3. 1. Anticipation de l'évolution des carrières professionnelles
Il est rappelé aux entreprises de la branche professionnelle l'importance, dans un environnement de plus en plus exigeant et en évolution permanente, de déployer une démarche d'individualisation des parcours professionnels en inscrivant ces derniers dans la durée afin de développer, concernant les seniors :
― leurs possibilités d'évolution de carrière ou de maintien dans leur emploi ;
― leurs possibilités de mobilité professionnelle interne ou externe ;
― l'aménagement de leur fin de carrière.
La réalisation de cette démarche passe autant par la capacité des salariés à s'adapter aux évolutions de leur métier et à être en mesure de changer d'emploi que par la volonté et les efforts des entreprises à prendre en compte les spécificités propres aux seniors.
Les entreprises se doteront des moyens favorisant le maintien dans l'emploi des seniors et recueilleront toutes les informations utiles à une connaissance précise des compétences de ceux-ci. Ces informations pourront notamment être recueillies à l'occasion de l'entretien professionnel de deuxième partie de carrière.
A partir de l'ensemble des informations recueillies et des besoins en compétences des entreprises, les entreprises de la branche mettront en oeuvre à destination des seniors des dispositifs de formation adaptés devant favoriser leur sécurisation professionnelle dans leur emploi, la préparation de leur évolution dans leur emploi ou vers un nouvel emploi (via, par exemple, la validation des acquis de l'expérience et les périodes de professionnalisation).
Gestion anticipative des emplois et des compétences :
Les entreprises de la profession s'efforceront de mettre en place, avec les organisations syndicales lorsqu'elles existent et, à défaut, après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, un dispositif de gestion anticipative des emplois et des compétences adapté à leur taille.
Les entreprises, et spécifiquement les TPE-PME peuvent solliciter une aide de l'Etat pour l'élaboration de plans de gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences.
Ce dispositif public est destiné à accompagner les entreprises dans leur démarche (gestion des pyramides des âges, adaptation des compétences, organisation du travail...), et notamment à examiner les possibilités d'évolution professionnelle des seniors.
Entretien professionnel de deuxième partie de carrière :
Un entretien professionnel de deuxième partie de carrière est proposé à tout salarié à partir de 45 ans par son responsable hiérarchique et renouvelable par la suite au moins tous les 5 ans selon les souhaits du salarié.
Cet entretien a pour objectif de faire le point, au regard de l'évolution des métiers et des perspectives d'emplois dans l'entreprise, sur les compétences, les besoins de formation, la situation et l'évolution professionnelle du collaborateur.
Il se déroule pendant le temps de travail, doit donner lieu à une synthèse écrite remise au salarié et respecter les principes de confidentialité.
Cet entretien pourra permettre d'identifier les besoins en matière d'actions de formation et d'adaptation personnalisées contribuant à la poursuite de sa carrière et de favoriser, le cas échéant, la perspective d'évoluer vers un autre emploi.
Cet entretien pourra, le cas échéant, être anticipé à la demande du salarié comme à celle de l'employeur si des circonstances exceptionnelles le justifient.
La branche professionnelle se donne comme objectif chiffré que 100 % des collaborateurs d'au moins 45 ans ayant sollicité un entretien professionnel de deuxième partie de carrière en bénéficient.
Un suivi de ce point sera fait auprès des entreprises par l'intermédiaire du questionnaire adressé pour l'établissement du rapport de branche.
Bilan de compétences :
Afin d'encourager la définition d'un projet professionnel pour la seconde partie de sa carrière, après 20 ans d'activité professionnelle et, en tout état de cause, à compter de son 45e anniversaire, tout salarié bénéficie, à son initiative et sous réserve d'une ancienneté minimum de 1 an dans l'entreprise qui l'emploie, d'un bilan de compétences.
Les financements liés à ces bilans de compétences peuvent être assurés soit par l'entreprise dans le cadre de sa contribution au développement de la formation professionnelle continue, soit par l'OPCA ou l'OPACIF compétent.
Les partenaires sociaux conviennent de demander à l'OPCA d'accorder une enveloppe budgétaire spécialement affectée à la prise en charge de ces bilans de compétences et d'organiser une prise en charge accélérée des dossiers des salariés concernés.
Le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, est informé chaque année du nombre de bilans de compétences des salariés de plus de 45 ans réalisés.
3. 2. Amélioration des conditions de travail
et prévention des situations de pénibilité
L'amélioration des conditions de travail est essentielle pour améliorer le taux d'emploi des seniors compte tenu des effets du vieillissement, des exigences de compétitivité et des transformations technologiques. Il convient de rechercher la plus grande compatibilité entre le poste de travail et l'évolution des capacités de chaque salarié.
Pour favoriser le maintien dans l'emploi des seniors ou leur reclassement, les entreprises de la branche engageront dans l'année suivant l'entrée en vigueur du présent accord :
-la réalisation d'une cartographie des seniors dans chaque entreprise ;
-une réflexion dans le but d'aboutir à une réelle amélioration des conditions de travail des seniors, à chaque fois qu'un besoin spécifique aura été identifié, cela quelle que soit leur catégorie, afin de mettre en oeuvre des plans d'actions destinés à aménager les postes comportant des facteurs de risques ou d'usure professionnels.
Le CHSCT ou, à défaut, les délégués du personnel seront associés à cette démarche.
Des actions de prévention des risques professionnels ciblées sur les seniors seront également développées (prise en compte des aspects d'ergonomie, organisation du travail...) en s'appuyant sur les ressources internes (CHSCT ou, à défaut, délégués du personnel, médecin du travail, responsable en charge des aspects techniques...) et externes (CRAM, ARACT...).
Les entreprises de la profession sont invitées à enrichir le document unique d'évaluation des risques de ces actions.
Le CHSCT ou, à défaut, les délégués du personnel sera également associé, concernant les seniors :
-à l'identification des principaux facteurs de pénibilité ;
-à l'identification des solutions d'adaptation ;
-et au suivi.
Une information spécifique relative au travail des seniors devra être incluse dans le rapport annuel du CHSCT, visé à l'article L. 4612-16 du code du travail, lorsqu'il existe, présentant notamment les mesures engagées en faveur de l'amélioration des conditions de travail des seniors.
Reclassement :
En cas d'inaptitude d'un senior, médicalement constatée par le médecin du travail, à occuper son poste, l'employeur doit rechercher en priorité les possibilités permettant son reclassement dans un poste équivalent.
En cas d'impossibilité d'assurer le reclassement à un poste de qualification équivalente et en cas de proposition de l'employeur d'un reclassement dans un poste de qualification inférieure, le senior bénéficie, en cas d'acceptation par écrit de la proposition, d'une garantie de rémunération ainsi définie :
-s'il compte entre 1 an et 5 ans inclus d'ancienneté dans l'entreprise : le senior bénéficie d'une indemnité mensuelle dégressive exprimée en pourcentage entre le dernier salaire mensuel brut de base et le nouveau salaire mensuel brut de base de :
-100 % pendant les 2 premier mois ;
-70 % du 3e au 7e mois ;
-50 % du 8e au 12e mois inclus ;
-s'il compte entre 6 ans et 15 ans inclus d'ancienneté dans l'entreprise : le senior bénéficie d'une indemnité mensuelle dégressive exprimée en pourcentage entre le dernier salaire mensuel brut de base et le nouveau salaire mensuel brut de base de :
-100 % pendant les 4 premiers mois ;
-70 % du 5e au 8e mois ;
-50 % du 9e au 12e mois inclus ;
-s'il compte au-delà de 15 ans d'ancienneté dans l'entreprise : le senior bénéficie d'une indemnité mensuelle dégressive exprimée en pourcentage entre le dernier salaire mensuel brut de base et le nouveau salaire mensuel brut de base de :
-100 % pendant les 6 premiers mois ;
-80 % du 7e au 9e mois ;
-60 % du 10e au 12e mois inclus.
Le salarié bénéficiera, le cas échéant, des actions de formation nécessaires à ce reclassement.
Les seniors concernés par cette procédure de reclassement garderont une priorité d'emploi dans un poste correspondant à leur précédente qualification en fonction de leurs capacités à l'occuper.
3. 3. Développement des compétences et des qualifications
et accès à la formation
Les parties signataires rappellent le caractère primordial de la formation professionnelle tout au long de la vie devant permettre au salarié de suivre des formations même après plusieurs années d'expérience professionnelle dans l'entreprise ou après un certain âge.
La formation professionnelle doit permettre de favoriser le maintien dans l'emploi des seniors, en :
-maintenant leur employabilité ;
-confortant leurs compétences à leur poste ;
-accompagnant l'évolution de leur emploi ou leur reconversion ;
-développant la transmission d'expérience ;
-encourageant le tutorat,
ceci en réponse aux exigences de qualité et de compétitivité des entreprises de la profession.
Les demandes d'utilisation au titre du DIF, présentées par les salariés âgés de 45 ans et plus pour faciliter leur employabilité bénéficieront d'une priorité d'examen et d'accès par l'entreprise.
En cas de refus par l'employeur d'une demande de DIF d'un salarié âgé de 45 ans et plus, celui-ci devra être motivé.
Suite à ce refus, le salarié concerné pourra représenter cette même demande passé un délai de 12 mois ; celle-ci devra alors être acceptée par l'employeur sous réserve de remplir les deux conditions cumulatives suivantes :
-être en lien avec les métiers et / ou les besoins de l'entreprise ou de la profession ;
-donner lieu à prise en charge par l'OPCA.
Pour toute demande de DIF ne remplissant pas les conditions ci-dessus et correspondant à une action de formation visée à l'article L. 6313-1 du code du travail, les dispositions de droit commun s'appliquent.
Période de professionnalisation :
Conformément à l'accord national interprofessionnel, du 5 décembre 2003 relatif à la formation tout au long de la vie professionnelle et à l'accord de branche relatif à la formation professionnelle du 12 mai 2005, la période de professionnalisation est l'outil à privilégier pour favoriser le maintien dans l'emploi des salariés de plus de 45 ans sous contrat à durée indéterminée.
Les parties signataires affirment le caractère prioritaire qu'elles entendent donner aux salariés de plus de 45 ans, sous réserve qu'ils justifient d'une ancienneté minimum de 1 an de présence dans l'entreprise, dans l'accès au dispositif de la période de professionnalisation.
Validation des acquis de l'expérience (VAE) :
La VAE peut constituer un dispositif adapté au maintien dans l'emploi des seniors.
Les entreprises peuvent apporter une aide matérielle et logistique au salarié engageant une VAE, selon des modalités définies à leur niveau.
Les entreprises informeront les seniors sur l'accès à la VAE à l'aide d'une documentation que les signataires du présent accord élaboreront.
Plan de formation :
Les entreprises devront porter une attention particulière, lors de l'élaboration de leur plan de formation, à la formation des collaborateurs de 45 ans et plus ; les actions d'adaptation favorisant le maintien dans l'emploi des seniors devront être privilégiées.
Le comité d'entreprise ou comité d'établissement, ou à défaut les délégués du personnel, est tenu informé chaque année dans le cadre de la consultation sur la formation professionnelle du nombre de salariés âgés de 45 ans et plus par catégorie professionnelle et par sexe et des formations suivies par ceux-ci au cours de l'année précédente.
Concernant le développement des compétences et des qualifications et l'accès à la formation, la branche professionnelle se donne comme objectif chiffré qu'au terme du présent accord, 15 % des salariés âgés de 45 ans et plus auront bénéficié d'une action de formation.
Un indicateur permettant le suivi de cet objectif est intégré au rapport de branche (cf. art. 4 du présent accord).
3. 4. Aménagement des fins de carrière et de la transition
entre activité et retraite
Les organisations signataires incitent les entreprises et les salariés à anticiper suffisamment tôt la gestion des fins de carrière en examinant les différentes possibilités offertes pour favoriser le maintien en activité.
Le bilan retraite :
Au vu des informations qui lui sont fournies par les régimes de sécurité sociale auxquels il a cotisé et ses caisses de retraite complémentaire, à titre strictement personnel et dont il est le seul propriétaire, le salarié de 55 ans et plus peut, à sa demande, faire le point avec son responsable hiérarchique des modalités de sa fin de carrière, à l'occasion de l'entretien professionnel de deuxième partie de carrière.
Congé de fin de carrière :
Conformément aux dispositions législatives et réglementaires ainsi qu'à celles de l'accord signé dans la branche professionnelle du 5 août 2008, le dispositif du compte épargne-temps, lorsqu'il existe au sein d'une entreprise, peut être utilisé par les seniors comme congé de fin de carrière.
En cas d'utilisation du compte épargne-temps comme congé de fin de carrière, les droits du salarié devront être majorés par l'entreprise et exclusivement en temps, sauf accord d'entreprise ou d'établissement prévoyant déjà des mesures au moins équivalentes :
-de 10 % pour les congés compris entre 4 et 6 mois ;
-de 15 % pour les congés supérieurs à 6 mois.
Aménagement des horaires de travail :
Conformément à l'accord national interprofessionnel du 13 octobre 2005, les salariés âgés de 55 ans et plus qui le souhaitent pourront bénéficier, en accord avec leur employeur et en fonction des contraintes d'organisation propres à chaque entreprise, d'aménagements de leurs horaires de travail, notamment dans le cas de travail posté en 3 × 8, y compris sous forme de temps partiel, organisés sur la semaine, le mois ou l'année (1), dans le cadre des dispositions régissant le contrat de travail et des règles liées aux procédures d'information / consultation des institutions représentatives du personnel.
Dans l'hypothèse où l'aménagement du temps de travail conduirait, avec l'accord de l'employeur, à un passage à temps partiel, celui-ci ne pourra conduire à l'accomplissement d'un horaire de travail inférieur à 60 % de la durée légale du travail (ou de la durée conventionnelle du travail pratiquée dans l'entreprise, si celle-ci est inférieure).
En cas d'aménagement du temps de travail selon les modalités ci-dessus, avec l'accord de l'employeur, la rémunération des seniors sera progressivement adaptée sur 12 mois par le versement d'un complément de rémunération égal à :
-75 % du différentiel entre le dernier salaire mensuel brut de base et le nouveau salaire mensuel brut de base pendant les 4 premiers mois ;
-50 % du différentiel entre le dernier salaire mensuel brut de base et le nouveau salaire mensuel brut de base pendant les 4 mois suivants ;
-25 % du différentiel entre le dernier salaire mensuel brut de base et le nouveau salaire mensuel brut de base pendant les 4 derniers mois.
Afin de garantir les droits en matière de retraite des seniors bénéficiant d'un aménagement du temps de travail en fin de carrière, les cotisations d'assurance vieillesse et de retraite complémentaire seront calculées sur la base du salaire correspondant à une activité exercée à temps plein.
Les employeurs prendront en charge le surplus de cotisations patronales.
3. 5. Transmission des savoirs et des compétences
et développement du tutorat
La connaissance de l'entreprise et de ses métiers ainsi que du secteur professionnel acquise par les seniors au cours de leur parcours professionnel rend pertinente la transmission de leur expérience, connaissances pratiques et savoir-faire, particulièrement à l'attention des jeunes générations, afin de :
-faciliter les coopérations intergénérationnelles ;
-favoriser le partage et la transmission des compétences et savoir-faire ;
-permettre l'assimilation de la culture d'entreprise.
Le développement du tutorat par les seniors permet également de faciliter l'aménagement du temps et des conditions de travail en fin de carrière.
Tutorat :
Les parties signataires entendent valoriser et reconnaître les missions exercées dans le cadre du tutorat.
Elles souhaitent rappeler l'importance de ce dispositif, notamment dans le cadre des formations en alternance qui associent le suivi d'une formation à l'exercice d'une activité professionnelle tels que le contrat et / ou la période de professionnalisation et le contrat d'apprentissage.
Elles rappellent à cet effet le guide de la fonction tutorale, en annexe I de l'accord du 12 mai 2005 relatif à la formation professionnelle, qu'elles invitent fortement à nouveau les entreprises à utiliser largement.
Les entreprises sont ainsi incitées à confier cette mission de tuteur aux salariés seniors volontaires.
Les seniors volontaires, retenus par l'employeur et justifiant des prérequis exigés par la fonction tutorale ou celle de formateur, bénéficieront prioritairement si nécessaire des formations propres à l'exercice du tutorat (tutorat, formation de formateurs).
De façon à valoriser la fonction tutorale du senior, tout tuteur âgé de 55 ans et plus pourra bénéficier, en accord avec son employeur, d'un aménagement de son temps de travail pour exercer sa mission.
La branche professionnelle se donne comme objectif chiffré que le nombre de missions de tutorat exercées par des salariés âgés de 45 ans et plus ait augmenté de 15 % à l'issue de la période d'application du présent accord (par rapport aux données du rapport de branche de 2010).
Un indicateur permettant le suivi de cet objectif est intégré au rapport de branche (cf. art. 4 du présent accord).
3. 6. Recrutement des salariés âgés dans l'entreprise
Bien que l'objet premier du présent accord soit de favoriser le maintien dans l'emploi des collaborateurs seniors, les parties souhaitent rappeler l'importance des règles suivantes en matière de recrutement et de gestion des seniors dans l'entreprise.
Les entreprises veilleront à ce qu'aucune mention précisant un critère d'âge n'apparaisse dans leurs offres d'emploi et propositions de mutations internes.
Elles s'assureront de l'absence de discrimination relative à l'âge en matière de recrutement, gestion des carrières, formation, rémunération en privilégiant l'appréciation des compétences, capacités professionnelles et aptitudes requises, appréciées objectivement en dehors de tout présupposé lié à l'âge.
Les parties signataires souhaitent rappeler aux entreprises que le contrat de professionnalisation doit être le dispositif prioritaire permettant la réinsertion des salariés de 45 ans et plus privés d'emploi, en leur assurant une qualification.
(1) termes exclus de l'extension comme étant contraires aux dispositions de l'article L. 3122-2 du code du travail.
(Arrêté du 18 décembre 2009, art. 1er)