'une part, de minimiser les cas de litige, et, d'autre part, de ne pas profiter de l'influence significative qu'ils exercent sur ces marchés pour « durcir » les négociations avec les opérateurs. Enfin, compte tenu des investissements réalisés par les acteurs qui demandent l'interconnexion, il est également justifié que ces trois opérateurs puissants soient soumis à l'obligation de ne pas retirer un accès déjà accordé, ou une prestation déjà fournie, sauf accord préalable de l'Autorité ou de l'exploitant de réseau ouvert au public tiers concerné.
Compte tenu de l'impossibilité pour un opérateur souhaitant terminer un SMS sur le réseau de déployer ses propres infrastructures, ces obligations d'accès et d'interconnexion relatives aux offres d'interconnexion SMS sont justifiées et proportionnées, notamment au regard de l'objectif fixé à l'article L. 32-1 (II) du CPCE visant à définir des « conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence ».
4.2.3. Obligation de non-discrimination
L'article L. 38 (I, 2°) du CPCE et l'article 10 de la directive « accès » prévoient la possibilité d'imposer une obligation de non-discrimination.
Les obligations de non-discrimination font notamment en sorte que les opérateurs appliquent des conditions équivalentes dans des circonstances équivalentes aux opérateurs tiers, et qu'ils fournissent à ces opérateurs des services et informations dans les mêmes conditions et avec la même qualité que ceux qu'ils assurent pour leurs propres services, ou pour ceux de leurs filiales ou partenaires.
Comme le précise le considérant 17 de la directive « accès », l'application d'une obligation de non-discrimination permet de garantir que les entreprises puissantes sur un marché de gros ne faussent pas la concurrence sur les marchés de détail avals, notamment lorsqu'il s'agit d'entreprises intégrées verticalement qui fournissent des services à des entreprises avec lesquelles elles sont en concurrence sur des marchés en aval.
La grande technicité des prestations d'interconnexion ou d'accès rend aisée pour un opérateur puissant l'offre de conditions techniques et tarifaires différentes pour ses différents clients, ses partenaires et ses propres services.
Des conditions techniques et tarifaires discriminatoires sur le marché de gros seraient préjudiciables à la concurrence sur les marchés de détail faisant intervenir de la terminaison SMS.
L'obligation de non-discrimination vise notamment dans ce cas à éviter que les opérateurs mobiles n'augmentent leurs charges ou ne dégradent la qualité de service vis-à-vis d'opérateurs acheteurs d'offres d'interconnexion SMS dont le pouvoir de négociation serait limité ou inexistant, ou qu'ils n'avantagent leurs partenaires ou leurs filiales en concurrence avec les autres acheteurs d'offres d'interconnexion SMS. De telles pratiques auraient pour effet de fausser le jeu de la concurrence entre les opérateurs sur les marchés de détail.
Il est donc justifié et proportionné d'imposer une obligation de non-discrimination, d'une part, entre clients et, d'autre part, entre clients et services internes, notamment au regard de l'objectif visant à garantir « l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques ».
Ainsi, un opérateur puissant n'est pas autorisé à pratiquer des conditions artificiellement différenciées, notamment lorsque la prestation d'interconnexion fournie est comparable, et ce quel que soit le type d'acheteur (opérateurs mobiles tiers, agrégateurs, etc.) ou la provenance du SMS (métropole, outre-mer, international). Cette obligation n'exclut toutefois pas la possibilité, pour un opérateur, de différencier ses prestations en fonction de critères objectifs, notamment d'ordre technique, liés à la nature des réseaux.
4.2.4. Obligation de transparence
L'article 9 de la directive « accès » relatif aux obligations de transparence et l'article L. 38 (I, 1°) du CPCE prévoient que l'Autorité peut demander à un opérateur disposant d'une influence significative de rendre publiques certaines informations relatives à l'interconnexion et à l'accès.
S'agissant des conventions d'interconnexion ou d'accès, l'article L. 34-8 du CPCE prévoit que toute convention doit être transmise à l'ARCEP à sa demande. Afin de donner la pleine mesure à cette disposition, et d'être en mesure de vérifier le respect de l'obligation de non-discrimination, l'Autorité estime nécessaire d'imposer une obligation d'informer l'Autorité de la signature d'une nouvelle convention d'interconnexion ou d'accès, ou d'un avenant à une convention existante, dans un délai de sept jours à compter de la signature du document.
L'analyse de la situation conduit en revanche l'Autorité à considérer que, en l'état actuel du marché, il n'est pas nécessaire d'imposer la publication d'une offre de référence aux opérateurs mobiles. En effet, et conformément à l'article D. 307-III du CPCE, il est justifié et proportionné que les opérateurs publient sur leur site Internet leurs principaux tarifs relatifs aux offres d'interconnexion SMS, en respectant des délais de préavis raisonnables.
L'imposition de telles obligations pour les prestations relatives aux offres d'interconnexion SMS permet ainsi d'assurer le respect de l'obligation de non-discrimination ou, en tout état de cause, de dissuader les opérateurs mobiles de mettre en oeuvre des pratiques discriminatoires.
Ces obligations doivent en outre permettre de faciliter les négociations en vue de la mise en oeuvre de l'interconnexion.
Ces obligations paraissent justifiées et proportionnées, notamment au regard de l'objectif visant à garantir « l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques ».
4.2.5. Obligation de contrôle tarifaire
4.2.5.1. Tarifs de gros reflétant les coûts correspondants
L'article 13 de la directive « accès » et l'article L. 38 (4°) du CPCE prévoient que l'Autorité peut imposer « de ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants ».
Chacun des trois opérateurs mobiles métropolitains dispose d'une position durable de puissance sur leur marché correspondant, compte tenu de leur position monopolistique vis-à-vis de leurs clients (ou ceux des MVNO utilisant leur réseau).
L'analyse de la puissance sur ces marchés a montré que ces prestations sont incontournables pour l'ensemble des opérateurs de communications électroniques souhaitant développer un service SMS, qui ne disposent dès lors d'aucun contre-pouvoir sur la latitude de fixation des tarifs dont disposent les trois opérateurs mobiles. En outre, le Conseil de la concurrence a également qualifié ces prestations de facilités essentielles.
L'Autorité note que l'absence d'obligation de reflet des coûts permet à Orange France, SFR et Bouygues Telecom de bénéficier d'une rente liée à leur position monopolistique, ce qui soulève de nombreux problèmes concurrentiels (cf. section 4.1.1) et entrave notamment l'exercice d'une concurrence effective sur les prix de détail du SMS interpersonnel.
L'Autorité estime donc que les tarifs des prestations relatives aux offres d'interconnexion SMS doivent refléter les coûts. Les coûts considérés recouvrent, comme pour la terminaison d'appel vocal, les seuls coûts de réseau liés à la terminaison d'appel SMS, augmentés d'une contribution équitable aux coûts communs de l'opérateur, à l'exclusion, en particulier, des charges liées à une activité commerciale autre que celles spécifiques à l'interconnexion SMS.
En l'absence de mesure moins contraignante qui permettrait de prévenir toute distorsion de concurrence, cette obligation est proportionnée aux objectifs de l'article L. 32-1 (II) du CPCE et en particulier à l'exercice « d'une concurrence effective et loyale », au développement de la compétitivité ou encore à « l'égalité des conditions de concurrence ».
L'Autorité comprend toutefois que si le niveau de la TA SMS devait atteindre un niveau très bas, proche de la gratuité, il s'ensuivrait un risque élevé de messages non sollicités. Des acteurs mal intentionnés pourraient en effet profiter d'un prix modique de SMS Push pour rentabiliser des campagnes de marketing direct massives et non ciblées, au mépris du principe selon lequel un client ne peut recevoir de message de ce type sans en avoir donné l'autorisation expresse (opt-in). En particulier, il n'est pas certain que les agrégateurs de SMS soient en mesure d'opérer un contrôle a priori sur leurs partenaires ou clients de façon à prévenir ce type de pratiques.
La prise en compte du risque de spam, c'est-à-dire l'envoi massif de messages vers des numéros générés de manière aléatoire, dans l'encadrement tarifaire des prestations relatives aux offres d'interconnexion SMS paraît en outre proportionnée aux objectifs de l'article L. 32-1 (II) du CPCE, notamment « un niveau élevé de protection des consommateurs » ainsi que « l'intégrité et la sécurité des réseaux ».
En revanche, l'Autorité considère qu'une TA SMS qui resterait supérieure à 1 cEUR par SMS ne lui paraît pas pouvoir, a priori, présenter un risque sérieux en matière de spam. Ce point est notamment développé dans la section 4.2.7.2.1.
4.2.5.2. Fixation, pour chaque opérateur disposant d'une influence significative
sur son marché de gros de TA SMS, des tarifs plafonds de TA SMS
En vertu du I de l'article D. 311 du CPCE, l'Autorité peut, dans le cadre de ses obligations de contrôle tarifaire, « demander à ces opérateurs de respecter un encadrement pluriannuel des tarifs ou de justifier intégralement leurs tarifs et, si nécessaire, en exiger l'adaptation ».
Si l'ensemble des offres d'interconnexion SMS, celles qui sont offertes aujourd'hui ou celles qui le seront demain, sont concernées par les obligations précédemment exposées, la précision de l'obligation de reflet des coûts ne concerne que les prestations d'accès et d'interconnexion relatives aux offres d'interconnexion SMS à destination des seuls exploitants de réseau mobile ouvert au public, c'est-à-dire celles qu'Orange France, SFR et Bouygues Telecom se fournissent mutuellement.
Lors de la première consultation publique de l'Autorité relative à l'analyse du marché de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles lancée le 24 octobre 2005, et au vu des éléments alors communiqués par les opérateurs (cf. annexe C), l'Autorité avait indiqué « que le coût d'une TA SMS en métropole, prenant en compte les coûts de réseau liés à l'usage des SMS ainsi qu'une juste contribution aux coûts communs, serait de l'ordre de 2,50 cEUR maximum par SMS. »
A l'issue et au vu des contributions des acteurs à cette consultation publique, des auditions susvisées des sociétés Orange France, SFR et Bouygues Télécom, ainsi que de la finalisation de l'analyse des coûts de réseau relatifs à la TA SMS compte tenu des éléments disponibles, l'Autorité considère, d'une part, être en mesure de déterminer un niveau de TA SMS maximum applicable à compter de l'entrée en vigueur de la présente analyse de marché, et, d'autre part, qu'au vu des éléments en sa possession (cf. annexe C) et des objectifs d'efficacité économique, de promotion d'une concurrence effective et loyale entre les opérateurs, ainsi que d'optimisation des avantages pour le consommateur qu'elle vise à concilier, il est justifié et proportionné de fixer le tarif maximal de TA SMS en métropole (prenant en compte les coûts de réseau liés à l'usage des SMS, ainsi qu'une juste contribution aux coûts communs) à 3 centimes d'euro par SMS-MT efficace pour Orange France et SFR, et à 3,5 centimes d'euro par SMS-MT efficace pour Bouygues Telecom.
S'agissant de l'écart tarifaire instauré entre, d'une part, Orange France et SFR et, d'autre part, Bouygues Telecom, l'Autorité précise que son introduction se justifie, d'une part, par l'analyse des coûts menée par l'Autorité (cf. annexe C) et, d'autre part, par le risque de marginalisation pesant sur la société Bouygues Telecom, dû notamment à une part de marché significativement plus faible et à l'absence « d'effet club » (cf. section 4.1.1.1.1). En cela, l'Autorité a suivi la recommandation du Conseil de la concurrence qui note dans son avis (§ 28) que « (...) la position de monopole des trois opérateurs sur les marchés concernés ainsi que le rôle différencié joué par les ressources correspondantes dans l'équilibre financier de chaque opérateur, peuvent justifier une régulation plus précise de ces tarifs, à même d'assurer que ne soit pas affaiblie la position d'un acteur en particulier, et notamment celui qui dispose de la part de marché la plus faible ».
L'Autorité tient toutefois à souligner le caractère transitoire de cet écart. En effet, l'Autorité considère au cas d'espèce que l'introduction d'une différenciation tarifaire en faveur de Bouygues Telecom permettra à la société de corriger les effets pervers engendrés par des niveaux de terminaison d'appel SMS élevés par rapport aux coûts, mais qu'à terme, une telle différenciation tarifaire n'a pas vocation à perdurer.
Les opérateurs mobiles visés par la présente décision disposent de 30 jours à compter de sa date de publication au Journal officiel de la République française pour se mettre en conformité avec la présente décision.
Ainsi qu'indiqué en section 4.3, les tarifs plafonds de TA SMS fixés dans le cadre de la présente décision sont valables au plus pendant une période de deux ans à compter de la publication au Journal officiel de cette décision. L'Autorité réexaminera, dans un délai maximum de deux ans à compter de la publication de cette décision, le niveau des plafonds tarifaires notamment au vu des données de coûts fournies par les opérateurs, en application des obligations comptables, en particulier de comptabilisation et de restitution des coûts, que l'Autorité leur impose dans le cadre de la présente décision (cf. section 4.2.6). Sur cette base et au vu du degré de fluidité du marché de détail sous-jacent, l'Autorité fixera de nouveaux plafonds tarifaires et par voie de conséquence redéfinira le niveau de l'écart entre la terminaison d'appel de Bouygues Telecom et celle de SFR et d'Orange France, qu'il est justifié d'accorder transitoirement à Bouygues Telecom, et spécifiera les conditions de convergence des terminaisons d'appel vers un price cap symétrique.
4.2.6. Obligations comptables
4.2.6.1. Objectifs généraux
Les obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts sont des obligations distinctes que peut imposer l'Autorité à un opérateur déclaré puissant sur un marché donné au terme des analyses de marché menées selon la procédure déclinée dans l'article 16 de la directive « cadre ».
L'article 11 de la directive « accès » prévoit que l'Autorité peut « imposer des obligations de séparation comptable en ce qui concerne certaines activités dans le domaine de l'interconnexion et/ou de l'accès » et ce, dans l'objectif de contribuer à la vérification du respect des obligations de transparence et de non-discrimination.
En particulier, l'Autorité peut « obliger une entreprise intégrée verticalement à rendre ses prix de gros et ses prix de transferts internes transparents, entre autres pour garantir le respect de l'obligation de non-discrimination prévue à l'article 10 ou, en cas de nécessité, pour empêcher des subventions croisées abusives. »
A ce titre, l'Autorité peut « spécifier le format et les méthodologies comptables à utiliser » et « exiger que les documents comptables, y compris les données concernant les recettes provenant de tiers, lui soient fournis si elle en fait la demande ».
L'obligation de comptabilisation des coûts est prévue par l'article 13 de la directive « accès », incluant également les obligations liées à la récupération des coûts, au contrôle des prix et à l'orientation des prix en fonction des coûts. L'objectif de l'imposition de ces obligations est d'éviter que l'opérateur concerné, « en l'absence de concurrence efficace, ne maintienne des prix à un niveau excessivement élevé, ou ne comprime les prix, au détriment des utilisateurs finals ».
L'article L. 38 (I, 5°) du code des postes et des communications électroniques précise que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des télécommunications électroniques peuvent se voir imposer (...) [d'] isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès, ou tenir une comptabilité des services et des activités qui permette de vérifier le respect des obligations imposées au titre du présent article ».
Le caractère intégré et le positionnement de chacun des trois opérateurs Orange France, SFR et Bouygues Telecom sur les marchés de la terminaison d'appel SMS peut se traduire par des distorsions discriminatoires sur les marchés de gros et de détail, qui peuvent être mises sous surveillance grâce notamment à l'imposition d'une obligation de séparation comptable et de comptabilisation des coûts.
Elle est proportionnée aux objectifs fixés à l'article L. 32-1 du CPCE, et en particulier les 2°, 3° et 4°. Ces obligations constituent le minimum nécessaire pour s'assurer notamment de l'absence de comportements anticoncurrentiels et du respect de l'obligation de reflet des coûts.
4.2.6.2. Spécifications et principes
La comptabilisation des coûts et la séparation comptable devront notamment permettre :
- de disposer d'informations cohérentes entre opérateurs indispensables pour le contrôle tarifaire ;
- d'identifier l'activité réseau, et notamment les conditions d'utilisation des différentes ressources par les services internes et externes de l'opérateur ;
- de distinguer les activités de détail des activités de gros de l'opérateur mobile, selon un détail et un format rendu nécessaire pour le suivi des obligations liées à ce marché.
Le format du rapport des comptes répondra au besoin du suivi spécifique des obligations portant sur le marché de gros analysé. Il devra par ailleurs fournir à l'Autorité une vision suffisamment exhaustive pour lui permettre de s'assurer de la cohérence d'ensemble du dispositif comptable mis en place.
Au titre de cette obligation, et afin de respecter une cohérence entre opérateurs, l'Autorité dispose de la possibilité d'établir, en vertu de l'article D. 312 du code des postes et des communications électroniques, les spécifications du système de comptabilisation des coûts ainsi que les méthodes de valorisation et les règles d'allocation des coûts. Elle précise par ailleurs le format et le degré de détail des comptes, pour permettre la vérification du respect des obligations de non-discrimination et de reflet des coûts, lorsqu'elles s'appliquent.
Afin d'assurer un degré d'information suffisant, les éléments pertinents du système d'information et les données comptables sont tenus à la disposition de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, à la demande de cette dernière.
L'Autorité arrêtera ultérieurement l'ensemble des règles relatives aux SMS concernant les spécifications éventuelles des systèmes de comptabilisation des coûts, les méthodes de valorisation et les règles d'allocation des coûts, ainsi que le format des comptes à produire, dans un souci de cohérence et notamment de prise en compte des spécifications, méthodes et règles existantes relatives aux prestations vocales.
4.2.6.3. Audits
Conformément à l'article L. 38 (5°) du CPCE, et suite à l'imposition d'obligations de séparation comptable ainsi que de comptabilisation des coûts sur le marché de gros en cause, les comptes produits et les systèmes de comptabilisation des coûts relatifs aux prestations SMS sont audités annuellement par des organismes indépendants. Ces organismes sont désignés par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. Cette vérification est assurée aux frais des opérateurs concernés. Les organismes désignés publient annuellement une attestation de conformité des comptes.
4.2.7. Prise en compte des contributions aux consultations publiques sur la partie obligations
4.2.7.1. Principales remarques des acteurs sur la partie obligations
4.2.7.1.1. Tableau synthétique des contributions à la première consultation publique
concernant les obligations envisagées par l'Autorité
Le tableau ci-dessous a pour objectif de donner une vision synthétique des contributions reçues par l'ARCEP suite à la première consultation publique qu'elle a lancée. Par nature, ce tableau ne peut pas refléter le sens complet des contributions qui, pour certaines, sont couvertes par le secret des affaires, mais donne une idée du point de vue défendu par chacun.
Les cases non renseignées signifient que le contributeur ne s'est pas prononcé explicitement pour ou contre la proposition de l'Autorité.
Acteurs ayant exprimé un accord avec le point de vue défendu par l'ARCEP
dans son projet d'analyse de marché
4.2.7.1.2. Sur le périmètre des obligations
[SDA] regrette que l'Autorité n'ait pas souhaité inclure dans le périmètre des prestations concernées par les obligations imposées aux opérateurs mobiles les prestations de SMS Push, notamment dans la mesure où, selon cet acteur, les niveaux tarifaires de ces offres n'ont pas évolué.
4.2.7.1.3. Sur l'obligation de contrôle tarifaire et le risque de messages non sollicités
L'ARCEP note tout d'abord que de nombreux acteurs, dont les associations de consommateurs, considèrent que le principe de cette obligation est tout à fait justifié et proportionné.
Dans le cadre des contributions à la première consultation publique, l'AdUF (Association des utilisateurs de Free), l'AFUTT (Association française des utilisateurs de télécommunications) et Télé2 formulent toutefois deux critiques. D'une part, les réserves émises par l'ARCEP quant au risque de spam leur semblent hors de propos. Il s'agirait en effet, selon eux, d'un argument fallacieux avancé par les opérateurs mobiles métropolitains leur permettant d'exploiter une « rente de situation indue », et il n'est par ailleurs pas prouvé qu'une baisse de la TA SMS aurait l'effet redouté. D'autre part, concernant l'analyse des coûts, les associations de consommateurs et Télé2 estiment que, les coûts de TA SMS étant inférieurs aux plafonds déterminés par l'autorité, l'autorité doit imposer des paliers tarifaires plus bas que ceux préconisés dans le cadre de la présente décision.
L'AduF semble toutefois revenir sur sa première contribution en indiquant dans sa contribution à la deuxième consultation publique que les mesures envisagées par l'Autorité semblent principalement profiter aux agrégateurs et de ce fait aux sociétés qui s'adonnent aux SMS publicitaires de type spam. L'AduF indique par ailleurs qu'elle craint que les baisses de TA SMS ne soient pas répercutées sur les prix de détail des SMS au bénéfice des consommateurs.
S'agissant de la répercussion des baisses des tarifs de gros, [SDA] souhaite que l'Autorité veille à ce qu'elle soit également effective sur les prix consentis par les agrégateurs ou les opérateurs aux éditeurs de services.
Pour sa part, MMA France (Mobile Marketing Association), si elle ne se prononce pas sur le principe d'une baisse des tarifs de gros, « craint qu'une baisse trop brutale de la TA SMS (...) [n']entraîne une croissance incontrôlée, exponentielle et irréversible du spam sur mobile ». Si une baisse doit intervenir, MMA France recommande qu'elle soit progressive afin de contrôler l'impact du spam sur mobile.
Orange France estime quant à elle que l'obligation de contrôle tarifaire envisagée par l'Autorité aurait des conséquences négatives pour les consommateurs. D'une part, une telle obligation réduirait les incitations des acteurs à innover et à investir. D'autre part, en accroissant le risque de spam, elle nuirait gravement aux intérêts des consommateurs.
A ce titre, [SDA] indique que le faible niveau de spam constaté aujourd'hui à destination des réseaux mobiles métropolitains serait principalement dû au prix actuel de la TA SMS, mais que cette protection est très précaire. Par ailleurs, la société estime que l'imposition d'une obligation de respecter un plafond tarifaire de TA SMS dès l'entrée en vigueur de la présente obligation n'est pas proportionnée au regard des prix de gros effectivement pratiqués en Europe. Enfin, dans l'hypothèse où l'ARCEP maintiendrait une obligation de contrôle tarifaire ex ante, celle-ci, dans un souci de proportionnalité, devrait se limiter selon la société à une obligation de symétrie tarifaire.
Pour [SDA], en imposant un premier palier commun aux trois opérateurs mobiles, l'Autorité ne tient pas compte des différentiels de coûts supportés par les différents opérateurs mobiles sur leurs réseaux. Selon la société, les différences de coûts de TA SMS justifient la mise en place d'une asymétrie tarifaire à son avantage, d'autant plus qu'une telle asymétrie existe sur le marché de la terminaison d'appel vocal.
Introduction d'une différenciation tarifaire en faveur de Bouygues Telecom
[SDA] considère que l'imposition d'un encadrement tarifaire asymétrique entre les opérateurs mobiles français n'est ni justifié, ni pertinent que ce soit sur le plan réglementaire, économique ou commercial.
[SDA] s'agissant de l'asymétrie tarifaire, [SDA] considère que celle-ci n'est pas justifiée, notamment car le risque de marginalisation de Bouygues Telecom mis en avant par l'Autorité est limité au regard de la part que les revenus issus des services SMS représentent dans le revenu global des opérateurs. De surcroît, [SDA] considère que cette asymétrie n'est pas pertinente, dans la mesure où les volumes de SMS échangés entre les opérateurs sont globalement équilibrés, où la réciprocité tarifaire jusque lors en vigueur n'a jamais soulevé de questions entre les acteurs jusque très récemment, et où l'introduction de cette différenciation consiste en fait à faire bénéficier à Bouygues Telecom d'une rente de dernier arrivé sur le marché.
4.2.7.1.4. Sur les autres obligations envisagées par l'Autorité
Si Télé2 considère « tout à fait adéquates et proportionnées » l'ensemble des obligations envisagées par l'Autorité dans le cadre de la présente analyse, la société précise toutefois que « le cas des MVNO semble devoir être envisagé de manière spécifique » dans la mesure notamment où « il n'est pas certain que la baisse de terminaison d'appel SMS, envisagée par l'Autorité dans le cadre de la présente analyse de marché, [soit] strictement répercutée aux MVNO » et où il peut y avoir un « décalage d'application ». Face à ce risque, Télé2 souhaite ainsi que « l'Autorité impose aux opérateurs hôtes de répercuter strictement et immédiatement toute baisse des tarifs de terminaison d'appel sur leurs tarifs de gros des SMS ».
[SDA] rappelle pour sa part que les agrégateurs de SMS doivent être considérés comme des exploitants de réseau ouvert au public. A ce titre, ils doivent avoir accès à la TA SMS. Selon la société, « [il] apparaît donc logique d'imposer à chaque opérateur puissant de ces marchés pertinents une obligation de faire droit à toute demande raisonnable d'interconnexion et d'accès ». La société précise par ailleurs qu'« [afin] de conserver un marché concurrentiel permettant de maintenir une qualité de service satisfaisante, il est nécessaire de définir des obligations de prestation de service minimal en tant qu'agrégateur ».
S'agissant des offres d'interconnexion que les opérateurs sont tenus de fournir dans des conditions transparentes et non discriminatoires, [SDA] indique qu'il est important que ces offres soient rapidement mises en place pour être proposées aux acteurs éligibles à l'interconnexion, et qu'à leur tour, les acteurs bénéficiant de l'interconnexion SMS offrent aux éditeurs des offres de prestation transparentes et détaillées limitées à la seule fonction d'agrégation.
Les opérateurs mobiles métropolitains considèrent quant à eux que les remèdes proposés par l'Autorité ne sont ni justifiés ni proportionnés :
- s'agissant des obligations d'interconnexion et d'accès, [SDA] estime qu'il n'est pas envisageable d'étendre la prestation de TA SMS via les réseaux SS7 au-delà de ce qui est fait aujourd'hui par les opérateurs mobiles. Selon la société, une telle interconnexion donnerait en effet accès à des ressources particulièrement sensibles pour les opérateurs et mettrait en danger la sécurité et l'intégrité des réseaux mobiles. [SDA] considère pour sa part que cette obligation est superflue, dans la mesure où elle ne viendrait corriger aucun dysfonctionnement constaté. Enfin, Orange France estime que l'absence de cadrage, quant au champ exact de l'obligation et de ses modalités, et l'interprétation très large des notions d'interconnexion et d'accès constituent un obstacle à la sécurité juridique et à la visibilité des acteurs sur le marché.
- s'agissant des obligations de non-discrimination et de transparence, les opérateurs mobiles estiment que cette obligation n'est pas utile dans la mesure où elle est déjà respectée. Au surplus, [SDA] note que, dans le cadre de l'itinérance internationale, une différence de conditions tarifaires peut être justifiée, sans qu'il s'agisse d'une discrimination, dans la mesure où des mécanismes de filtrage s'avèrent nécessaires. Orange France indique pour sa part que les obligations de non-discrimination et de transparence imposent aux opérateurs « d'appliquer des conditions équivalentes dans des circonstances équivalentes aux autres entreprises fournissant des services équivalents ». En contestant aux agrégateurs de SMS la qualité d'exploitant de réseaux ouverts au public, la société indique qu'elle n'est pas tenue de faire droit aux demandes d'interconnexion émanant de ces acteurs ;
- s'agissant des obligations comptables, [SDA] estime qu'au-delà de leur caractère lourd, ces pratiques comptables risqueraient de mettre à mal la cohérence des comptes de la société et augmenteraient les risques d'erreurs. D'autre part, la mise en place d'une nouvelle comptabilité entraînerait inéluctablement des coûts supplémentaires qui seraient supportés in fine par les utilisateurs finals. Enfin, [SDA] estime que, les obligations de non-discrimination et de transparence étant déjà respectées, les obligations comptables envisagées ne sont ni proportionnées, ni justifiées.
Enfin, [SDA] soulève les difficultés qui pourraient résulter d'une part de l'imposition de l'obligation de fournir dans des conditions transparentes et non discriminatoires, à des prix reflétant les coûts correspondants, leurs prestations d'accès et d'interconnexion relatives aux offres d'interconnexion SMS, et d'autre part une interprétation très large de la notion d'opérateur de réseau ouvert au public. Ces difficultés pourraient notamment être la remise en cause du modèle d'agrégateur ou la recrudescence des spams, susceptible de perturber la qualité du réseau et des services mobiles. Ces remarques rejoignent celles formulées sur la partie introductive (cf. 1.8.1).
4.2.7.2. Réponses de l'Autorité
4.2.7.2.1. Sur l'obligation de contrôle tarifaire et le risque de messages non sollicités
A titre liminaire, l'Autorité tient à préciser qu'elle ne peut pas exclure la problématique du spam du champ de la présente analyse, même si elle considère que le spam sur mobile constitue un sujet à part entière. En effet, l'Autorité rappelle qu'au titre de l'article L. 32-1 (II) du CPCE, elle a notamment pour mission de veiller à un niveau élevé de protection des consommateurs et au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures. A cet égard, l'Autorité note que le Conseil d'Etat, dans son arrêt en date du 5 décembre 2005 UFC Que Choisir/ART, dont les requêtes n°s 277441, 277443 et 277445 portaient sur le marché de la terminaison d'appel vocal sur les réseaux mobiles, souligne que l'Autorité doit « concilier lorsqu'elle fixe le niveau des plafonds tarifaires, les objectifs d'efficacité économique, de promotion d'une concurrence durable entre les opérateurs et d'optimisation des avantages pour le consommateur ; que dès lors l'ART pouvait légalement prévoir, au vu des considérations, une baisse progressive de plafonds tarifaires vers un niveau de prix reflétant les coûts ».
De la même manière, le Conseil de concurrence, dans son avis du 10 mars 2006 précité (§ 32), a tenu à attirer « l'attention de l'ARCEP sur les risques que présente pour les consommateurs le développement massif de SMS publicitaires de type spam », indiquant que « (...), la baisse brutale de la terminaison SMS pourrait encourager une augmentation particulièrement sensible du trafic de SMS publicitaires. S'il existe déjà des mécanismes légaux de protection des consommateurs contre le "spamming, il convient que l'ARCEP, comme elle l'envisage d'ailleurs dans son analyse, veille à ce que son action soit globalement profitable au consommateur non seulement en terme de prix mais aussi en termes de qualité de service et protection de son bien-être ».
Sur ce point, l'Autorité considère que la présente analyse répond aux objectifs qui lui sont assignés, à savoir veiller à ce que les tarifs de TA SMS reflètent les coûts, tout en ne favorisant pas excessivement le développement de SMS publicitaires non sollicités.
En réponse aux diverses critiques exprimées, l'Autorité note que des moyens efficaces de lutte contre le spam existent et rappelle que de telles pratiques sont encadrées par ailleurs. Ainsi, l'article L. 34-5 du CPCE interdit « la prospection directe (...) utilisant, sous quelque forme que ce soit, les coordonnées d'une personne physique qui n'a pas exprimé son consentement préalable à recevoir des prospections directes par ce moyen ». Enfin, comme la plupart des opérateurs, l'Autorité constate que le mobile est aujourd'hui relativement épargné par le phénomène et considère qu'à partir du moment où les prestations de TA SMS ne sont pas gratuites, la dénonciation du risque de spam paraît exagérée à ce stade.
Concernant l'analyse des coûts et l'identification d'un plafond a maxima, l'Autorité renvoie à l'annexe C de la présente analyse. Suite aux éléments nouveaux versés par les opérateurs mobiles, notamment par [SDA], et en l'absence de règles définitives de comptabilisation des coûts relatifs aux prestations SMS, l'Autorité estime justifié et proportionné de fixer ce niveau tarifaire à 3 centimes d'euros pour Orange France et SFR et à 3,5 centimes pour Bouygues Telecom. L'Autorité considère par ailleurs que les diverses estimations faites par certains contributeurs ne sont pas suffisamment robustes pour fixer un niveau tarifaire plus bas, mais précise que ces niveaux de terminaison sont sans préjudice de ceux qui pourront être fixés ultérieurement sur la base d'éléments de coûts audités.
Concernant les tarifs de TA SMS pratiqués en Europe, l'Autorité réfute totalement les observations de [SDA] et d'Orange France. Pour justifier sa position, l'Autorité renvoie à la section 4.1.1.2.1 de la présente analyse en précisant que, loin d'aller contre ce qui se pratique ailleurs en Europe, la fixation de tarifs de TA SMS à 3 et 3,5 centimes d'euro s'inscrit dans la tendance européenne. En effet, l'étude comparative menée par l'Autorité au cours de l'été 2005 indique que plus la terminaison a été fixée tardivement, plus elle s'établit à un niveau bas. Cette tendance est manifeste lorsqu'on examine le cas de la Suède et des pays qui pratiquaient encore le bill and keep pour les SMS jusqu'en 2002 ou en 2003. Cet élément dynamique doit être pris en compte lorsqu'on analyse les niveaux de terminaison d'appel SMS en Europe (74).
Enfin, concernant la nécessité d'imposer une différenciation tarifaire, l'Autorité renvoie à la section 4.2.5.2 de la présente décision.