Article (Circulaire du 10 février 1995 commentant la loi no 95-1 du 2 janvier 1995 portant adaptation de la législation française aux dispositions de la résolution 827 du Conseil de sécurité des Nations Unies instituant un tribunal international en vue de juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991)
2.2. Compétence et dessaisissement
des juridictions françaises (art. 2 à 6)
2.2.1. Compétence des juridictions françaises (art. 2)
L'article 2 du chapitre Ier du titre Ier de la loi pose le principe de la compétence universelle des juridictions françaises pour les infractions mentionnées à l'article 1er dès lors que l'auteur ou le complice de ces faits est trouvé sur le territoire français.
La reconnaissance de cette compétence universelle, qui n'était pas exigée par la résolution du Conseil de sécurité, constitue une importante innovation: elle marque la volonté de la France de collaborer aussi efficacement que possible à la répression de ces crimes.
Elle permet ainsi l'application de la loi française à l'encontre de tout criminel de guerre qui tenterait de se réfugier sur notre territoire, même dans l'hypothèse où celui-ci ne serait pas encore recherché par le tribunal international.
Le deuxième alinéa de l'article 2 précise que les victimes pourront se constituer partie civile, le cas échéant, pour mettre en mouvement l'action publique. Cette précision, qui pourrait paraître juridiquement superfétatoire, a été jugée nécessaire par le Parlement afin d'éviter toute ambiguïté, dans la mesure où la constitution de partie civile est exclue devant le tribunal international.
Conformément à la règle traditionnellement édictée en matière de compétence universelle et dans un souci d'efficacité, le Parlement n'a pas souhaité étendre la compétence des juridictions nationales aux infractions mentionnées à l'article 1er dont les auteurs ne sont pas trouvés en France.
Toutefois, comme cela a été indiqué au cours des débats devant l'Assemblée nationale (J.O. A.N. CR 20 décembre 1994, p. 9446), l'impossibilité de mettre en mouvement l'action publique contre des personnes ne se trouvant pas sur le territoire français n'empêche nullement les parquets de faire procéder, à titre conservatoire et au cours d'une enquête préliminaire, à l'audition des personnes victimes de ces crimes et qui se seraient réfugiées en France.
Les parquets dans le ressort desquels ces victimes ont élu domicile devront ainsi veiller, à la demande de ces dernières, à ce que leurs déclarations puissent être recueillies par procès-verbal, en faisant procéder si nécessaire à leur examen médical en application de l'article 77-1 du code de procédure pénale, afin de conserver leur témoignage au cas de poursuites ultérieures.
En tout état de cause, le tribunal international bénéficiant d'une compétence prioritaire, le dernier alinéa de l'article 2 précise que les procédures en cours portant sur des faits pouvant relever de ses attributions doivent être portées à la connaissance de ce dernier. Cette information devra être faite par l'intermédiaire des parquets et du ministère de la justice,
qui adressera copie de ces procédures, y compris celles concernant le recueil du témoignage des victimes, au tribunal international.