Différenciation tarifaire
La pratique de différenciations tarifaires on net/off net est apparue fin 2003. Ainsi que le décrit l'annexe B, elle se présente, d'une part, sous la forme de bonus (possibilité d'envoyer quelques SMS on net gratuitement) et intervient, d'autre part, dans le cadre des forfaits de consommation importante (chez Orange France et, jusqu'en mars 2005, chez SFR) ainsi que d'offres d'abondance (textos et MMS illimités vers 3 numéros préférés chez SFR). Sans être anecdotique, cette pratique reste donc limitée à ce jour en comparaison d'une différenciation généralisée, qui porterait sur le prix du SMS « à l'unité ».
Sur un plan concurrentiel, ce type de pratique n'est pas nécessairement problématique, notamment lorsqu'elle reflète des différences de coût (cf. l'avis n° 2001-A-01 du 16 mars 2001 du Conseil de la concurrence portant sur la tarification par France Télécom des communications téléphoniques au départ de son réseau vers des réseaux tiers). La différenciation on net/off net favorise néanmoins l'« effet club », c'est-à-dire le fait qu'un prospect préférera, toutes choses égales par ailleurs, souscrire auprès de l'opérateur auprès de qui ses correspondants sont déjà abonnés, afin de bénéficier du tarif on net sur un maximum de SMS. Réciproquement, ses correspondants pourront l'inciter à souscrire auprès du même opérateur qu'eux, de façon à payer le tarif on net lorsqu'ils lui enverront des SMS.
Tout opérateur peut, a priori, faire jouer un effet club. Néanmoins, celui-ci sera d'autant plus fort que les correspondants du prospect auront tendanciellement souscrit auprès de cet opérateur plutôt qu'un autre. Or ceci est d'autant plus probable que le parc de clients de l'opérateur est important.
En considérant, pour fixer les idées, un prospect ayant 10 correspondants (64), la probabilité que, parmi ces 10 correspondants, il y en ait strictement plus qui sont chez un opérateur donné plutôt que chez un autre, s'établit à 56,3 % pour Orange France, 26,6 % pour SFR et 3,4 % pour Bouygues Telecom (65).
La différenciation tarifaire on net/off net défavorise donc mécaniquement, par effet club, les opérateurs dont le parc est plus modeste. Dans sa décision n° 2002-D-69 du 26 novembre 2002 relative aux saisines et aux demandes de mesures conservatoires présentées par la société Bouygues Telecom, l'Union fédérale des consommateurs Que Choisir et la Confédération de la consommation, du logement et du cadre de vie, le Conseil de la concurrence relevait ainsi que « la différenciation tarifaire peut influer sur le choix des clients lors du premier achat ou d'un renouvellement, dans la mesure où ils seront désormais susceptibles de tenir compte des réseaux auxquels appartiennent leurs principaux correspondants. Ces effets sont de nature à limiter l'interopérabilité des réseaux et donc à favoriser le plus grand des parcs, les clients valorisant la possibilité d'appeler et d'être appelés par le plus grand nombre possible de correspondants ».
Il pourrait néanmoins être objecté que la différenciation tarifaire on net/off net induit une dynamique proconcurrentielle en incitant chaque opérateur à accroître sa part de marché pour bénéficier au maximum de l'effet club.
Cet argument, issu de la littérature économique, revêt une certaine pertinence lorsque les parts de marché des opérateurs sont équilibrées. Chacun tire alors un même bénéfice de l'effet club et cherche à prendre un avantage sur ses concurrents. En revanche, lorsque les parts de marché sont déséquilibrées, comme c'est le cas en métropole, l'effet club crée au contraire un handicap pour les plus petits opérateurs, enfermant ces derniers dans un « cercle vicieux » : plus leur part de marché est faible, moins leurs offres sont attractives plus leur part de marché est faible, etc.
En tout état de cause, l'effet bénéfique de cette dynamique pro concurrentielle, lorsqu'il existe, ne constitue qu'un optimum de second rang par rapport à une situation dans laquelle les TA SMS restent proches des coûts.