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Article (CONSEIL CONSTITUTIONNEL Observations du Gouvernement en réponse à la saisine du Conseil constitutionnel en date du 27 décembre 1994 par soixante députés)

Article (CONSEIL CONSTITUTIONNEL Observations du Gouvernement en réponse à la saisine du Conseil constitutionnel en date du 27 décembre 1994 par soixante députés)

2. Le deuxième grief est tiré de l'extension excessive des publics visés par les associations intermédiaires, extension entraînant, si on comprend bien le recours, une rupture d'égalité
Cette argumentation manque en fait.
Les dispositions dérogatoires du droit commun dont bénéficient les associations intermédiaires sont justifiées par le souci de faciliter le retour à l'emploi de personnes se trouvant dans une situation telle que, sans ces avantages particuliers, elles perdraient en fait toute chance de réinsertion.
Contrairement à ce qu'affirment les requérants, la notion de « personnes sans emploi rencontrant des difficultés particulières d'insertion » est précisée par la loi, qui donne une liste indicative.
La nouvelle rédaction du I de l'article L. 128 ne modifie que très légèrement la définition actuelle de l'objet des associations intermédiaires: L'ancienne rédaction était la suivante:
« Elle (l'association intermédiaire) a pour objet d'embaucher des personnes dépourvues d'emploi et éprouvant des difficultés de réinsertion, notamment les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, les chômeurs de longue durée et les chômeurs âgés de plus de cinquante ans... » La nouvelle rédaction indique:
« L'association a pour objet d'embaucher des personnes sans emploi rencontrant des difficultés particulières d'insertion ou de réinsertion,
notamment les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, les chômeurs âgés de plus de cinquante ans, les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique, les jeunes en difficulté, les personnes prises en charge au titre de l'aide sociale... » Ces deux rédactions ne diffèrent que sur deux points:
a) La mention des difficultés particulières d'insertion:
Le texte permet ainsi de lever toute ambiguïté sur le fait que ses bénéficiaires peuvent être des personnes n'ayant pas réussi à s'insérer sur le marché du travail, notamment les jeunes en difficulté qui n'auraient jamais travaillé ou certains bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, qui n'ont jamais accédé à un emploi régulier. La prise en charge de ces publics se trouve donc affirmée dans la loi, alors qu'elle ne l'était pas auparavant. Loin d'entraîner un élargissement vers des publics qui ne rencontreraient pas de réelles difficultés sur le marché de l'emploi, la mention du mot « insertion » contribue à bien orienter l'action des associations intermédiaires vers les publics les moins préparés à affronter le marché du travail. Le mot « particulières » permet également de privilégier le recrutement de personnes qui ont des difficultés spécifiques. La précision ainsi apportée exprime la priorité donnée par le législateur à la lutte contre l'exclusion.
b) L'énoncé des différentes catégories diffère de l'ancien sur trois points: Il mentionne en effet les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique, les jeunes en difficulté et les personnes prises en charge au titre de l'aide sociale, dont les difficultés d'insertion ou de réinsertion sont souvent très importantes. Si la loi précise le champ d'action des associations intermédiaires, c'est afin de mieux orienter le recrutement de celles-ci vers des publics qui ne peuvent que très difficilement bénéficier d'autres dispositifs d'aide à l'insertion.
Le grief tiré de la prétendue rupture d'égalité résultant de l'imprécision des termes de la loi manque donc en fait.
A ces précisions s'ajoute le caractère plus rigoureux de la procédure d'agrément. Celui-ci doit être renouvelé dans les conditions dans lesquelles il a été délivré et ne peut donc plus l'être par tacite reconduction. Il peut également être suspendu pour trois mois ou retiré si l'association ne respecte pas ses engagements, alors qu'auparavant seul le retrait était possible. L'absence de pouvoir de suspension avait pu dissuader le représentant de l'Etat dans le département d'intervenir, dans le souci d'éviter une sanction trop sévère. L'option nouvelle renforcera donc en réalité la rigueur du contrôle.
Enfin, la possibilité de conclure une convention de coopération avec l'A.N.P.E. doit permettre à l'association intermédiaire de « cibler » plus étroitement son action sur les publics visés par la loi. Cette convention de coopération, si elle n'est pas obligatoire, constitue une garantie vis-à-vis de l'objet de l'association et un moyen pour celle-ci d'appuyer sa demande de renouvellement d'agrément.
Contrairement à ce qu'affirme le recours, la nouvelle rédaction de l'article L. 128 constitue bien un moyen de réserver le bénéfice de ses dispositions aux personnes en grande difficulté et d'encadrer efficacement l'action des associations intermédiaires. Elle ne permet nullement une ouverture de celles-ci à tous les publics.