En ce qui concerne la dégradation alléguée des comptes des régimes de base :
14. Considérant que les sénateurs requérants font valoir que la loi déférée aurait « pour principal effet, sinon pour objet, de dégrader considérablement les comptes des régimes de base pour les exercices 2000, 2001 et 2002 afin d'éviter de faire supporter au budget de l'Etat les conséquences financières des politiques décidées par le Gouvernement » ; qu'ils estiment ces mouvements contraires à l'objectif constitutionnel d'équilibre financier de la sécurité sociale découlant du dix-neuvième alinéa de l'article 34 de la Constitution ;
15. Considérant que sont critiqués à cet égard les transferts de recettes figurant aux articles 13, 16 et 67 ainsi que les changements d'imputation de charges opérés notamment par l'article 42 ;
16. Considérant que l'article 13 de la loi déférée comprend diverses mesures tendant à accroître les recettes du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale ; qu'en particulier son II transfère à ce fonds, à compter du 1er janvier 2002, la totalité de la contribution sur les contrats d'assurance en matière de circulation de véhicules terrestres à moteur ; que le III du même article lui affecte la totalité du droit de consommation sur les alcools dès le 1er janvier 2001 ; qu'il est allégué que, du fait de ces transferts de recettes, le déficit de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés serait aggravé de 5,9 milliards de francs en 2001 et de 11,8 milliards de francs en 2002 ; qu'en outre il serait porté atteinte au principe du consentement à l'impôt, en raison, selon les requérants, de la « grande opacité » des nouvelles affectations ;
17. Considérant que sont également mises en cause deux dispositions au motif qu'elles aggraveraient le déficit du fonds de solidarité vieillesse, organisme créé pour concourir au financement des régimes de base ; que les requérants soutiennent, en premier lieu, que le V de l'article 13 prive le fonds, à compter du 1er janvier 2002, de la totalité du produit de la taxe sur les contributions au bénéfice des salariés pour le financement des prestations complémentaires de prévoyance, à hauteur de 2,9 milliards de francs ; qu'ils font valoir, en second lieu, que la part de la contribution sociale de solidarité des sociétés affectée au même fonds est réduite de 0,7 milliard de francs du fait de l'article 16 de la loi déférée « coordonné avec l'article 8 du projet de loi de finances rectificative pour 2001 » ;
18. Considérant, en outre, selon les saisissants, que l'article 67 de la loi déférée réduirait les recettes de la Caisse nationale d'assurance vieillesse en relevant la part, affectée au fonds de réserve pour les retraites, des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les revenus de placement mentionnés aux articles L. 245-14 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale ;
19. Considérant, enfin, que, s'agissant des charges nouvelles pesant sur les comptes de certains régimes de base, les sénateurs requérants mettent en cause l'incidence de l'article 42 qui prévoit en 2001 une participation exceptionnelle de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés au financement du « plan Biotox », à hauteur de 1,3 milliard de francs ;
20. Considérant, en premier lieu, que l'exigence constitutionnelle qui s'attache à l'équilibre financier de la sécurité sociale n'impose pas que cet équilibre soit strictement réalisé pour chaque branche et pour chaque régime au cours de chaque exercice ;
21. Considérant, en deuxième lieu, que les transferts critiqués de recettes fiscales et de charges, qui sont définis avec une précision suffisante, n'entravent pas, eu égard à leur montant, le fonctionnement des régimes et organismes concernés au point de les empêcher d'exercer leurs missions ou de mettre en oeuvre les politiques nécessaires au respect des exigences découlant des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 ;
22. Considérant, enfin, que ces transferts ne méconnaissent pas davantage le principe du consentement à l'impôt, proclamé par l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, dès lors que le Parlement a été clairement informé de leurs motifs et y a librement consenti par son vote ; que le principe du consentement à l'impôt n'implique pas qu'une imposition prélevée initialement pour couvrir un besoin déterminé ne puisse être affectée à la couverture d'un autre besoin ;