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Article (CONSEIL CONSTITUTIONNEL Saisine du Conseil constitutionnel en date du 1er avril 1996, présentée par plus de soixante sénateurs, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, et visée dans la décision no 96-375 DC)

Article (CONSEIL CONSTITUTIONNEL Saisine du Conseil constitutionnel en date du 1er avril 1996, présentée par plus de soixante sénateurs, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, et visée dans la décision no 96-375 DC)

I. - Sur l'article 47


L'article 47 a pour objet d'autoriser le Gouvernement à procéder, par voie réglementaire, à la privatisation de certaines entreprises appartenant au secteur public de premier rang. La délégation ainsi faite au pouvoir réglementaire est soumise à deux conditions cumulatives. Les entreprises concernées doivent, au cours de l'exercice précédent, avoir réalisé un chiffre d'affaires inférieur à un milliard de francs et avoir un effectif salarié inférieur à mille personnes. Selon les indications fournies par le Gouvernement, douze sociétés étaient concernées au 31 décembre 1994.
Ces dispositions sont contraires à l'article 34 de la Constitution, qui prévoit que « la loi fixe les règles concernant (...) les nationalisations d'entreprises et les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé ».
Dans sa décision no 86-207 DC des 25 et 26 juin 1986, le Conseil constitutionnel a d'abord rappelé que, si « l'article 34 de la Constitution n'impose pas que toute opération impliquant un transfert du secteur public au secteur privé soit directement décidée par le législateur », « il appartient à celui-ci de poser des règles dont l'application incombera aux autorités ou aux organes désignés par lui ». Le Haut Conseil a ensuite opéré une distinction fondamentale entre « les entreprises dans lesquelles l'Etat détient directement une partie du capital social et les autres entreprises, y compris celles où la majorité des participations directes ou indirectes appartient à l'Etat ou aux personnes publiques ». Il ressort donc de cette jurisprudence que si aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle n'impose que le transfert du secteur public au secteur privé obéisse, pour chaque catégorie, à des règles rigoureusement identiques, celles-ci doivent, par contre, être les mêmes dès lors que les opérations en cause s'inscrivent dans le cadre de l'une ou de l'autre de ces deux catégories.
En conséquence, et sans qu'il faille attacher une importance particulière à la taille des entreprises en cause, dès lors qu'il s'agit de sociétés appartenant au secteur public de premier rang, leur éventuel transfert du secteur public au secteur privé doit être fixé par la loi et obéir aux dispositions de l'article 7-I de la loi no 86-793 du 2 juillet 1986. On voit d'ailleurs mal en quoi la taille des entreprises considérées pourrait constituer un critère pertinent. C'est, en effet, la nature de l'opération de privatisation qui justifie la compétence exclusive du législateur. La seule atténuation à cette règle concerne les entreprises qui n'appartiennent pas au secteur public de premier rang et dont l'éventuelle privatisation obéit aux règles posées par la loi du 6 août 1986, dite loi de « respiration » du secteur public.
La modification adoptée par le Parlement revient donc sur les termes de la loi du 2 juillet 1986 tels que déclarés conformes à la Constitution sous les strictes réserves d'interprétation énoncées par le Conseil constitutionnel dans sa décision no 86-207 DC des 25 et 26 juin 1986.