II-D-4. Conclusion sur l'application des trois critères
définis par la Commission
L'analyse exposée ci-avant conduit l'Autorité à considérer que les trois critères définis par la Commission sont remplis en ce qui concerne le marché des offres de gros d'accès large bande livrées au niveau national.
Dans ce cadre, et par référence aux dispositions du considérant n° 16 de la recommandation de la Commission sur les marchés pertinents, le marché de gros des offres d'accès large bande livrées au niveau national doit donc être considéré comme pertinent au titre de la régulation sectorielle des communications électroniques.
III. - ANALYSE DE L'AUTORITÉ QUANT À LA DÉSIGNATION D'UN OPÉRATEUR EXERÇANT UNE INFLUENCE SIGNIFICATIVE
III-A. - Principes généraux relatifs à la détermination des conditions caractérisant une situation
d'influence significative sur le marché de gros des offres d'accès large bande livrées au niveau national
L'article 14 de la directive cadre susvisée précise la notion d'entreprises puissantes sur un marché et dispose que : « Une entreprise est considérée comme disposant d'une puissance significative sur le marché si, individuellement ou conjointement avec d'autres, elle se trouve dans une position équivalant à une position dominante, c'est-à-dire qu'elle est en mesure de se comporter, dans une mesure appréciable, de manière indépendante de ses concurrents, de ses clients et, en fin de compte, des consommateurs.
En particulier, lorsque les autorités réglementaires nationales procèdent à une évaluation visant à déterminer si deux entreprises, ou plus, occupent conjointement une position dominante sur un marché, elles se conforment aux dispositions du droit communautaire et tiennent le plus grand compte des « Lignes directrices sur l'analyse du marché et l'évaluation de la puissance sur le marché » publiées par la Commission [...].
Lorsqu'une entreprise est puissante sur un marché particulier, elle peut également être considérée comme puissante sur un marché étroitement lié, lorsque les liens entre les deux marchés sont tels qu'ils permettent d'utiliser sur un des deux marchés, par effet de levier, la puissance détenue sur l'autre marché, ce qui renforce la puissance de l'entreprise sur le marché. »
Il est en outre précisé au point 5 des lignes directrices que la Commission et les autorités réglementaires nationales doivent « se fonder sur les principes et les méthodes du droit de la concurrence pour définir les marchés qui devront être soumis à une réglementation ex ante et apprécier le puissance des entreprises sur ces marchés ».
Ainsi, il résulte de l'article 14 de la directive « cadre » et du point 5 des lignes directrices publiées par la Commission que les autorités réglementaires nationales ne doivent intervenir pour imposer des obligations aux entreprises que dans la mesure où elles considèrent que les marchés envisagés ne sont pas en situation de concurrence réelle, essentiellement en raison du fait que ces entreprises ont acquis « une position équivalente à une position dominante » au sens de l'article 82 du traité CE.
En droit interne, l'article L. 37-1 du code des postes et des communications électroniques dispose : « Est réputé exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques tout opérateur qui, pris individuellement ou conjointement avec d'autres, se trouve dans une position équivalente à une position dominante lui permettant de se comporter de manière indépendante vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et des consommateurs. »
Pour évaluer l'existence d'une influence significative, l'Autorité doit, conformément aux dispositions de l'article D. 302 du code des postes et des communications électroniques, tenir le plus grand compte des lignes directrices adoptées par la Commission.
L'observation des parts de marché des acteurs constitue la première étape. La Commission propose trois chiffres-clés dans le déroulement de cet exercice :
- au-delà de 40 % de part de marché, il est peu probable qu'une entreprise ne soit pas en situation de puissance significative ;
- une présence supérieure à 50 % du marché « suffit, sauf circonstances exceptionnelles, à établir l'existence d'une position dominante » (22) ;
- une entreprise ayant au contraire moins de 25 % de part de marché est peu susceptible de se révéler puissante, même si cela n'est pas totalement exclu.
L'analyse des parts de marché, bien que prospective, ne suffit donc pas à démontrer l'éventuelle influence significative des acteurs présents sur un marché. Pour une analyse complète du développement de la concurrence sur les marchés pertinents, les lignes directrices recommandent en effet de « procéder à une analyse approfondie et exhaustive des caractéristiques économiques du marché pertinent avant de conclure à l'existence d'une puissance sur le marché ». A cet égard, la Commission recommande d'utiliser notamment les critères suivants :
- la taille de l'entreprise ;
- le contrôle d'une infrastructure qu'il n'est pas facile de dupliquer ;
- les avancées ou la supériorité technologiques ;
- l'absence ou la faible présence de contre-pouvoir des acheteurs ;
- la diversification des produits ou des services ;
- l'intégration verticale de l'entreprise ;
- la présence d'économies de gamme ou d'échelle ;
- l'absence de concurrence potentielle ;
- l'accès privilégié aux marchés des capitaux.
L'analyse qui suit démontre l'influence significative que détient France Télécom sur le marché de gros des accès large bande livrés au niveau national. Deux types d'indicateurs, quantitatifs et qualitatifs, permettent de caractériser l'état de la concurrence et d'évaluer l'influence exercée par les différents acteurs positionnés sur le marché analysé.