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Article (Décision no 99-411 DC du 16 juin 1999)

Article (Décision no 99-411 DC du 16 juin 1999)

Sur l'article 7 :

Considérant que l'article 7 de la loi déférée ajoute au titre Ier du code de la route un article L. 4-1 aux termes duquel : « Est puni de trois mois d'emprisonnement et de 25 000 F d'amende tout conducteur d'un véhicule à moteur qui, déjà condamné définitivement pour un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h, commet la même infraction dans le délai d'un an à compter de la date à laquelle cette condamnation est devenue définitive. » ;

Considérant que les députés auteurs de la saisine font grief à cette disposition de méconnaître les principes de nécessité et de proportionnalité des peines énoncés par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; qu'ils soutiennent à cette fin que « le législateur, en créant un nouveau délit gravement sanctionné, a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard du dispositif répressif existant » ; qu'ils font valoir à cet égard que les dispositions pénales actuellement en vigueur prévoient que le dépassement d'au moins 50 km/h de la vitesse maximale autorisée constitue une contravention de la 5e classe, le retrait de points affectés au permis de conduire pouvant au surplus être encouru ; qu'en outre, certains comportements que le législateur souhaite voir sanctionnés entreraient d'ores et déjà dans le champ de l'article 223-1 du code pénal relatif au délit de mise en danger d'autrui ;

Considérant qu'il revient au législateur, compte tenu des objectifs qu'il s'assigne, de fixer, dans le respect des principes constitutionnels, les règles concernant la détermination des crimes et délits, ainsi que des peines qui leur sont applicables ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : « la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires... » ; qu'en conséquence, il appartient au Conseil constitutionnel de vérifier qu'eu égard à la qualification des faits en cause, la détermination des sanctions dont sont assorties les infractions correspondantes n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que les éléments constitutifs du délit institué par l'article L. 4-1 nouveau du code de la route sont distincts de ceux du délit de mise en danger d'autrui institué par l'article 223-1 du code pénal qui est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 F d'amende ; qu'en l'état de la législation, le dépassement d'au moins 50 km/h de la vitesse maximale autorisée ne constitue qu'une contravention de la 5e classe pour laquelle la récidive n'est pas prévue ; qu'en prévoyant la récidive de cette contravention, pour répondre aux exigences de la lutte contre l'insécurité routière, et en la réprimant par une peine délictuelle de trois mois d'emprisonnement et de 25 000 F d'amende, le législateur a fixé une peine maximale inférieure au quantum de la peine pouvant être prononcée si le comportement délictueux répond aux conditions de l'article 223-1 du code pénal, prenant ainsi en considération le degré de gravité propre aux différents faits incriminés ; qu'enfin, si un même comportement est susceptible de faire l'objet de qualifications distinctes au titre tant de l'article 223-1 du code pénal que de l'article L. 4-1 du code de la route, la peine prononcée ne pourra excéder le maximum prévu pour le délit de mise en danger d'autrui ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les peines prévues par l'article L. 4-1 du code de la route ne sont pas entachées de disproportion manifeste ; qu'en l'absence d'une telle disproportion, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer sa propre appréciation à celle du législateur ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, s'agissant des crimes et délits, que la culpabilité ne saurait résulter de la seule imputabilité matérielle d'actes pénalement sanctionnés ; qu'en conséquence, et conformément aux dispositions combinées de l'article 9 précité et du principe de légalité des délits et des peines affirmé par l'article 8 de la même Déclaration, la définition d'une incrimination, en matière délictuelle, doit inclure, outre l'élément matériel de l'infraction, l'élément moral, intentionnel ou non, de celle-ci ;

Considérant qu'en l'espèce, en l'absence de précision sur l'élément moral de l'infraction prévue à l'article L. 4-1 du code de la route, il appartiendra au juge de faire application des dispositions générales de l'article 121-3 du code pénal aux termes desquelles « il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre » ; que, sous cette stricte réserve, l'article 7 est conforme aux prescriptions constitutionnelles ci-dessus rappelées ;