I. - Les fondements de l'encadrement tarifaire
D'une manière générale, l'encadrement tarifaire est un contrat entre le régulateur et l'entité régulée, dont l'objectif est d'encadrer la trajectoire tarifaire de tout ou partie des produits du secteur sur lequel porte la régulation, en vue de maintenir, grâce à un effort d'efficience, le taux de marge de l'entreprise constant sur une période déterminée. Le choix d'un horizon temporel de trois ans a semblé judicieux compte tenu du fait que l'article L. 5-2 du code des postes et des communications électroniques impose un minimum de deux ans et qu'une durée supérieure, par exemple cinq ans, est apparue trop longue au regard de la prévision possible des grands indicateurs économiques.
I-1. Le principe de l'encadrement
Le taux de marge est maintenu constant si à toute variation des charges correspond une variation identique du chiffre d'affaires. L'évolution de chacune de ces deux variables est déterminée par plusieurs facteurs.
La progression du chiffre d'affaires dépend de l'évolution combinée des volumes et des tarifs. L'élasticité de la demande par rapport au prix vient toutefois modérer les effets purement mécaniques de l'évolution des prix. Les charges, quant à elles, suivent une tendance de base que modulent à la marge, d'une part, la variation éventuelle de l'effort d'efficience (facteur endogène), d'autre part, la possible modification de la tendance naturelle du volume d'activité (facteur fondamentalement exogène). Lorsque l'évolution naturelle du volume d'activité est stable et correctement anticipée, et lorsque l'effort d'efficience est fixé à son niveau tendanciel, l'égalisation du taux de variation du chiffre d'affaires à l'évolution de référence des charges assure structurellement le maintien du taux de marge.
Cette harmonisation de l'évolution des revenus et de celle des charges conduit à exprimer le taux de l'encadrement des tarifs en fonction du taux d'inflation et de l'effort exigible d'efficience, prenant en compte l'évolution naturelle du volume, requis pour maintenir le taux de rentabilité. Cette relation n'est autre que le contrat d'encadrement tarifaire.
I-2. La formule de l'encadrement
Si i désigne le taux d'inflation et si X désigne le facteur d'efficience, alors le taux annuel d'évolution des prix imposé par l'encadrement tarifaire s'écrit dp/p = i - X.
Après avoir analysé les déterminants des coûts postaux, et l'évolution des tarifs postaux sur la période récente, l'Autorité a choisi comme référence de l'inflation l'indice des prix à la consommation.
C'est d'ailleurs l'option généralement adoptée par les politiques d'encadrement tarifaire dans les autres pays européens, comme le montre le tableau suivant qui met en évidence une situation contrastée mais permet de voir que la France ne se situe pas hors des références ou des comparaisons internationales.
I-3. Le facteur X
Le facteur X est égal à l'évolution du coût moyen exprimé en termes réels, corrigée de l'effet de l'élasticité de la demande, soit X = (i + t - dc/c)/(1 + e), où t est la tendance naturelle du volume (l'évolution du volume qui serait observée si les prix suivaient l'inflation), dc/c est l'évolution des charges et e est l'élasticité de la demande par rapport au prix, estimée à - 0,28 sur la base de travaux publiés.
La variable de contractualisation est le facteur X ; si l'effort effectivement réalisé est supérieur à l'effort minimum requis, alors le gain de rentabilité ainsi obtenu est acquis à l'entreprise ; si l'évolution des charges se traduit par un effort réalisé inférieur à l'effort minimum requis, l'entreprise subit la perte de rentabilité qui en résulte.
A la date initiale du contrat, il convient donc de calculer l'évolution des charges attendue sur la période considérée et d'anticiper la valeur des deux variables exogènes que sont le taux d'inflation et la tendance naturelle du volume : l'évolution autorisée des tarifs se déduit du niveau minimum requis de l'effort d'efficience.
II. - Les valeurs retenues
La progression de l'indice des prix à la consommation a été estimée à 1,8 % par an.
Les hypothèses retenues par l'Autorité pour fixer la valeur de l'augmentation des tarifs conduisent à estimer une évolution des charges de La Poste de 1,65 % par an et une évolution du volume de - 0,35 % par an.
D'où le facteur X égal à (1,8 - 0,35 - 1,65)/(1 - 0,28) = - 0,3. Ce résultat ne signifie pas que La Poste ne réalise pas de gains d'efficience. Il traduit le fait qu'elle se situe actuellement dans une zone où ses coûts moyens augmentent plus que l'inflation, du fait d'une prévision de diminution de son volume d'activité et de la rigidité de ses charges. Les actions de modernisation, notamment les projets d'investissement, qu'elle a engagées depuis 2004 devraient lui permettre de combler, au moins partiellement, le retard technologique qu'elle a accumulé et de réaliser, à moyen terme, l'adaptation nécessaire de ses processus de production.
La valeur retenue pour l'évolution des charges repose sur deux calculs aboutissant au même résultat. Le premier résulte des prévisions faites par La Poste sur le périmètre du service universel. Le second repose sur une simulation de la déformation de la structure des charges 2004 de l'établissement public effectué par l'Autorité. Les deux calculs conduisent au même résultat et font apparaître, en moyenne sur la période 2006-2008, une augmentation des charges en coûts complets de 1,65 % par an.
L'évolution du volume a été approchée par celle du courrier. La Poste anticipe une diminution du volume du courrier et estime que cette baisse pourrait s'établir à - 0,65 % par an. Cette tendance s'explique par l'apparition de nouveaux modes de communications dématérialisés qui se sont substitués aux envois postaux et par la rationalisation des envois de la part des grands émetteurs. Toutefois, rien ne permet aujourd'hui d'évaluer avec une assurance raisonnable l'ampleur, ni même le sens, des variations de court terme.
C'est pourquoi l'Autorité a préféré l'approche historique et retenu comme valeur l'estimation de la moyenne mobile de l'évolution constatée sur la période 2003-2005, c'est-à-dire l'hypothèse d'une évolution annuelle moyenne du volume d'activité de - 0,35 % sur les trois années de l'encadrement tarifaire.
III. - L'ajustement
Compte tenu de la rigidité des charges à court terme, il est apparu indispensable que le risque portant sur l'estimation des volumes soit pris en compte et partagé équitablement entre les consommateurs et l'opérateur. Ainsi, l'encadrement prévoit qu'en cas de baisse des volumes supérieure à la tendance estimée pour une année donnée la contrainte tarifaire soit relâchée pour permettre à La Poste d'ajuster ses recettes. En sens inverse, si l'évolution observée est plus favorable, l'encadrement tarifaire est resserré et le gain d'efficience acquis mécaniquement bénéficie au consommateur. Dans les deux cas, l'ajustement est limité à 50 % / (1 - 0,28), soit 70 % de l'écart constaté.
Pour la construction de l'encadrement tarifaire, le taux d'inflation a été estimé à 1,8 % par an, chiffre retenu pour établir la valeur de l'encadrement tarifaire la première année d'application. Il est apparu toutefois nécessaire de procéder à une actualisation annuelle, pour approcher plus précisément l'évolution effective de l'indice des prix à la consommation. La valeur retenue pour établir le niveau de l'encadrement tarifaire des deuxième et troisième années d'application sera celle de la prévision du projet de loi de finance initiale. Cette valeur connue à l'automne précédant l'année d'application permettra à La Poste d'établir ses prévisions d'évolution tarifaires.
IV. - Les autres dispositions
La Poste et l'Autorité sont convenues d'effectuer un point régulier sur les prix et les volumes, au moins deux fois par an, dans le cadre d'un processus de fourniture d'information.
L'encadrement pluriannuel des tarifs du service universel postal est établi pour la période qui s'étend du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 sur des bases correspondant à l'environnement général et aux projections d'évolution prévalant à la date du 1er juin 2006. Si une ou plusieurs composantes de cet environnement venaient à être sensiblement modifiées en cours de période, remettant en cause l'équilibre économique sous-jacent, le dispositif serait réexaminé, sur proposition de La Poste ou d'office à l'initiative de l'Autorité, pour adapter, autant que de besoin, les conditions et les modalités d'exécution de l'encadrement tarifaire,
Décide :