2o Les conséquences de la violation du principe d'égalité
6. Le caractère anticonstitutionnel du nouvel alinéa 3 de l'article L. 521-1 du code de la sécurité sociale ne conduit pas seulement à invalider cet alinéa.
Il doit entraîner l'invalidation non seulement d'autres dispositions de l'article 23, mais de l'article 23 dans son ensemble.
7. Sont d'abord contraires à la Constitution toutes les autres dispositions du même article qui y font expressément référence (en ce sens notamment CC no 96-373 DC 9 avril 1996, Rec. 43, considérant 23).
Dans son paragraphe II, l'article 23 complète l'article L. 755-11 du code de la sécurité sociale par des alinéas, dont le dernier renvoie expressément aux troisième à sixième alinéas, du nouvel article L. 521-1 pour en faire application aux allocations visées à l'article 755-12.
Or, comme on vient de le voir, le troisième alinéa de l'article L. 521-1 nouveau est contraire au principe d'égalité, donc à la Constitution.
Le renvoi par le dernier alinéa de l'article L. 755-11 nouveau au troisième alinéa de l'article L. 521-1 nouveau est donc lui-même contraire à la Constitution.
La même conséquence doit s'appliquer au paragraphe III de l'article 23, qui complète l'article L. 755-10 du code de la sécurité sociale pour rendre applicables aux personnes mentionnées à cet article les dispositions de l'article L. 521-1, parmi lesquelles le troisième alinéa, contraire à la Constitution.
Par là même le paragraphe III de l'article 23 est contraire à la Constitution.
8. Au-delà de chacun des alinéas qui viennent d'être passés en revue, c'est l'article 23 tout entier qui doit être déclaré contraire à la Constitution, car les alinéas en cause sont inséparables du reste de l'article.
Il faut rappeler à ce sujet que, pour apprécier l'inséparabilité d'une disposition, doivent être pris en considération le texte lui-même et les débats parlementaires (en ce sens notamment CC no 63-21 DC, 12 mars 1963, Rec. 23, considérant 23 ; CC no 87-232 DC, 7 janvier 1988, Rec. 17, considérant 43).
Un précédent permet d'illustrer l'inséparabilité de dispositions figurant au sein d'un même article dans une espèce analogue à celle-ci :
- CC no 73-51 DC, 27 décembre 1973, Rec. 25, considérant 4 : l'exclusion de certains contribuables, en fonction du montant de leur base d'imposition, de la possibilité de recours contre une taxation d'office, se présente comme une exception à la faculté d'écarter, au moyen de la preuve contraire, l'application d'une taxation d'office ; elle constitue donc un élément inséparable des autres dispositions de l'article de la loi.
De la même manière, la disposition établissant un plafond de ressources différent pour le versement d'allocation familiales, plus élevé pour certaines personnes que pour d'autres, se présente comme une exception au système du plafonnement ; elle constitue donc un élément inséparable des autres dispositions de l'article de la loi.
Tant dans les débats parlementaires que dans le rapport annexé à la loi, la différenciation du plafond apparaît comme un élément intrinsèquement lié au principe même du plafonnement. Le législateur n'aurait pas adopté de la même manière ce principe s'il avait vu qu'il ne pouvait différencier le plafond selon l'origine des revenus des personnes chargées de famille.
En conséquence, la censure des dispositions établissant cette différenciation doit entraîner celle de tout l'article dans lequel elles se trouvent, qui constitue un tout indissociable.