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Article (Observations du Gouvernement en réponse aux saisines du Conseil constitutionnel en date du 20 décembre 1995 et du 21 décembre 1995 par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs)

Article (Observations du Gouvernement en réponse aux saisines du Conseil constitutionnel en date du 20 décembre 1995 et du 21 décembre 1995 par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs)

A. - Le premier grief du recours est tiré de l'inclusion

de la matière fiscale dans le champ de l'habilitation


Le Conseil constitutionnel s'est déjà prononcé sur ce point en décidant que ni l'article 38 de la Constitution ni l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 ne faisaient obstacle à ce qu'une ordonnance traite de fiscalité (no 84-170 DC du 4 juin 1984). Ce faisant, il a implicitement, mais nécessairement écarté le moyen tiré de ce que l'article 14 de la Déclaration de 1789 ferait obstacle à l'utilisation de l'article 38 en matière fiscale.
Au demeurant, l'article 14 n'a évidemment pas entendu préjuger la manière dont les textes constitutionnels mettent en oeuvre le principe du consentement à l'impôt.
En premier lieu, le Gouvernement représente les citoyens dans le cadre de l'habilitation que lui consent la représentation nationale, pour une période limitée et sur un domaine et des finalités précisément fixés.
En second lieu, et en tout état de cause, l'existence d'une délégation temporaire ne fait en rien obstacle à l'expression de ce consentement par le Parlement lui-même : ce consentement s'exprime non seulement lors du vote de la loi d'habilitation, mais en outre lors de l'examen du projet de loi de ratification.
Enfin, à suivre le raisonnement des requérants, l'habilitation de l'article 38 de la Constitution ne serait jamais possible, ainsi qu'il ressort du rapprochement des articles 6 et 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui se réfèrent tous deux aux « citoyens ou à leurs représentants » dans la formation de la loi ou le consentement à l'impôt.
Rien ne justifie donc d'excepter les lois fiscales du champ des lois d'habilitation. Au demeurant, l'interprétation littérale, suggérée par les députés saisissants, de l'article 14 et donc de l'article 6 de la Déclaration ferait échec de manière générale à l'application de l'article 38 de la Constitution et dénaturerait sur un point majeur nos institutions. Elle méconnaîtrait enfin l'interprétation constante selon laquelle la loi, au sens de la Déclaration des droits de l'homme, a une signification matérielle et non organique et ne se réfère pas à une procédure déterminée d'élaboration.
Les termes de la Déclaration s'apprécient à la lumière de la répartition des compétences entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif fixée par les articles 34, 37 et 38 de la Constitution.