Article (LOI d'orientation quinquennale no 94-66 du 24 janvier 1994 relative à la maîtrise des finances publiques (1))
II. - La stratégie de redressement des finances publiques
L'apurement des déficits n'aurait pas de sens s'il reposait uniquement sur l'augmentation des prélèvements obligatoires. Nécessaire pendant la phase d'assainissement, une telle politique ne serait pas soutenable à long terme. Le premier objectif du Gouvernement est donc d'engager la réduction de la ponction opérée sur l'économie par les prélèvements obligatoires et le déficit, ce qui implique une maîtrise de l'ensemble des dépenses publiques.
Cette stratégie de redressement repose sur trois principes:
1. Le redressement des finances publiques doit être appréhendé de façon globale, ce qui suppose un effort conjoint de l'Etat, de la sécurité sociale et des collectivités locales. Il est en effet impossible de concevoir un redressement du budget de l'Etat sans tenir compte de la remise en ordre qui doit être opérée dans les comptes des autres administrations publiques.
Compte tenu de la situation budgétaire très dégradée, la programmation quinquennale impose que le redressement de la sécurité sociale soit réalisé sans contribution de l'Etat.
Cette orientation stratégique est justifiée par les raisons suivantes:
La progression récente des dépenses de la sécurité sociale a été beaucoup plus rapide que celle du budget de l'Etat qui, par ailleurs, a supporté tout le poids de l'allégement des prélèvements obligatoires. La dérive de la sécurité sociale pèse d'ailleurs d'un poids déjà très lourd sur le budget de l'Etat du fait notamment de dispositifs en faveur de l'emploi qui, peu ou prou, visent tous à compenser un coût de la protection sociale pesant trop lourdement sur les bas salaires ou les emplois d'insertion.
Dans la situation budgétaire présente, de nouveaux concours de l'Etat à la sécurité sociale équivaudraient enfin à financer des dépenses courantes par le déficit supplémentaire, ce qui n'est pas acceptable.
La sécurité sociale doit donc retrouver un rythme de croissance des dépenses compatible avec la restauration de son équilibre financier, sans recourir aux solutions de facilité que seraient la hausse répétée des prélèvements sociaux ou les concours de l'Etat.
S'agissant des collectivités locales, il leur appartiendra de réaliser elles aussi un effort important de maîtrise de leurs dépenses, parallèle à celui consenti par l'Etat, leur permettant de ne pas accroître leur besoin de financement, sans pour autant accroître leur pression fiscale.
2. Concernant l'Etat, le redressement amorcé en 1993 doit se poursuivre en 1994, mais la stabilisation de l'endettement nécessitera plusieurs années d'efforts.
Compte tenu de la situation économique et budgétaire, les projections pluriannuelles montrent qu'il n'est pas possible de passer du déficit actuel proche de 4,5 p. 100 du P.I.B. à l'objectif de 2,5 p. 100 du P.I.B. avant 1997, ce qui nécessite de réduire le déficit d'un demi-point de P.I.B. chaque année dès 1994.
3. L'objectif de réduction du déficit impose de stabiliser les dépenses en francs constants dès 1994.
La programmation pluriannuelle repose sur l'hypothèse que les recettes fiscales progresseraient parallèlement à la richesse nationale à partir de 1995. Cette hypothèse de stabilisation de la pression fiscale de l'Etat est relativement optimiste en ce sens qu'elle suppose que le décrochement constaté depuis 1991 du rythme de progression des recettes par rapport à celui du P.I.B. se résorberait dès 1995.
Compte tenu de cette hypothèse, le respect de l'objectif de déficit à moyen terme impose que l'ensemble des dépenses, y compris les intérêts de la dette, ne progresse pas plus vite que les prix prévisionnels, de 1994 à 1997. A titre conventionnel, les taux à court terme ont été estimés à 6,5 p. 100 et les taux à long terme à 7 p. 100 à partir de 1994.
Cette forte réduction de la progression des dépenses publiques par rapport à leur évolution tendancielle impose que des économies soient opérées dans tous les domaines de l'action de l'Etat.
D'importantes réformes des structures administratives permettant d'améliorer leur efficacité et leur productivité devront être mises en oeuvre dès 1994 et poursuivies les années suivantes. Elles impliqueront de profondes réorganisations de certains services administratifs et, le cas échéant, la redéfinition de leurs missions. Ces réformes permettront notamment aux administrations de l'Etat de tirer parti des investissements informatiques considérables réalisés dans l'administration. La réalisation de ces réformes sera facilitée par la mise en place de nouveaux instruments de réallocation des emplois entre les différents ministères permettant d'améliorer la mobilité des fonctionnaires.
Il sera également procédé, dans le cadre de la procédure budgétaire, à un examen critique des principaux régimes d'intervention publique, afin d'en améliorer l'efficacité et d'en maîtriser le coût dans l'avenir, conformément aux objectifs de la programmation à moyen terme.
C'est donc une révision en profondeur des services votés qui s'impose afin de redéployer les marges de manoeuvre budgétaires ainsi dégagées vers la réduction du déficit budgétaire, vers le financement des priorités et vers l'allégement de la pression fiscale.