Article (Décision n° 93-333 DC du 21 janvier 1994)
Sur les normes de constitutionnalité applicables en matière de liberté
de communication:
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen: « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la loi. »;
Considérant que le pluralisme des courants d'expression socioculturels est en lui-même un objectif de valeur constitutionnelle; que le respect de ce pluralisme est une des conditions de la démocratie; que la libre communication des pensées et des opinions, garantie par l'article 11 de la Déclaration de 1789, ne serait pas effective si le public auquel s'adressent les moyens de communication audiovisuels n'était pas à même de disposer,
aussi bien dans le cadre du secteur privé que dans celui du secteur public,
de programmes qui garantissent l'expression de tendances de caractère différent dans le respect de l'impératif d'honnêteté de l'information; qu'en définitive l'objectif à réaliser est que les auditeurs et les téléspectateurs, qui sont au nombre des destinataires essentiels de la liberté proclamée par l'article 11 précité, soient à même d'exercer leur libre choix sans que ni les intérêts privés ni les pouvoirs publics puissent y substituer leurs propres décisions ni qu'on puisse en faire les objets d'un marché;
Considérant qu'il appartient au législateur, compétent en vertu de l'article 34 de la Constitution pour fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques, de concilier, en l'état actuel des techniques et de leur maîtrise, l'exercice de la liberté de communication telle qu'elle résulte de l'article 11 de la Déclaration de 1789 avec d'une part, les contraintes inhérentes aux moyens de la communication audiovisuelle et de ses opérateurs et d'autre part, les objectifs de valeur constitutionnelle que sont la sauvegarde de l'ordre public, le respect de la liberté d'autrui et la préservation du caractère pluraliste des courants d'expression socioculturels auxquels ces modes de communication, par leur influence considérable, sont susceptibles de porter atteinte;