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Article (Décret no 91-447 du 7 mai 1991 portant publication de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Canada, signée à Paris le 15 décembre 1989 (1))

Article (Décret no 91-447 du 7 mai 1991 portant publication de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Canada, signée à Paris le 15 décembre 1989 (1))

CONVENTION

D'ENTRAIDE JUDICIAIRE EN MATIERE PENALE ENTRE LE GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE ET LE GOUVERNEMENT DU CANADA
Le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Canada,
Désireux de conclure une Convention d'entraide judiciaire en matière pénale, sont convenus des dispositions suivantes:


Article 1er


Champ d'application


1. Les deux Etats s'engagent à s'accorder mutuellement, selon les dispositions de la présente Convention, l'entraide judiciaire la plus large possible dans la recherche et la poursuite des infractions pénales dont la sanction relève des autorités judiciaires de l'Etat requérant.
2. La présente Convention ne s'applique ni à l'exécution des décisions d'arrestation et de condamnation ni aux infractions militaires qui ne constituent pas des infractions de droit commun.


Article 2


Définitions


Aux fins de la présente Convention,
1. «Infraction pénale» désigne:
- pour la France, les infractions relevant de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale;
- pour le Canada, les infractions établies par une loi du Parlement ou de la législature d'une province.
2. «Autorités compétentes» désigne les autorités qui ont formé une demande d'entraide judiciaire, soit qu'elle émane d'une autorité judiciaire, soit qu'elle ait été visée par le Procureur général du Canada ou d'une province ou l'un de leurs substituts.


Article 3


Transmission des demandes


Les demandes d'entraide judiciaire devront être adressées par le Ministère de la Justice de l'Etat requérant au Ministère de la Justice de l'Etat requis et les actes résultant de leur exécution seront transmis par la même voie.


Article 4


Motifs de refus


L'entraide judiciaire pourra être refusée:
1. Si la demande se rapporte à des infractions considérées par l'Etat requis soit comme des infractions politiques, soit comme des infractions connexes à des infractions politiques, soit comme des infractions en matière de taxes et impôts, de douane ou de change;
2. Si l'Etat requis estime que l'exécution de la demande est de nature à porter atteinte à sa souveraineté, à sa sécurité, à son ordre public ou à d'autres de ses intérêts essentiels;
3. Si, s'agissant d'une demande ayant pour objet l'exécution de mesures de perquisition ou de saisie, les faits constitutifs des infractions qui la motivent étaient passibles dans l'Etat requis, dans la mesure où ils relèveraient de sa compétence, d'une peine privative de liberté de moins de deux ans.


Article 5


Actes d'enquête et d'instruction


1. L'Etat requis fera exécuter, conformément à sa législation, les demandes d'entraide judiciaire relatives à une affaire pénale qui lui seront adressées par les autorités compétentes de l'Etat requérant et qui ont pour objet l'accomplissement d'actes d'enquête ou d'instruction, y compris de perquisitions, saisies et auditions de témoins, ou la communication de pièces à conviction, de dossiers ou de documents.
2. Toute demande est exécutée conformément à la législation de l'Etat requis et, dans la mesure où ladite législation ne l'exclut pas, conformément aux formes spécifiées dans la demande. Notamment, l'Etat requérant pourra demander que l'exécution de la demande soit effectuée par une autorité judiciaire, ou que les témoins ou experts déposent sous serment.
3. Si l'Etat requérant le demande expressément, l'Etat requis l'informera de la date et du lieu d'exécution de la demande d'entraide. Si l'Etat requis y consent, les autorités de l'Etat requérant et les personnes en cause mentionnées dans sa demande pourront assister à l'audition de témoins et, le cas échéant, à l'exécution d'autres demandes et pourront, dans la mesure où la législation de l'Etat requis le permet, interroger les témoins ou les faire interroger.
4. L'Etat requis donnera suite aux demandes de perquisition ou de saisie dans la mesure permise par sa législation, à condition que les renseignements fournis par les autorités compétentes de l'Etat requérant permettent une telle mesure.
5. L'Etat requis pourra ne transmettre que des copies ou photocopies certifiées conformes des dossiers ou documents demandés. Toutefois, si l'Etat requérant demande expressément la communication des originaux, il sera donné suite à cette demande dans toute la mesure du possible.


Article 6


Remise d'objets, de dossiers ou de documents


1. L'Etat requis pourra surseoir à la remise des objets, dossiers ou documents dont la communication est demandée, s'ils lui sont nécessaires pour une procédure pénale en cours.
2. Les objets, ainsi que les originaux des dossiers ou documents, qui auront été communiqués en exécution d'une demande, seront renvoyés aussitôt que possible par l'Etat requérant à l'Etat requis, à moins que celui-ci n'y renonce.


Article 7


Remise d'actes de procédure et de décisions judiciaires


1. L'Etat requis procédera, conformément à sa législation, à la remise des actes de procédure et des décisions judiciaires qui lui seront envoyés à cette fin par l'Etat requérant. Cette remise pourra être effectuée par simple transmission de l'acte ou de la décision au destinataire.
2. Si la Partie requérante le demande expressément, l'Etat requis effectuera, dans la mesure compatible avec sa législation, la remise dans la forme demandée par l'Etat requérant.
3. La preuve de la remise se fera au moyen d'un récépissé daté et signé par le destinataire ou d'une déclaration de l'Etat requis constatant le fait, la forme et la date de la remise. L'un ou l'autre de ces documents sera immédiatement transmis à l'Etat requérant. Si la remise n'a pu se faire,
l'Etat requis en fera connaître immédiatement le motif à l'Etat requérant.


Article 8


Défaut de comparution


Le témoin ou l'expert qui n'aura pas déféré à une citation à comparaître émanant de l'Etat requérant et dont la remise a été demandée ne pourra être soumis, alors même que cette citation contiendrait des injonctions, à aucune sanction ou mesure de contrainte, à moins qu'il ne se rende par la suite de son plein gré sur le territoire de l'Etat requérant et qu'il n'y soit régulièrement cité à nouveau.


Article 9


Immunités


1. Aucun témoin ou expert, de quelque nationalité qu'il soit, qui, à la suite d'une demande, comparaîtra devant les autorités compétentes de l'Etat requérant ou les assistera, ne pourra être ni poursuivi, ni détenu, ni soumis à aucune autre restriction de sa liberté individuelle sur le territoire de cet Etat pour des faits ou condamnations antérieurs à son départ du territoire de l'Etat requis.
2. Aucune personne, de quelque nationalité qu'elle soit, citée devant les autorités judiciaires de l'Etat requérant, dans la mesure où la législation de cet Etat permet telle citation, afin d'y répondre des faits pour lesquels elle fait l'objet de poursuites, ne pourra y être ni poursuivie, ni détenue, ni soumise à aucune autre restriction de sa liberté individuelle pour des faits ou condamnations antérieurs à son départ du territoire de l'Etat requis et non visés par la citation.
3. L'immunité prévue au présent article cessera lorsque le témoin, l'expert ou la personne poursuivie, ayant eu la possibilité de quitter le territoire de l'Etat requérant pendant trente jours consécutifs après que sa présence n'était plus requise par les autorités compétentes, sera néanmoins demeuré sur ce territoire ou y sera retourné après l'avoir quitté.


Article 10


Indemnités et frais aux témoins et experts


1. Les indemnités à verser ainsi que les frais de voyage et de séjour à rembourser au témoin ou à l'expert par l'Etat requérant seront calculés depuis le lieu de sa résidence et lui seront accordés selon des taux au moins égaux à ceux prévus par les tarifs et règlements en vigueur dans l'Etat où l'audition doit avoir lieu.
2. Si l'Etat requérant estime que la comparution personnelle d'un témoin ou d'un expert devant ses autorités compétentes ou son assistance à ces autorités est particulièrement nécessaire, il en fera mention dans la demande de remise de la citation et l'Etat requis en informera le témoin ou l'expert. L'Etat requis fera connaître à l'Etat requérant la réponse du témoin ou de l'expert. Dans ce cas, la demande ou la citation devra mentionner le montant approximatif des indemnités à verser ainsi que des frais de voyage et de séjour à rembourser.
3. Si une demande lui est présentée à cette fin, l'Etat requis pourra consentir une avance au témoin ou à l'expert. Celle-ci sera mentionnée sur la demande ou la citation et remboursée par l'Etat requérant.


Article 11


Transfèrement des détenus


1. Toute personne détenue dont la comparution personnelle en qualité de témoin ou aux fins de confrontation ou dont l'assistance aux autorités compétentes est demandée par l'Etat requérant sera transférée temporairement sur le territoire de l'Etat requérant sous condition de son renvoi dans le délai indiqué par l'Etat requis et sous réserve des dispositions de l'article 9 dans la mesure où celles-ci peuvent s'appliquer.
2. Le transfèrement pourra être refusé:
a) Si la personne détenue n'y consent pas;
b) Si sa présence est nécessaire dans une procédure pénale en cours sur le territoire de l'Etat requis;
c) Si son transfèrement est susceptible de prolonger sa détention; ou d) Si d'autres considérations impérieuses s'opposent à son transfèrement sur le territoire de l'Etat requérant.
3. La personne transférée devra rester en détention sur le territoire de l'Etat requérant, à moins que l'Etat requis du transfèrement ne demande sa mise en liberté.


Article 12


Contenu des demandes


1. Les demandes d'entraide devront contenir les indications suivantes:
a) L'autorité dont émane la demande;
b) L'objet et le motif de la demande;
c) Dans la mesure du possible, l'identité et la nationalité de la personne en cause et,
d) Le nom et l'adresse du destinataire, s'il y a lieu, ou le plus grand nombre possible de renseignements permettant son identification et sa localisation.
2. Elles pourront en outre contenir tous éléments d'information que l'Etat requérant estimera utiles à l'Etat requis pour l'exécution de la demande.
3. Les demandes prévues à l'article 5 mentionneront également la qualification juridique des faits et contiendront un exposé sommaire desdits faits. En outre, les demandes prévues au paragraphe 4 dudit article devront être accompagnées des renseignements permettant à l'Etat requis d'apprécier s'il peut y donner suite, y compris les raisons laissant à croire que des pièces à conviction, des dossiers ou des documents se trouvent en un lieu donné du territoire de l'Etat requis.


Article 13


Confidentialité


Chacun des deux Etats peut demander à l'autre de garder le secret sur la demande et sa réponse sauf dans la mesure nécessaire pour l'exécution de la demande et l'utilisation de la réponse. Chacun des deux Etats s'efforcera de satisfaire à cette requête.


Article 14


Dispense de légalisation


Les demandes d'entraide judiciaire et les pièces les accompagnant sont dispensées de toute formalité de légalisation.


Article 15


Motivation du refus


L'Etat requis informera aussi rapidement que possible l'Etat requérant de toute décision de refus total ou partiel d'une demande ainsi que du motif d'une telle décision.


Article 16


Frais


1. Sous réserve des dispositions de l'article 10, l'exécution des demandes d'entraide ne donnera lieu au remboursement d'aucuns frais, à l'exception de ceux occasionnés par l'intervention d'experts sur le territoire de l'Etat requis et par le transfèrement de personnes détenues en application de l'article 11.
2. Toutefois, s'il apparaît que l'exécution de la demande entraîne ou est susceptible d'entraîner des frais exceptionnels, les deux Etats se consultent en vue de déterminer les modalités selon lesquelles l'exécution de la demande peut se poursuivre.


Article 17


Langues


Les demandes d'entraide judiciaire et les documents qui les accompagnent peuvent être établis indifféremment en langue française ou anglaise.


Article 18


Consultations


Les Etats peuvent se consulter, à la demande de l'un d'entre eux, sur l'interprétation et l'application de la présente Convention.


Article 19


Entrée en vigueur et dénonciation


1. Chacun des deux Etats notifiera à l'autre l'accomplissement des procédures requises pour l'entrée en vigueur de la présente Convention.
2. La présente Convention entrera en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la date de réception de la dernière notification.
3. Chacun des deux Etats pourra à tout moment dénoncer la présente Convention en adressant à l'autre, par la voie diplomatique, une notification de dénonciation. La dénonciation prendra effet un an après la date de réception de ladite notification.
En foi de quoi, les représentants des deux Gouvernements, dûment autorisés, ont signé la présente Convention et y ont apposé leur sceau.

Fait à Paris, le 15 décembre 1989, en double exemplaire, en langues française et anglaise, les deux textes faisant également foi.

Pour le Gouvernement

de la République française:

PIERRE ARPAILLANGE

Pour le Gouvernement du Canada:
PIERRE BLAIS