II-4.2. Observations des autorités réglementaires nationales
et de la Commission européenne
Les autorités réglementaires nationales des autres Etats membres de la Communauté européenne n'ont pas transmis d'observations à l'Autorité.
Comme indiqué précédemment, la Commission européenne a été notifiée du projet de décision de l'Autorité sur les marchés pertinents de gros et de détail de la téléphonie fixe le 29 juillet 2005. Elle a validé l'analyse de l'ARCEP sur la puissance de France Télécom sur les marchés pertinents : « Conformément à l'article 7, paragraphe 5, de la directive "cadre, l'ARCEP peut adopter le projet de mesure final et, le cas échéant, le communiquer à la Commission. »
III. - OBJECTIFS DE L'ACTION RÉGLEMENTAIRE
Si l'analyse du niveau de développement de la concurrence conclut qu'un marché est effectivement concurrentiel, l'Autorité peut proposer la suppression des éventuelles obligations qui s'y appliquaient jusqu'alors ; dans le cas contraire, l'Autorité impose aux entreprises identifiées comme puissantes les obligations spécifiques appropriées, conformément aux articles L. 38 et L. 38-1 du CPCE. L'imposition de ces obligations doit être établie en tenant compte de la nature des obstacles au développement d'une concurrence effective et proportionnée à la réalisation des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du CPCE :
« 1° A la fourniture et au financement de l'ensemble des composantes du service public des communications électroniques ;
« 2° A l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques ;
« 3° Au développement de l'emploi, de l'investissement efficace dans les infrastructures, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques ;
« 4° A la définition de conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence ;
« 5° Au respect par les opérateurs de communications électroniques du secret des correspondances et du principe de neutralité au regard du contenu des messages transmis, ainsi que de la protection des données à caractère personnel ;
« 6° Au respect par les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques de l'ordre public et des obligations de défense et de sécurité publique ;
« 7° A la prise en compte de l'intérêt des territoires et des utilisateurs, notamment handicapés, dans l'accès aux services et aux équipements ;
« 8° Au développement de l'utilisation partagée entre opérateurs des installations mentionnées aux articles L. 47 et L. 48 ;
« 9° A l'absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des opérateurs ;
« 10° A la mise en place et au développement de réseaux et de services et à l'interopérabilité des services au niveau européen ;
« 11° A l'utilisation et à la gestion efficaces des fréquences radioélectriques et des ressources de numérotation ;
« 12° A un niveau élevé de protection des consommateurs, grâce notamment à la fourniture d'informations claires, notamment par la transparence des tarifs et des conditions d'utilisation des services de communications électroniques accessibles au public ;
« 13° Au respect de la plus grande neutralité possible, d'un point de vue technologique, des mesures qu'ils prennent ;
« 14° A l'intégrité et la sécurité des réseaux de communications électroniques ouverts au public. »
La présente section présente les obligations génériques sur les marchés de l'interconnexion et de l'accès (III-1) puis sur les marchés de détail (III-2), et présente les obstacles au développement d'une concurrence effective (III-3).
III-1. Obligations génériques d'interconnexion et d'accès
III-1.1. Introduction
D'une manière générale, l'interconnexion des réseaux permet aux opérateurs d'acheminer leurs trafics sur les réseaux des autres opérateurs. Elle permet ainsi à leurs abonnés de joindre les abonnés physiquement présents sur d'autres réseaux.
Par ailleurs, l'existence de marchés de gros de l'accès et de l'interconnexion permet à des opérateurs qui ne possèdent pas l'ensemble des infrastructures nécessaires à l'acheminement de trafic de bout en bout de s'appuyer sur les réseaux existants pour intervenir sur les marchés de détail.
Par conséquent, ces marchés de gros sont indispensables à l'existence et au bon fonctionnement d'une concurrence durable sur les marchés de communications électroniques.
A ce titre, tous les opérateurs, indépendamment de leur éventuelle puissance de marché, sont soumis à une obligation générique de faire droit aux demandes raisonnables d'interconnexion, en vertu de l'article L. 34-8 du CPCE, et peuvent être soumis à des obligations de faire droit aux demandes raisonnables d'accès, afin notamment d'assurer une connectivité de bout en bout entre l'ensemble des utilisateurs finals, et de garantir à ces derniers une accessibilité à l'ensemble des services de communications électroniques mis sur le marché.
III-1.2. Prééminence de la régulation
via les marchés de gros
La finalité de la conduite des analyses de marchés est, au-delà de la désignation d'opérateurs puissants, de déterminer les obligations spécifiques qui paraissent, conformément aux dispositions des articles L. 38 et L. 38-1 du CPCE, proportionnées aux objectifs de régulation fixés à l'article L. 32-1.
Dans l'esprit du nouveau cadre européen, et conformément à l'article L. 38-1 du CPCE, l'Autorité privilégie une régulation via les marchés de gros et n'envisage une régulation via les marchés de détail que lorsque l'imposition d'obligations de gros ne suffit pas à atteindre l'objectif poursuivi. Dans cette logique, sont examinées dans le chapitre IV les obligations sur les marchés de gros et dans le chapitre V les obligations complémentaires sur les marchés de détail.
III-1.3. Principales obligations sur les marchés de gros
Conformément à l'article 16 de la directive « cadre », lorsqu'une autorité de régulation nationale a identifié un opérateur exerçant une influence significative sur un marché pertinent, celle-ci est tenue de lui imposer des mesures réglementaires spécifiques visées aux articles 9 à 13 de la directive « accès ». Ces obligations sont les suivantes :
- obligations de transparence ;
- obligations de non-discrimination ;
- obligations relatives à la séparation comptable ;
- obligations relatives à l'accès à des ressources spécifiques et à leur utilisation ;
- contrôle des prix et obligations relatives au système de comptabilisation des coûts.
Conformément au considérant 14 de la même directive, il s'agit d'un ensemble maximal d'obligations pouvant être imposées aux entreprises.
L'article 8 de la directive « accès » prévoit également que les obligations imposées sont fondées sur la nature du problème constaté, proportionnées et justifiées au regard des objectifs énoncés dans l'article 8 de la directive « cadre ».
Par ailleurs, le paragraphe 118 des « lignes directrices » indique qu'un projet de mesure est considéré comme compatible avec le principe de proportionnalité si la mesure à prendre poursuit un but légitime et si les moyens employés sont à la fois nécessaires et aussi peu contraignants que possible.
L'article L. 38-I du code des postes et des communications électroniques prévoit que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer, en matière d'interconnexion et d'accès, une ou plusieurs des obligations [...], proportionnées à la réalisation des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 ».
Il s'agit des obligations suivantes :
- rendre publiques des informations concernant l'interconnexion ou l'accès, notamment publier une offre technique et tarifaire détaillée d'interconnexion ou d'accès lorsqu'ils sont soumis à des obligations de non-discrimination ;
- fournir des prestations d'interconnexion ou d'accès dans des conditions non discriminatoires ;
- faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des éléments de réseau ou à des moyens qui y sont associés ;
- ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants ;
- isoler sur le plan comptable certaines activités en matière d'interconnexion ou d'accès.
S'agissant de l'accès, l'Autorité peut imposer à un opérateur réputé exercer une influence significative de faire droit aux demandes raisonnables, notamment lorsqu'elle considère qu'un refus ou des propositions déraisonnables empêcheraient l'émergence d'un marché de détail concurrentiel durable ou risqueraient d'être préjudiciables aux utilisateurs finals.
Dans ce cadre, l'Autorité peut préciser les contours de l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès en imposant certains des mécanismes spécifiques qui figurent notamment à l'article D. 310 du code des postes et des communications électroniques.
En outre, lorsque l'Autorité apprécie le caractère proportionné des obligations d'accès qu'elle est susceptible d'imposer, elle veille notamment à prendre en compte les critères d'analyse suivants, mentionnés à l'article L. 38-V du code des postes et des communications électroniques :
- la viabilité technique et économique de l'utilisation ou de la mise en place de ressources concurrentes, compte tenu du rythme auquel le marché évolue et de la nature et du type d'interconnexion et d'accès concerné ;
- le degré de faisabilité de la fourniture d'accès proposée, compte tenu de la capacité disponible ;
- l'investissement initial réalisé par le propriétaire des ressources, sans négliger les risques inhérents à l'investissement ;
- la nécessité de préserver la concurrence à long terme ;
- le cas échéant, les éventuels droits de propriété intellectuelle pertinents ;
- la fourniture de services paneuropéens.
III-2. Obligations génériques pour les marchés de détail
En ce qui concerne les obligations imposées sur les marchés de détail, l'article 17 de la directive « service universel » dispose que lorsqu'un marché de détail n'est pas en situation de concurrence réelle et que les obligations imposées au titre de l'interconnexion et de l'accès ne permettent pas réaliser les objectifs de régulation, les autorités réglementaires nationales peuvent imposer des obligations aux entreprises puissantes sur ces marchés. Ces obligations « peuvent inclure l'exigence que les entreprises visées ne pratiquent pas de prix excessifs, n'interdisent pas l'accès au marché ou ne restreignent pas la concurrence en fixant des prix d'éviction, ni ne privilégient de manière abusive certains utilisateurs finals ou groupent leurs services de façon déraisonnable. Les autorités réglementaires nationales peuvent appliquer à ces entreprises des mesures d'encadrement des tarifs [...]. Les autorités réglementaires nationales veillent à ce que, lorsqu'une entreprise est soumise à une réglementation relative aux tarifs de détail ou à d'autres contrôles concernant le marché de détail, les systèmes nécessaires et appropriés de comptabilité des coûts soient mis en oeuvre [...] ».
Ces dispositions ont été transposées à l'article L. 38-1 du CPCE qui dispose que l'Autorité peut, lorsque les obligations imposées au titre de l'article L. 38 ne permettent pas à elles seules d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 32-1, imposer aux opérateurs disposant d'une influence significative sur les marchés de détail une ou plusieurs des obligations présentées ci-après. Elles doivent être proportionnées à la réalisation de ces objectifs susmentionnés, et établies en tenant compte de la nature des obstacles au développement d'une concurrence effective identifiés lors de l'analyse du marché prévue à l'article L. 37-1. Ces obligations sont :
- l'obligation de non-discrimination et interdiction de couplage abusif ;
- l'obligation de contrôle tarifaire : interdiction des tarifs excessifs ou d'éviction, pratiquer des tarifs reflétant les coûts, encadrement pluriannuel des tarifs, communication préalable des tarifs dans la mesure où ces tarifs ne sont pas déjà contrôlés au titre du service universel ;
- l'obligation de comptabilisation des coûts.
III-3. Obstacles au développement d'une concurrence effective
En vertu des articles L. 37-1 et L. 38 du CPCE, la mise en oeuvre, par l'Autorité, d'obligations ex ante au niveau des marchés de gros doit permettre « de lever ou d'atténuer les obstacles au développement d'une concurrence effective », ces obstacles étant identifiés au cours de l'analyse des marchés. Il convient donc de procéder à cet examen en ce qui concerne France Télécom.
Dans l'esprit du nouveau cadre européen, l'Autorité privilégie une régulation via les marchés de gros ; seul son caractère insuffisant peut conduire l'Autorité à envisager une régulation des marchés de détail pour atteindre l'objectif poursuivi.
Les remèdes imposés sur les marchés de gros reposent principalement sur la sélection du transporteur, l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès, les obligations de transparence et de non discrimination, la publication d'une offre de référence « Interconnexion et sélection du transporteur » et de « Vente en gros de l'accès au service téléphonique », le contrôle des tarifs et les obligations comptables ; ces obligations font l'objet de la partie IV de la présente analyse.
D'une façon générale, il est difficile de prévoir avec certitude l'effet des remèdes imposés sur les marchés de gros sur le fonctionnement de la concurrence. En effet, l'imposition de ces remèdes a pour objectif de permettre aux opérateurs concurrents d'accéder aux offres de gros nécessaires pour intervenir dans des conditions de concurrence équivalentes sur les marchés détail par rapport à celles dont bénéficie France Télécom. Cependant, comme cela est exposé dans l'analyse des marchés de détail, il paraît peu vraisemblable que ces remèdes conduisent les marchés de détail à une situation de concurrence effective sur la période d'analyse.
Le principal frein au développement d'une concurrence effective sur les marchés de détail réside dans la très forte position de puissance de France Télécom sur les marchés de l'accès. A partir de cette position, France Télécom est potentiellement en mesure d'exercer un effet de levier horizontal vers l'ensemble des marchés des communications. Le développement de la demande en accès large bande couplé aux actions de régulation sur les marchés du haut débit devrait permettre dans une certaine mesure de rétablir les conditions d'une concurrence effective en matière d'accès large bande.
En matière d'accès en bande étroite, compte tenu des contraintes économiques et techniques, le déploiement par les opérateurs alternatifs d'infrastructures propres de boucle locale n'est pas envisageable, sauf pour les plus gros accès professionnels. Les accès en large bande sont impropres pour répondre à une demande simple d'accès au réseau téléphonique ouvert au public, demande actuellement couverte par des raccordements analogiques ou numériques de base. Seule l'imposition d'une vente en gros de l'accès au service téléphonique est de nature à permettre l'établissement d'une concurrence accrue.
La création d'une nouvelle offre de gros est néanmoins un processus complexe qui nécessite une concertation approfondie avec l'ensemble des acteurs du secteur et une coopération active de France Télécom. L'industrialisation d'une telle offre nécessitera la résolution de nombreux problèmes techniques, juridiques et commerciaux. Un allègement substantiel des obligations portant sur les marchés de détail ne pourra donc avoir lieu qu'à l'issue de la mise en oeuvre effective de l'obligation de vente en gros de l'accès au service téléphonique et l'amélioration de l'offre de gros de dégroupage total.
Dans cette attente et comme on l'a vu précédemment, ce manque de concurrence effective n'est pas uniquement lié à l'importance de la puissance de France Télécom sur les marchés de détail. Certains facteurs tels que la persistance de barrières économiques à l'entrée suggèrent que la contrainte exercée sur France Télécom par l'entrée effective ou potentielle de nouveaux opérateurs est limitée. D'autres facteurs, tels que la puissance exercée simultanément par France Télécom sur les marchés de gros et les marchés avals de détail montre que les risques d'éviction de la concurrence ou de fermeture de l'accès à certains marchés demeurent relativement élevés. Ces risques sont détaillés ci-après, afin de préciser les obligations qui permettent de les anticiper sur les marchés de détail (partie V).
IV. - OBLIGATIONS POUR LES MARCHÉS DE GROS
DE LA TÉLÉPHONIE FIXE
L'influence significative qu'exerce France Télécom sur les marchés de gros et de détail de la téléphonie fixe rend nécessaire l'imposition de remèdes sur ces marchés.
L'Autorité justifie dans cette partie la nécessité et la proportionnalité des obligations qu'elle lui impose, dans la présente décision, sur les marchés de gros.
Ces obligations sont imposées à France Télécom jusqu'au 1er septembre 2008, sans préjudice de l'éventuel réexamen que l'Autorité pourrait être amenée à anticiper conformément à l'article D. 303 du CPCE.
IV-1. Obligation de faire droit
aux demandes raisonnables d'accès
L'article L. 38 du code des postes et communications électroniques précité prévoit que « les opérateurs réputés exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques peuvent se voir imposer (...) [de] faire droit aux demandes raisonnables d'accès à des éléments de réseau ou à des moyens qui y sont associés ».
Comme cela a été démontré précédemment, France Télécom dispose d'une influence significative sur l'ensemble des marchés pertinents de détail et de gros de la téléphonie fixe. En outre, l'analyse a également montré qu'elle disposait d'un réseau capillaire très étendu qui peut difficilement être dupliqué par un opérateur alternatif.
Par conséquent, afin de permettre aux opérateurs d'intervenir dans des conditions équivalentes sur les marchés de détail situés en aval, il est nécessaire d'imposer à France Télécom une obligation de fournir, en réponse aux demandes raisonnables des opérateurs alternatifs, des prestations d'accès, lorsque celles-ci sont relatives aux marchés de gros sur lesquels elle exerce une influence significative, ou nécessaires pour l'exercice, au bénéfice des utilisateurs, d'une concurrence effective et loyale sur les marchés de détail.
D'une manière générale, conformément aux dispositions de l'article L. 38-V du code, le caractère raisonnable d'une demande d'accès formulée par un opérateur devra être apprécié au regard de la proportionnalité entre les contraintes économiques et techniques d'une telle demande pour France Télécom et le bénéfice attendu pour la résolution d'un problème concurrentiel particulier ou plus généralement pour le fonctionnement d'un des marchés de gros ou de détail de la téléphonie fixe pertinents.
IV-1.1. Obligations générales
En premier lieu, compte tenu des investissements consentis par les opérateurs pour s'interconnecter sur l'un ou l'autre des commutateurs de France Télécom, et en vertu de l'article D. 310 (3°) du CPCE, il est proportionné d'imposer à cette dernière de ne pas retirer un accès déjà accordé à un opérateur, sauf accord préalable exprès de l'Autorité, conformément à l'objectif de développement efficace dans les infrastructures et de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du code précité.
Par ailleurs, France Télécom étant une entreprise verticalement intégrée fournissant tout type de prestations de détail et de gros, il est également nécessaire et proportionné, au regard notamment de l'objectif de développement efficace dans les infrastructures et de compétitivité du secteur mentionné au 3° de l'article L. 32-1 du code précité, qu'elle présente les prestations qu'elle offre de façon suffisamment claire et détaillée, et qu'elle ne subordonne pas l'octroi d'une prestation à une autre, afin de ne pas conduire les acteurs à payer pour des prestations qui ne leur seraient pas nécessaires.
Enfin, France Télécom devra, conformément à l'article D. 310 (2°), négocier de bonne foi avec les opérateurs qui demandent des prestations d'accès relatives à ces marchés, afin, d'une part, de minimiser les cas de litige, et, d'autre part, de ne pas profiter de l'influence significative qu'elle exerce sur ces marchés pour durcir les négociations avec les opérateurs.
Ces obligations sont conformes aux critères fixés par l'article L. 38-V en particulier les a, b et d en ce qu'elles sont aujourd'hui fournies par France Télécom et permettent le développement de la concurrence. Elles sont proportionnées aux objectifs fixés à l'article L. 32-1-II du CPCE précités, en particulier les 2°, 3° et 4°.
IV-1.2. Obligation de fournir les prestations
d'accès actuellement fournies
France Télécom fournit aujourd'hui des prestations de départ d'appel, de transit et de terminaison d'appel, basées sur des protocoles de type « signalisation par canal sémaphore CCITT n° 7 » (dit SS7).
Elle fournit également une prestation d'interconnexion forfaitaire pour l'internet, ainsi que des prestations d'accès et d'interconnexion associées à l'ensemble de ces prestations :
- des prestations connexes de raccordement de ses sites d'interconnexion ;
- des prestations de facturation pour compte de tiers pour les appels issus de son réseau à destination de services spéciaux des opérateurs.
Elle dispose par conséquent de fait de la capacité technique à fournir l'ensemble de ces prestations.
L'Autorité explique ci-dessous pourquoi il est nécessaire et proportionné au regard des objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du code d'obliger France Télécom à continuer à fournir ces prestations.
IV-1.2.1. Prestations d'acheminement de trafic
sur les marchés de gros pertinent
a) Fourniture de prestations de départ d'appel
France Télécom est un opérateur durablement puissant sur le marché de détail de l'accès, et est de fait dans une situation proche du monopole sur le marché du départ d'appel, comme en témoigne sa part de marché supérieure à 98 %.
Les prestations de départ d'appel que France Télécom fournit sont par conséquent indispensables pour permettre aux opérateurs alternatifs d'intervenir sur l'ensemble des marchés de détail et de gros. En effet, ils ne peuvent réaliser cette prestation dans la mesure où elle repose en grande partie sur la boucle locale de France Télécom dont le caractère de facilité essentielle n'est plus à démontrer (52), et dont le coût de reconstruction à neuf est évalué à 28 milliards d'euros (cf. l'analyse de la puissance de France Télécom sur ce marché).
En l'absence de l'obligation de fournir du départ d'appel aux opérateurs alternatifs, France Télécom pourrait contraindre dans une large mesure leur intervention sur l'ensemble de ces marchés.
C'est pourquoi il est nécessaire que France Télécom propose, sauf pour des raisons dûment motivées, l'interconnexion à chacun de ses commutateurs d'abonnés.
Eu égard à l'ensemble de ces éléments, et dans la mesure où elle fournit déjà actuellement cette prestation nécessaire au développement de la concurrence et indispensable au maintien des opérateurs alternatifs sur ces marchés, cette obligation est conforme à l'article L. 38-V, a, b et d.
Plus généralement, le nombre et la localisation des points d'accès à l'offre de départ d'appel devront permettre de répondre aux demandes raisonnables des acteurs souhaitant s'interconnecter avec le réseau de l'opérateur.
En conséquence, l'obligation de fournir des prestations de départ d'appel ainsi spécifiée, imposée à France Télécom, est proportionnée aux objectifs mentionnés à l'article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques. Elle est notamment nécessaire à l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques (2°), au développement de l'investissement efficace dans les infrastructures de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques (3°), et garantit l'égalité des conditions de concurrence et la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement (4°). Cette obligation, conforme à l'article D. 310 (1°) du code, constitue le seul moyen permettant de répondre aux problèmes de concurrence démontrés ci-avant.