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Article (Décision n° 2006-0593 du 27 juillet 2006 portant sur la définition des marchés pertinents de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles en métropole, la désignation d'opérateur disposant d'influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)

Article (Décision n° 2006-0593 du 27 juillet 2006 portant sur la définition des marchés pertinents de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles en métropole, la désignation d'opérateur disposant d'influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre)


4.1.3. Examen des trois critères


La Commission européenne, dans l'exposé des motifs de sa recommandation concernant les marchés pertinents, définit trois critères pour recenser sa liste des marchés, dont les caractéristiques peuvent justifier l'imposition des obligations réglementaires définies dans les directives particulières. Conformément au point 9 de la recommandation, il appartient aux ARN d'examiner ces trois critères lorsqu'elles envisagent de recenser des marchés qui ne figurent pas dans la recommandation. Ces trois critères sont les suivants :
- existence de barrières à l'entrée ou d'entraves au développement de la concurrence ;
- absence d'évolution possible vers une situation de concurrence effective ;
- efficacité relative du droit de la concurrence et utilité d'une régulation ex ante complémentaire.


4.1.3.1. Barrières à l'entrée et entraves au développement de la concurrence


« Le premier critère consiste à déterminer si un marché présente des barrières à l'entrée élevées et non provisoires. [...] deux catégories de barrières à l'entrée et d'entraves au développement de la concurrence dans le secteur des communications électroniques semblent présenter un intérêt : les barrières structurelles et les barrières légales ou réglementaires.
Il y a barrières structurelles à l'entrée d'un marché lorsque, compte tenu du niveau de la demande, l'état de la technologie ainsi que la structure des coûts qui en découle créent des conditions asymétriques entre les opérateurs en place et les nouveaux arrivants, freinant ou empêchant l'entrée sur le marché de ces derniers.
Les barrières légales ou réglementaires ne résultent pas de conditions économiques mais de mesures législatives, administratives ou autres actes des pouvoirs publics ayant un effet direct sur les conditions d'entrée et/ou la position des opérateurs sur le marché pertinent. »
Comme pour la terminaison d'appel vocal, il y a aujourd'hui une impossibilité technique et structurelle d'arrivée d'un nouvel entrant pour fournir la terminaison de SMS vers un client d'un certain opérateur mobile disposant d'un réseau radio (ou d'un MVNO utilisant le réseau radio de cet opérateur) : seul cet opérateur peut en effet terminer, sur un plan technique, le trafic SMS à destination de l'appelé.
La prestation technique de terminaison SMS est ainsi incontournable ; or seuls les opérateurs mobiles métropolitains, Orange France, SFR et Bouygues Telecom, peuvent fournir ces prestations techniques qui sollicitent des macroéléments de leur réseau. Pour tout autre opérateur, l'achat des prestations de terminaison SMS auprès d'Orange France, de SFR et de Bouygues Telecom est nécessaire pour garantir à ses utilisateurs la possibilité de joindre les utilisateurs des réseaux mobiles.
Les entraves au développement de la concurrence ont par ailleurs été mises en évidence en section 4.1.1.


4.1.3.2. Absence d'évolution possible vers une situation de concurrence effective


« Le deuxième critère consiste, par conséquent, à déterminer si les caractéristiques d'un marché présagent une évolution vers une situation de concurrence effective. Ce critère est de nature dynamique et prend en compte un certain nombre d'aspects structurels et comportementaux qui, l'un dans l'autre, permettent de savoir si, sur la période considérée, le marché présente des caractéristiques susceptibles de justifier l'imposition des obligations réglementaires énoncées dans les directives particulières du nouveau cadre réglementaire. »
La barrière technique et structurelle évoquée ci-dessus n'est pas susceptible d'évoluer. Ainsi, comme pour la terminaison d'appel vocal, le monopole structurel de chaque opérateur sur la terminaison de SMS sur son réseau va perdurer.
Par conséquent, en l'absence de régulation, la situation tarifaire constatée selon laquelle, les prix n'ont pas baissé depuis plusieurs années alors que l'utilisation de ces services a été démultipliée et que ses coûts de production ont considérablement diminué, devrait perdurer.
Par ailleurs, du fait du modèle économique dit du calling party pays qui prévaut, les conditions économiques de la vente de ces prestations influent directement sur les conditions d'exercice de la concurrence entre les opérateurs sur le marché de détail, ainsi que sur les possibilité de développements d'offres SMS alternatives.
En effet, dans ce modèle économique, c'est l'appelant qui se voit facturer l'intégralité des charges liées à l'acheminement des SMS vers ses correspondants, y compris vers les clients d'autres réseaux.
Ainsi l'offre des opérateurs, notamment dans sa dimension tarifaire, est contrainte par les charges de terminaison SMS qui leur sont facturées par les opérateurs mobiles, qui peuvent être en même temps leurs concurrents sur le marché de détail.
Il en résulte qu'il n'existe intrinsèquement pas ou peu d'incitation économique pour les opérateurs métropolitains à fixer leurs charges de terminaison d'appel à des niveaux « concurrentiels », c'est-à-dire à des niveaux qui pourraient être constatés si ces prestations étaient soumises à une concurrence effective.
Comme exposé précédemment, cette situation est également confirmée par les plaintes, d'une association de consommateurs et de l'opérateur mobile 3e entrant.


4.1.3.3. Efficacité relative du droit de la concurrence
et utilité d'une régulation ex ante complémentaire


« Le troisième critère envisage l'efficacité suffisante du droit de la concurrence en lui-même (sans réglementation ex ante), compte tenu des caractéristiques du secteur des communications électroniques.
La décision finale de recenser un marché répondant aux deux premiers critères (barrières à l'entrée élevées et persistantes, et absence de caractéristiques suggérant une évolution vers une concurrence effective) comme susceptible d'être soumis à une réglementation ex ante va dépendre d'une appréciation de la capacité suffisante du droit de la concurrence en lui-même (sans réglementation ex ante) d'atténuer ou de supprimer ces entraves, ou de restaurer une concurrence effective.
La réglementation ex ante pourrait utilement compléter le droit de la concurrence dans les cas où son application ne suffirait pas à remédier aux défaillances du marché concerné. Il s'agirait, par exemple, de situations où une intervention visant à remédier aux défaillances du marché doit satisfaire à un grand nombre de critères de conformité (comptabilité détaillée à des fins réglementaires, évaluation des coûts, contrôle des modalités, y compris des paramètres techniques, etc.), de situations qui requièrent des interventions fréquentes et/ou réalisées dans un délai imparti ou de situations où la sécurité juridique constitue une préoccupation primordiale. »
De même que la terminaison d'appel vocal, la terminaison SMS constitue un goulot d'étranglement, passage obligé pour tout opérateur tiers souhaitant acheminer des SMS à destination des clients de l'opérateur concerné.
En posant le principe de l'interopérabilité des services et donc de l'interconnexion des réseaux, la régulation sectorielle crée l'obligation de vente, mais aussi d'achat de prestations d'interconnexion lorsque celles-ci correspondent à des goulots d'étranglement. Il en résulte dans ce dernier cas un pouvoir de marché, parfois artificiel, pour l'opérateur offreur, qui peut justifier une intervention supplémentaire, afin de donner sa pleine mesure au principe d'interopérabilité. Il s'agit, au-delà de l'obligation d'accorder l'interconnexion :

- des obligations de non-discrimination, de transparence et de contrôle tarifaire ;
- des mesures nécessaires au contrôle du respect de ces prescriptions, telles que les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable.
Or l'Autorité comprend que le droit de la concurrence ne serait pas nécessairement en mesure d'imposer un contrôle adéquat des prestations de TA SMS.
La régulation ex ante dispose en effet d'outils adaptés tels que le contrôle tarifaire ex ante ou la mise en place et le suivi d'obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts. La spécification et la mise en oeuvre de ces obligations nécessitent en effet une connaissance approfondie des pratiques techniques et des comptabilités réglementaires, ainsi qu'un travail récurrent de traitement, de suivi et d'évolution du dispositif de comptabilisation et de restitution des coûts ainsi mis en place, en cohérence avec celui déjà existant pour les prestations vocales. Le seul droit de la concurrence peut, sur ce plan, apparaître insuffisant pour remédier aux problèmes de concurrence existants sur ces marchés.
Plus précisément, la mise en place d'un contrôle tarifaire semble nécessaire, comme pour la terminaison d'appel vocal, pour remédier aux défaillances du marché constatées sur les marchés de gros de la terminaison de SMS (cf. 4.1.1). La mise en place de telles mesures nécessite l'utilisation de comptabilités réglementaires détaillées, l'évaluation des coûts, la prise en compte de nombreux paramètres techniques, ainsi qu'un travail de traitement et de suivi des données, généralement sur une base annuelle.
En outre, les méthodes de comptabilisation des coûts relatifs aux SMS ne sont pas décorrélées de celles retenues par l'ARCEP dans le cadre de l'analyse des marchés de la terminaison d'appel vocal. En effet, l'essentiel des coûts d'un réseau mobile sont communs à la voix et au SMS (coûts joints), dans la mesure où un même macro-élément de réseau peut être sollicité pour la fourniture de prestations vocales et pour le transport de SMS. Des règles précises d'allocation de ces coûts joints à la voix et au SMS doivent donc être définies de manière préalable aux restitutions réglementaires relatives aux prestations vocales, d'une part, et aux prestations SMS, d'autre part.
Enfin, le dispositif doit être revu régulièrement afin de prendre en compte l'évolution du marché et les évolutions technologiques. Ainsi, depuis 2003, ont émergé en France les WebSMS et les mini messages depuis le réseau fixe de France Télécom. Parallèlement, le rôle des agrégateurs se développe en Europe. Surtout, d'importantes évolutions sont à prévoir du fait du lancement de nouveaux services, notamment via l'UMTS.


4.1.3.4. Conclusion sur le caractère pertinent des marchés au sens de l'article L. 37-1


Les obstacles au développement d'une concurrence effective et les circonstances nationales spécifiques à la France, relevés dans les sections 4.1.1 et 4.1.2, justifient que l'Autorité considère comme pertinents les marchés de gros de la terminaison de SMS sur les réseaux mobiles individuels de métropole au sens de l'article L. 37-1 du code des postes et communications électroniques.
Conformément à la recommandation précitée de la Commission sur les marchés pertinents, ces marchés vérifient également les trois critères permettant de déterminer leur pertinence pour une régulation ex ante.
Cette analyse a été confirmée par celle du Conseil de la concurrence dans son avis n° 2006-A-05 du 10 mars 2006 précité. L'Autorité renvoie sur ce point aux observations du Conseil de la concurrence synthétisée au paragraphe 4.1.5 de la présente décision.


4.1.4. Prise en compte des contributions aux consultations publiques
sur l'examen des trois critères
4.1.4.1. Principales remarques des acteurs sur l'examen des trois critères
4.1.4.1.1. Tableau synthétique des contributions à la première consultation publique
concernant l'examen des trois critères


Le tableau ci-dessous a pour objectif de donner une vision synthétique des contributions reçues par l'ARCEP suite à la première consultation publique qu'elle a lancée. Par nature, ce tableau ne peut pas refléter le sens complet des contributions qui, pour certaines, sont couvertes par le secret des affaires, mais donne une idée du point de vue défendu par chacun.
Les cases non renseignées signifient que le contributeur ne s'est pas prononcé explicitement pour ou contre la proposition de l'Autorité.




Source : Réponses à la consultation publique
du 24 octobre 2005, décembre 2005
4.1.4.1.2. Sur l'examen des trois critères et le caractère non concurrentiel du marché


Du point de vue des trois opérateurs mobiles métropolitains, l'Autorité ne rapporte pas la preuve de l'absence de concurrence effective dans la mesure notamment où elle ne démontre pas de problèmes concurrentiels sur le marché de détail. Tous trois mettent en avant le caractère attractif des offres SMS des opérateurs mobiles virtuels nouvellement entrés sur le marché, tandis que le niveau absolu des prix français se situent globalement dans la moyenne européenne, ce qui légitime une non-intervention de l'Autorité.
[SDA] approuve l'analyse de l'Autorité en ce qu'elle estime que le niveau élevé de la TA SMS est particulièrement défavorable au plus petit opérateur, tant en termes de marge de manoeuvre commerciale pour ce dernier que dans les dérives d'une différenciation on net/off net qu'il engendre. En revanche, la société estime que l'ARCEP occulte les moyens de régulation ex post dont elle dispose et ne tient pas compte de sa situation concurrentielle défavorable dans ce cadre.
Orange France estime quant à elle que les trois critères listés dans la recommandation de la Commission sur les marchés pertinents ne sont pas remplis en l'espèce, notamment concernant la non-efficacité relative du droit de la concurrence. A ce titre, la société rappelle qu'une plainte actuellement en cours d'instruction a été déposée en novembre 2003 devant le Conseil de la concurrence par l'association UFC Que Choisir et indique qu'il n'est dès lors pas possible de se prononcer sur l'impact du droit de la concurrence tant que cette procédure n'est pas close.
[SDA] estime pour sa part qu'aucun des trois critères indispensables pour identifier un marché pertinent au regard de la régulation ex ante n'est réuni. Par ailleurs, selon la société, le lien intangible de causalité entre les tarifs de terminaison et les prix de détail des SMS est contestable, comme le prouve notamment l'équilibre entre revenus et charges de TA SMS. Quand bien même un certain lien de causalité pourrait être démontré, cela ne signifierait pas pour autant que les opérateurs mobiles auraient un réel intérêt à fixer des tarifs de TA SMS élevés qu'ils répercuteraient dans leurs tarifs de détail sur les SMS, au détriment des consommateurs. Pour justifier sa position, [SDA] s'appuie sur une étude économique interne qui tend à montrer que « (...) les opérateurs, même s'ils déterminent conjointement le niveau de la TA SMS, n'ont pas intérêt à la fixer à un niveau excessif ». La société précise par ailleurs que « [ce] résultat théorique, à lui seul, suffit à réfuter l'idée selon laquelle l'existence de déséquilibres individuels renforcerait la justification d'une régulation de la TA SMS » et que « (...) les données disponibles (...) démentent l'importance de ces déséquilibres individuels ». Elle conclut enfin que « (...) la différenciation tarifaire (...) est dans l'ensemble proconcurrentielle, et qu'il est peu probable que les gros opérateurs aient intérêt à augmenter la TA SMS pour faire jouer les effets club au détriment d'une stratégie de concurrence par les prix ».
Dans sa contribution à la deuxième consultation publique, [SDA] considère que la situation concurrentielle observée sur le marché de détail mobile français est satisfaisante, notamment sur les services SMS et que, en conséquence, elle ne semble pas nécessiter l'introduction d'une régulation ex ante. De surcroît, cette société réfute les arguments relatifs au contexte national particulier avancés par l'ARCEP, en indiquant notamment qu'il est prématuré de tirer des conclusions sur les SMS en France à la lumière de la seule communication de UFC Que Choisir, dans la mesure où l'instruction de la plainte que l'association a déposée est encore en cours.
Dans sa contribution à la deuxième consultation publique, Orange Caraïbe partage l'avis de sa maison mère selon lequel la définition d'un marché de terminaison d'appel SMS à des fins de régulation ex ante n'est pas pertinente.
Enfin, [SDA] dans sa contribution à la deuxième consultation publique est préoccupé par le fait que l'ARCEP réfute le principe même d'un lien entre marché de détail et marché de gros, alors que le cadre réglementaire explicite bien cette relation. Cet opérateur mentionne à cet égard un avis du Conseil de la concurrence relatif à la terminaison d'appel mobile d'Outremer Telecom et de Tel Cell, en juin dernier.


4.1.4.2. Réponses de l'Autorité


S'agissant de la vitalité et la spécificité des offres SMS des MVNO avancées par certains contributeurs, il convient de souligner que, même s'ils sont appelés à se développer, l'ensemble des MVNO représentant, selon les derniers chiffres publiés par l'ARCEP (71), 0,91 % du marché métropolitain, on ne peut raisonnablement pas soutenir que les offres SMS des MVNO suffiront, à l'horizon de la présente analyse, à concurrencer un marché marqué par une très grande stabilité des prix de détail depuis janvier 2000. En tout état de cause, l'Autorité souligne que le développement des MVNO est sans impact sur la TA SMS et renvoie aux observations du conseil de la concurrence synthétisée au paragraphe 4.1.5 de la présente décision.
Concernant l'examen des trois critères et conformément aux standards de preuve exigés par le droit national et le droit communautaire, l'Autorité estime qu'elle a réuni suffisamment d'éléments permettant de démontrer un faisceau d'indices précis et concordants indiquant que chacun des trois critères est bien vérifié en l'espèce. S'agissant de l'argument selon lequel la régulation sectorielle ex post serait suffisant, l'Autorité renvoie en section 1.8.2.1 et rappelle que le troisième critère concerne le droit de la concurrence ex post et non le droit sectoriel ex post. En réponse à Orange France, l'Autorité précise qu'une saisine contentieuse déposée devant le Conseil de concurrence n'est pas en elle-même suffisante pour enlever à l'Autorité toute capacité d'appréciation. A ce titre, l'Autorité rappelle que les deux institutions ont des compétences complémentaires et disposent d'outils différents. Au cas d'espèce, l'Autorité a souligné que le conseil ne disposait pas des compétences ex ante nécessaires pour permettre le développement concurrentiel de ce marché, en particulier en ce qui concerne l'imposition d'obligations de contrôle tarifaire, d'interconnexion, d'accès ou d'obligations comptables. Au surplus, l'Autorité note que l'analyse développée par le Conseil de la concurrence dans son avis est en tout point conforme à la sienne et renvoie aux observations du Conseil de la concurrence synthétisée au paragraphe 4.1.5 de la présente décision.
Concernant les comparaisons des prix de gros des SMS en Europe présentées par les opérateurs mobiles dans leur contribution, l'Autorité tient à faire trois remarques méthodologiques (complétées dans la section 4.2.7.2.1 par des observations de fond). D'une part, ces benchmarks ne sont pas toujours cohérents entre eux et comportent certaines inexactitudes et omissions. Contrairement à ce qu'affirment Orange France et [SDA] dans leur contribution, imposer un tarif plafond de terminaison d'appel SMS de l'ordre de 3 à 3,5 c ne conduirait pas à faire de la France le pays où les tarifs de TA SMS seraient les plus faibles d'Europe, dans la mesure notamment où certains pays de l'Union européenne ont une TA SMS inférieure aux niveaux avancés. D'autre part, contrairement à l'étude comparative présentée par l'Autorité dans la section 4.1.1.2.1 et l'annexe G de la présente analyse (72), ces benchmarks ne permettent pas d'étayer une analyse objective dans la mesure où ils portent sur un nombre trop restreint de pays. Enfin, ils ne comportent ni source vérifiable, ni date, ni aucune indication sur la méthodologie retenue. Dans ces conditions et étant donné les nombreuses difficultés attenantes à la construction d'un tel comparatif, l'Autorité émet des réserves sur la pertinence des benchmarks présentés par les opérateurs mobiles dans le cadre de la présente analyse de marché.
S'agissant des observations spécifiques de [SDA], l'Autorité renvoie à la section 4.1.1.2.1 et à l'annexe G de la présente analyse. S'agissant de la thèse selon laquelle la marge dégagée sur les SMS inciterait « à offrir des subventions généreuses », l'Autorité relève que ce type de tarification ne s'applique que dans des conditions particulières qui ne sont pas nécessairement remplies en l'espèce. En effet, lorsque les biens sont indépendants, les prix sont au contraire fixés en fonction des coûts marginaux propres à chaque prestation. Par ailleurs, l'Autorité ne comprend pas la segmentation des abonnés que la société a mise en oeuvre pour mettre en évidence l'absence de déséquilibre entre trafic SMS entrant et trafic SMS sortant suivant les catégories de consommateurs. L'Autorité émet par conséquent des doutes sérieux sur la pertinence de la partie empirique de l'analyse et a demandé à l'opérateur des éléments d'information complémentaires sur ce point. Enfin, l'Autorité souligne l'incohérence de la position défendue par la société dans son étude théorique eu égard à sa situation réelle : si, comme [SDA] est la seule à le prétendre, les prix de gros n'ont aucun impact sur les prix de détail - les revenus et les charges de TA SMS se compensant sur chaque offre -, l'Autorité ne comprend pas pourquoi cette charge d'interconnexion est demeurée aussi éloignée des coûts réellement supportés par les opérateurs mobiles sur une période de temps aussi longue, ni pourquoi [SDA] a toujours refusé d'accéder aux demandes réitérées de Bouygues Telecom de baisser la TA SMS de 50 %, malgré plus de huit mois de négociations commerciales (cf. annexe F). Au surplus, l'Autorité constate qu'à compter du mois d'avril 2006, l'opérateur a baissé ses prix de détail de 20 % sur l'ensemble de ses offres SMS (73). Cette baisse de 20 % intervenue en avril 2006 doit notamment s'apprécier au regard de la baisse de 20 % des tarifs de TA SMS, intervenue en novembre 2005 sur les marchés de gros.
Enfin, s'agissant des arguments relatifs au lien entre marché de détail et marché de gros, l'ARCEP précise d'abord qu'elle n'entend pas « qualifier » le marché de détail au titre de la régulation ex ante, même s'il semble utile d'examiner son fonctionnement dans le cadre de la présente décision afin de mieux appréhender celui du marché de gros et d'être en mesure de délimiter sur le marché de gros de la TA SMS les prestations incluses dans le marché, comme le démontre la partie chapitre 2, ainsi que d'analyser les éventuels contre-pouvoirs d'acheteur (cf. partie chapitre 3). Enfin, la section 4.1.1 du présent chapitre motive effectivement l'intervention de l'Autorité sur le marché de la terminaison d'appel SMS au vu notamment de son importance vis-à-vis du marché de détail.
Par ailleurs, il convient de noter que l'avis du Conseil de la concurrence mentionné par [SDA] porte sur l'analyse des marchés de la terminaison d'appel mobile vocal sur des réseaux mobiles ouverts au public d'opérateurs d'outre-mer et que, dans l'avis susvisé relatif au projet de décision concernant la TA SMS que le conseil a rendu, ce dernier a validé l'approche de l'Autorité.
En outre, il importe de relever la spécificité des marchés de terminaison, fixe ou mobile, voix ou data, en termes de régulation. Tout d'abord, dans la mesure où en vertu du cadre réglementaire des communications électroniques, les opérateurs de réseaux ouverts au public doivent faire droit aux demandes raisonnables d'interconnexion d'autres opérateurs de réseaux ouverts au public, ces marchés de gros, contrairement à d'autres comme celui des marchés de l'accès, existent comme conséquence directe de ce droit à l'interconnexion établi par la loi. Ensuite, l'opérateur qui termine l'appel est, en raison du principe du calling party pays (CPP) et du monopole de fait qu'il exerce sur sa boucle locale, incité à élever ses tarifs de gros ; ce comportement lui permet en effet à la fois d'accroître ses propres revenus et d'impacter ceux de ses concurrents directs sur le marché de détail.
Enfin, s'agissant des évolutions à venir sur le marché de détail, l'Autorité renvoie au chapitre 2 illustrant qu'elle a effectivement pris en compte le développement des services tels que le MMS ou la messagerie interpersonnelle pour en conclure qu'à ce stade ils n'étaient pas encore substituables au SMS.